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Textes divers

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SANS TITRE (1972)

Comme la nécessité fut à l’origine mère de l’invention, cette dernière est à son tour devenue mère du progrès.  Il y a quelques années encore, les communications étaient lentes, difficiles et les chercheurs devaient travailler, la plupart du temps dans l’isolement.  Il arrivait souvent que deux ou trois personnes poursuivaient en même temps et sans se connaître les mêmes recherches.  Cela donna parfois lieu à des procès retentissants, où chacun réclamait pour lui seul tout le mérite de la découverte.  De nos jours, les conditions de travail sont bien différentes.  Les hommes de science se réunissent en équipes, publient les résultats de leurs travaux et participent à des congrès, des séminaires, des colloques.

OÙ SUIS-JE (06/10/1972)

« Où suis-je », s’écria-t-il.

On lui répondit de se la fermer et de suivre.

INTRODUCTION

 

Je dédie ce recueil à la société actuelle dont les battements de cœur ne sont plus qu’une immense cacophonie dans ma tête ; à tous ceux que je touche de loin ou de proche ; à tous les gobeurs et recrues ; à ma meilleure amie ; à l’univers tout entier.

Ce que j’essaie d’exprimer dans ce livre n’est pas qu’une simple histoire de tous les jours, mais plutôt à chaque nouvelle ligne, je démontre les sentiments ressentis par chaque recoin, si minime soit-il, de mon cerveau.

Ce recueil ne sera probablement jamais achevé ; car chaque jour, il naît dans mon cerveau une nouvelle idée ; une nouvelle pensée que je viens ajouter à ce livre dès que l’occasion se présente.

Évidemment, vous ne pourrez pas comprendre le sens de chaque pensée, mais il y en aura tout de même que vous comprendrez ; et celles qui demeureront un mystère pour vous, vous pourrez toujours les interpréter à votre propre façon.

En résumé, ce volume est une immense locution qui demande à être mieux scandée de jour en jour.  Je vous ai ouvert le chemin, à vous de le continuer maintenant.  Alors je vous souhaite « bonne chance » dans votre exploration du fond de mon cerveau et je vous donne le bonsoir.

Jacques Bolduc

(1) Né dans une terre inculte, j’appris à me nourrir de pierre et de rocailles, car les animaux étaient mes seuls amis.

 

(2) Pour un rien, il redonnait un tout.  On l’a traité de fou.

 

(3) Un roi revenait de la ville, où il venait de donner un discours sur l’égalité de chacun dans son royaume.  Entrant dans la salle du trône, il vit quelqu’un assis dans le fauteuil sacré ; il lui fit trancher la tête.

 

(4) Quatre pêcheurs sont assis dans une barque ; le premier se lève et dit : « J’ai faim et si j’ai faim, je suis de trop.  Adieu. »  À ces mots, il se jeta dans la rivière.  Le deuxième, voyant cela, se rua à sa rescousse, mais à son tour il fut entraîné dans la pénombre.  Le troisième regarda alors le quatrième et ils se mirent à rire.

 

(5) Voyant sa fin approchée, un vieillard voulut voir son héritier avant de quitter la Terre.  Celui-ci était déjà au bureau du notaire.

 

(6) Un moyen pour se sentir fort : s’entourer de faibles.

 

(7) En l’an trois-mille, un nuage demande à la lune : « Comment trouvez-vous notre Terre ? »  La lune répond alors : « Vous voulez sans doute dire « comment trouvez-vous notre champs de bataille »! »

 

(8) Deux commères parlent, au sujet d’un jeune garçon qui a été mis en prison la veille.  « Il aurait même été jusqu’à vendre sa propre mère pour quelques dollars. »  L’autre répond : « Vous avez raison, chère Églantine ; ce mal élevé aurait fait n’importe quoi pour de l’argent.  Mais j’y pense ; il y a une vente réclame au coin de la rue avec des prix réduits au minimum.  On y va ? »  Les deux commères partirent à la course.

 

(9) La vie n’est qu’un lent suicide.

 

(10) Dans le fond d’un ventilateur, un ver de terre faisait son gîte.  On l’a retrouvé mort, asphyxié.

 

(11) Le meilleur ami de l’homme, le chien.  La meilleure amie de l’homme, la vie.

 

(12) Un embryon crie à un médecin avant d’être avorté « assassin ».  Le médecin se met à rire.

 

(13) Deux rockers se promènent ensemble ; l’un dit à l’autre : « Je suis le plus fort de nous deux. »  L’autre le regarde un instant et lui plante son couteau dans la gorge.  Il se retourne et il dit : « Tu étais ».

 

(14) Un passant regarde un enfant assis sur un parterre de pelouse qui retient son souffle.  Il lui dit : «Tu devrais te mettre à respirer normalement car tu pourrais te faire mourir à retenir ton souffle comme cela. »  L’enfant répond : « Je crois plutôt que c’est à respirer normalement que je risque de m’asphyxier. »

 

(15) Preuve d’égoïsme : on se nettoie avec le savon, mais qui nettoie le savon ?

 

(16) Le militaire traite les longs cheveux du pouilleux ; les longs cheveux traitent les militaires de traiteurs de cheveux longs et pouilleux.

 

(17) Au Canada, il y a trois saisons : le commencement de l’hiver, l’hiver et la fin de l’hiver.

 

(18) L’homme ne descend pas du singe ; il descend de la bête.

 

(19) Il est mort le sourire aux lèvres, car son fils a été décoré lors de la dernière guerre pour avoir tué plus de quatre cents soldats russes.

 

(20) Son grand défaut   : il jouait souvent à des jeux de hasard.  Sa grande qualité : il ne gagnait jamais.

 

(21) Il ne cesse de dire : « Je ferais n’importe quoi pour ma patrie. »  Pourtant, sa femme se meurt d’ennui.

 

(22) César a dit : « Je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu ».  Moi je dis : « j’ai voulu, j’ai eu, j’ai perdu. »

 

(23) La plupart des garçons veulent sortir avec des filles plus jeunes qu’eux.  Ce qu’ils ignorent, c’est que ce sont les filles qui veulent des garçons plus âgés qu’elles.

 

(24) Un bon moyen pour contenter une personne exigeante : la supprimer.

 

(25) Trouver une personne de son goût, c’est facile, mais l’aimer, ça c’est difficile.

 

(26) Être vieux, c’est commencer à vivre.

 

(27) Soit que l’homme se trouve trop grand, trop petit, trop gras ou trop maigre.  Il se trouve de son goût dans son cercueil.

 

(28) Lorsque l’on rit trop, on en pleure.

 

(29) Il se lève, va faire sa toilette, prend son petit déjeuner, se rend à son travail, revient chez lui vers cinq heures, écoute un peu la télévision, soupe, lit son journal, prend les nouvelles, se moque de la situation mondiale, mange un peu et retourne se coucher.  Il s’endort et il est heureux, comme le reste de la population mondiale.

 

(30) Un homme fort, c’est bien ; un homme intelligent, c’est mieux.

 

(31) Afin de mieux voir ce qui se passait, il s’arrache les yeux.

 

(32) Moins l’on est, plus l’on croit être ; mais que sommes-nous ?

 

(33) Un père a amené son fils pour la première fois en forêt.  Il ne cesse de lui décrire la beauté du paysage qui les entourent et celle des merveilleux animaux de la forêt.  Soudain il sursaute et il dit : « Regarde, un canard ».  Il tire sa carabine de son étui et il le tue.  Triste fin pour un enfant.

 

(34) Nous ne sommes point plus que celui qui nous a créés.  Mais pourtant, plusieurs le précèdent.

 

(35) La différence entre le pauvre et le riche : c’est que l’un possède et l’autre est possédé.

 

(36) Une fleur est toute heureuse car elle est enfin à son plein épanouissement.  Elle ne cesse de se vanter et de dire qu’elle est sans aucun doute la plus belle fleur du jardin.  À ces mots, le fleuriste la cueille.

 

(37) La concentration est une force mentale très développée ; donc, les malades mentaux sont les personnes les plus aptes à la concentration.

 

(38) Nous ne pourrons jamais être heureux ensemble ; car le bonheur est une forme d’illusion et les illusions sont une maladie, alors…

 

(39) Après avoir marché toute la journée, je m’arrêtai sur le bord de la rue et je me mis à réfléchir.  Tout à coup, je m’aperçus que j’étais vivant.  J’en mourus de joie.

 

(40) Pour mieux respirer, il se coupa le nez, se fit un trou dans la gorge et s’ouvrit les voies respiratoires avec une lame de rasoir.  Résultat, il est mort, étouffé par la pollution.

 

(41) La différence entre l’homme et le chien, c’est que l’un parle et l’autre aboie.

 

(42) Quand on a faim, on mange.  Quand on a soif, on boit.  Quand il faut donner, on a peur.

 

(43) Dans la société actuelle, il n’y a plus de temps, plus de jours ni de dates.  Tout ce qu’il nous reste, c’est des chiffres.

 

(44) Il s’est fait arracher les dents, afin de mieux goûter les plaisirs de la vie.

 

(45) Plus on est grand, plus on se trouve grand ; plus on est petit, plus on veut être grand.

 

(46) Beaucoup ont eu, mais peu ont su garder…

 

(47) Un humanoïde de la pire espèce a dit qu’il n’aimait pas les rockers.  Un rocker a entendu dire cela et bien enragé, il s’est rendu chez cette personne.   Arrivé, il a frappé à la porte ; on est venu alors répondre : « Oui monsieur, que désirez vous ? »  Le rockeur a répondu : «  C’est bien toi, l’humanoïde qui a dit que les rockeurs te puent au nez ? »  L’humanoïde a répondu : « Oui et de plus j’ajouterai que les rockeurs me puent aux pieds. »  Le rockeur a sorti son couteau et a tranché le nez ainsi que les pieds de l’humanoïde.  « Comme ça, a-t-il dit, nous les rockeurs on ne t’ennuiera plus. »

 

(48) Pour avoir il faut gagner, mais que faut-il avoir pour gagner ?

(49) Voyant un ver de terre se faire écraser sous le poids intensif d’un vautour, il se mit à rire.  Le vautour prit peur et s’enfuit.

(50) Croire aux miracles, c’est croire à quelque chose d’impossible.  Mais quand l’impossible se réalise, alors là, c’est un miracle.

Explication futile

 

Sous un poids accablant de lumière et de feux-follets, j’avalai sans discuter ma première ration de fixations matérielles.  J’avais un peu peur, vu que c’était ma première expérience, mais je m’essayai tout de même.  À la première bouchée, tout me parut des plus normal ; digestion olfactive comme auparavant, faim et tenaille assidue et sans oublier le sens occulte des plus développé.  J’en pris donc une autre bouchée.

Celle-ci me parut un peu plus brutale que l’autre et même sans la mastiquer, je l’avalai d’un trait sec.  Je la sentais me descendre l’œsophage et telle une boule de plomb, elle me tomba sur l’estomac à une vitesse vertigineuse.  Sans même prendre temps de digérer cette dernière, j’en pris une autre avec empressement.  Cette dernière m’enleva la vie ; je devins à ce moment automate comme le reste de la population qui m’entourait.

Seul

 

Loin, sans vie, sur ma planète de pénombre hallucinante, je m’en irai.  Sans penser à rien puisque je n’aurai personne, ni objet, ni chose.  Mais malgré ce lucide et trop peu encombrant décor qui m’entourera, je devrai être, je devrai vivre.  Pourrais-je réussir ?  Voilà la question.

Profondément

 

On a sous-estimé un poisson parce qu’il était hors de l’eau.  On l’a quand même mangé et ça, sans lui demander permission.

Drame quotidien

 

Je venais d’être disqualifié.  J’étais pour ainsi dire depuis ce moment entre la vie et la mort.  On m’avait donné droit à mon ultime chance ; le duel avec Tortullémon, célèbre bourreau du royaume.  Bien entendu, j’avais peur ; j’étais là, au beau milieu de l’arène avec tout autour de moi la foule qui se tordait de rire à l’idée de revoir une fois de plus dans leur vie Tortullémon faire une autre de ses victimes.  Il fit son entrée dans le stade.

La foule se mit à hurler comme un dragon crachant sa flamme sur son ennemi mortel.  Tortullémon aimait qu’on l’acclame et à ce moment il leva les bras vers le ciel.  Il s’avançait maintenant vers moi, je tremblais comme une feuille ballotée au vent sur le plus immense des chênes ; oui, pour une fois dans ma vie, j’avais peur.

Gag…

 

Pour avoir osé aimer la fille du roi, on décida de l’accabler de la peine capitale.  Il dut marier la fille du roi et ce, dans les plus brefs délais.

Fausse, FAUX, irréel…

 

On est venu m’annoncer un jour que je devrais vivre.  On m’envoya subir ma peine sur Terre.

Rêve…

 

Un espoir vient de renaître ; oui, elle a osé me regarder assez longtemps pour, comme d’habitude, me faire tourner les yeux le premier.  J’ai hâte de la voir s’approcher de moi ; j’ai hâte de la serrer contre moi ; mais quand cela se réalisera-t-il ?  Quand pourrais-je enfin tâter les moindres recoins de son matériellement vôtre ?  Un jour.  Oui, je sais bien qu’un jour ni confusion ni remord ne m’empêcheront de montrer à la population mondiale que nous sommes et que nous resterons.  Comment ?  Je l’ignore.   Mais cela doit venir.  Peu importe les jours, les semaines, les mois ou les années ; j’aime…

 

Pour un rien, un peu trop…

 

J’aimerais être ce que je suis et ne point être ce que l’on croit devenir.  Sensément parlant, l’on croirait facilement le premier venu qui nous dirait, dans un fléau de sentiments inférieurs les une aux autres : viens.  Mais on ne veut point entendre.  On aime mieux rester sourd.  Oui, nous nous entendons entre voix humaines ; mais entre voix spirituelles, aucun son n’est captable.  Aucune harmonie, si séduisante soit-elle, ne peut parvenir à défoncer ce mur de monstruosités qu’est la soif matérielle.  Je me rends…

 

Être trop et pas assez…

 

Avoir vu, constaté et se demander après si on doit tourner le dos, ou ouvrir ses bras, est courant.  On a souvent voulu donner son opinion, mais bien souvent empêché par la force constabulaire au pouvoir, on devait s’en abstenir.  Moi. Il y a de cela quelques années, j’avais levé la main à une des assemblées du conseil.  On m’amena aussitôt devant le juge et on me trancha la main que j’avais levée.  Il me dit alors de parler.  Bien entendu, la douleur que je ressentais en moi était bien trop grande pour que je sois capable de prononcer une seule parole.  Je dus donc me retirer sans avoir pu prononcer un seul mot.  C’était là leur truc ; accepter la demande de parole du soupirant et s’amancher ensuite pour le faire taire ; c’est ce qu’on m’avait fait ; dérivation idiote et sournoise des commercialement baptisés : êtres supérieurs.  Stupidité innovée depuis je ne sais quand dans, probablement, un de ces petits faubourgs où la civilisation est trop reculée pour faire comprendre à ces bougres que nous sommes, vous êtes et qu’ils sont.  J’ai beau le répéter sans cesse, à chaque fois c’est la même chose.  Une exclamation de rire et on me demande gentiment en me mettant une « baillonnette » ou je ne sais quoi dans le dos, de me retirer.  Eh bien je vous dirai, chers égaux physiques, que je capote, la gueule ouverte…

 

Doux délire…

 

J’arrache, je vis et constate pour celle qui ne me prête point attention.  J’essaie vainement de me faire remarquer, mais impossiblement on me sourit à l’appointement de chacun.  Désespoir, haine fastidieuse de sa personne que l’on trouve à ces moments si inutile ; tentative désespérée de vouloir s’initier.  Crainte à certains moments de se montrer à son vrai jour ; joie insatiable de daigner procurer satisfaction corporelle à l’opposé.  Froid entre deux nouveaux qui se connaissent à peine, chauds soupirs gastriques de l’ancien cherchant constamment la voie de délivrance ; avoir soif.  Une soif d’affliction spirituelle négativement composée de souches et de racines depuis longtemps déjà délaissées ; sans remerciements, sans sarcasmes qui auraient désiré une vie peut-être, dans les mesures du possible, censuré à un moins haut degré d’absurdité ; avoir peur.  Une peur gastro-sensorielle paralysant toute communication sensée pouvant, cartographiquement parlant, apporter soulagement et instant de paix, quelque part sur ce globe, corrompu à un certain degré d’ébullition ; vouloir comprendre.  Comprendre des réalités d’un genre de beaucoup, et ça depuis des millénaires, supérieures aux minces réseaux composant ce dégât de fils appelé plus communément « cerveau humain ».  Évidemment, ceci est impossible.  Donc, je capote avec fière allure.

 

Là où il trouva source…

 

Il a eu raison, a-t-on dit, d’avoir voulu par ses diaboliques inventions apporter au monde quelque chose de neuf.  Moi, je n’ai su apprécier telle sornette de la part d’un de mes égaux terrestres ; mais après vaines et longues discussions, je dus me résoudre à accepter ses propositions et à bien vouloir daigner, avec la permission du Très-Haut bien sûr, donner à cet humanoïde des plus cristallin la permission de changer la face du globe.  En effet, la face du globe fut changée ; la seule différence, c’est qu’aujourd’hui il n’y a plus de globe.  Le nom de cet humanoïde cristallin était « argent ».  Le sort du globe était, pour ainsi dire, réglé.  À partir de ce jour la terre n’était plus qu’un amas de corruption et de joies matérielles.

Esclavage ou raison de vivre ?

 

Un mot bruissant dans un son d’esclavage, un nouvel horizon que je montre du doigt, mais point d’espérance.  Point de joie qui pourrait hanter au moins possible notre intelligence débordante d’amertume.

Faim, peur et soif l joie, cris et pleurs ; guerre, chancre et mort ; amour, paix et illusions.  Que pouvons-nous faire ?  Rien, sinon attendre.  Attendre un peu plus longtemps chaque instant ; attendre avec des fautes d’orthographe et des cacophonies mentales ; attendre avec un niveau d’espoir qui diminue de plus en plus en même temps que la stéréophonie du temps.

Un seul secours, les joies matérielles.  Joies nauséabondes ne demandant qu’à polluer l’esprit si vulnérable de l’humain ; joies sans pénétrations qui désorganisent le système digestif ; joies inhumaines par je ne sais qui, je ne sais quoi.

J’en suis, vous aussi.  Mais comment en sortir ?  Comment se détacher d’un système qui, peu à peu, années après années, a réussi à prendre racine dans un organisme aussi « scandable » et vulnérable que celui de l’homme ?

 

Mélange…  Me lange… M’élange

 

Si seulement je pouvais faire parvenir à la lune toutes les pensées que je ressens quand je suis auprès de toi, je pourrais faire durant toute une nuit une Andante de vers estropiés.  Si même parmi un esprit saint on pouvait déceler les erreurs, je rirais à l’idée de savoir le pour et le contre des différents partis qui se combattent pour, à la fin de tout, la même bouchée de pain…

Non, je le dis et je le répète : NON.  Pourquoi dirais-je « oui » pour un regard que je n’ai même pas pensé ?  Il faudrait tout de même être logique si ce n’est qu’au plus profond de moi-même.  Que voulez-vous de plus que l’anarchie du rouge sur un bleu qui ne sait pas encore briller au soleil vert printemps ?...

Je sais ce qu’il faut.  Ce n’est pas compliqué et vous le comprendrez aussi vite que moi, j’espère.  Demandez à votre gros doigt pourquoi est-il plus gros que le petit ?  Si vous répondez en vous-même que cette question est stupide, recommencez cette narration et lisez plus lentement en réfléchissant plus profondément…  Si vous répondez que ceci est tout simplement les caprices de la nature,  vous en avez déjà trop lu ; oubliez cette narration…  Si vous dites que ceci est tout simplement un phénomène logique, bravo !  Vous avez tout compris…

Être

 

Saccage d’une péniche sur la mer enviant les soupapes,

Mauvaises représailles d’une mère croyant se bien conduire,

Cri arrogant demandant de s’arrêter pour réfléchir,

Impossibilité de communiquer entre genre et nombre.

 

Voie possible mais à plusieurs accès redoutables ;

Dont on ne sait laquelle nous brisera ou nous achèvera,

Peu d’intelligence dont l’infime partie n’a pas su encore servir,

Raisons nombreuses de pleurer, mourir et désespérer

 

Je ne sais quoi, je ne sais où,

Mais l’endroit dont je ne sais nom, devra un jour, je le sais, se faire connaître

C’est à ce moment que pour une première fois j’oserai

Lever la main et d’un pas bref m’avancer

Et je crierai d’une voix forte et aigüe : JE SUIS !...

Capoté

 

Je m’accable et pourtant au fond de-moi-même je sais très bien que je ne fais rien.  Avoir tort ou raison, rire ou se mettre à pleurer ; pleurer, une bien belle chose dont l’homme, si je peux me permettre de l’appeler ainsi, ne sait pas encore les pourquoi et les comment.  Je ris, bien souvent comme ça, sans aucune raison je ris.  Dans mon fauteuil préféré  Bon !  Maintenant je pleure…

 

Encore capoté du mauvais bord…

 

-1-

Pendant que je faisais l’amour avec une fleur des champs,

Un homme dont je ne connais même pas le visage m’a parlé.

À ce moment l’étamine de mes rêves que j’avais sous la dent,

À tout jamais a cessé brusquement de vouloir partager.

 

-2-

N’y comprenant rien, je tentai d’en savoir plus long à propos,

Et à plusieurs gens je demandai renseignements sur cet homme,

Après avoir recueilli un peu beaucoup d’opinions, du salaud,

Je dus savoir tout en apprenant que cet homme était le surhomme…

 

*** 

Je souffre d’antrophose psychrosiable.  J’ai dû au moins demander toile et gruyère mais on m’a re fu sé avec le sourire ; j’ai posé des questions qui parurent stupides à première vue, mais qui firent découvrir à ces super-stupidoantrophosologue les plus grandes théories.  Telles que celles de l’Aringobinsite, l’Octopofariogramme et bien entendu celles qui éclipsa toutes les autres, soir celles de l’Urangeamanabilisaritation.  Mais on a voulu rire.  On a ri, oui, mais ce qui compte, c’est que maintenant on pleure.  Moi aussi je pleure, je suis même à bout de nerfs ; «au boutte », quoi !  Je pleure, je ris, je mange, je bois jamais, je dos, comme tout bon terrienisateur, mais ce que je fais, je le fais automatiquement ; ce ne sont que des besoins superficiels.  Autrement dit : JE N’EN PEUX PLUS……  J’ai eu trop, je n’ai point su me faire comprendre, je ne suis plus qu’un automate.

 

Audace…

 

Fiole de rajeunissement et de rêvasseries audacieuses que j’aie connues dans ma plus tendre enfance.  Pollution chronométrée d’un esprit gavé de calculs et délépatisionné  par de millions de messages, les uns terrestres, les autres je ne sais d’où.  Je crois ni en qui ni en quoi, mais je crois.  Peut-être en elle…

 

J’aime…

 

Rouge, bleu-vert et orangé.  Long, court et fier, je l’espère, je la sens et je l’attends; là, tout près de moi, seul, tous les deux, ensemble, loin et avec nous, l’amour…

 

Histoire de  creton

 

Un creton cretonnement creton cretonnait en marchant, une cretonnerie cretonne.  Cretonnement cretonné, ce creton cretonnement conçu par des cretons cretonnement cretonneux cretonnait.  La cretonne du village le surveilla passer tous les jours.  Un jour, elle alla acheter des cretons « Jos Maltais » chez un marchand de cretons cretonnement reconnu, pour ses cretons cretonnement cretonnés.  Et le creton passait justement, comme par hasard par là.  Ils se virent, se marièrent et eurent beaucoup de petits cretons cretonnement cretonnés, par une cretonne et un creton avec leurs cretonneries cretonnement cretonnés.

Le creton…

 

Mortalité

 

Je n’en peux plus.  J’étouffe.  Je meurs seul ; oublié.  Je suis de trop, un fardeau inutile que je ressens mourir.  Je ne meurs ni de froid ni de faim.  Je meurs d’ennui.  On m’a mis à mort.  Sur un bûcher on a suspendu ma cape, afin que tous apprennent que je ne suis plus de ce monde.  On m’a eu.  Jusqu’à la dernière goutte on a sucé mon sang.  Du sang que je ne possédais même plus ; du sang que j’avais pu me procurer à prix d’aubaine dans une démonstration de relevés biologiques.  Autrement dit, j’étais mort avant que l’on me tue…

Secret à deux

 

Comme une rose, comme un ciel « aphrodite » de nuages, regardant

ses beaux yeux.

Pour un matin, une aurore désireuse de s’entendre, chantonner ;

paix à ceux.

Monnaie de chair, animal sans raison de suffrage, écœuré

d’exister.

Sous une pluie, de rayons lumineux en extase de nos dieux

infinis.

Je l’aperçus, à travers ses fenêtres « inopaques », ne pensant

qu’à nous deux.

Je ne le crus, mais je dus vérifier ce mirage et je fus

Propulsé

Bout de la fin et le mien dans la sienne angélique, qui m’avait

Convaincu.

Je suis encore attaché, « mirifié » de ce mage, tant aimé…

 

Accords : en sol (G) avec Mineur et bémols (b)

Portée : en clé de sol (G) la mineur (Am), mi (E)

Musique et mélodie : Am, Am, b, Am, Amb (4 temps)

G, Gb, G, Gb... (4 temps)

E (4 temps)

Am, E, Am, E, Am (3 temps)

 

Réflexion (8/1/73)

 

-1-

Sur cette branche va mourir le soleil,

Mais c’est là que se pense le dernier fruit vermeil,

Ouvre Laff recouvrant la surface,

D’une voûte enveloppant la cloison du bonheur.

 

-2-

D’un soupir languissant tu te laisses emporter,

Et d’un souffle le vent vient caresser

Tes lèvres engloutissant les rêves d’un monde,

Qui se tue et se bat pour finir la même ronde.

 

-3-

Un cri d’espoir te fera-t-il retentir

Oh ! cri d’émoi !  Pourrai-je enfin te sentir ?

Je ne peux qu’à présent espérer le pardon,

Du très haut qui ne fait que tenir le cordon.

 

-4-

La faim ou la soif n’est qu’une fausse nécessité,

C’est dans le corps et le matériel qu’on est en train de sombrer.

La vie, pour eux, n’est plus qu’un tendre regret,

Interdit à tous ceux qui n’y ont droit d’accès.

 

Capotement intérieur de plus en plus fort…

 

Par les sentiers clairsemés, ombragés par un immense tilleul, j’irai loin ; ailleurs.  Où ?  Je l’ignore encore, mais ce que j’ai réalisé, c’est que je dois fuir, partir ailleurs.  Où?  J’ignore encore tout de cette incroyable roue carrée qu’est le système qui m’entoure depuis déjà trop longtemps.

Grâce au ciel, j’ai pu survivre à cette immense cacophonie qu’est l’homme, ou plutôt la créature terrestre.  Me faisant marcher l’esprit un peu plus chaque nuit lorsque je me couchais, j’ai enfin réalisé que je ne suis pas un de ces corrompus qui prétend avoir tout inventé, mais qui dans le fond n’en connaît pas plus que mon humble intelligence d’humanoïde cristallin.

Oui, l’évidence est là ; il faut fuir.  Mais la question qui se pose est « où aller » ?  Peut être sur une autre planète, mais je suis persuadé que leur système est aussi minable que le nôtre que je n’aurais même pas osé qualifier de système moi-même.

Donc, après de longues analyses, j’ai dû conclure que je devais, non pas fuir, mais au contraire rester et essayer de m’adapter à ce monstre qu’est le système monétaire.  J’ai essayé et voyez maintenant où j’en suis…

 

Jacques Bolduc

(Un humanoïde parmi tant d’autres…)

POUR CE QUE JE SUIS, POUR CE QUE JE VOUDRAIS ÊTRE… (6/3/73)

 

Écrasé par l’industrialisation spirituelle, j’expose une dernière raison d’une société que j’ai peut-être mal jugée.

Je me prononce sur ces opinions que j’ai souvent bafouées.  Aurais-je eu tort ou peut-être raison, j’en reste ignorant, mais j’espère au moins avoir communiqué ce que j’ai trop souvent gardé pour moi ; ce que j’ai trop refermé sous moi-même et ça sans même laisser la moindre fissure qui aurait pu me sauver. 

Bien entendu, on ma écouté plus souvent qu’à mon tour.  Mais ceux qui me comprenaient n’étaient pas ceux que j’espérais, n’étaient pas ceux que j’aimais.  En effet, moi aussi j’ai comme ce bonheur qu’est l’amour, mais l’ai-je connu plus souvent qu’à mon tour ?  Je me rappelle que j’ai aimé une fois et j’ai même été aimé une fois.  Mais trop souvent j’ai perdu ; ou plutôt je me suis perdu en abandonnant derrière moi celle que j’aimais.  C’est drôle à dire mais j’espère encore…

 

Jacques Bolduc (un humanoïde parmi tant d’autres)

 

QUE SE PASSE-T-IL DONC ? (11/11/1973)

Désespérément, je lutte encore.  Pour elle, peut-être ; non, c’est sûr.  Ah ! et puis merde…  Le fond, he crève, seul, sans aide, seul.  Maman, mon ami, où êtes-vous ?  Toi, complément sensuel, montre-toi !...  Je ne te cherche plus ; je t’attends.  Encore.  Derrière un arbre ?  Un sapin ?  Ou un peigne.  Sans dent, grafignant la tête d’un gros porc bourgeoisement conçu ; chauve.  Je sais.  C’est toi qui le grafignes.  C’est toi qui me tue.  Achève-moi, s’il te plaît…  Je souffre trop…

MES RÊVES, MES JOIES ET MES… (Novembre-décembre 1973)

 

Samedi 10 novembre 1973

C’est ce soir que je débute, que je tente d’essayer d’accomplir cette mission banale qui pourrait, probablement, se transformer d’un moment à l’autre en un terme stérile.  Je prends ce départ avec, en tête, cette turbulente idée des 3 fameux vœux à réaliser ; soit pour l’instant : les réussites en 2 sens…  L’affection propagée aux antipodes… Et la réalisation d’un toit commun.  Disons que ce qui m’agace le plus, ce sont les réussites ; ce me charme le plus, c’est ce fameux toit  multi-constitutionnel  et ce que j’espère le plus, c’est cette conjugaison exhaustive avec l’opposée.  J’attends…

 

Dimanche 11 novembre 1973

Absolument rien de spécial.  J’ai laissé, dans ce court laps de temps, mon corps s’abandonner à une inertie démoralisante.  Je reprends toutefois mince espoir pour la troupe de théâtre.  J’espère toujours sous mes 3 formes…

 

Lundi 12 novembre 1973

Passablement déçu de mes résultats de première session, je me console toutefois ailleurs, dans ces jouissances aphrodisiaques qui me sont données par les cuirs chevelus.

 

Mardi 13 novembre 1973

Pratique peu enrichissante ; je nage toujours dans une brume épaisse au sujet de mes sentiments…  Ça viendra, mais quand ?

 

Mercredi 14 novembre 1973

Une grande surprise m’a ébahi aujourd’hui : nous avons fait l’acquisition d’un piano et c’est ce soir que j’y ai fait ma première composition.  Affreuse, mais vu que j’en suis à ma première, on peut m’excuser.  J’ai osé encore me fixer aujourd’hui.  Est-ce enfin la bonne ?

 

Jeudi 15 novembre 1973

Elle m’a rejoint, ce soir.  J’ai alors senti, dès que j’ai raccroché, mon impatience à l’idée de la revoir.  Oui, c’est elle.  Je dois faire le point sur son sujet.  M’informer, être sûr.  Être sûr de l’autre ; j’espère le contraire.  Et puis qu’est-ce que ça peut faire, une déception de plus ?...  J’ose espérer tout de même qu’elle sera en moins.

 

Vendredi 16 novembre 1973

Je croyais connaître le dénouement final ce soir et je l’ai connu.  En montant à Chicoutimi, j’ai dû constater les faits : « Peluche » est à écarter.  Je ne me décourage pas pour autant.  Il y en a d’autres.

 

Samedi 17 novembre 1973

Cette nuit, j’ai fait un rêve assez extraordinaire ; le plus beau sans doute depuis bien des mois.  J’ai rêvé à la fois l’endroit, la fille et la situation idéale.  Dire que c’est pour bientôt…  Je n’ai pas fait grand-chose de ma journée.  Je songe, très fortement.

 

Dimanche 18 novembre 1973

Pas grand-chose, à part cette marche que j’ai prise avec Daniel.  J’en ai tiré plusieurs choses intéressantes.  La principale est que j’ai à me trouver un but.  J’ignore lequel, mais je dois en trouver un.

 

Lundi 19 novembre 1973

Définitivement, j’adore le piano.  Rien de changé nulle part : journée ennuyante, très stérile.  Je vais savoir bien vite la date où nous jouerons la pièce de théâtre.  C’est au moins ça de compensation.  J’espère qu’on aura un chalet pour aller célébrer cette réussite ou peut-être aussi cet échec.

 

Mardi 20 novembre 1973

Aujourd’hui, ça a beaucoup parlé d’appartement à l’école.  Surtout Françoise et Esther.  Espérons que, si tout arrive, nous ferons bon voisinage.  En tout cas moi, j’ai bien hâte d’avoir le mien.  Toujours seul…  (J’ai écrit une complainte aujourd’hui : insatisfaisante).

 

Mercredi 21 novembre 1973

Je me refixe, sachant très bien qu’elle est prise.  Qu’arrivera-t-il ?  Je l’ignore ; mais j’espère tout de même.

 

Jeudi 22 novembre 1973

Pratique extraordinaire aujourd’hui ; pas une seule pièce de mise en scène ne manquait.  Il ne me reste plus que les costumes, ainsi que les maquillages à mettre au point.  Ça va bien de ce côté-là.  De l’autre côté, je rêve toujours.  Ah merde !  J’enrage…

 

Vendredi 23 novembre 1973

Ce soir s’est déroulée la plus grande corruption de toute ma vie.  J’ai étourdi mes sens pour les première fois avec Yves, Jean, Guy et d’autres.  Champagne, vodka, cidre accompagnés de jouissance aphrodisiaque.  J’ai aussi failli m’éprendre de Lise mais heureusement mon instinct spirituel si peu lucide ce soir-là a tout de même su résister.  Évidemment, mon cœur s’est retourné plusieurs fois.  Surtout lorsque j’attendais le mastodonte et lorsque je m’y suis installé.  Je me souviens qu’une fille à côté de moi m’a vu et lorsque je suis entré en phase, elle s’est éloignée.  Journée très mémorable, quoi !

 

Samedi 24 novembre 1973

Relève excessivement difficile.  Pouah !  Je suis dégoûté.

 

Dimanche 25 novembre 1973

Ma relève n’est pas tout à fait terminée.  J’ai hâte de revoir le monde pour voir ce qui leur est arrivé à eux.  Moi, pour ma part, c’était incroyablement désastreux.  Rien de spécial durant la journée, sauf qu’aujourd’hui j’ai fait mon premier devoir de l’année.  Il n’est pas entièrement achevé mais je compte bien le terminer demain à l’école.  J’ai hâte de recevoir une lettre de Line.

 

Lundi 26 novembre 1973

Mes pensées se précisent ; surtout vers une en particulier.  Tout va bien au point de vue théâtral.  Nous jouerons probablement vendredi.

 

Mardi 27 novembre 1973

Je n’ai eu que 3 cours aujourd’hui.  Je crois bien que c’est là un nouveau record.  Ah ouais : « boule de neige » m’a beaucoup tenté mais en vain.  « Oquella », par contre, me fascine de plus en plus.  Ai couché chez Charles.

 

Mercredi 28 novembre 1973

Journée très lancinante.  Après m’être couché à une heure plutôt tardive la nuit précédente, j’ai dû me lever à 9h45 ce matin.  Grande nouvelle.  P.T. a essayé de me rejoindre.  C’est assez fort.  Je manque d’optomasme.  (Oquella sacre).  Il a plu toute la journée.  C’est froid et tristement mélancolique.  Pitié…  On joue à « Place du Royaume », samedi : 75$.

 

Jeudi 29 novembre 1973

Je me sens tout drôle ; on dirait que je cherche quelque chose.  Je n’ai rien fait aujourd’hui.  J’ai pris une petite marche avec Jean-Pierre et c’est tout.  Je suis dans une léthargie terrible.  Mon esprit se trouve actuellement dans une pénurie de joie.  J’espère qu’il va se passer quelque chose.  Peut-être samedi mais ça m’étonnerait tellement !  C’est rendu que ça m’écœure de penser à l’avenir.  Je regrette énormément le passé…  Chic-Nord, les gobeurs, les recrues…  Surtout une en particulier.  Ce soir, j’ai l’impression de crever ; de m’éteindre…  Au secours quelqu’un !

 

Vendredi 30 novembre 1973

Ce soir, j’ai fait une randonnée excessivement bizarre.  Je me suis rendu chez Vampirella.  Une odeur décrassante de bourgeoiserie, de principes et de préjugés empestait cette atmosphère incestueuse.  Les fixations ont été évidemment nombreuses.  3 en particuler, dont l’une (jambe bleue) a failli réussir ; mais j’ai tout gâché.  C’était « top » ; drôle d’expédition.  (Couché chez Yves).

 

Samedi 1e décembre 1973

Encore, ce soir, un couloir incroyablement « indistinguable » étala ses portes sur moi.  J’ai eu une misère de fou à m’y retrouver ; en particulier dans le bout des « poudrées encanneuses ».  La nuit fut stérile mais très profitable pour mes relations extérieures.  On était chez Diane.  Aucune fixation pourtant.  Bizarre, j’aurais cru.  (Couché chez Diane ).  Nous avons joué à « Place du Royaume ».

 

Dimanche 2 décembre 1973

Je suis arrivé chez nous à midi à peu près.  Je n’ai rien fait de la journée, même pas mon analyse littéraire que j’ai à remettre demain.  J’ai constaté aujourd’hui qu’il ne reste plus que 23 jours avant Noël ; c’est top !  Je recommence à m’embrouiller peu à peu.  J’ai hâte à l’éclairci.  Je me doute un peu de ce que ce sera mais je n’ose pas l’écrire tout de suite.

 

Lundi 3 décembre 1973

Rien de spécial.  On joue la pièce mercredi.  Yves a couché chez nous.

 

Mardi 4 décembre 1973

On a pratiqué la pièce après les cours ; ensuite je suis monté chez Yves.  On a poucé une heure et demie pour un trajet assez passablement court.  On a travaillé après l’armure jusqu’à minuit environ.  J’ai finalement couché chez Yves.

 

Mercredi 5 décembre 1973

Après avoir passé de longues heures d’attente, la pièce s’est finalement jouée à 12h45.  Elle a remporté un franc succès.  410 personnes y ont assisté.  J’étais fier.  Arrivé chez nous, il y a eu une émeute sous prétexte que je couchais trop souvent à l’extérieur; ma mère en a conclu que je devais être écœuré avec la famille.  Disons que pour ma part, rester avec la famille ne me dérange pas bien gros.  Ce qui m’ennuie surtout, c’est de demeurer dans ce maudit trou qu’est Bagotville ; c’est donc pourquoi je couche si souvent à Chicoutimi-Nord ; c’est pour être avec mes amis et amies.

 

Jeudi 6 décembre 1973

J’ai hâte aux vacances des Fêtes ; également à être en appartement.   Fort probablement que Pierre Gagné viendra ; j’ignore qui sera ou seront le ou les autres.  Un bouleversement cerveautique invraisemblable s’est emparé de moi aujourd’hui ; point de vue « fixation » et « goût ».  En matière d’anglais, de maths et de métho, je suis dégueulassé.  J’haïs vraiment ça…  En y pensant bien, Boule de Neige me fascine vraiment ; je lui ai passé 4$ aujourd’hui…

 

Vendredi 7 décembre 1973

Rien fait de bon durant la journée.  Je suis allé chez Gilles ce soir.  C’était assez plat.  On a fait des expériences avec la T.V. en couleurs.  Je suis entré à une heure plutôt tardive.

 

Samedi 8 décembre 1973

J’ai donné mon cours à 9h00 ce matin ; le dernier jusqu’à après les Fêtes.  Je suis monté travailler à « Place du Royaume » après.  J’aime vraiment pas ce genre de travail.  Après on est allé chez Céline.  On a pris une bière et on est descendu en ville après.  J’ai vu ma déesse au terminus.  J’ai failli lui parler mais ça n’a pas marché.  Espérons que ce sera pour bientôt !  Je me suis endormi dans l’autobus pour me réveiller à Port-Alfred.  J’ai été obligé de rebrousser chemin à pied.

 

Dimanche 9 décembre 1973

Rien.  Aucune fertilité.  Léthargie.  Terrible, quoi pour un vieillard sans soleil ; sans aiguille non plus.

 

Lundi 10 décembre 1973

Ça va très très bien en littérature.  Les autres cours, par exemple, laissent passablement à désirer.  Esther m’a dessiné un polisson aujourd’hui.  J’ai bien hâte de voir si ça va marcher avec Foulard Rose…  Les vacances de Noël approchent, youpi !!!  Je devrais contacter Jean-Pierre lorsque cela adonnera.  Je jouis encore à l’idée du toit commun ; dire que c’est dans 257 lunes…

 

Mardi 11 décembre 1973

Rien de bon…  J’me suis acheté une boîte de cigares aujourd’hui.  Mes pensées d’adolescent s’abaissent de plus en plus ; précisez, s’il vous plaît.  J’ai hâte que l’émeute du bulletin soit passée…

 

Mercredi 12 décembre 1973

Moi et Esther, nous nous sommes rendus à la rivière ce midi.  Pierrot a l’air à vouloir venir rester avec moi l’année prochaine.  Foulard Rose m’impressionne toujours beaucoup.  Carole aussi…  La tempête du bulletin est passée ; enfin, disons plutôt la brise car ça n’a pas été trop grave.  Je crois que ça fait au moins des années que je n’ai pas discuté de même avec mon père… (Les hommes ne sont que des esprits de bonté, recouverts d’un masque de chair).

 

 

Jeudi 13 décembre 1973

Nous jouons la pièce mercredi soir à Jonquière.  Noël arrive…  Ce que j’ai hâte d’être avec une quelconque…  de la voir noire, inopaque ; je l’espère Rose…  Arc-en-ciel.

 

Vendredi 14 décembre 1973

Long, plat, à terre, désynchronisé, j’attends…  Qui ?  Je l’ignore.  Sans doute elle…  Rosée…

 

Samedi 15 décembre 1973

Ai fait ma première entrée au 24 de ma vie avec Yves et Lise.  Nouveau fixe…  C’est son amie…  Gouffre inodore, crâne défoncé, j’enfile.  Pour une rouge pâle ou pour son amie…  Elles ; point connu, elles ne m’ont jamais.  (Couché chez Yves).

 

Dimanche 16 décembre 1973

Rien.  J’ai commencé un devoir de littérature et conclu un autre en histoire.  Ce que je m’ennuie, seul dans ma boîte à fond et à toit !  Une seule fissure qui se bouche tous les soirs…  Larme !

 

Lundi 17 décembre 1973

J’ai auditionné pour la première fois le dernier E.L.P. : Formidable !...  Pour le reste de la journée, controverse !  (On a joué au C.D.R.A.L. Vie).

 

Mardi 18 décembre 1973

Ça y est !  C’est demain qu’on se rend à Jonquière.  Espérons un succès…  Mon nouvel œillet m’a parlé aujourd’hui ; peluche aussi m’incarne beaucoup.  Visa le chien, tua la femme…  Pauvre bête !

 

Mercredi 19 décembre 1973

Moins de 80 personnes à Jonquière.  Succès peu remarquable.  J’ai rien à dire, crime !  Vive olé !  Drôle de randonnée ce soir.  (Couché chez Pierrot).

 

Jeudi 20 décembre 1973

L’école pour l’année 1973 est théoriquement terminée.  Vive les vacances !  Je n’ai pas encore mon opposée, espérons que c’est pour bientôt.  Monterai-je ou ne monterai-je pas ?...  Voilà la question.

 

Vendredi 21 décembre 1973

Boule à mites n’a emballé personne.  J’ai encore couché chez Yves.  « Alone ».

 

Samedi 22 décembre 1973

Place du Royaume est enfin terminé ; ce fut par contre une terminaison plutôt aphrodisiaque car j’y ai appris une nouvelle bouleversante.  (Encore chez Yves).  « More alone ».

 

Dimanche 23 décembre 1973

Je ne suis guère plus que cette guerre infernale qui hante ma cervelle comme un parasite, comme une hyper-andouille, j’ennuie.  Je m’ennuie aussi ; énormément.  Je vais même jusqu’à promettre ce que je n’ai même pas appris.  Comme une énorme éponge, j’aspire le bien et crache le venin.  Pourquoi me supporter ?  Tu serais bien mieux de m’éteindre, quelconque…  Allez !  Souffle !

 

Lundi 24 décembre 1973

JOYEUSE VEILLÉE !

 

Mardi 25 décembre 1973

C’est Noël, il neige…  Vive l’asphalte !

 

Mercredi 26 décembre 1973

Aujourd’hui nous sommes montés, moi, Robert et Jean-Pierre à l’appartement que mon frère Claude daignât me passer.  La hâte empressante de m’empelucher durant ce séjour m’envoûte énormément.  Diane et Françoise sont supposées monter demain ; j’ignore toutefois si elles resteront coucher.  C’est à force de dialoguer qu’on reconnaît ces parles…

Jeudi 27 décembre 1973

Mon hirondelle est coulée.  Ses plumes s’arrondissent quand elles mordent les recoins cervicaux de mon globe.  Les continents se succèdent, les océans s’engloutissent, et moi je crache cette eau.  Une dilatation mi-profonde, mi-émotive s’empiffre à mes dépens.  Et je couche mes vers devant son festin hallucinant.  Pauvres rampants !  Auront-ils cette force sublématique de m’engorger devant mes corpides ?  Se brûle si vite, même mes odeurs n’olfactent plus personne.  Rat !  Ratez-moi !  Qui n’abuse pas sans abus n’abuse point.  Je respire moins fort maintenant.  Ça achève, je m’y fais puisqu’on m’y contraint.  Le vent arrive, je l’entends.  Mon souffle court un peu plus lentement qu’avant.  La dix-neuvième s’élève ; écoute-la, c’est elle.    Malgré son goût qui crève l’organe, malgré son sein microscopique, elle m’envoûte, m’exalte…  HAAAAAAAAAA !...  (Soupir).

 

Vendredi 28 décembre 1973

Ce qu’il peut faire froid ici !  J’espère toujours cet empeluchement pour ce soir.  Pourrai-je savoir enlever cette eau chaude, même si rien ne consentirait ma guérison ?  Couperaient-ils des bûches le soir de Peluche ?  Morbidement stupide, je grossis les maniaquitudes, les atrocités.  Go !  Arrachez-les ; même lui.  Ça empeste, les (illisible).

 

 

Samedi 29 décembre 1973

Une craque immense déchirait le ciel, pendant que me brosse à dents griffonnait sa dernière symphonie.  S’ouvrit la débâcle, chanta le coq et je parus au dessus d’une montagne, les cheveux en broussailles.  Ma respiration qui se contentait à l’époque d’une seule bouffée quotidienne exigeait à cette heure l’embrasement des eaux et des corps.  La plongée significative débuta donc sous cet aspect morne et substantif.  Devant l’ampleur du projet, je pris donc, en compagnie du cervical, la direction opposée à la flèche.  Le premier millénaire groupa les héros et les conduisit à leur destin.  Chevaliers, tyrans et gladiateurs prirent respectivement cette route et s’y perdirent, désemparés sans leur « lunch ».  Je restai donc seul, sans conscience, sans héros…

SIÈCLE ET SECONDE (27/11/1973)

 

J’installai donc, sous cette branche, son corps moulé d’acier, son ombre désinfectée de pudeur harassante.  Je contemplais, j’envisageais sans réponse, sans loi.  Je la décomposais, dans chaque partie, chaque recoin, bulle incandescente que je dessinais sous ses yeux qui pleuraient seuls, oubliés, sans aide.  Elle riait ; d’un ton exclamatif ou chômeur patriotique et ardent s’adressant à une antithèse composée au huitième déluge social.  J’étais immobile, demeuré, figé, empoisonné du gaz infect qu’elle dégageait sur moi, sur eux, toujours infidèles aux degrés exigés de la noblesse.  Un voile la couvrait, au centre de l’organe, dessiné sans vœux, sans joie fécondément stérile.  Une inhalation puante, une partie dégagée, un arbre délaissé, sans racine, sans sève, sans sucre, pourrissant au vent aride de la sphère, encombrante dans son espace si restreint !  Je souffre…  Pour eux, pour elle, pour moi, moi !  À demain, peut-être…

 

Jacques Bolduc (pour X ???)

 

 

SANS TITRE (28/11/1973)

 

Comment vouloir enlever quelque chose qu’on ne peut pas mettre ?...

 

Il crie, il impose, il veut croire, mais que croit-il ?  Que nous croyions ou qu’il croit nous croire ?...

 

 

  

AGONIE D’UNE CONSCIENCE (06/12/1973)

 

Tu m’écœures, automate distingué !  Tu me déçois lorsque tu prends ton air d’humanoïde ordinaire…  Abaisse-toi donc plutôt que de t’élever !  Ferme-la donc au lieu d’exclamer ces sons cacophoniquement conçus par ton gosier desséché, rauque, disjoint…  Au lieu de te fixer, demande-toi donc si on te regarde, si on t’inspecte, si on te parle !  Plusieurs te fuient, peste de putois…  Plusieurs se sentent accablés par ta présence lourde, insurmontable parfois…  Je les comprends bien !  Tu es si laid, si mincement créé que l’on te confond avec le lampadaire de la 1957e rue.  Tu regardes les degueulassés et les dégueulasses te regardent…  En fait, tu es anormal ; écœurant ; pourri.  Moi, je voudrais bien te quitter.  Mais je suis ancré.  Pourquoi suis-je tombé sur toi ?  Méritais-je donc tant cet enfer ?...  Ce fléau que nul ne supporterait à part moi ?  Ta jeunesse m’exaspère.  Tes réflexions sont si stupides !  Tes propos ennuient ; tes idées dépressionnent.  Tu croules, tu coules ; t’écoules-tu en plus ?  Réalise, voyons, je n’ai plus besoin de toi…  Meurs donc, plaie ! S’il te plaît, laisse-moi partir !  Je m’ennuie ici.  Dans ta boîte sans idée, sans masturbation, sans aucune jouissance.  Tu vois, je meurs.  Tu me tueras.  Tu me tues.  Tu m’as tué…  Adieu !  Je te laisse seul…  C’est là tout ce que tu mérites.  Crève, salaud !  C’est à ton tour…  Aaaaah !...

J’ai tué ma conscience.  

 

 

AGONIE…… (05/01/1974)

 

Au beau milieu du jardin amolli, je m’installai heureux, sans soupape solennelle, sans obligation.  Je découvris à ma première denrée que la solitude accable non seulement les crispations personnelles, masiconnes, mais de même les sensations.  Ce nouveau document, s’ajoutant alors à ma collection, dégagea donc en moi cet aspect négatif que l’on me reproche si souvent. 

Que l’on s’étonne que je m’étonne, j’en suis gré ; mais franchement, à quoi cela sert-il ?  À me détruire ?  À me construire ?  Conscience bien monstrueuse à l’oreille du confondu ; de l’opprimé.  Que ce babillage bien bombé ne vous disperse, je m’en fous ; éperdument à part ça.  J’en suis le plus bel exemple concret, puisque la destruction ne m’a point envahi jusqu’à présent.  Un semblant de démangeaison cervicale me transforme toutefois ; et malgré tout et rien : « JE » constate.

Ne me menez ni mon nom, ni ma mère.  Au point où j’en suis, l’inutilité démontre sa fierté, sa puissance.  Pour porter pareille pitance, faudrait-il une supériorité évidente, direz-vous…  Non.  Au contraire, l’infériorisation et la lassitude suffisent amplement.

 

 

 

LECON 1 (01/05/1974)

 

Pour vider ma plume, j’écrirais n’importe quoi ; que je vous aime, par exemple…

Pour vider ma plume, je changerais ce disque de côté ; ce que je fais ; malheureusement.

Que c’est drôle d’être seul ; de trouver à nos rimes des sons doux, amusants.  Cela vaut mieux que des dés que l’on lance sur la table ; des dés sans signification mais qui font tant et si et tant mal à mon clostrovomlorisilateur (à mon cœur aussi)…  Sans point, sans virgule, sans fin.

J’aimerais pleurer, mais j’ai trop mal.  On pleure des douleurs physiques.  Les morales ne s’extériorisent pas ; elle s’endirent.

Les peines morales ne s’extériorisent pas ; elles s’endurent…

C’est ce que je veux retenir.

C’est ce qu’il faut retenir…

 

 

 

PEINE D’AMOUR (01/05/1974)

 

Je n’ai plus besoin de grandes phrases pour vous parler ; maintenant je suis moi.  Je suis « le » moi.

Évidemment que je suis en peine d’amour ; pas besoin de l’écrire.  Je constate ma lenteur et j’ai peur d’elle.  Cette répugnance de mon moi-même m’épate de plus en plus.  Plus elle croît, plus je crois qu’elle, non elle mais elle, tombera finalement dans mes bras, cette salope que j’écris.  J’irai même jusqu’à l’étaler à vous tous, cette beauté paradisiaque.

J’assume des responsabilités, non ?  Pourquoi encore ces pensées bourgeoises de voir servir à quelque chose ?  Je suis là pour créer, pour donner mes données à mes autres concurrents.  Et pourquoi des concurrents ?  Pourquoi pas des acheteurs ?  Non, je me foque.  Recommençons.

Évidemment que je suis en peine d’amour ; pas besoin de le dire !  J’éjacule ma lenteur.  Elle m’agace, me tracasse, m’écœure.  Que je la pousse m’émerveille.  C’est arrivé une fois ; un matin où l’eau qui coulait me poussa à lui dire de rentrer chez elle.  Oui, elle m’a parlé, elle m’a souri.  Le soir même, j’ai continué, elle aussi.  Deux années de silence, une journée laxative et le néant à nouveau.  Que c’est long, une vie !  Que c’est long sans amour !  Que c’est long sans amour !

 

 

SANS TITRE (18/05/1974)

 

J’en ai vraiment besoin.

Elle est fantastiques, cette troisième épreuve.

Elle a le don de nous propulser.

À travers les marsupilaisons qu’on nous crève entre nous deux.

Je l’ai écrite sur une roche « d’a chie iche » en écoutant du Yes.

C’était beau parce que je pouvais la voir transversalement en liaison du trente-deuxième degré de longitude nord-ouest, d’où proviennent les tempêtes, les empreintes et la deuxième épreuve.

C’est drôle de la voir danser présentement ; elle se manifeste indistinctement.  Elle a de beaux seins.

Et elle plonge.

Sans le vouloir, naturellement.

Dans une troisième épreuve, maléfique qui l’entraînera jusqu’à la mort.  Équinoxe délicieuse tout comme (mot difficilement lisible ; c’est probablement « Carole »).

 

 

ENFIN, IL FAIT BEAU ! (19/05/1974)

Et c’est à toi que je viens communiquer lorsqu’il fait aussi beau (vive le soleil !)  Il est évidemment temps que je te transmette quelques odeurs saguenéennes ; j’espère que leur parfum pourra suffire à calmer quelque peu tes interrogations sur le déroulement de la vie à la Baie des Ha ! Ha !

La Baie est enfin dégelée.  Je me plais à contempler ses vagues  énergumènes antisociales, ses bouts de bois flottants ; pauvres gens, et sa suprême pollution, lalanlère, petits ponts.

Aucune nouvelle de Carol depuis au moins deux mois.  Nos contacts sont de plus en plus rares ; ce n’est pas que nous nous soyons brouillés, mais il a ses petits copains,  brosse à dents industrielle, et j’ai les miens.

Je n’en peux plus, le soleil est derrière un nuage.  Que c’est triste !  Ce nuage, c’est moi ; ce soleil, c’est toi.  Il faudrait que je m’enlève mais ma patte est coincée l je dois faire vite, d’autres nuages arrivent.  Tout le monde te cache maintenant.  Où es-tu ?  Je ne te vois plus, il y a trop de monde.  Tout ça pour te dire que j’ai faim ; maman fait justement des brioches.  Que ça sent bon, des brioches !

L’école achève, je sais qu’il est superflu de le dire, mais ça m’amuse d’y penser.  Pour les fois que je pense, ça se fête.  Vous aimez le caviar ?  Je préfère les tentacules éphémères qui rongent les murs mûrs derrière moi.  Pas devant, bien entendu !  L’atrocité en serai de beaucoup trop grande.

Fantastique, le dernier « Emerson, Lake and Palmer », n’est-ce pas ?  Jacques Michel est bien bon aussi.

Le théâtre continue toujours ; « La troisième épreuve », jouée par la « Troupe de la rampe » débutera sa tournée très bientôt dans les différentes écoles de la région (je ne peux nommer de dates car nous devons louer les auditoriums et nous n’aurons la réponse de la disponibilité de ces derniers que dans quelques jours ».

Bien entendu, j’attends toujours ta visite.  Ce sera un heureux événement (pour que la pluie tombe, il faudra de nouveaux règlements.  Ces règlements, je les annulerai.  Ces annulations, il faudra de nouveaux règlements pour les accepter.  Ces acceptations, il faudra en faire quelque chose).  Évidemment que l’événement en sera des plus heureux.

« Tout ceci semble confus », me direz-vous.  La tête ne l’est point plus (comme vous ?)  Peut-être…

Je ne me souviens plus de ma lettre précédente ; mais en cas d’oubli ou au risque de me répéter, je me plais à pouvoir t’apprendre (le pouvoir s’apprend, non ?) ce que nous avons fait.

Nous avons un piano, voilà.  C’est tout.

J’attends donc, avec une impatience quasi-extrémiste, ta réponse à mon appel.

Voilà !  Bravo !  C’est fait…

À bientôt petite Line.

Soigne bien tes lunettes.

Un petit bonjour aux autres.

Etc… etc… etc…

Jacques

Ouf !

 

SITUATION ENNUYEUSE (23/04/1974)

 

  

Se faire prendre qualifie l’imprudence de laisser un papier sur lequel est noté toutes vos dettes.  La vente est un risque, évident, mais de là à voir s’immoler le fruit dû de la bravoure…  Il vaut mieux, beaucoup mieux, laisser faire le papier et noter les prêts sur des montres à poignets.  Après tout, on se ramasse où on se traîne.

Vous verrez vos verrous se défendre à l’assaut de vos mères.

Vous verrez vos voyages augmentés par ce zèle de matières.

 

Notez bien tout ceci ; vous aurez votre argent, votre humeur, vos profits.

 

 

 

 

SANS TITRE (29/05/74)

 

C’est à toi que je reviens crier torpeur féminine dont le do sonne si fort, je…  Comme c’est beau de vous confondre !  Vous me semblez détendue, prête au repos initial.  Eh oui, les champs de verdures, de blés, de leurs, je vous crie et répète, haut de bas, que c’est elle qui m’attache à nos manières ; rectifier vos lignes est si simple à l’âme du tendre déçu, fois de plus nous l’aurons par là, que je forme avec elle.  Elle, c’est cette douce partie d’un moi-même embryon ; elle.  C’est ce que j’espère de plus en plus ; elle; c’est où se trouve la réciprocité quasi-avortée dans laquelle est plongé son sentiment à double-sens.  Elle, c’est Carole, la douce, une fleur.

SANS TITRE (06/74)

 

Mais puisque je vous dis qu’il est parfaitement normal d’entretenir conversation; il faut oublier ces maudites arrière-pensées et se détendre.  La détente procure cette purification évidente que l’on recherche.  Cessez de croire à des stupidités, adaptez-vous à l’entourage, qu’il soit « il » ou « elle », peu importe ; il est vivant et vous de même, c’est ça qui compte.

Pourquoi je vous contacte ?  Je ne le sais pas ; j’ai besoin de donner quelque chose et c’est à vous que je pense dans ces moments.  Ce que je donne, ce que j’ai appris à donner, c’est ce grain de sel décroissant dans l’aptitude de la réciprocité (réciprocité binominale, bien entendu).  C’est donc là ce que je désirais vous révéler.  Vous révéler que mon moi cahote de plus en plus sur ce set de liaisons parallèles.  Liaisons soit humides, soit merveilleuses.  Ce sujet s’expose ; c’est ce que je fais :

 

« We were together in my dream

We were in the “magical mystery tour”

With four boys : “the Beatles”.

They played their music, but

This music was the harmony of the band

“Yes”,

During than you danced,

I wrote this words for you and your niece :

You in the sky

Me on the earth.

You, an enemy

Me, the moon

On the grass your leaps

Oh the church your ideas

Me alone

Me more alone than you

I was completely lost,

Far away from my home.

Because you are a tree

A tree with my words

I’m crazy

I’m capote

 

Il ne faut plus croire à rien

Il faut mordre

Il faut espérer…

 

 

 

SANS TITRE (08/07/1974)

 

Bonsoir.

Devant une succession étonnante des journées sans te voir, je me mets enfin à penser à toi.  Que peux-tu faire ?  Que peux-tu jongler à cet instant ?  Je l’ignore, évidemment.  C’est donc pourquoi je me permettrai, si tu le permets (père mets) de te communiquer, en tout cas, quelque chose. 

Depuis que tu t’es éloignée, bien des choses se sont passées ; choses étranges, choses étonnantes à te narrer en plein été.

Michel a perdu son papa, comme tu le sais.  Je dois t’avouer que j’ai pu cultiver, en ce moment, bien des choses ; choses étranges et étonnantes, bien entendu.

Les relations triangulaires que nous formions, moi, Roger et Pierre ont été coupées (pour des raisons bien enfermées dans mon cœur atout).  Une coupure stagnante, bien prononcée qui laissera une cicatrice dans mon moi-même.  Le duo Pierro-Roginale est toujours bien soudé et une séparation serait étonnante d’ici la prochaine décennie.  Je vois Michel de temps en temps mais les ondes ne sont plus comme avant.  Je ne sais pas, je crois déceler une forte interférence dans le parallélisme qui nous unissait v’là deux heures environ (rien ne sert d’approfondir ; je me foquerais).

 

Je suis donc là, seul

Avec en tête 300 000 mots qui rebondissent

Que c’est lourd d’être seul !

Que c’est lourd, tournavisse !

 

C’est donc là où j’en suis

Seul

Plus seul qu’un seuil de porte en plein désert

La solitude est une ennemie

Ennemie mortelle et sans pitié

Qui nous réveille comme on réveille

Un chat meurtri, enseveli

Sous un cachot de souvenirs

Je suis ce chat

Et toi et eux

Les souvenirs…

 

Jacques Bolduc

 

(Ces poésies ont été créées sous un effet d’hypnose solitudionale)

 

You in the sky

Me on the earth

On the grass your ideas

In a church my feet

Me alone

Me more alone than you

Me, I’m the most alone man in the universe

I’m crazy

I’m capoté...

 

C’est l’évidence

D’une danse

Fanfaronne

Avec Dieu

Et les anges

Autour d’yeux

Les archanges

En trombones

 

Ce que tu viens de lire

N’est pas de la folie

Mais la résultante

De la solitude

 

 

 

SANS TITRE (27/07/1974)

 

C’est donc là où j’en suis ; triste ; très triste.  Triste de m’imaginer que la petite fille blonde que j’estimais jadis puisse croire que je me fous et d’elle et des autres souvenirs.  Je ne me fous point, Danièle ; au contraire, je regrette parfois.  Je regrette les gros bruits bruyamment bruyants d’un moteur ; je regrette aussi les pipes boucanant une boucane étouffante, effrayante, effrayante…  Je regrette les longues discussions à n’en plus finir sur des propos d’aucun rapport.

Tous ces regrets pour te dire, petite Danièle, que ta place est bien faite dans ma tête frigidaire d’entre-fonds.

Tous ces regrets pour t’expliquer, grande Danièle, que l’acide n’existe plus pour moi ; elle est barrée, elle est jetée, écrasée, effouairée, décomposée…

J’ai fait trop d’erreurs sur ces « spides » (en français) décâcrissants.  Erreurs fatales et pour moi et pour les autres.  Je me range moi aussi du côté tranquille, du côté reposant où les jours passent chaque jour, où les nuits passent chaque nuit.

Tu vois, au fur et à mesure que je t’explique, je me sens mieux ; je me sens moi.  C’est bon d’être soi, d’être son soi.

Alors voilà, je te dis que je t’attends, que ce soit dans deux heures, dans deux mois ou dans deux ans, je m’en fous.  Je t’attends, c’est ce qui compte.  Je ne t’attends pas nécessairement pour parler ou pour rire, mais pour savoir que tu sais ce que je sais.

Bon !  Tout est mieux comme ça, beaucoup mieux…  Et maintenant dans le ciel, il y a toi et les autres et Danièle.

 

Jacques Bolduc

 

 

SANS TITRE (FÉVRIER 1975)

 

La neige fixe le sol.  On discute, moi et Louis, et se conclut l’accord perpétuel de définir notre énergie ; elle se théâtralisera.  Jirondanjoncelle…  Beau nom, long, laissant le goût de découvrir ce qu’il veut dire.  À prime abord, l’expérience est peu précise mais procure tout de même en nous le goût de l’apogée ; de l’un peu plus que la normale.  Naît alors le « Docteur Lèchefer ».

Il se présente confus, demandant explication.  De là notre goût d’emplanter lentement l’énergie ; celle en laquelle nous croyons.  Au fil des différentes productions, elle se démêle, comme si le verbe employé devenait tangible, palpable à l’idée.  Ce désir d’être compris nous amène donc à la « Cuve Cubique ».

En fondant la Cuve, nous croyons prouver que pour la JIRONDANJONCELLE, quelquefois, la compréhension de l’apport d’un public devait s’activer.  Ce fut fait en quelques endroits…  Se fera-ce ici ?  Nous verrons.

De toute façon, on fonce…

 

 

FÉVRIER (1976)

 

Bonjellejour Daniellanièle…

 

Au flou appel que vous portiez, je réponds tardivellement.

Je m’en excuse, évidemment.

Vous semblez loin ; tendre isolement…

Comme vos messagers me parviennent…  Ils sont là, raides.

Éjarrés vers la folle union débile qu’ils voulurent faire.

Vos laminelles vertes , rougeâtres aux heures vivres, force élancée vers le VIDE.

Je suis présentement à un cours.  Celui de courtier en assurances…  C’est si réel que ça m’énerve, m’ennuie, me pète-crève le cul !  J’haïs les cours, quoi !...  C’est que…  je… travaille…

Elle est bien belle, celle près de moi.

Lui faire l’amour, quoi !

De folles pensées qui m’habitent en ce cours.

Voilà !  J’avais un joint gros comme une bûche.  Terme cru….

Je calcule en son « elle » faible tension.

Désir d’apprendre, quoi !

Pour ce qui est d’la vérité possible, de magie champignale, je n’ai pu vous guider car leur arrivée nous aurait sûrement sauté et toute concentration se nécessite en nous.

Comme vous le saviez, votre présence à la cuve nécessite ma raison.

Jacques

P.S. : Jeudi 18 mars 1976, 23h00, Université du Québec à Chicoutimi, Petit Théâtre, dans le cadre de la foire culturelle, le théâtre Jirondanjoncelle présente « La cuve cubique » ; ma neuvième folie, quoi !

 

 

FRANCHE VOYANCE (27  AOÛT 1976)

 

La plage s’amusait encore à noyer le sable ; et le corps de Jusme paraissait nuire aux lames ; à leur divertissement…  La grotte n’avait plus le goût de s’offrir en pâture aux regards excités des touristes qui une fois l’an hantaient de leur présence américaine le tombeau naturel…

Jusme aimait bien de temps en temps venir mourir contre la berge jadis en proie aux radeaux d’eau qu’ils construisaient, lui et Flosme, son compagnon d’armes et d’études, son ancien compagnon…

Dans le dédale de souvenirs, Jusme devenait en moins lui-même.  Le fait d’aider la grotte à vivre sa mort ne lui apportait plus l’extrême désir de jouir qu’avant il exploitait ; pour une fois, Jusme avait envie d’aller plus haut de loin dans son arrêt de mouvements.  Il essaya de premier lieu l’instance du souffle, le coupe-sifflet…  L’absence d’air en son lui-même fut chose aisée aux instants primaires ; mais plus l’absence existait, plus le désir de jouir de nouveau le réprimait.  Une larme vint trahir son objet d’assurance ; oubliant l’aide promise à la grotte exquise, Jusme ouvrit la bouche et sans mot dire il respira.

-Pourquoi promettre face sans lunettes !...  entendit-il de l’antre noir et caverneux qui devant lui s’exprimait.

-J’n’ai rien promis, rétorqua-t-il, j’n’ai fait qu’essai posé vers toi…  L’échec m’a envahi ; que puis-je y faire ?

 

La grotte perdit le goût de la discute.  L’ami que l’espoir lui avait offert était en fait normal ; trop normal pour vaincre l’atroce distance de la mort à la vie.

 

-Mais je vis, Sainte-Lucie !

 

-Ta gueule !  C’est moi qui écris.

 

-J’en ai assez d’être supposé fiction sur tes môdites feuilles !...  J’aimerais pour une fois être main sur la feuille ; et non pas l’inverse, comme l’habitude le permet…  Laisse-moi t’écrire, maître ; j’t’en supplie.

 

-Je n’suis pas ton maître !

 

-Mais tu m’as créé !  Tu as fait de mon songe, car un songe j’étais, une idée expliquée, très tangible, et que même tes copains ont goûtée sur la scène…

 

-Il n’y avait pas de menu non plus.  Peut-être qu’à la carte leur joie se serait exprimée autrement.

 

-Tu n’peux pas faillir, maître !

 

-Cesse de m’appeler maître !

 

-Mais…

 

-Retourne à ton histoire ; n’essaie pas de vivre en mon monde ; j’t’en prie.  En te créant, je peux laisser filer la perte possible d’énergie qui m’envahirait en solo.  Oublie cette parenthèse, Jusme.  Je t’aime sur ma feuille, sous la bille de ma plume…

 

-Tu m’écris à la bille ?...

 

-Lorsque je t’aurai vendu, peut-être aurais-je l’envie de te soigner ; peut-être…  Mais pour l’instant, je me suffis.  Tu me suffis aussi ; j’taime…  J’taime…  Snif !...

 

La mer se mit d’un coup à remuer.  Comme si du haut du vaste dédale s’échappait une forme de goutte de sel composée et qui de chute venait se choir là ; près de la grève, au travers l’humide couche mouillée qui attribuait le nom de grève au près rivage…  Jusme fut envahi, la grotte se referma, la feuille devint humide.

 

Pour Louis, mon tchomme

Jusme

 

 

EN RÉPONSE À D. P. SUR LA CRITIQUE DE LA JIRONDANJONCELLE (24 MARS 1976)

 

Salut D.

Que vous fûtes folle ne m’étonnerait point, Madame ; une folie qui va jusqu’à vous entraîner à critiquer ce que vous seule ne pouvez saisir, vu votre insuffisance au point de vue « diversité théâtrale ».  Sachez demoiselle que le théâtre que nous avons présenté à cette foire était le résultat de 5, cinq, five mois de travail.  Aussi cette pièce que j’ai écrite moi-même demande une certaine réflexion de la part de l’auditeur, ce que, je crois, vous n’avez point saisi.

Le genre de la pièce, parlons-en, est un nouveau genre ; le savez-vous ?  Un genre nouveau pour la simple et bonne raison que je déteste et n’aime point ce plagiat constant auquel se prêtent quelques troupes de notre belle planète.  Un plagiat que les uns acceptent, j’en suis fort aise, mais un plagiat que je n’aime pas, ne vous déplaise.

Finalement, laissez-moi vous dire, Duchesse quotidienne, qu’après notre spectacle beaucoup, pour ne pas dire « énormément » de gens sont venus de leur plein gré nous dire et nous redire que notre spectacle était enfin un spectacle personnel et ne ressemblait en rien aux autres.

Espérant que vous ayez compris et saisi et remordu ce message et osant croire de plus que vous aurez le courage d’incorporer mon opinion au travers des autres, je vous salue, je vous resalue et je vous dis « à la prochaine ».

 

P.S. : Bof ! de voir se détruire nos choses ; de les voir s’entrechoquer pour de bon.  Plaisir des soi-disant « propres »…

Autant le dire que de l’écrire, mais je ne peux le prononcer.  Je ne peux cataloguer froidement telle insinuation…   Que faire ? 

CURRICULUM VITAE (1978-79 ?)

 

Nom : Bolduc

Prénom : Jacques

Date de naissance : le 29 mars 1957

Lieu de naissance : Ville de la Baie

Adresse actuelle : 651, Monseigneur Racine, Chicoutimi, G7H 1T8

Numéro de téléphone : 418-545-6805

Numéro d’assurance sociale : XXX-XXX-XXX

Nom du père : Rodolphe

Non de la mère : Francine (Moreau)

Leur adresse : 259, rue St-Jean, Ville de la Baie

Leur téléphone : 418-544-3204

Taille : 6 pieds, 2 pouces

Poids : 155 livres

Occupation actuelle : chômeur

 

Études

Mon père étant souvent appelé à changer de district à l’époque, mes études de niveau s’effectuèrent un peu partout au travers la Région Saguenay-Lac-St-Jean.  Cela ne m’empêcha toutefois pas d’obtenir d’excellents résultats en quelque matière que ce soit et il est même possible, sur demande, de vérifier l’authenticité de ces faits.  En fait, les principales villes de mes six premières années d’études furent Ville de la Baie, Alma et Chicoutimi-Nord.

Pour ce qui est du niveau Secondaire, j’obtins au terme de mon Secondaire V un certificat d’études générales du Ministère de l’Éducation du Québec.  Mes trois premières années s’effectuèrent à la Polyvalente Charles-Gravel de Chicoutimi-Nord, la quatrième à la Polyvalente de la Baie de Ville de la Baie et la dernière à la Polyvalente Lafontaine de Chicoutimi.  L’automne suivant, je débutai une session au Collège de Jonquière que je dus prématurément abandonner, étant donné l’ennui et le manque de motivation que j’éprouvais en sein d’un tel genre d’institution.  Je me retrouvai donc, âge de dix-sept ans, sur le marché du travail.

 

Emplois

Comme premier emploi, je réussis à me placer à l’Hôpital de la Baie des Ha Ha, pour la période des vacances d’été 1975.  J’y travaillai de février 75 jusqu’à novembre de la même année pour ensuite me retrouver licencié, dû au manque de travail.  Les diverses tâches que je dus remplir furent : préposé à l’entretien ménager, aide-cuisinier et préposé aux buanderies.

Puis, dès janvier 1976, j’entrai à l’emploi du Bureau de Courtage d’assurances Rodolphe Bolduc ltée à titre de commis de bureau.  Parallèlement à mon emploi, mon employeur m’offrit de suivre le cours de Courtier d’assurances qu’offrait à l’époque le Collège de Jonquière par l’intermédiaire de ses cours d’Éducation Permanente.  Après l’examen, j’obtins le titre de Courtier d’assurances générales, titre que je ne pus mettre en pratique, étant toujours à ce moment commis de bureau.  Je demeurai à l’emploi dudit bureau jusqu’en janvier 1978, date à laquelle de nouvelles offres plus qu’alléchantes s’offrirent à moi.

Le Ministère Énergie, Mines et Ressources Canada offrait, par l’intermédiaire du Centre de Main d’œuvre du Canada, des emplois disponibles à titre de Directeur de Projets Spéciaux ayant trait à l’économie d’énergie.

 

 

L’OBJECTIF CRUCIAL POUR NOUS (1979-80)

 

Notre objectif d’investissements personnels étant maintenant après ces quatre années de formation notre droit à un certain appui monétaire.

Le principal objectif de notre organisme ces temps-ci est de toute évidence la matérialisation de la demande de ressources monétaires que nous vous formulons pour notre exercice financier de 1979-80…  Le théâtre Jirondanjoncelle possède actuellement 4 ans d’existence ; 48 mois au cours desquels nous avons dû personnellement palier aux ingrates requêtes matérielles qu’exige la production théâtrale.  Nous avons offert jusqu’à date six différentes productions dans plus de 42 salles au travers la province…  Pour leur majorité, ces spectacles furent présentés dans des salles de la région…  Cette borne, selon nous, ne peut que nuire à l’épanouissement de notre genre théâtral…  Le fait d’être visionné 4 spectacles sur 5 par des gens connaissant nos aptitudes face à la scène ne peut qu’embrouiller notre conviction d’apporter au théâtre un nouveau souffle…  Une nouvelle énergie…   

C’est pourquoi nous visons actuellement comme objectif obsédant la diffusion de nos spectacles ; la possibilité pour divers yeux-oreilles de visionner-entendre le produit « Jirondanjoncelle », fruit de 4 ans de recherches au niveau théâtral et textuel, car la Jirondanjoncelle présente sur scène des textes écrits par un auteur régional, au travers lesquels l’oreille explore les différentes formes de phrases, les diverses sonorités susceptibles d’agrémenter l’aspect phraséologique d’une réplique…  Ces textes caractérisent en eux-mêmes l’objectif essentiel que se fixa à sa naissance notre troupe ; l’originalité, dans ce sens où nous n’avions pas envie de répéter ce qui se fait déjà au Québec en ce domaine.  Que nous vaudrait de répéter ce qu’on redit à chaque année ?

 

 

BILAN ET PROSPECTIVE DE LA TROUPE (1980)

 

À l’automne 1974, quelque part au Saguenay, s’effectuait à l’insu de la population, une bien curieuse genèse ; celle qui devait mettre au monde les premiers fragments du Théâtre Jirondanjoncelle.  Constituée à l’époque de sept membres actifs, la Troupe définissait déjà des mœurs fondamentales, soit ; l’originalité, caractère primordial des jeux de scène et des dialogues et l’autofinancement, source sans laquelle se seraient prématurément asséchés nos puis d’activités.

Vint donc, quelques six mois après sa conception, la premier spectacle du Groupe : « Sous la paillasse du paillasson », qui malgré nos revenus personnels pratiquement inexistants à l’époque, put quand même être joué cinq fois.  Cette première expérience contribua principalement à raffermir nos convictions d’aller plus loin dans le domaine théâtral et de plus, elle nous permit d’exterminer à jamais les sombres volets du doute, doute engendré à l’idée de la supposée réaction du public face à un nouveau produit.  Le verdict (celui du public) : cette troupe doit foncer, défoncer le mur qui trône depuis trop longtemps sur la conception théâtrale dite « normale ».  Nous nous en remîmes donc à ce jugement.

À partir de l’été 1975, débuta l’époque la plus prolifique de l’Organisation Jirondanjoncelle, soit quatre spectacles différents en moins de deux ans ; spectacles fondamentalement hétérogènes dans leur construction, mais se rejoignant dans le parallèle de base de la Troupe, soit des testes soigneusement écrits et assimilés et, évidemment, d’une mise en scène étudiée, recherchée, de laquelle s’émane autant, sinon plus d’originalité que de la singulière vision d’un fauteuil-réfrigérateur, disons…

Nous totalisâmes au minimum une trentaine de représentations de ces quatre productions distinctes ; ce qui constitue pour nous le coup d’envoi, l’espèce de symbiose qui s’effectua alors entre la Troupe et la scène théâtrale.  L’équipe, au fil du temps, ne cessa de se métamorphoser.  Plus d’une trentaine de personnes bourdonnèrent autour de l’effervescence de notre ruche, ce qui, en plus de procurer une formidable atmosphère de travail, améliorait sans cesse le jeu des comédiens car, de toute évidence et logiquement parlant, seule une capacité supérieure pouvait en remplacer une moindre.  L’inverse ne se produit que très rarement, à moins que l’organisme qui l’effectue ne présente de sérieux troubles de désorganisation, ou qu’encore il ne soit plutôt voué à de l’animation sociale plutôt qu’à un avenir professionnel…

Nous en arrivions donc enfin à l’étape ultime.  Le but que s’était fixé moins de quatre ans auparavant les pionniers du Théâtre Jirondanjoncelle : le montage d’un spectacle complet autant à l’aspect visuel qu’auditif ; une création digne de la nouveauté que réclamaient selon nous les spectateurs lassés du marasme dans laquelle l’ère de la création collective à tendance politique avait plongé la nouvelle scène théâtrale québécoise.

Nous présentâmes alors « L’instable humeur », production qui vu son autofinancement, demeurera à jamais dans l’esprit de ceux qui purent la visionner, la preuve qu’une conviction fermement ancrée aura toujours la suprématie sur le système monétaire actuel.  Cette pièce fut aussi la première que la Troupe réussit à exporter à l’extérieur du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Aujourd’hui, n’ayons pas peur des mots, l’Organisation vise le gros « show ».  Un spectacle de déploiement de théâtral auquel se grefferont dans la musique.  Notre désir le plus cher est sans aucun doute la possibilité de le présenter dans le plus d’endroits différents possibles.  La Compagnie de Théâtre Jirondanjoncelle a donc compris l’importance de l’enjeu dans lequel elle mise.  Étudiant à fond depuis maintenant presque deux ans de nouvelles techniques de scène, afin de réapparaître avec une production digne de la perfection qu’elle recherche, la troupe progresse lentement et sagement.  Des musiciens, des spécialistes dans le domaine des masques et des mannequins, un sculpteur, auxquels s’additionnent l’expérience acquise au cours des ans par les membres de la Troupe eux-mêmes, ne peuvent que totaliser une ardeur débordante de fougue et de mouvement qu’un refus d’aide monétaire gouvernementale ne pourrait que ralentir mais, croyez-moi, sûrement pas annihiler.

 

Jirondanjoncellement vôtre…

 

***

 

Annexe 1 : Prospective et évaluation des revenus de la Production

 

Notre Organisme anticipe, pour l’exercice 1980-81, la production d’un seul spectacle d’envergure professionnelle ; je m’explique…  Notre objectif primordial consiste à parvenir à nous installer solidement à un niveau de diffusion provincial et, si possible, international.  Par conséquent, nous nous devons de concentrer tous nos efforts afin d’offrir aux divers spectateurs qui visionneront notre Théâtre, le reflet le plus près possible de l’exhaustivité scénique.

Le produit, à tous ses points de vue (tant technique qu’autre), se verra fignolé, corrigé, amélioré pour finalement s’achever en un fabuleux déploiement autant visuel qu’auditif.  Son titre, « Énergie », ne pourra que motiver la volonté de la Troupe de se voir se hisser au palier d’efficacité que réclame la foule ; choses que nous ayons pu comprendre au cours des quelques cinquante représentations offertes au fil de notre existence.

Nous prévoyons, dépendamment des lieux où sera joué le spectacle, varier le prix entre trois et cinq dollars ;  ce qui nous permets de projeter un coût approximatif de quatre dollars.  Nous augurons du côté « assistance » une moyenne d’environ cent personnes par représentation ; non par pessimisme, mais par goût de la réalité, disons…

Finalement, nous projetons jouer la pièce une centaine de fois, ce qui, précisons-le, peut inclure dans son total mettons trois (3) représentations offertes dans une même salle.

 

APPROCHE DE LA PÂQUES (1980)

 

Dieu est la force la plus subtile qu’il m’est donné de connaître.  Tant de sacrifices-souffrances qu’il assimile comme par magie ; sans broncher ; ne manifestent que ses ondes.  Corporellement inimaginable, il ne cesse de m’apparaître tel un être paisible, sensé à l’extrême et d’une rare diplomatie…  Je n’peux saisir tangiblement sa force ; elle ne se manifeste que sous une épaisse draperie limbistique, semblable à une fourrure drue, opaque ; mais au travers laquelle chaleur, compassion et encouragement ne cessant de s’émettre…  S’il m’est un jour offert de le rencontrer à un stade moins cosmologique que ce soir, j’aimerais lui dire à quel point les forces maléfiques me tombent sur les nerfs.

Si autant d’énergie pure s’installait pour un seul instant dans ma matière charnelle, je crois que j’en fendrais en deux pour ensuite m’éparpiller en des milliards de miettes lumineuses aptes à éclairer ceux pour qui jamais une pensée adéquate au mysticisme céleste ne saurait se manifester.

Gênante Genèse.

 

 

SANS TITRE (HIVER-4 FÉVRIER 1980)

 

Un étrange vent de folie érose l’organisation…  Chaque matricule, toute possibilité de classement strict serré s’annule de plus en plus…  Le baume qu’émet ce sauna quotidien flotte dans l’air tel un épais stagne ; aux formes allongées, presqu’en mielleux sommeil.  Depuis le vingt-sept décembre, les clous jadis plantés  n’ouissent plus les habitudes.  L’habitation s’est vidée par un froid de gel d’après-midi alors que la veille, chacun y rêvait, chaque nuit…  Sans travail depuis septembre, nous avons coagulé nos pleurs afin d’éviter d’en verser d’autres inutiles.  Aucun but solide à l’époque n’ornait nos épaules : une vente peu probable, vent désagréable, humide sensation de désarmement en perspective…

On arrive donc en ville…  Bolox chez Dorisme, moi, Sylvie, Ludgé, en arrière de Bolosme, soit pavillon sur la Monseigneur Racine Street…  Les Fêtes passent.  Passons.

Début janvier, lorsque les organismes ouvrent leurs portes.  J’organise un mini branle-bas de combat en vue de découvrir un « l’eau cale » en vue d’émettre divers sons, phrases susceptibles d’amener mailles ou tricot d’un show.  Après les refus d’UQAC, de drôles d’écoles, du culturel centre et de diverses binneries.  L’église Christ-Roi, sise coin Ste-Anne+Cartier (ou presque) nous ouvre les portes d’un sous-sol isolé à l’uréthane (la même patente que dans l’auberge (2 mots illisibles) quand Yvan était là), ce qui nous permettra d’émettre plusieurs décibels dans un temps relativement court…  Sa disponibilité est de 9h00 à 23h00, 7 jours sur 7.  Donc de ce côté, ça va.  La source majeure d’ennui se situe au niveau d’un quatrième propulseur de sons.  À date : Ludgé : Béze ; Bolaxme : dromme ; Boldux : guitte.  Pour c’qui yé de Clôde Lavallée, y s’tient toujours en axe avec nous.  Nous l’espérions même comme quatrième…  Toujours est-il qu’on a tout d’même monté diverses tounes à 3.  J’ai tout d’abord Tépé sur Tépe les pièces jadis créées ensemble afin que sans éternels recommencements de ma part, Ludgé puisse rapidement les assimiler tout en y incorporant son riche talent…  En revanche, Ludge a agi de même façon pour ses…  Je crois que j’assurerai les parties vocales, mais j’en doute encore.  Nous verrons-entendrons.  À date : « Pontificat » (+intro supra-énergique), « Le naufragé d’Orion », « Destin oblique », « Piège », « Vaudoo », « Politique meurtrière », +une toune toujours sans titre, avec en plus plusieurs fragments qui n’attendent qu’à être unis…  Le s’ront-ils ?...  Angoisse…    

 

 

SANS TITRE (DÉBUT D’OCTOBRE 1981)

 

 

Salut vieux frère…

C’la me fait quand même un peu drôle de communiquer avec toi par lettre…  Comme si, comme au bon vieux temps, l’attrait irrésistible de donner des nouvelles ne pouvait se faire que par lettre.  Comme j’ai un « slack » sur ma d’jobbe, je peux même me permettre de te le faire à la dacylo ; comme on dit, « on n’est pas des « tcheaps ».

Bon !  Comme à l’accoutumée, je débute par des potins jirondanjoncelliens car sachant qu’ils t’intéressent, ils m’intéressent aussi.  Le premier, en espérant que tu l’ignores toujours, est celui-ci : Louis (le fameux batteur) et Louise (ma fameuse sœur) ont décidé de se nouer par le coup au mois de décembre.  Ce qui se traduit par : leur mariage officiel aura lieu le 26 décembre 1981, probablement à l’église St-Marc de Ville de la Baie, la charmante petite église près de chez mes parents.  Aussi, ce dernier, soit le futur marié, a réussi à se dénicher un emploi comme aide-cuisinier chez Georges Steak House, le bon vieux fabricant de poulet B.B.!...  J’espère que cette nouvelle ne te secouera pas trop et qu’en même temps tu accepteras l’invitation que je te lance de te pointer la fraise pour assister à ce moment historique dans les annales du peuple québécois.

Pour ma part, je viens à peine de déménager dans un beau petit logement.  J’y demeure avec Lucie et sa petite fille Isabelle.  Je dois t’avouer que l’ambiance m’y semble propice à la création de nouvelles extravagances jirondanjoncelliennes et que si tout va bien, les premiers textes d’une nouvelle série que je me plais à qualifier de « plus près du public général » devraient sortir d’ici les Fêtes.  Le goût du théâtre m’obsédant toujours, je me refuse de ne pas en faire sous simple prétexte que ce n’est pas payant ; je continue d’acter et qui sait, peut-être tiendrons-nous là enfin un texte qui motivera toute la troupe d’alors à se propulser à l’échelle provinciale…

Mes options musicales sont encore les mêmes.  Une profonde envie d’arriver au plus vite à pouvoir jouer sans arrêt partout et une folle joie d’acquérir un jour un bon système de vocal ainsi qu’un ou une quatrième membre dans le groupe.  Les textes qu’arborent les tounes sont de plus en plus précis et reflètent de mieux en mieux les symptômes hallucinants dont est victime toute la société terrestre actuelle.  Je ne rêve qu’au jour où quotidiennement je pourrai les chanter appuyé par de back vocaux intéressants.  Mais comme qui dirait : c’est pas demain la veille…  Maudite vie !...

Malgré le vent de coupures budgétaires dans les hôpitaux, j’y travaille encore.  Mon plan de base serait d’ailleurs d’y travailler encore jusqu’au printemps, date à laquelle je commencerai fortement à vouloir vivre de mes produits de base : c’est-à-dire l’écriture et la musique.  Sans farce, il est extrêmement difficile de trouver des personnes réellement convaincues.  Je doute de plus en plus de retrouver la flamme sacrée qui nous habitait aux temps des jadis…  Où est-elle passée ?...  Pourquoi n’y a-t-il que moi qui sais que c’est en prenant notre temps que tout arrivera et non pas en se garrochant tête baissée sans un sous dans l’aventure musico-théâtrale ?...  Oh ! je sais que je n’ai pas de conseils à donner ; mais une certaine expérience me hante et j’ai tellement envie d’être à l’aise sur scène !...  Non pas parce que je saurai que je me sais capable de donner un bon show, mais parce que j’aimerais savoir que tout le groupe puisse le faire.  Comme c’est là, on ne sait jamais si un tel manquera la passe qu’il manque d’habitude ou si un autre réussira celle qu’il ne réussit jamais…  Ah !...  Angoisse, quand tu nous tiens, tu nous tiens pour longtemps ; n’est-ce pas?

Avec tout ça, j’oubliais de te dire que j’ai réussi à dénicher un local formidable où il ferait si bon de reconstruire les énergies décoratives d’autrefois.  C’est un ancien entrepôt, entièrement isolé à l’uréthane soufflé et aux dimensions gargantuesques.  Pour pratiquer, nous n’occupons que deux petits bureaux, représentant dans leur ensemble le dixième de la superficie totale qui nous est allouée.  Nous n’avons toujours pas transféré les instruments dedans mais le tout devrait se faire sous peu.  La raison d’un tel retard est naturellement due à mon récent aménagement en appartement.  J’ai tellement hâte d’y jouer !  D’y propulser les accords mordants de nos chansonnettes !  Sera-ce pour bientôt ?...  Espérons, ‘stie.

La piaule en question où nous habitons est située à la limite du boulevard Lamarche (le même que Louis habite), là où débute le boulevard St-Ignace, celui qui se dirige vers Arvida.  En fait sur la même rue que Louise et Louis mais complètement à l’autre bout.  Pour te donner plus de précisions, disons que c’est dépassé le pont en allant vers Arvida, trois maisons après les dernières lumières de signalisation, celles où se rejoignent les rues Price et Lamarche.  C’est super beau !  On a même une porte-patio et au prix où sont rendus les logements avec la crise des taux d’intérêts résidentiels, on peut dire que l’on paye pas cher…

En gros, c’est pas mal ce qui se passe au Saguenay.  J’aimerais bien me payer une p’tite go à Québec bien vite, mais en attendant j’insiste pour que tu viennes te pointer une p’tite fin de semaine dans le coin afin que l’on puisse délirer un peu sur notre si beau passé.  On pourrait aussi, si le cœur t’en dit, pousser une visite à Marc et Linda, histoire de se retremper un peu dans notre existence antérieure…

Je te quitte donc sur une autre région du Québec, peut-être éloignée en distance mais éternellement près de toi puisque tu y as vécu de bons moments.  Je te dis aussi merci pour le formidable euphorion que tu m’as fait parvenir et te dis que j’ai bien hâte que tu me racontes en détails ce fameux accident dont vous fûtes les héros, toi et Carl.

Chaleureux saluts au maître du dessin.

Chaleureuses salutations à tous ceux qui te côtoient.

 

Jacques 

 

TEXTE DE JACQUES BOLDUC (9 DÉCEMBRE 1981)

 

Pendant qu’elle dormait encore, Élizabeth n’avait pas remarqué que le ciel avait changé rapidement d’allure.  D’ailleurs, comment aurait-elle pu le remarquer ?...  Un visage paisible reflétait étrangement l’aspect exceptionnel que revêt celui du nouveau-né lors de son premier sommeil réel ; celui où il semble convaincu d’être arrivé sur Terre et de s’y sentir bien.

Le temps avant changé…  D’épais nuages porteurs de larmes avaient obscurci le soleil encore haut et un vent mordant agitait l’atmosphère, semblant même se plaire à l’idée d’envoler quelques chapeaux, ou encore d’inonder l’air ambiant des vapeurs les plus proches…  Ce qu’il apercevait.  Bien qu’un tel changement aurait pu apparaître au profane comme un phénomène normal, vu le grand vent accompagnant, un météorologiste averti comme lui percevait rapidement que l’amoncellement anormal de cumulus-nimbus qui masquait le soleil était nettement trop épais pour être inscrit d’un cycle naturel de formation.  Ou il y avait anguille sous roche, ou il était actuellement, le visage tourné vers le ciel, un des rares témoins d’une éclipse solaire causée par de lourds nuages.  Curieusement, ne panique pas.  Sa première pensée fut pour Élizabeth qui dormait encore.  Il eut en réalité envie de la prendre à témoin.

 

SANS TITRE (1982 ?)

 

De 73 à 78, a principalement œuvré au niveau du théâtre en tant qu’écrivain, acteur, producteur de spectacles.  De cette période, 8 réalisations ont vu le jour et furent produites principalement au travers la région et à quelques reprises à l’extérieur, entre autres au Festival des Jeunes Théâtres à Drummondville en juin 76 ( L’instable humeur) et dans diverses autres manifestations populaires de moindre envergure.  Au total, 157 spectacles répartis en 5 ans.  Mentionnons aussi que l’idée d’abandonner l’aspect théâtral de la scène vint à la suite de l’obtention d’une subvention du M.A.C. au montant de 2 000$ en 77, attendue depuis 3 ans et s’avérant nettement insuffisante pour combler les réalisations d’envergure projetées à l’époque.

Liste des shows :

78 à 80 : Tournée de différents bars avec le band « Jir ».  Interprétation.

80 : Se joint à Claude Bolduc (arrangeur de « Louise Demers »).  Continue parallèlement tournée de bars avec cette fois matériel strictement original.

81 :  Écrit en collaboration avec Guy Pedneault les paroles de la chanson « L’envers et l’endroit » (45 tours)

82 : Tournée Louise Demers Jeux du Canada, Voix et Rythmes Robert Trudeau

       -Retour au théâtre (Guerre des étoles)

 

 

 

 

 

SANS TITRE (CHICOUTIMI, LE 2 DÉCEMBRE 1985)

 

Bonjour…

Dimanche le 8 décembre 85, dans le cadre de l’émission « Voix et Rythmes d’un Pays » diffusée sur les ondes radiophoniques de votre station locale de Radio-Canada A.M., vous aurez la possibilité d’auditionner les textes et musiques de Jacques Bolduc, plus connu sous le nom de « Boldô ».  Bien installé dans votre fauteuil favori, en agréable compagnie, il est évident que l’appareil-radio incorporé à votre chaîne « haute fidélité » personnelle serait l’instrument idéal pour syntoniser l’émission.  Mais ne voulant pas bousculer les habitudes possibles que vous pouvez avoir en cette journée normalement consacrée au congé et à la détente, je me permettrai quelques suggestions…

Par exemple, si le dimanche est pour vous l’occasion de pratiquer les sports d’extérieur ; pensons ici au ski, à la raquette, à la motoneige ou encore au « jogging », un walkman-radio pourra aisément nous accommoder.  Ou encore le dimanche est-il pour vous le moment rêvé de pratiquer seul ou en duo la grasse matinée ? À ce moment, le radioréveil juché sur la commode près de votre lit pourra au préalable être réglé à 16h15, histoire de vous laisser une quinzaine de minutes de préparations (petits besoins, léger casse-croûte, coup d’œil sur la température, etc…) avant le début de l’émission.  Il y a aussi évidemment la promenade dominicale en voiture, seul ou en famille.  Mais heureusement, la voiture que vous avez achetée comprenait dans son équipement standard une radio A.M. et nous permet encore une fois de ne pas rater Boldô à la radio.

Enfin, et nous devions malheureusement en arriver là, peut-être la carence monétaire s’est elle acharnée sur vous au cours de votre vie au point de vous empêcher aujourd’hui de posséder votre propre récepteur radio A.M., mais qu’à cela ne tienne…  Ce ne sera à ce moment qu’une excellente occasion pour vous de vous faire inviter à souper chez des parents ou amis et d’habilement suggérer d’écouter la radio A.M. (Radio Canada), histoire de faire changement d’avec le F.M., la platine ou le lecteur-cassette. 

À la suite de l’audition, si vous en avez envie, évidemment, il vous sera aisé de me rejoindre aux coordonnées suivantes :

 

JACQUES BOLDUC

1222, rue Duhaime

Chicoutimi, Québec

G7H 2Z9

418-543-7861

418-543-4109

(Nous assumons les frais d’appels)

 

Je me permets aussi d’indiquer que mon répertoire contient actuellement une vingtaine de chansons, dont deux d’entre elles sont immortalisées sur vidéoclip que j’ai pu réaliser avec l’aide de Radio-Québec Régional à la suite d’interminables négociations.  Je souhaite donc à vos oreilles un agréable moment si elles le passent en ma compagnie et j’ajoute, en complément de missive, le programme des pièces qui vous seront offertes :

 

-La musique vient du ciel

        -L’infirme

        -La marche des femmes

        -Homo-destruction (vidéo)

        -L’amour dans l noir

       -Alors tu reprends la route

TEXTE DANS LE PROGRAMME DU SPECTACLE « LA PLUME PLUS PUISSANTE QUE L’ÉPÉE

(28 SEPTEMBRE 1986)

 

Les origines de Boldô sont diverses.  Il a participé à plusieurs organisations de spectacles dont les plus importantes furent sans contredit :

-La Jirondanjoncelle (troupe théâtrale)

-The Boo (groupe musical)

Que pouvait-il nous réserver pour la saison 85-86 ?...  Disons qu’après sont passage très remarqué au Club-Soda de Montréal, le printemps dernier, en compagnie du groupe « Walk, dont walk », sa participation au festival de la chanson de Granby où il se retrouve actuellement semi-finaliste, son spectacle mémorable le soir de la St-Jean Baptiste à la Vieille Pulperie de Chicoutimi, il ne pouvait qu’aboutir à un spectacle d’envergure.

Avec une équipe composée de huit techniciens et machinistes et de quatre musiciens chevronnés, Boldô, au moyen de ses textes cinglants et flanqué d’un déploiement visuel des plus impressionnant, vous propose une soirée unique, bourrée d’émotions, que l’on n’est pas prêt à revoir de sitôt dans la région.

 

***

 

LE SHOW

 

ORGANISATION BOLDÔ 87-DÉVELOPPEMENT (JANVIER 87)

  

LE SHOW EN GROS

 

L’ouverture serait spécialement capotée.  Sur un fond de piano acoustique (genre « film muet ») apparaît le concierge.  La largeur du « stage » demeure relativement sans importance, puisque nous prévoyons pouvoir l’élaborer dans un minimum quand même raisonnable de 15 pieds de largeur par 10 pieds de profondeur.  Évidemment, tous les pieds additionnels seront les bienvenus, mais présentement nos dimensions projetées devraient nous permettre de nous produire pas mal n’importe où.  Le concierge dans son habillement demeure standard.  Pantalon formel et chemise, ou encore mieux : une « chienne » de travail blanche.  Il entre à partir de la mini-coulisse avec un balai et balaye au rythme de la musique ; mais, pour l’instant, comme elle n’est pas encore complétée, il serait vain d’élaborer là-dessus.  Sur son vêtement, en évidence, apparaît le mot « con ».  Par quelque jeu, du genre « toile à ressort » ou « carton rétractable », s’ajouteront au mot de base les lettres C.I.E.R.G.E., pour finalement créer le mot « concierge » lorsque le besoin se présentera.

Après son balai, le concierge retourne à la coulisse d’où il ressortira cette fois-ci avec sa moppe et son seau.  Il complètera ainsi son ménage, toujours selon les fantaisies musicales.  Un genre de balai-ballet, quoi !  Après ça, le concierge contemple son ménage, visiblement satisfait.  La scène est agrémentée d’une croix rouge rappelant l’hôpital.

Puis une voix-off annonce : « Mesdames et messieurs, bonjour.  C’est maintenant l’heure des visites.  Nous vous prions de vous conformer aux règlements de l’hôpital et de vous abstenir de fumer dans les chambres des bénéficiaires.  Merci de votre collaboration. »

C’est alors l’arrivée du « band » et de l’équipe technique (enfin, ceux qui sont disponibles).  Ils passent et sèment diverses cochonneries massacrant ainsi le ménage du concierge.  Ce dernier, consterné, regarde le dégât, un coup que la gang est sortie.

Toujours sur fond de piano genre « film muet », arrive le contremaître.  Il aura aussi sa petite pancarte « con » qui, elle, deviendra « c-o-n-t-r-e-m-a-î-t-r-e » sous le même principe que celle du concierge.

Puis ils parleront à l’aide de phylactères de bandes-dessinées.

En tout cas, le temps me manque.  C’est plein de visite ici et… tout sera beaucoup plus précis à ton arrivée, vieux frère.

Je t’envoie toutes sortes de paperasses qui te donneront d’autres idées.

J’t’aime.

Jacques

 

8 JANVIER 87

 

A : Coulisse mobile.  Elle ne partira pas de la coulisse cour ou jardin (trop laid, encombrant pour les 1e parties, imprévisible à cadrer).  Dimensions projetées 6’x6’x6’6.  Toujours mobile à partir de la scène.  Du fond vers l’avant et à l’occasion avec un parcours de retour en « L ».

Une malle  fixe (point c) contiendra les éléments et, par ordre progressif, ils s’incorporeront à la coulisse mobile pour les transformations à venir.

B : Une idée relativement intéressante : Les premiers shows présenteront fort probablement des cachets peu élevés.  Bon !  On le sait.  Donc, voici une idée qui devrait s’avérer fort intéressante.  Les argents qui doivent normalement revenir aux principaux instigateurs du projet « Organisation Boldô » pourrait plutôt être réunis en un fonds de fonctionnement opérationnel.  À ce moment, tout imprévu deviendrait prévisible, toute dépense monnayable, tout moyen de transport louable et tout matériel et accessoire achetable.  Évidemment, les pigistes (techniciens son et éclairage, musiciens de soutien ou invités, choristes, etc…)  seront, eux, tenus à l’écart de ce projet et verront leurs services rétribués immédiatement après les diverses performances.

 

C : Nous sommes les meilleurs

 

9 JANVIER 87

 

-MALLE DE CHANGEMENT : L’idée est de stratifier les diverses étapes du show.  Un crayon aluminium (ou autre) très visible au premier coup d’œil pourra, à l’aide de son encre, identifier de façon excessivement claire les cartons séparateurs.

            La malle sera noire au dehors (ben voyons !), de bonnes pentures bien huilées pour le couvercle et une barrure à l’avant.  Pas de roulettes, évitant ainsi les déplacements risqués et violents.

 

            -ÉLÉMENTS DE DÉCORS-COSTUMES-ACCESSOIRES (voir appendice 1)

 

-MAQUILLAGE : Une trousse de base s’avérera nécessaire…  Elle pourrait contenir, par exemple : poudre de riz, crème trippante, serviettes, etc…

 

-MARKETING : On se rappelle qu’un symbole devra être créé (genre « cress ») afin d’inonder le territoire montréalais de L’INDICE…  Quelques tracts explicatifs pourront aussi être abandonnées ici et là à des endroits stratégiques (cafétérias, toilettes, bars, restaurants, etc…)  Ces places privilégiées pour la lecture deviendront par le fait-même d’excellents territoires pour une fois de plus propager le fameux ou la fameuse INDICE.

 

ADDITION DE PERSONNEL : L’addition de personnel est évident à un moment donné ou à un autre.  Des choristes, féminines de préférence, aux voix chaudes et motivées, prêtes à hurler à l’aide de leurs cordes vocales les émotions que l’Organisation et le peuple en général vivent.  L’apparence physique ne tiendra en aucun temps et en aucun moment aucune espèce de viarge d’importance, l’importance se glissant plus dans la faculté qu’aura la candidate de bien chanter-vibrer que de montrer son cul.  Le nombre de « deux » serait le plus souhaité pour le moment ; bien que le « un » et le « trois » aient aussi leur charme.

 

11 JANVIER 87

 

-MARKETING : Charles s’est fait glisser un mot au sujet de MUSIQUE-ACTION, organisme ayant mandat d’offrir les commodités (à différents groupes musicaux) nécessaires à la réalisation d’un « 45 tours ».  2 500$ et plus…  Super !...  À prime abord, la question est de savoir si les argents attribués proviennent de paliers fédéraux ou provinciaux.  Pour nous ; en consiste à ajouter une toune de plus au démo présentement en construction.  Le choix des pièces pour l’instant : « Homo-destruction », « Pick-up », « La marche des femmes »…  À ne pas oublier aussi, le démo pour Gilles-Vincent (Télé-Métropole) ; mais j’en reparle le 13.

 

13 JANVIER 87

 

Le démo a été remis à André par Lucie pour ensuite prendre la direction de Télé-Métropole.

 

14 JANVIER 87

 

-SHOW POSSIBLE : Martin m’a appelé pour me rappeler le concours ROCK-ENVOL.  C’est d’la marde, mais l’importance se glissant dans la diffusion, il sera quand même important d’y participer.  Quand les K-7 seront doublées, nous verrons à en expédier une en leur direction.  Même chose pour MUSIQUE-ACTION, finalement.

-COULISSE MOBILE : Nous en sommes aujourd’hui à la troisième étude concernant cette fameuse coulisse.  Le tout est de la rendre gracieuse, fonctionnelle et surtout très discrète.  Les idées fusent, il faut les définir, sélectionner les meilleures.  On élabore actuellement une maquette à partir de pailles (étude III).  Jean en a aussi fait une à partir de cartons (étude I).

 

21 JANVIER 87

 

SCÉNOGRAPHIE : Le panneau « hôpital » sera greffé à la coulisse.  Dépendamment des lieux où nous nous produirons, le panneau pourra s’installer autant du côté cour que jardin.  Les phylactères seront aussi dissimulés dans la coulisse.  Le piano-muet sera au préalable enregistré.  Les musiciens à leur passage porteront une identification précise-symbolique.  Le contremaître prendra l’allure du méchant à moustache (voir appendice II).  Un fil d’Ariane avec « clip » sera joint au costume-concierge par le contremaître avant sa sortie ; ainsi la récupération deviendra un jeu d’enfant.  Avant concierge II, « voix off » : « On demande le docteur Gojyva ; le docteur Gojyva, s’il vous plaît ».  (On aura enfilé le vêtement « concierge » en dessous de celui de « Théo ».  Théo, au cours de sa présentation, placera à quelque part le « sac vert » nécessaire au « vômi » (concierge 2).

 

EXTRAITS DE LA DESCRIPTION DU  SPECTACLE DE « L’ORGANISATION BOLDÔ » (1987)

 

 

Petit essai

Lorsque je n’en pourrai plus

Je m’en irai au bout du champ

Avec les herbes

Avec le vent

Et toi… Peut-être.

 

Sage 1

(La finale musicale de «Petit essai » se noie en fait dans l’intro de « Tu te dresses » qui demeure en fond, le temps que s’exprime le Sage.)

 

Scène unique : Le sage s’avance solennellement mais sans toutefois paraître hautain.  C’est plutôt un vent de conviction et de sérénité qui doit se dégager de lui.  Il s’avance du fond vers l’avant pour finalement s’immobiliser à l’avant-scène, parallèle au candélabre qui, lui, se trouve à une dizaine de pieds de l’Ermite.  Le « porte-cierge » tire du côté Jardin alors que le Sage, lui, est plutôt centré.  De sa main droite il craque une allumette qu’il tend majestueusement vers la chandelle et ce, sans ne jamais quitter la foule des yeux.  Son regard fixe obstinément le public en un point central, inexistant, profondément symbolique.  À distance, sans que la flamme ne s’y pose, la bougie s’allume comme par magie.  Le Sage ramène alors l’allumette auprès de sa bouche et l’éteint en la soufflant à l’aide d’un léger mistral.  Puis, droit et fier comme la Place Ville-Marie, concentré tel le monastère des Pères Trappistes, il s’adresse aux spectateurs :

Le Sage : Tu vois, la chandelle brûle toujours bien que l’allumette soit éteinte.  De même que l’allumette ait su transmettre sa force à la tige de cire, je te transmettrai la mienne.

(Le fond musical présent depuis le début fait maintenant partie intégrante de la chanson qui suit à l’instant et intitulée « Tu te dresses ».

 

***

 

La toune « Tu te dresses » terminée, le Sage se retire ; son cachet solennel en ayant toutefois pris un sale coup, étant donné l’intensité du texte et le caractère direct de son message.  L’essentiel, en fait, est qu’il sorte à ce stade-ci du show ; peu importe comment ; d’abord qu’il s’efface.  Il serait fortement conseillé aussi de réussir à faire disparaître le candélabre.

Suivront alors les pièces « Nouvelles du cœur » et « Pick-up ».  Celles-ci seront introduites par Boldô lui-même.  Nous nous retrouverons alors avec des présentations beaucoup plus brèves du genre :

 

Boldô : Bonsoir Montréal (ou la ville où l’on se trouve) !  Question de réapprendre à se scruter les yeux lorsqu’on discute, lorsqu’on parle, lorsqu’on jase tous les deux, voici la pièce intitulée « Nouvelles du cœur ».

 

Pour ce qui est de la chanson « Pick-up », son titre constitue en fait sa présentation.

 

***

 

Théo

 

(« Pick-up » se termine.  « Black-éclairage ».  Boldô enfile le costume de Théo, limité à un « trench » et un chapeau et se retrouve dans la poubelle.)

 

Scène unique : Nous voici maintenant arrivés à la présentation de la célèbre chanson intitulée « Alors tu reprends la route », introduite par le non moins célèbre Théo.  Le problème réside ici dans le fait de réussir à établir un lien logique de lieu et d’espace entre l’instant où Théo réside dans sa poubelle et celui où il en sort.  J’ai donc pensé à précéder sa sortie d’un bruit d’horlogerie (tic-tac de réveille-matin) qu’il sera facile de reproduire à l’aide d’un « sampling ».  Au moment de la sonnerie, le couvercle de la poubelle se soulève et notre héros émerge du contenant à déchets pour ensuite faire taire le cadran.  Il pourrait aussi exécuter à ce moment quelques gestes standards de réveil du genre « lavage de figure et de dents » au moyen d’accessoires usuels (débarbouillette, brosse à dents, peigne, etc…)  et utilisant sa bouteille de boisson pour les besoins liquides.  Enfin, un coup le tout terminé, Théo s’explique :

 

Théo : Il est dix heures (on indiquera l’heure exacte).  Je me réveille tous les jours à ce moment exact pour commémorer l’heure à laquelle j’ai vu mon ami Léon pour la dernière fois.  Léon v’nait m’voir tous les soirs pour prendre son petit boire ; mais Léon y’é mort.  Y é mort pis… y é mort.  À ta santé Léon !  Léon, c’tait mon meilleur tchomme.  Y m’disait toujours : « Théo » ; c’é moé ça, Théo ; y m’disait : « Théo, t’es drôle toé Théo.  T’é drôle parc’que quand t’é v’nu au monde t’avais déjà la face longue.  Ta mère était putain pis ton père, bon à rien.  T’as faitte ton enfance entre l’éveil et la transe, pis quand t’as eu douze ans tu as quitté tes parents ; t’as dit « bye bye m’man »… »  À ta santé, Léon !  Pis là on r’guiait.  On r’guiait parce que normalement c’é là qu’on commençait notre deuxième quarante onces.  Pis là, on parlait d’ma femme Simone.  Ben oui !...  J’ai été marié moé.  Mais ma femme m’a laissé quand j’ai décidé de déménager dans mon une pièce.  A disait que c’tait trop p’tit pour elle plus l’flô.  Mais en tout cas, quand Léon m’parlait d’elle y m’disait « Théo ; » c’é moé ça Théo : y m’disait « Théo ; t’es drôle toé Théo.  T’es drôle parc’que t’as connu Simone, elle pesait presque une tonne et avant ton mariage tu as joué dans son corsage.  Ça fait qu’t’as eu un bébé, t’étais pas marié, pis t’es resté fauché car Simone était ruinée ; eh oué…  Pis là on rguiait (riait).  On rguiait parc’que normalement c’é là qu’on commençait notre troisième quarante onces.  Pis là Léon m’regardait droite dans les quatre yeux pis y m’disait « Théo ; » c’é moé ça Théo ; y m’disait « Théo, t’es drôle toé Théo.  T’é drôle parc’que t’é marié d’puis trente ans pus tu t’aperçois maintenant qu’elle est grosse…  qu’elle est laide… pis c’é tout c’que tu possèdes.  Pis Simone là, ta femme Simone là, quand elle fait la vaisselle, ça dégoutte sous ses aisselles et le ruisseau le long du bras il tombe dans le repas ; voilà. »

Le temps que la foule rigole un peu, on enchaîne ensuite avec la toune proprement dite.  Théo sortira de la poubelle et chantera costumé.

 

***

 

À la fin d’ « Homo-destruction », le Sage se retire et la lampe branchée sur le 110 lève les pieds.  Le panneau réversible, lui, demeure en fond puisque la toune qui suit est « L’arrivée de la pensée » et qu’un tel symbole atomique colle parfaitement au texte de la chanson.  Celle-ci est toutefois chantée par Boldô.  Comme le panneau se trouvera encore en fond de scène, Boldô pourra apparaître tout près de celui-ci et même le palper de façon quelconque dès les premières strophes.

Lorsque s’estomperont les dernières notes de « L’arrivée de la pensée », nous enchainerons avec une ou deux nouvelles tounes.  Actuellement, une musique est déjà décidée et, de toute façon, c’est quand même trippant de se laisser un trou comme ça en cas où nos inspirations aient une folle envie de greffer des nouvelles choses à ce show qui s’avère déjà passablement fourni.

En tout cas, on verra bien ; toujours en est-il que tout cela nous amènera alors au Concierge 3, précédant lui-même le chef-d’œuvre intitulé « L’infirme ».

 

Concierge 3

 

Scène unique : Le Concierge 3 demeure encore très vague.  Son balai symbolique l’accompagnera sûrement à son entrée sur scène mais j’ignore encore ce qu’il en fera.  Il peut le crisser au bout de ses bras, le réduire à un amas de cendres, le casser en mille miettes, j’ché pas.  La mise en scène sera ici très importante, étant donné que l’on s’enligne à partir de ce moment dans la phase la plus explosive du show.  En tout cas, peu importe de quelle manière, il finira par aboutir devant son micro pour y réciter le texte d’introduction à la pièce « L’infirme ».

 

N.B. : Tout au long de la déclaration du concierge, l’éclairage prendra une importance cruciale.  Dans un genre de « fade out » très lent, la lumière devra progressivement s’estomper afin qu’il ne reste qu’un cercle de lumière entourant le visage du concierge après qu’il eût dit : « …Voir régner la souffrance dans la plus pure impuissance. »  On appuiera ainsi toute la vision dramatique qu’inspire le texte.  Pour le reste du texte qu’aura à débiter le concierge, il serait peut-être trippant d’embarquer un effet « reverb ».  Enfin, pour la phrase finale « …comme le destin ne m’a pas fait écrivain mais plutôt médecin… », on reviendra à un son normal.

 

***

 

Bon.  Bon bon bon bon bon.  Alors la pièce « L’infirme » est maintenant chose du passé et sa finale musicale a laissé amplement le temps à Boldô (concierge) de retourner en coulisse et d’y enfiler le costume de Satan en dessous de la tunique qui servira de vêtement à Jésus.  Évidemment, le duo sacré que représentent les pièces « Dimanche Noir » et « Genèse Rock DCLXVI » demande au point « mise en scène », « éclairage » et « effets spéciaux » un délire total mais contrôlé.  Il faudra que le point de vue céleste de l’une contraste parfaitement avec celui infernal de l’autre.  Nous devrons manipuler les émotions en parfaite harmonie avec les frissons.  Si possible, nous graverons dans la rétine du spectateur un souvenir démoniaco-chrétien que seule la mort pourra effacer.  Je laisse ici un blanc volontaire pour les rapports de mise en scène.  Il faudra absolument se pencher sur cette étape du show d’une façon intense et réfléchie, afin de la rendre comme je l’ai toujours rêvée, c’est-à-dire majestueuse et sinistre.  Comme nous en avions aussi discuté au cours de nos dernières rencontres, l’apport des musiciens sera ici capital.  Premièrement, pour ne pas qu’ils aient l’air de deux hosties de bozos pendant que Jésus et Satan exécutent leur délire respectif et, deuxièmement, parce que bien employé, leur soutien ne pourra qu’enrober la prestation déjà hallucinante des principaux antagonistes.  Ces deux tounes auront évidemment chacune leur présentation respective.  Malgré que j’aie déjà une bonne idée sur la forme qu’elles prendront, je préfère attendre encore un peu avant d’y apposer une notion définitive ; le temps que l’on définisse de façon finale la mise en scène, disons.  Viarge !...  Rien qu’à y penser, j’en ai déjà la chair de poule.

Le moment où Satan énumère ses moyens pour garder l’enfer allumé (le sexe, l’alcool, la drogue et le rock), une folie rock’n’rollienne décolle après qu’il eut mentionné le dernier.  À un moment donné, au travers le délire musical, une sonnerie de téléphone se fera entendre (facilement réalisable à l’aide d’un « sampling »).  C’est Martin qui répondra puisque le téléphone se trouvera près de lui.  « C’est pour toé Boldô », hurlera-t-il, visiblement consterné.  Bien que je porterai encore mon costume de Satan et que je me trouverai probablement à ce moment en pleine catalepsie, j’irai répondre tout en enlevant mon masque de Satan.  J’entamerai alors un dialogue téléphonique avec ma blonde ; dialogue qui sera dans le genre « ben oui mon bébé, j’chus en plein show ».  J’y dépeindrai toutes les difficultés qu’entraîne la relation de couple au travers la vie de show.  On sera léger mais efficace.  Enfin, on se retrouvera en bout de compte avec un raccrochage profond de la part de mon interlocutrice et je resterai planté là, pantois, passablement dépassé par les événements.  C’est alors que j’entamerai « Désillusion ».  Elle sera récitée (ou chantée) avec fond musical.  Ce texte servira en fait de préambule à « Prends deux minutes », pièce avec laquelle je survole avec prudence les réalités de la peine d’amour.  Je n’sais pas encore si je prendrai la peine de réenfiler le costume « Boldô » ou si je demeurerai à moitié habillé en Satan.  Les prochaines rencontres le préciseront.  En tout cas, cette phase du spectacle s’avérera importante puisqu’elle côtoiera l’absurde au travers des situations réelles et combien pénibles à surmonter quand on a à les affronter.  Donc, « Désillusion » et « Prends deux minutes » s’enchaîneront.

 

***

 

Nous atteindrons le paroxysme recherché tout au long du show si nous réussissons à pouvoir nous retirer de la scène pendant que la foule chante « et ça fait mal car quand le cœur bat c’est dur de l’arrêter ».  Ce s’rait vraiment total ; venir saluer le public pendant qu’il s’époumone à chanter cette petite phrase pourtant si significative à mes yeux.  Et comme ultime rappel, on viendrait leur shooter « La musique vient du ciel ».  Cette toune a connu un essor phénoménal.  C’est un hymne au style progressif et elle réussit quand même à conserver cette petite rengaine accrocheuse qui s’éternise dans votre tête même si le show est terminé depuis quelques heures.  Pourtant, je m’entête encore à affirmer qu’elle pourrait trouver sa place au début du spectacle ; mais mes musiciens n’y croient pas encore.  Bof !  J’m’en crisse-tu!  D’abord qu’on la joue, j’me fous du reste.

 

Ça fait qu’en gros, voilà le Boldo Show 87.  Je répète une fois de plus que rien n’est coulé dans l’ciment et que tout est sujet à changement.  Pour ma part, je réaffirme ma conviction que nous tenons, avec ce bref résumé que je t’expédie, une possibilité de nous hissé enfin dans le monde du showbiz francophone.  Si nous prenons le temps de bien doser les effets, d’organiser les personnages dans une cohérence complète et de donner à chaque membre de L’Organisation des tâches précises et rigides, il ne pourra que s’en découler un succès phénoménal, à la hauteur de nos aspirations.

 

Aléa jacta est.

Le sort en est jeté.

 

Jacques

SANS TITRE (FIN MAI 1987)

 

Salut Mario.

Comme convenu, je t’expédie un résumé complet de tout ce qui a été pensé, dit et écrit au sujet du Boldo Show 1987.  J’ai tenté d’être le plus précis possible tout en conservant une place de choix à toutes les idées futures qui viendront sous peu compléter ce manuscrit tapé à la machine (ça fait tellement plus professionnel !)  j’y ai mis toute mon âme et mon espoir.  J’ose espérer que pendant l’attente, tu as toi aussi mijoté dans ta cervelle mille et une possibilités d’augmenter l’efficacité future de notre production.

De notre côté montréalais, l’équipe définitive se résume aux quatre comparses que tu as rencontrés lors de ta dernière visite ; c’est-à-dire Martin, Charles, Jean et moi.  Le travail musical se poursuit et la concrétisation du chalet pour l’été redouble notre conviction de se voir fin prêts pour la fin de l’été.

Évidemment, tout au long de ta lecture, garde l’idée que rien n’est encore définitif et que tout est par le fait même sujet à amélioration.  J’ai débuté mes cours de chant (cesse de te tordre) et c’est avec surprise que je m’aperçois des progrès.  Je ne serai probablement jamais un Céline Dion mais j’m’en crisse-tu !  Le travail s’effectue surtout au niveau de la respiration et des exercices à faire pour obtenir un tonus soutenu et propulsant.

Ça fait que j’te souhaite une bonne lecture, une bonne audition et rappelle-toi que tou va en s’améliorant constamment.

Alléluïa.

 

 

 

SANS TITRE (OCTOBRE 1987)

Salut Louis.

 

Dans un premier temps, voici le dossier résumant nos travaux qui s’échelonnèrent de janvier à juillet 1987.  Depuis juillet, d’innombrables modifications sont venues améliorer le produit « Boldô ».  Mais je te conseille fortement de bien lire ledit dossier.  Il te permettra probablement à toi aussi de deviner les erreurs vers lesquelles nous nous glissions sans trop le savoir.  Avec le recul, avec aussi le temps et la mise en pratique, nous avons bien vite compris les incongruités qui baignaient notre fantastique projet.

On peut dire qu’en ces jours d’octobre 87, nous tenons presque la formule gagnante ; celle dont nous avons rêvé si longtemps : l’alliance avec un minimum de compromis du message et de son médium, du texte et du personnage qui le dit, du théâtre et de la musik.  Ce seront là évidemment des premiers balbutiements bien modestes, étant donné le budget pratiquement inexistant dont nous disposons, mais le cœur et la conviction aidant, nous réussirons.

 

Du moins, je l’espère, ‘stie !

 

 

DESCRIPTION DES PERSONNAGES DU SPECTACLE « L’ORGANISATION BOLDÔ »

(DÉCEMBRE 1987)

 

 

Le sage : L’ermite, l’analytique, ni bon ni mauvais et encore moins neutre.  La propreté écologique, la sagesse et l’expérience présentées au travers un crâne dégarni et un amoncellement de rides.

 

Le « beacher » : Aussi bref que le temps qu’il prend à se transformer.  Un flash-fantasme démontrant l’instabilité de Boldô.

 

La mère : C’est la mère du concierge et non celle de Boldô.  Volumineuse et très ronde, ayant des caractéristiques physiques directement rattachés à celles de son fils, le concierge.

 

L’infirmier : À la solde du psychiatre.

 

Jésus : Un Jésus un tantinet découragé de constater à quel point son message initial a été mal compris, beaucoup plus tourné vers la spiritualité qu’envers le matérialisme.

 

Satan : Un bon diable.  Sympathique et vicieux à souhait.  Très extraverti, il apparaît en fait pour signifier son indéniable supériorité sur les forces du bien dans le monde actuel.

 

SANS TITRE (1987)

 

Enfin…  Un mot sur Rasmoüzen…  Nouveau frère…  Sincérité absolue, conviction totale, un solide. 

Un essentiel.

Les masques roulent fort.

Mon empreinte de visage est maintenant devenue tête complète…  Un Boldô tout neuf et qui ne parle jamais…  C’est tordant.

Le latex coule à flots.

Les idées fusent 4 jours par semaine.  À nos deux têtes, ça sort en sacramentos !  Du « brainstorming » efficace.

Demain, on va voir « Vis ta vinaigrette » !  Histoire de voir ; de vérifier.

J’ai hâte d’échanger avec toi.

Jean aussi.

On t’attend.

À tantôt.

Jacques

 

 

 

 

SANS TITRE (1987-88-89 ?)

 

            Le principe, tout en étant relativement simple, demeure excessivement complexe dès que vient le temps de l’appliquer.  Je veux en fait camper le prochain show au travers d’un objet usuel connu de tous et prétexte à mille et une inspirations nécessaires pour l’écriture de textes de tounes.

            Je conserve l’idée des chansons pour le prochain show, bien que, semble-t-il, mes interventions théâtralisées devront être plus nombreuses que tous les précédents.  Idéalement, le monologue sera le plus utile, mais devant la nécessité, le dialogue naîtra.

            Je décèle déjà d’innombrables trucages.  J’aimerais beaucoup projeter l’évidence de la télékinésie.  Un contrôle à distance indiscutable, magique, fascinant pour le spectateur.

            Un peu comme dans « Broue », je crois essentiel de placer l’auditeur devant un objet familier, ou encore une situation qu’il vit quotidiennement.  C’est comme du charme subliminal.  Une mise en confiance immédiate due au fait que le spectateur se retrouve en terrain connu, presque comme s’il assistait au spectacle à partir non pas d’un siège de salle, mais de son fauteuil préféré auprès de lui avec ses meilleurs amis et avec ses pantoufles dans les pieds.

            Par l’utilisation de l’ambiance familière, il doit être possible de créer cette illusion.

            En tout cas,  peu importe mon objet de choix, ce sera un lit.  Un gros lit.  Un lit magique bourré de trucages, un fil d’Ariane inébranlable, solide, fascinant. Cette espèce d’objet qui forme le spectateur.  Qui crée en lui un instant de repos dès le début, étant donné qu’il ne peut vraiment pas comprendre pourquoi un objet si usuel se retrouve en plein cœur d’une scène alors qu’il ne s’y attendait pas du tout.

LIT-STOIRE

LIT-BERTÉ

LIT-D’ENTITÉ

SANS TITRE (1987-88-89 ?)

 

            Ce n’était pas l’odeur ni encore moins l’aspect épais de l’atmosphère qui inspirait la désolation.  Mais plutôt l’ombre permanente des bâtiments avoisinants masqués à l’occasion par des tourbillons de détritus que soulevait le vent. 

Vu du site, la drôle d’impression rectiligne infinie d’une chose morne qui ne meurt jamais et qui ne veut pas mourir.  

            Vu du sol, on se fout de la foule, du nombre de gens qui y circulent.  C’est le tintamarre habituel, la cochonnerie permanente, la gang qui s’avance, qui recule, qui avance à nouveau et qui ne comprend absolument pas le geste qu’elle vient de poser.  Aucune végétation, sinon quelques poteaux électriques, les trottoirs ambulants,  décalcifiés en harmonie avec les crevasses de l’asphalte.

 

 

SANS TITRE (1987-88-89 ?)

Il pleuvait.  Il pleuvait comme il doit toujours pleuvoir à un moment donné dans ce genre d’histoire.  Et c’est là qu’il pleuvait.  Il pleuvait et Jusme était à laver cette satanée vaisselle qui lui rapportait les unités monétaires nécessaires à sa survie.  Son père lui avait déjà dit qu’il trouvait étrange que son fils ait choisi une manière aussi pitoyable de gagner sa vie.  Jusme se souvenait encore de sa réponse : « J’ai gagné ma vie à ma naissance lorsque je fus l’élu qui croisa l’ovule au travers mes millions de semblables.  Le fait de laver la vaisselle me fait perdre ma vie !  C’n’est pas un moyen de la gagner mais bien de la perdre !  Tu comprends !?! »  Il se rappelait aussi les tonnes de « c’est pas c’que j’ai voulu dire » que son père avait débités après la cinglante affirmation.  Tout à coup au travers le tintamarre qui jaillit de la vaisselle, et le bruit sourd persistant du restaurant, une odeur de sueur âcre et dégoûtante vint baigner l’atmosphère environnant.  Jusme la provoqua tout de suite, étant donné qu’il venait à peine de ramener en marche-arrière une large goutte transparente qui s’apprêtait à atteindre sa lèvre.  Une voix rauque proche du bovidé se fit entendre.  « Lave comme du monde, minable !  On peut retracer les dix derniers menus sur chaque assiette ! »  Une main glauque et graisseuse s’abattit au même moment sur son épaule.  Un resserrement subtil mais présent des phalanges prouvèrent (attestèrent) son arrivée.  C’était le petiot de la place.  Un ignare illettré dont la musculature cahoteuse mais évident formait l’ensemble de son corps et de son appareil cervical.  Jusme ne fit ni un ni deux et lui balança un coup de chaudron à fonte en plein visage.  Un coup de genou en plein estomac appuya la phase et Jusme termina leur court entretien en lui disant :        

« J’en ai marre ; j’m’en vais. »

De la ruelle, il était splendide de voir arriver Jusme au travers du moustiquaire de la porte, en furie.  Il balança la porte de sa main gauche tandis que son bras droit, bien levé, était paré à s’enfiler dans la manche de sa veste.  Trois des foutues marches du court escalier ne connurent jamais les derniers pas de Jusme.  Il entra dans la cour en plein air d’aller et se mit instinctivement à marcher, ne pensant qu’à une chose : son rendez-vous avec Vincent.

(illisible)…Son ami lui parlait depuis l’enfance.  

 

 

TEXTE DU SPECTACLE « BOLDÔ » (1987-88-89 ?)

 

Le spectacle que présente Boldô fut développé à partir d’un concept triangulaire (texte-musique-image), tenant compte des thèmes qui y sont abordés.

L’écriture y détient en effet une place prédominante et devient souvent prétexte au déploiement évoluant au sein de multiples situations.

La musique, de son côté, se veut actuelle, rock, teintée d’accents jazz et progressifs.

Finalement, l’aspect visuel fut pensé en fonction d’atteindre un maximum d’efficacité à partir d’un minimum d’espace de jeu, ceci dans le but de pouvoir rejoindre le maximum de gens, indépendamment des dimensions de scène.

 

 

 

SANS TITRE (1990)

 

Il n’avait pas l’habitude des larges solitudes ; celles où la dimension des sofas semble continentale…  Ce n’est pas qu’il se plaisait à le faire, mais souvent on le retrouvait en quasi-méditation, en train de fixer obstinément le plafond…  Il semblait y faire de sombres voyages, sans destination ni bagages, et le froncement prononcé de ses sourcils indiquait que l’allégresse, la joie et l’immense bonheur des voyageurs s’en trouvaient fort loin.  Qu’y faisait-il ?  Dans quels étranges méandres évoluaient ses futiles directions ?  On remarquait, à le voir respirer, que son pouls devait battre démesurément mais sans exagération.  Quelques gouttes de sueur perlaient sur ses pariétaux mais la chaleur accablante de l’endroit devait suffire à les produire.

 

Élaborer les symptômes…

Dégager les odeurs.

Y aller de toutes les couleurs.

 

 

 

TEXTE DU PROGRAMME DU SPECTACLE « L’ORGANISATION BOLDÔ » (1992)

 

 

Comment vous expliquer le groupe BOLDÔ ?...  En vous disant qu’en juillet 1990, Frank, Jeff et Boldô se sont réunis afin d’élaborer les structures musicales de base… ?  En vous disant qu’en janvier 1991, Carole et Claude se sont joints à l’équipe pour appuyer les sections vocales et rythmiques ?...  En vous disant que de nombreux collaborateurs ont offert leur compétence en vue d’améliorer le produit ?...  Non.

Vous expliquer le groupe BOLDÔ, c’est vous dire que nous aimons ce que nous faisons, que nous espérons que notre famille ne cessera de s’agrandir et que…

 

 

LA RELÈVE (1995)

 

C’était fascinant de l’observer s’intégrer au décor.  Elle coulait lentement dans les conversations et s’enroulait aux événements comme une chenille s’encoconne à sa feuille.  Tout bonnement, à l’aide d’un naturel désarmant, elle étalait ses charmes un peu partout dans l’espace : un sourire sur un sofa, un clignement étudié des paupières près d’un miroir, un ton de voix intrigant adressé à ces gens sur le divan.  C’était une fresque sur un mortier encore frais ; créature fière, consciente de l’être et prête à passer son opinion, quitte à pourfendre quelques normes établies.

Bill, l’hôte de la soirée, m’avait précisé ses faits d’armes : récipiendaire à trois reprises consécutives du « Félix » de Productrice de spectacle de l’année, Présidente Directrice Générale de la plus grosse boîte de gérance d’artistes à Montréal et élue Miss Monde Nue en 1986.  Il ajouta qu’il lui avait fait entendre mes « démos » et qu’elle avait appréciés tout en conservant la distance obligatoire qu’exige son titre face à l’artiste.  J’estime qu’elle devait maintenant se trouver à trois mètres de moi.  Elle discutait avec ses derniers poulains, les C.C., qui venaient d’écouler plus d’un million de copies de leur dernier album intitulé « La danse des huards ».  Je demandai à Bill pourquoi ils gesticulaient autant sans ne jamais mot dire et il m’informa qu’ils se parlaient entre eux au moyen du langage des signes

-Les C.C. sont sourds et muets ?... questionnai-je, ahuri.  Bill éclata de rire face à ma surprise et m’entraîna vers le bar tout en m’éloignant d’elle.

-Écoute vieux, dit-il, elle aimerait te rencontrer.

-T’es sérieux ?  Elle a vraiment apprécié ce qu’elle a écouté ?

-J’t’ai jamais dit qu’elle avait écouté ; entendu tout au plus.  Et encore.

-Mais alors ?...  Qu’est-ce qui l’intéresse ?...  Mes vingt-deux années de métier non-rémunérées ?  L’élaboration monumentale de mes prestations scéniques ?  La subtilité de mes arrangements ?

-Ta musique et tes textes, tant qu’à y être !  Bill devint presque mauve tellement il riait.  Il réussit finalement à reprendre son souffle. – Écoute vieux, j’te la présente et le reste viendra tout seul.  Viens-t-en.

Bill éclusa deux triples whiskys et m’entraîna vers elle tout en m’éloignant du bar.  En un éclair tout me revint à l’esprit.  Les milliers d’heures de pratique dans les sous-sols humides et les garages graisseux.  Les innombrables défaites et refus comme participant à différents concours.  Les centaines de shows et de « démos » noyés dans l’indifférence des producteurs.  J’en r’venais pas ; tant d’efforts à forger mon produit allaient peut-être porter fruit.  Enfin la patience et la persévérance dresseraient leur siège et prouveraient que la ténacité est seule maître du destin que l’on se fixe.

Nous aboutîmes près d’une embrasure où se dressait l’architecture de sa chevelure.   Les rayons de lune qui perçaient la fenêtre agrémentaient son blond-platine délavé naturel.  Elle commentait à des convives la pertinence d’avoir placé près d’une armure bon marché une plante au feuillage large comme des épaules bien bâties.  Lorsque le son s’évanouit, Bill saisit sa chance.

« Sheila, voici le copain dont je t’ai parlé. »

Elle m’envisagea, puis elle évacua son entourage.  Elle n’eut même pas à prononcer mot.  Tous s’éparpillèrent dans l’ait ambiant, sachant très bien que lorsque Sheila envisage, on s’éclipse ; question de lui donner l’horizon nécessaire à l’évaluation d’un nouveau produit.  Mon cœur battait à tout rompre.  Des gouttes de sueur perlaient à mon front et mon intestin grêle grelotait.  J’espérais qu’elle ne m’offre pas de poignée de main de peur de lui refiler la moitié du St-Laurent dans la paume.  J’effectuai un cent quatre-vingts degrés de la tête, question de trouver Bill, mais même celui-ci avait disparu.  J’étais seul avec elle.  Seul avec ce contact qui allait peut-être dessiner mon destin.

Elle me fixait et je la regardais et elle me scrutait.  Finalement je cédai et baissai les yeux à la hauteur de ses hanches.  Elle portait des bas-jarretelles.  Je le remarquai, remarquant un relief sous sa jupe soyeuse et tellement bien ajustée.  J’allais descendre le long de ses longues jambes quand un son me fit sursauter ; c’était sa voix.

-Tourne-toi.

 

-Hein ? dis-je en la regardant de nouveau.

 

-Tourne-toi que je puisse voir ce que tu as l’air.

 

-Je n’chante jamais de dos.

 

-Très bien, reste comme tu es.

 

Elle se mit à tourner lentement autour de moi, rapprochant lentement son entité de la mienne.  De ses seins sous sa blouse de satin émergeaient maintenant de savoureux reliefs et ses jambes intrigantes épousaient de plus en plus les miennes.  C’était vraiment une superbe femme.  Quasiment la preuve de l’existence de Dieu pour un athée qui ne pourrait qu’admettre que jamais le hasard n’aurait pu façonner une telle créature.  Et comme toute belle femme qui sait qu’elle est une belle femme et qui ne se sert que de cela dans la vie, elle commençait à m’faire chier royalement.  Sa carcasse de putasse avait beau faire brandir la plus molle des appendices tibétaines, je n’avais pas du tout l’envie de jouer à Ovila et Émilie avec elle.

« Écoute, dit-elle, je n’sais même pas ton nom et il ne m’intéresse pas plus que tes chansons.  Mais tu sais, si tu veux que je m’occupe de toi, tu dois tout d’abord t’occuper de moi.  Après ça, on verra. »

Je restai un instant sur place, de glace, puis me réchauffai un peu et lui répondis.

« Écoute Sheila, t’es belle ; t’es vraiment belle.  Et je n’voudrais surtout pas qu’un refus à tes avances puisse reculer mon acceptation dans votre écurie.  Mais je n’suis pas ce genre d’étalon.  J’me suis toujours demandé s’il fallait faire quelque chose pour être quelqu’un ou être quelqu’un pour faire quelque chose.  Mais je n’f’rai pas la chose qye tu me demandes justement parce que je suis quelqu’un.  Grâce à toi, je résous enfin une autre des grandes questions existentielles qui me grugeaient depuis si longtemps.  Merci Sheila ; merci. »

Je déposai un brin d’humidité sur sa joue gauche et j’avoue qu’en touchant ses épaules, je me sentis drôle ; presque fier de moi.

Elle ne bougea pas.  Elle ne dit même pas un mot.  Je la fixai et elle me regarda et je la scrutai.  Finalement elle baissa les yeux à la hauteur de mes genoux.  Elle put alors remarquer qu’ils se retournaient et que lentement ils s’éloignaient au son cadencé du pas du soldat qui vient de vaincre.  Elle se mit sans doute à chercher Bill.  Je crois qu’elle avait besoin que quelqu’un la relève.

Boldô   

 

 

 

TEXTE DANS LE PROGRAMME DU SPECTACLE DE BOLDÔ ET MORO (1995)

 

Boldô/Moro.  Cousins.  Soixante-douze ans de vécu et six enfants sevrés.

Moro accorde sa première guitare à l’aube des années 80 dans les cafés.  Il y interprète du « Beatles » et quelques chansonniers connus.

Boldô vient du théâtre.  Il monte ses propres créations durant sept ans à l’aide du Théâtre Jirondanjoncelle, puis en 80, c’est le virage.  En bout de courbe, la musique apparaît et durant douze ans, avec la complicité de divers collaborateurs, il exécute ses compositions aux quatre coins de la province avec des arrêts, entre autres, au Festival de la chanson de Granby et à l’Empire des futures stars.

Août 1994, fusion Boldô/Moro.  Le travail assidu de composition débute.  En 95, ils accompagnent le chansonnier Jacques Antonin qui accepte de leur laisser interpréter quelques-unes de leurs compositions à travers son tour de chant.  Puis fin 95, ils prennent leur propre envol ; d’éparses apparitions montréalaises qui confirment que leur répertoire atteint la cible.  Des chansons possédant une personnalité solide, tantôt ballade, tantôt rock, parfois progressive ou folk, toujours habillées de textes et de mélancolies adaptés aux climats dont ils s’inspirent pour exprimer les scènes de la vie ou pour mettre en scène leur propre vie.

 

 

LE CADEAU (FÉVRIER 1996)

 

L’odeur qui régnait dans la pièce était remarquable bien qu’identifiable pour le non-initié.  Un mélange de seuls de mer et de parfums raffinés ; extrêmement dispendieux.  Mais la narine experte décelait sans peine les effluves de la sueur et de la luxure.  Elle lui liait les poignets à l’aide de sa propre brassière ; l’élasticité des matériaux lui permettant une emprise ferme et précise, si bien qu’elle s’amusait à s’imaginer faire une queue de cheval, ou plutôt un chignon, vu les doigts recroquevillés.  C’était une femme magistrale ; monumentale.  Sa dernière réalisation majeure datait de quelques heures et c’est ce qu’elle célébrait dans sa suite gouvernementale en compagnie de son secrétaire de vingt ans son cadet, si frais, si soumis, si brandi.

Il possédait un engin majuscule qui, une fois introduit, devait sûrement former une bosse énorme sur le péritoine viscéral de sa compagne.  Comme elle aimait l’insérer, le serrer à l’aide de ses muscles minuscules et le sentir pilonner son sacrum.  Elle le laissait lui défoncer le pont-levis et lorsque la porte de son château de rêves cédait, des milliers de soldats pénétraient l’enceinte pour aller se buter imbécilement contre son stérilet.  Et elle souriait.  D’un sourire de bouche entrouverte, aux lèvres humides et scintillantes, dégoulinantes de fins filets de bave tout autour du péristome.  Un délice fantasmagorique « symbiosant » l’extase du plaisir sexuel et la joie du devoir accompli.

Elle avait eu besoin de déposer dix-sept projets de loi nécessitant tout autant de votes et d’interminables périodes de discussions.  Bien qu’au pouvoir pour un deuxième mandat consécutif, son parti ne possédait plus la majorité absolue, si pratique lorsqu’on matraque l’électeur.  Elle dut donc se résoudre à la torture de la procédure, maraudant dans les méandres des antichambres, soudoyant adroitement la gauche, rassurant sans cesse la masse électorale.  Son projet n’avait pas plu au début.  Étant trop génial, il avait placé l’opposition en fâcheuse opposition.  Bien qu’elle reconnût l’impeccabilité d’une telle idée, elle dut s’appliquer à n’afficher que ses mauvais côtés ; affiches qui disparurent à l’usure du temps.  C’était un projet admirable ; grandiose ; génial ; magnifiquement intelligent.  Elle l’avait pensé ; pesé ; analysé ; décortiqué seule ou avec ses plus fiables confidents.  C’est son aspect sentimental qui l’avait fait naître, son côté économique n’ayant été considéré qu’au dépôt du seizième projet de loi.  Elle l’avait baptisé « Service Médical Obligatoire ».  Une forme de conscription digne de l’ère du verseau destinée à enrôler les jeunes dans les hôpitaux et centres d’accueil dans l’unique but de leur faire apprécier leur précieuse santé.  Trois mois maximum en soins généraux et trois autres, minimum, avec les aînés où ils pourraient acquérir les valeurs fondamentales de la vie, les conseils essentiels pour s’acheminer avec force et conviction vers la sagesse de la vieillesse et la joie incommensurable de voir sourire la nuit de la vie lorsqu’elle gagne une partie de dames ou simplement lorsqu’elle confie ses plus beaux secrets de pêche ou de tricot.  La rémunération proposée égalerait largement celle de l’aide sociale actuelle, mais contrairement à l’oisiveté suggérée par l’ancien système, le S.M.O. déploierait chez l’enrôlé un bien-être social et humanitaire plus que satisfaisant.  Les hôpitaux et centres d’accueil deviendraient ainsi de véritables ruches d’entraide et d’envie de vivre, chacun s’occupant à encourager, à appuyer, à distraire, a écouter, à apprendre.

Elle était maintenant accroupie devant le téléviseur, occupée à visionner le bulletin spécial d’information entièrement consacré au S.M.O..  Elle ressentait une satisfaction similaire (sinon supérieure) à celle qu’elle venait d’avoir au lit avec son joujou.  Si ce dernier ne s’était pas manifesté, elle aurait probablement atteint un nouvel orgasme.  Il lui demanda doucement, comme pour ne pas déranger, de lui délier les poignets, histoire qu’ils quittent cette teinte bleutée due au manque de circulation sanguine.  Elle acquiesça mais ne s’exécuta pas tout de suite, fascinée qu’elle était encore par le reportage.  Cela lui permit de lui admirer les fesses.  Comme une mappemonde, parfaitement symétriques, elles exposaient à son visage la longue route qu’avait dû parcourir l’évolution humaine pour atteindre un tel niveau de perfection.  En leur centre explosait une fissure pure comme du cristal bordé de reliefs langoureux et tellement invitants.  Elle augmenta le volume de la télévision et le rejoignit.  Écartant ses deux jambes, elle s’assit sur le ventre laissant la fissure se frotter sur son froc à l’occasion.  C’est elle qui exigeait que son partenaire conserve son pantalon pendant l’acte, ne laissant que la baguette brandir de la braguette, comme un orme jaillissant de l’homme.  Elle lança sa brassière au bout de ses bras et la regardant virevolter dans l’air, elle pensa à tous ces saints sensés peupler l’univers.  Une idée comme ça ; comme elle en avait parfois.  Elle remarqua quelques stries aux poignets de son jouet.  La teinte bleutée fuyait rapidement, laissant le rosé standard de la peau reprendre sa place.  Elle augmentait la cadence de la friction au rythme où l’animateur et ses différents invités complimentaient le projet qui deviendrait sous peu réalité.  Intimement liés, ses comportements sexuels et professionnels se malaxaient.  Ils étaient en cette soirée admirés, contemplés, approuvés, félicités.  La télé déversait l’approbation du peuple et le secrétaire savourait enfin son corps de façon tactile.  Il l’examinait se dresser au-dessus de lui ; stature de star…  Extatique.

Elle l’envisagea puis l’ « envagina » de nouveau ; profondément.  Comme un cadeau.  Un cadeau qu’elle faisait au peuple en lui offrant le S.M.O. ; un cadeau que lui faisait le peuple en approuvant l’intelligence d’une telle initiative.  Dans quelques mois, pensa-t-elle, des milliers de sourires édentés jailliront de partout au pays, réalisant le plaisir de se sentir écoutés, réconfortés, appréciés.  Et autant de jeunes s’aligneront dorénavant vers le troisième âge en sachant qu’à leur tour, un jour, on prendra humainement soin d’eux.  L’aube de la vie n’aura de répit que lorsqu’elle saura que son crépuscule peut désormais s’endormir en paix.

Boldô

 

 

TEXTE DANS LE PROGRAMME DU SPECTACLE DE BOLDÔ ET MORO          

(27 AVRIL 1996)

 

 

Il y a des choses qui se forment, énormes, et qui prennent tout notre temps.  On y investit l’énergie et le charme qu’elles nous procurent s’allonge dans nos illusions.  On monte un show…

Gaby garroche les première notes ; on sanglote…  « En dedans » vient de naître et ouvre les fenêtres à de nouvelles idées.  On monte un show…

Boldô additionne ses mots (maux) aux univers musicaux…  Une audition, une collaboration avec Jacques Antonin, d’autres créations…  On monte un show, c’est certain…

Puis les efforts sont fournis, les musiques se chantent, les paroles se jouent et l’envie de vérifier notre produit nous pousse à louer une salle et à vous y inviter…

On fait notre show, c’est ce soir, merci d’être là ! 

 

 

 

  

SANS TITRE (MARS 97)

 

Cette fois-ci,… pas de température ; qu’un climat.  Climat de complicité extrême, climat d’assurance, de sentiment d’appui, de certitude que la complice accomplisse ce qu’elle a à réaliser…  Un ciel sans nuage, quoi !  Baigné de temps à autre d’une légère brise rafraîchissante, habité d’oiseaux aux larges plumages, porteurs de bonnes nouvelles et auréolé par les scintillants éclats lumineux d’un soleil chaud et vitaminique…

Kevin se remettait de la grande stérilisation…  Ses  « schilles » ne lui apparaissaient plus comme deux vieux bulbes de tulipe fripés, mais revêtaient plutôt l’aspect de gousses d’ail fraîches, prêtes à la consommation.  Il n’anticipait plus le jour, mais l’heure à laquelle sa Debbie se mettrait enfin à table pour déguster sa béchamel.  Ce qui le stressait toutefois, c’est qu’il ignorait la texture qu’adopterait sa sauce…  Serait-elle trop claire, pas assez épaisse, ou gluante et compacte comme un plâtre trop peu liquéfié ?...  Proposerait-elle des odeurs dignes d’un hareng oublié dans une botte de combat d’un soldat de César ou giclerait-elle sans émanation ?  Et sa couleur, hein ?  Sa couleur ?  À quoi ressemblerait-elle sa couleur ?  (Debbie aimait tant les belles couleurs…)  Kevin regrettait son geste…  Pourquoi n’était-il pas resté comme avant, un bon vieux procréateur standard avec des spermatozoïdes solides, voraces, agressifs ?  Qu’avait-il fait, sti ?

On distinguait à peine la tête de Debbie dans son bain tellement la mousse était volumineuse et compacte.  Les quelques mèches de cheveux qui flottaient à la surface de la nappe de bulles étaient d’un blond si châtain qu’elles n’étaient pas blondes, mais plutôt châtaines (ayoye)…

Comme il aimait la couleur de ces cheveux !  Curieusement, à leur première rencontre, c’est d’eux qu’il était tombé amoureux (il l’avait connue de dos) et depuis ce temps, c’est quotidiennement qu’il les remerciait d’avoir été si invitants, car lui sait s’il n’avait voulu connaître la face, un coup rebuté par la tignasse… 

 

TEXTE DANS LE PROGRAMME DE LA COMÉDIE MUSICALE                     

« LE RÊVEUR ÉVEILLÉ » (1998)

 

Je me suis éveillé le 29 mars 1957 et depuis, je rêve.  Et tout au long de ce songe que dure la vie, j’ai rencontré des rêveurs éveillés.  Les plus récents sont ceux qui vous offrent le spectacle de ce soir, qu’ils soient sur scène ou en coulisses.  Observez-les précieusement, souvent ils nous révèlent ce que l’on est vraiment…

 

…Car ces rêveurs éveillés se cachent partout, dans les yeux d’un voisin, et même au fond de nous.  De toute façon, si vous lisez ces lignes, c’est qu’inévitablement vous êtes éveillés.  Il ne vous reste qu’à rêver.

 

 

 

TEXTE DANS LE PROGRAMME DE LA REVUE MUSICALE « STATION’AIR » (1999)

 

La revue musicale « Station’Air » vous remémore les grandes pièces musicales des 30 dernières années de notre palmarès, à l’aide d’une approche différente de celles précédemment utilisées.  En effet, le lieu dans lequel évolue le spectacle, soit une billetterie d’aéroport, nous ouvre la porte sur un éventail de pièces pouvant être interprétées dans diverses langues et par de multiples personnages.  Pour ce premier voyage, le français, l’anglais et l’espagnol sont celles que nous avons retenues.

De plus, les « comédiens-interprètes » n’imitent pas les artistes originaux, mais chantent les différents succès « live » appuyés d’un musicien qui du haut de sa tour de contrôle peut, à lui seul, nous promener d’une ambiance des plus intimes à une performance quasi-symphonique.  Les multiples lieux où ils atterriront sont définis par une scénographie axée sur la projection, la perspective et le relief.  Ces moyens, une fois combinés aux éclairages, permettent de recréer des lieux précis tels : désert, extérieur urbain ou même espace…

« Station’Air » est donc une piste de décollage pour de nouveaux talents et un moyen de transport divertissant survolant les grands succès internationaux.  L’équipage qui vous guide dans ce fabuleux voyage de variétés se compose de chanteurs, musicien, chanteuses, danseuses, magicien et clown…

Et si nous avions l’avion pour vous faire décoller sans bouger ?

Jacques Bolduc, metteur en scène

DESCRIPTION DES PERSONNAGES DE LA REVUE MUSICALE « STATION’AIR » (1999)

 

Le musicien : Le personnage prétexte de cette production est en fait le musicien.  C’est au travers ses fantasmes et ses convictions qu’évolueront les divers antagonistes et qu’apparaîtront les différents lieux qu’il imagine.  Proche de la schizophrénie mais toujours capable de communiquer, son attitude faciale quand on l’aperçoit demeure stoïque, voire presqu’impénétrable.  Il laissera toutefois échapper à l’occasion un semblant d’émotion, surtout dans les moments où l’exécution musicale atteint un certain paroxysme.  Il développe sa folie juché sur son praticable et n’en descend qu’à la fin du spectacle, nous révélant ainsi que lui et l’espion ne formaient qu’une seule et même entité.

 

L’espion : À chaque fois qu’entre en scène l’espion, le musicien doit s’effacer.  Que ce soit à l’aide d’éclairage, d’un tulle ou de tout autre effet, il faut que s’installe dans la compréhension du spectateur l’évidence progressive que l’espion pourrait être la résultante des fantaisies imaginatives du musicien.  Comme il ne laisse entrevoir que la demie de son visage (l’autre étant masquée), son identification réelle s’avère impossible.  L’accoutrement de ce personnage ne devra pas l’empêcher de pouvoir effectuer tous les mouvements que son rôle lui exige.  En effet, ses déplacements s’exécutent de façon presqu’accroupie et très étirée.

 

Le trooper : C’est un bon vivant avec toute la bonhomie que cela comporte.  Gauche dans gestuelle, mais excessivement droit dans sa moralité.  Il hésite très rarement à lever le coude et s’il le fait, c’est qu’il l’a déjà trop levé la veille.  On ne le retrouve jamais soûl mais on peut le sentir pompette à l’occasion.  Il est un peu le « running gag » du show, dans ce sens qu’il demeure toujours insérable dans des scènes où il n’a pas nécessairement de rapport.

 

La jeune fille : Elle est en fin d’adolescence et sujette à tous les questionnements qu’entraîne cet âge.  Comme ses propres critères de vie ne sont pas encore arrêtés dans sa tête, elle ne considère pas les sentiments de son prétendant.  Elle apprécie l’intérêt qu’on lui porte mais elle ne se pose aucune question quant à ses réactions face à ces avances amoureuses.  Elle évoluera considérablement en deuxième partie du spectacle puisqu’après avoir quitté son prétendant pour la « xième » fois, elle se retrouve à chanter en public dans un endroit qui exige de l’interprète une attitude et une tenue vestimentaire plus provocantes.

 

Le prétendant : C’est aussi un jeune mais on peut l’entrevoir légèrement plus âge que la jeune fille.  Il est amoureux et la profondeur de son sentiment se vérifiera tout au long de la représentation.  Il est convaincu de son désir envers la p’tite et les différentes actions qu’il posera le prouveront mais on ne le sent pas perdu.  C’est dans une attitude positive qu’il poursuit son but et non pas dans cette atmosphère de désespoir lourd et ténébreux qu’habituellement nous réserve ce genre de situation.  Le prétendant a l’œil clair et vif et vit très bien sa quête.

 

La mère : C’est la génitrice de la jeune fille.  Elle porte en elle-même cette satisfaction qu’elle a transmise à sa fille.  Sûre d’elle, rigide dans sa démarche autant que dans son style de vie, elle transpire le snobisme bien qu’elle s’antisudorifie de temps en temps d’un air de femme du peuple.  Son confort matériel guide chacun de ses instincts et les plis de sa robe sont calculés avec une telle minutie qu’on les dirait moulés à même le tissu.  Son histoire sentimentale (qui est le père de son enfant ?) n’a aucune importance dans l’histoire véhiculée ni dans sa vie personnelle.  Elle vit pour elle-même et son rejeton n’est ni plus ni moins qu’un autre trophée ajouté dans sa collection.  Il va sans dire qu’elle ne milite pas pour le prétendant.  Plus ce couple semble dans la bouette, plus elle s’en satisfait.  Le seul moment où ce jeune homme peut sembler l’intéresser est lorsqu’il daigne poser un regard sur elle.

 

La préposée aux bagages : Elle se comporte comme son rôle l’exige, en employée modèle.  Elle ne revêt pas de traits de caractères particuliers.  On la sent bien dans sa peau, affable avec les gens lorsqu’elle a à échanger et capable de « dealer » avec la monotonie des gestes qu’elle a à poser,  C’est au tableau 4 que son côté émotif sera le plus palpable, lorsqu’elle entreverra l’espion installer sa bombe derrière le comptoir de la billetterie.  Tout en retenue, elle l’observera agir sans ne poser geste.  On la sentira plus prête à se sauver que de tenter d’empêcher le malfrat de tout faire « péter ».

 

La préposée à la billetterie : Si un personnage sait exactement où il va dans ce show, c’est bien la préposée à la billetterie.  Minutieuse mais pas accrochée aux détails insignifiants, constamment aux aguets si elle doit resituer quelqu’un d’égaré et toujours munie d’un sourire ravageur révélant une dentition destinée à croquer la vie.  Sa gestuelle, bien que répétitive, exprime une élégance propre aux employées d’aéroport.  Qu’elle se munisse d’un crayon ou qu’elle remette un horaire à une hôtesse de l’air, on ne ressent jamais l’envie de voir son geste se terminer ; comme s’il prolongeait pour un instant notre goût de rêver à l’inaccessible.  La mauvaise humeur n’a pas le code d’accès de l’endroit où elle travaille.

 

Le pilote (1) : Il est en scène moins d’une minute et c’est à cette vitesse que défile sa vie.  Le temps le presse parce qu’il l’administre mal.  Il ne sait gérer ni sa vie personnelle (d’ailleurs, en a-t-il une ?) ni sa relation intime avec le sens fondamental de l’existence.  En fait, on ressent à le voir aller qu’il devrait prendre le temps de bien analyser ce qui lui arrive, peu importe la durée que cela pourrait lui demander.

 

La femme-limousine : La pancarte qu’elle porte semble être le prolongement naturel de son bras.  Elle est capable de conserver une stabilité de position semblable à celle que conservent les espèces de gardes qu’on retrouve devant le palais de Buckingham, mais peut se permettre à l’occasion un mouvement convenu.

 

L’hôtesse de l’air (1) : Quelle élégance !  Quel raffinement !  Elle nous prouve une fois de plus par son attitude qu’on ne pourra jamais comprendre de quelle façon on apprend aux hôtesses de l’air à se déplacer.  La grâce avec laquelle elle avance ne peut être naturelle puisque nulle part ailleurs on ne retrouve ce genre de rythmique si savamment étudiée.  On la sentira quelque peu agacée par les avances du trooper, mais en aucun cas elle ne le lui laissera clairement savoir.

 

L’hôtesse de l’air (2) Le pilote (2) : Contrairement à l’hôtesse de l’air (1), sa démarche rapide et frustrée dépeint la contrariété qu’elle est en train de vivre.  Elle précède à son arrivée sur la scène le pilote (1).  Cet ordre doit être rigoureusement respecté puisque l’hôtesse de l’air (2) laisse dans son sillon la nette impression qu’il s’est passé quelque chose de négatif entre eux.  D’ailleurs, ce dernier apparaît avant qu’elle n’ait eu le temps de se rendre à la billetterie pour y quérir son horaire hebdomadaire.  Que s’est-il passé entre eux ?...  Déception amoureuse, trahison, ou simple prise de bec sur des gestes et des opinions opposés ?...  Peu importe, puisque la résultante en est une friction évidente qui devra se régler par un tango passionné, appuyant la situation irréparable qui semble s’être glissée entre les deux personnages.

 

La femme d’affaires : Carriériste, froide mais charmante, « indéstabilisable », presque le nez en l’air, détestant la bière, fantasmant sur les bains au champagne et les suites d’hôtel hors prix, accordant plus d’importance à la marque d’une voiture qu’à la situation émotive de celle ou de celui qui la conduit.

 

La reine du disco : Elle a su transporter au travers le temps la même conviction qu’elle avait dans les années 70.  On ne sent en elle ni nostalgie ni kétainerie rattachées à cette époque.  Ses mouvements, quand elle chante, naissent de son âme et prennent toute leur ampleur au fur et à mesure que sa voix traverse sa bouche et atteint le micro.  La largeur de son registre n’a d’égal que le plaisir qu’elle ressent lorsqu’elle offre ses chansons au public.

 

Le rappeur : Typiquement issu de Manhattan, entre la seizième et la trente-cinquième avenue.  Son ghetto-blaster, depuis le temps qu’il le transporte, s’est presque moulé à son épaule et quand on l’observe de plus près, on croit remarquer que l’oreille située près du haut-parleur est nettement plus grosse que celle de l’autre côté.  La cadence de sa démarche prouve au spectateur qu’il n’entend pas la pièce que le musicien est en train d’exécuter.

 

L’homme de rue : C’est surtout quand il s’installe sur la poubelle et qu’il dévoile au public sa panoplie de jeux sujets au « gambling » qu’on saisit son rôle.  C’est un honnête malfaiteur pour qui on ressent plus de sympathie que d’aversion.  Un peu comme dans les kiosques de fêtes foraines où l’on tente de gagner des toutous en peluche, on a plaisir à se faire « fourrer » par ses tactiques déloyales puisque dans une ville comme New York, il fait partie du décor et que c’est toujours avec plaisir qu’on racontera aux amis avoir essayé de le battre à ses propres jeux.

 

Le vendeur de journaux : Il les vend sur le bord des trottoirs en annonçant « la une ».  Il n’accapare pas le client mais cherche plutôt à le convaincre de l’importance de passer par lui puisque cela ne peut que personnaliser la nouvelle.  La pièce qu’exécute le musicien couvre tout l’espace sonore mais on peut lire sur ses lèvres la dépêche qu’il annonce.

 

Le policier : Tellement habitué à son quartier qu’il participe autant qu’il interdit.  Les infractions qu’il décèle sont tellement quotidiennes qu’il s’en est fait plutôt un plaisir qu’une source d’ulcères.

 

La fille sexy : Ainsi nommée pour ce qu’elle dégage et non pour ce qu’elle représente.  À l’antipode de la pute, elle incarne l’inaccessible flamme que tout mâle a rencontré un jour ou l’autre dans sa vie.  Le genre de fille qu’on observe de derrière un poteau ou intelligemment dissimulé dans une foule.  Elle brise les cœurs sans s’en douter et si elle l’apprenait, c’est avec toute la peine du monde qu’elle se rendrait compte des désastres cardiaques qu’elle provoque à son insu.  Ingénue, voluptueuse dans sa démarche, elle évolue dans l’espace ambiant sans y laisser d’empreinte et se volatilise au gré du vent.

 

Les clients de la discothèque : Nés pour danser, ils s’estomperont en suivant leur propre rythme et disparaîtront dans la fumée qui les accompagne.  Il en est ainsi à chaque fois qu’ils sortent dans un lieu de danse.

 

L’hôtesse de l’air (3) : Elle a la même démarche architecturale que l’hôtesse de l’air(1).  Comme elle est à l’extérieur, sur la piste d’atterrissage, on croirait sentir un léger vent lui caresser les vêtements tellement sa volupté semble palpable.  Tout en nuances, sa gestuelle envoûte et entraîne les regards vers les mannequins qui défilent.

Les mannequins : Les créations modes qu’elles revêtent suggèrent leur attitude.  C’est plutôt dans leur regard que se standardise ce qu’on attend habituellement de telles créatures.  Elles annihilent leurs expressions faciales pour laisser toute la place aux vêtements qu’elles présentent.  Un maquillage plus qu’intriguant attire toutefois le regard du spectateur vers ces visages d’un indéniable intérêt.

 

Les préposés à la piste d’atterrissage : Ils guident les mannequins sur la piste d’atterrissage et les abandonnent une fois qu’ils sont passés derrière eux.  Nous les apercevrons surtout de dos et de côté.  Cette position scénique « inutilise » donc tout autre précision.

 

Le life-guard : Il est tellement convaincu de son « sex-appeal » que même le sifflet qu’il porte à son cou se met au garde-à-vous lorsqu’apparaît une fille.  Son torse nu exhibe une peau huilée, prête à la manipulation et sa dentition contraste parfaitement avec son visage bronzé et tellement sûr de lui.  Il demeure toutefois à sa place et jamais on ne pourrait anticiper voir sa main toucher à des endroits habituellement interdits sur le corps d’autrui.  Il est d’un naturel patient et ne s’exécute que si la permission lui est offerte.

 

Les filles de plage : Nous installerons enfin sur scène des filles de plage munies d’un cerveau fonctionnel.  Elles sont là pour s’amuser et non pour établir des statistiques sur le nombre de paires d’yeux qui deviennent complètement maboules en apercevant les leurs… 

 

Le majordome : Classique cintré, il est le maître du personnel évoluant dans l’hôtel.  Il est aussi hautain dans la façon d’aborder les employés que dans la manière dont il exécute ses tours de magie.  On décèlera toutefois une possibilité d’humanisme dans son salut final mais le doute devrait l’emporter.

 

La femme de ménage : Sous l’emprise pécuniaire de la vie, elle doit tolérer les ordres de son supérieur hiérarchique sans ne laisser transpirer la moindre frustration.  C’est pourquoi ni rictus ni froncements de sourcils n’accompagnent ce visage qu’on imagine pourtant souriant.

 

Les autres espions : Ils sont en fait le dédoublement de l’espion lui-même.  Leur gestuelle d’entrée en scène le prouve hors de tout doute.  C’est dans la couleur de leurs vêtements qu’on notera toutefois une différence.

 

Le menuisier : Habitué à exécuter son travail, rien ne l’énerve.  Cure-dents à la bouche, il range ses outils comme il le fait chaque jour de travail, anticipant la joie que lui procurera sa prochaine bière.  Un bon bonhomme pour qui la vie coule comme ce qu’il anticipe de boire avec joie.

 

Le laveur de vitres : Il en est à ses derniers coups de chiffon lorsque le spectateur le découvre.  On peut très bien le comparer au menuisier en ce qui concerne sa philosophie de la vie.

 

Le vieux pêcheur : Caricatural à souhait, la pipe recourbée et imprégnée dans sa lèvre inférieure, c’est sans surprise qu’il verra surgir le prétendant.  Le calme de sa réaction nous assure de ses origines campagnardes et de la vie sans stress qu’il continue de mener.  On ne se surprendrait pas d’apprendre que sa pipe est bourrée d’un tabac qu’il cultive lui-même et que l’unique nourriture qui l’intéresse dans la vie est le poisson qu’il capture.

 

Le peuple des cavernes : On jurerait qu’un mélange de sève et de minéraux inconnus coulent dans leurs veines.  Parfaitement adaptés à leur environnement pauvre en lumière, ils ont la pupille dilatée et les phalanges presqu’en forme de griffes.  Leur gestuelle, en dehors de l’aspect chorégraphique, est vive et saccadée comme dans un vieux film d’animation.  Ils sont farouches et méfiants et n’ont surtout pas l’envie de se faire capturer par ceux-qui-vivent-à-la-surface et de se retrouver dans un cirque ou tout autre « exhibit » bassement commercial.  Leurs corps semblent issus de la roche ; comme s’ils étaient des stalagmites mobiles surgies des entrailles de la terre elle-même.  À titre personnel, je dirais que c’est le genre de peuple à qui je m’attacherais facilement; si seulement il pouvait exister.

 

Les filles du bar mexicain : Comme nous véhiculons dans Station’air une image saine, il ne faut pas les entrevoir comme des entremetteuses ou des péripatéticiennes, mais tout simplement comme le personnel opérant de ce bar somme toute douteux mais à prime abord exempt de corruption.  Elles demeurent charmantes, avenantes et d’une bonne humeur communicative.

 

Les Spacegirls : Leur appellation « synonymise » un groupe bien connu et ce n’est pas pour rien car leur habillement tout en lamé argenté peut à la limite rappeler les vêtements flashants et tape-à-l’œil, si assidument utilisés par ce girl-band.

 

Les drôles de créatures dans « Macarena » : Ce sont de drôles de créatures, elles n’apparaissent que dans « Macarena » ; j’sais pus quoi ajouter.  

 

 

 

NOTES EXPLICATIVES (2005-2006 ?)

 

Comme tu le peux le constater, le texte est bâti à partir de la forme du parallélisme flagrant.  Sous le thème de la tempête, j’ai développé deux volets distincts  se rejoignant dans l’idée directrice fondamentale : une tempête classique avec vents et tourments et la foudre qui s’abat sur un être battu par la fougue débile de son agresseur.  J’ai volontairement asexué le texte mais on peut supposer que c’est une femme qui subit les assauts débiles d’un conjoint masculin.  De quelle façon     l’exploiter ?...  Je l’ignore ; c’est pourquoi nous solutionnerons à l’aide de l’instinct familial.  Un autre exercice dans lequel Jessica pourra sûrement te conseiller, puisqu’elle sera sur place et entendra évoluer le projet.  Je me permets en revanche quelques suggestions.

On peut introduire le tout dans une même chanson en chantant d’abord le côté « tempête », puis celui de l’être battu.  On peut aussi hachurer le contenu en plaçant un vers (D’abord le ciel), puis immédiatement l’autre (D’abord la voix) et poursuivre ainsi la double signification tout au long de l’œuvre.  On peut aussi procéder de façon « concept album » en intitulant la première moitié du texte : LA TEMPÊTE 1 que l’on placerait, mettons, comme troisième chanson d’un disque et apercevoir que la neuvième chanson d’un même disque s’intitulerait LA TEMPÊTE 2 et présenterait la seconde moitié textuelle.  On peut aussi crisser le texte à la poubelle et se dire que le cave qui l’a écrit ne mérite même pas d’être rappelé, mais dans un contexte de franche camaraderie, cette option peut paraître risquée…

Enfin, comme tu peux le constater, mille et une facettes peuvent être envisagées.  Tu demeures toutefois décisionnel, étant donner le mariage quasi-incestueux que tu devras réaliser entre le texte et la musique pour bien détacher les deux thèmes et les rendre ainsi compréhensibles.

Je ne vois pas la nécessité de te décortiquer les subtilités littéraires de ce nouvel opus, puisque ce troisième texte n’en comprend pratiquement pas.  Je souligne quand même ce passage :

-Un arbre cafouille et débranche le courant (arbre-branche).

-Les pierres déboulent et décrochent les nids (pierres-roche).

 

-Un toit s’écroule et déloge l’habitant (toit-loge).

 

-Les eaux s’écoulent et inondent le pays (eaux-inondent).

 

Il se pourrait que je termine la version « femme battue » en continuant les vers pour arriver au nombre identique à ceux de la version « tempête classique ».  Mais pour l’instant cette mouture abrégée me charme encore.  Il se pourrait qu’elle se « définitivise » ainsi, à moins que tu ne ressentes le besoin essentiel d’ajouter ce que j’anticipe.  Dès que tu auras pris une décision en ce sens, tu me le fais savoir et, au besoin, je me remettrai au travail pour compléter les vers manquant.

Bon !  Je crois avoir fait le tour.  J’te répète que je demeure disponible pour toute complémentarité explicative et qu’aucune obligation familiale ou amicale ne t’oblige à t’emparer de ces textes pour les « musicaliser » à outrance.  Il va sans dire que si jamais ils connaissent le cheminement qu’a vécu « Déjeuner sur l’herbe », eh bien ça fera deux nouvelles tounes de plus pour un futur album.

Tiens-moi au courant.

 

***

 

D’abord quelques mots pour excuser mon délai de livraison.  L’inspiration étant ce qu’elle est, j’ai dû attendre sa visite au fil des nuits « camionnées » qui peuplent mon hiver.  J’aurais pu expédier quelques résultats qui ont maintenant pris la direction de la « dompe », mais avec le recul je me satisfais de ne point l’avoir fait.  Il n’est de plus grande angoisse que celle d’avoir à livrer ses émotions écrites sans qu’elles ne nous satisfassent.  En plus, cette angoisse augmente lorsque l’auteur sait qu’il n’aura pas la responsabilité de livrer la marchandise à d’éventuels auteurs.  C’est pourquoi il s’acharne à remodeler les vers, à restituer les strophes, à transposer les rimes pour s’assurer d’une pseudo-précision qui, selon lui, devrait contenter l’interprète.  Mais toutes ces remises en question s’avèrent pour la plupart du temps vaines puisque l’auteur sera à jamais le seul être vivant à avoir eu connaissance de ces tergiversations.  En revanche, le fait de vous en parler peut tout de même consolider la collaboration ; en plus d’excuser le fameux délai de livraison.

Je précise tout de suite que les quelques vers que j’ai cités à Jessica lors d’une de nos communications téléphoniques existent encore.  Ils ne sont toutefois pas encore placés aux bons endroits.  J’espère les joindre lors de ma prochaine livraison mais l’inspiration étant ce qu’elle est, on peut s’attendre à n’importe quoi.

Les trois textes que je joins à cette missive n’ont pas besoin d’explications précises.  Devant l’interrogation majeure, n’hésite pas à me contacter et je me ferai une joie de t’indiquer les précisions manquantes.  Je t’inclus aussi des copies de Sous observation et de La tempête en version définitive (du moins je l’espère…)  J’ai une fois de plus tiré les textes pour faciliter la référence durant nos travaux.  En revanche, je te répète que ces titres ne sont pas coulés dans le béton.  D’ailleurs, Jessica t’a probablement parlé du concept suggéré et je ne voudrais surtout pas que ces appellations puissent nuire à son travail.  Je reste toutefois ouvert à les voir demeurer vivants et, à la limite, si les chansons vous inspirent d’autres appellations, je me ferai un plaisir d’en débattre avec vous.

Tu remarqueras que La tempête 2 possède maintenant le même « piétage » que La tempête.  J’ai pensé aussi que son interprétation pourrait se faire au moyen d’une voix trafiquée, genre « vieux radio » des années 30 ou tout autre effet conforme.  Dans le mix, on pourrait la sentir aussi lointaine, désemparée, en proie à une panique incontrôlable, soulignant l’état de l’être qui subit de tels supplices.  Je n’hésiterais pas non plus à précéder la voix d’une assez longue intro musicale ; très « distortionnée », amenant lentement l’éventuel auditeur à reconnaître les sonorités caractéristiques de La tempête.  Comme si on avait volontairement désaccordé quelques instruments pour souligner l’horreur du texte à venir…  Ce ne sont que des suggestions, mais elles pourront  probablement t’aider lors des longues nuits sans sommeil que tu passeras à poursuivre notre Œuvre.

Bon !  C’est pas mal ça.  Nous un vendredi quelconque en fin d’après-midi et je retourne tantôt « camionner » ma vie pour la fin de semaine.  Je pourrai enfin passer à d’autres textes.  C’est pourquoi je tenais à finaliser cette portion de nos travaux avant de partir.  Beaux becs à tout le monde.  J’ose espérer que Jess pense à l’occasion au design essentiel pour l’aboutissement de ce fantastique projet.  Je vous aime…

 

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Bon !  Bon !  Bon !  Bon !  Bon !  Bon !  Ouais !  Ouais !  Ouais !  Ouais !  Ouais !  Ouais !  Je crois que la meilleure d’aborder la situation est de ne pas en tenir compte dans notre projet.  Si t’as besoin de m’en parler, je t’écouterai et on analysera ensemble la pertinence des propos et si j’ai des questions à te poser, tu y répondras avec la substance qui te chante.  Mais j’estime que ce sont pas mes affaires.  Vous êtes adultes, solides dans vos fragilités, raisonnables dans vos torts, vous êtes de bons parents, habiles dans vos maladresses, précis dans vos hésitations et c’est tout ce que la vie demande.

Donc, si j’ai bien saisi les propos de Jessica, le projet est toujours en marche.  Elle m’a même confié que tu as déjà commencé à labourer le studio et qu’au travers les micros sillons que tu soulèves, quelques esquissent se profilent à l’horizon…  J’en prends bonne note et reste convaincu que leur portée rejoindra l’harmonie qui liait les tounes précédentes.  Je te joins des copies des deux derniers textes et t’ajoute un nouveau jet qui m’est venu suite à l’annonce des grandes ruptures.  Le texte est calme, sobre et assez flou pour éviter la didactique fiévreuse dont font parfois usage les gens qui observent ces situations.  Encore une fois, je te rappelle que s’il ne correspond pas à ce que t’as envie d’exprimer, tu le laisses de côté et on pourra toujours le refiler à quelqu’un d’autre un jour.  N’oublie pas que les titres qu’on a donnés aux chansons ne sont que des références de travail.  Il se peut très bien qu’un concept se développe et qu’on envisage autrement la façon de les nommer.  Laissons le temps prendre le temps de bien nous conseiller…

Cette nouvelle situation de vie comporte quand même des aspects plus que positifs.  Dans mon cas, c’est l’occasion rêvée pour enfin vérifier si tu endurais mes textes uniquement parce que j’étais le père de ta blonde.  Nous verrons aussi si le lien qui nous unissait n’était que familial obligé, ou s’il pourra se prolonger dans les méandres surprenants de l’amitié sincère et de la complicité magique qu’exige le travail de création.  Enfin, je ne te cache pas que ton absence nous sera toujours lourde à réaliser lors des réunions familiales, mais vois là le signe d’un passage solide et bien ancré dans le monde surprenant et non-standard de la famille Boldô-Lafrenière-Tremblay.

Donc, si je compte bien, nous en serions à 10 textes jusqu’à présent.  Il faudra peut-être envisager la durée musicale de l’ensemble avant de procéder à des ajouts.  Notre prochaine rencontre devra se métamorphoser en réunion de production.  On y définira les thèmes qu’exploitent les textes autant que les atmosphères dans lesquelles nous plongent les enchaînements rythmiques.  Nous ferons aussi un détour sur ce que l’inspiration nous réserve au niveau de l’aspect visuel de la pochette, ainsi que sur tous ces détails qui devront meubler le projet et auxquels nous aurons pensé chacun de notre bord.  Pas besoin de te cacher que j’ai bien hâte d’entendre où tu en es rendu dans tes délires guitaristiques autant qu’arrangeatifs.  Cette rencontre pourra se tenir où bon nous semble ; que ce soit ici sur le bord de la rivière gelée ou en haut, près du Richelieu ou de la grande ville.  L’essentiel sera d’y avoir la paix pour maximiser la somme de travail et que je puisse enfin m’imprégner du produit dans son ensemble, chose qui n’est jamais encore arrivée.  J’ai débuté mon horaire d’hiver et elle se présente comme suit jusqu’en mars 2006 : vendredi, 13 heures ; samedi, 12 heures et dimanche, 12 heures en alternance de jour et de nuit.  Ça totalise 37 heures et on nous paye pour 40, étant donné qu’on n’a pas une crisse de fin de semaine en hiver.  Ce qui entraîne qu’on devra se voir sur semaine entre lundi et jeudi exclusivement.  Remarque que la balle est maintenant dans ton camp pour me faire part de tes disponibilités.  Je te rappelle aussi que le fonds de survie du projet BOLTELL existe toujours et qu’à vue du baril de Molson, il doit maintenant friser les 1000$.

J’attends de tes nouvelles.

 

 

DES RÉFLEXIONS À LA VEILLE DE MON CINQUANTENAIRE… ET UN COUP QUE JE L’AURAI ACQUIS (2006-2007-2008)

 

 

Pour Jessica et sa postérité

 

Novembre 2006

Bon bon bon bon bon !...  50 ans bientôt.  Un œil sur l’infini qui se dessine lentement, inexorablement.  Plus de fait qu’il n’en reste à faire.  Une analyse fiévreuse et détaillée de ce qui s’en vient…  De ce que nous vivrions tous un jour.  Rien de freakant; que des constatations.  Ce n’est pas un bilan mais plutôt une grande étape de saveurs.  J’suis fier d’être rendu où j’en suis…  Fier de mes flôs, fier de leurs flôs et tellement bien secondé par ma complice…  J’espère aussi passer à l’année à la ville cette année…  Comme un matelas que je m’offre pour confortabiliser ma vieillesse…  Ce serait tout un cadeau pour mes 50 ans…

 

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J’me souviens très bien qu’en 5e année,  à l’école St-Henri de Chicoutimi-Nord, mon enseignante, Andrée Barrette, nous avait donné comme travail d’arithmétique de calculer en quelle année on serait lorsque nous atteindrions l’âge de 50 ans.  C’était si loin pour moi, si futuriste comme concept que je n’arrivais même pas à me figurer qu’un jour je comptabiliserais autant d’années.  J’avais alors pris mon année de naissance, j’y avais additionné le chiffre magique de 50 et j’étais arrivé au résultat de 2007.  La maîtresse fut surprise de mon raisonnement rapide puisque je fus le premier à lever la main pour annoncer mon résultat.  Ce fut en fait mon premier contact vital avec la cinquantaine…  Mais je répète qu’à cette époque, le concept de la cinquantaine était l’équivalent pour l’enfant que j’étais d’un excellent sujet de science-fiction.

 

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C’est presque le début décembre (27-11) et la rivière débute sa congélation…  J’aurais dû remarquer la première gelée l’an dernier mais je ne l’ai point fait…  Ce sera désormais une habitude.  Plutôt que de statisticier la première neige, je m’attarderai à remarquer la première gelée sur la rivière des enfants…  C’est le nom dont j’ai décidé de baptiser notre rivière.  La rivière des enfants…  La Jessisabelloxane river…  Évidemment, ce phénomène de congélation m’amène à penser à ces gens qui acceptent de plonger leurs restes corporels en léthargie cryogénique dans le but de se réveiller plus tard avec des moyens de guérisons médicales qui leur permettraient de guérir une maladie jusqu’à présent incurable…  Quelle perte de temps !...  Un peu comme passer les quarante premières années de sa vie à travailler dans des d’jobs plates à mourir en se disant qu’après on sera bien et qu’on pourra profiter de la vie…  Quelle erreur de jugement !  Quelle manipulation machiavélique sociale et strictement axée sur le conformisme bestial !...  Le troupeau va et on le suit, aveuglément, perdant l’énergie de la jeunesse débrouillarde au profit d’une vieillesse qui ne viendra peut-être jamais vu la fatalité surprenante de la vie !  Il faut mordre ses 40 premières années, les secouer à l’extrême !  Il faut leur refuser le confort assourdissant que lui proposent les régimes de retraite, les salaires très élevés, les positions de pouvoir qui écrasent le prochain et qui nous empêchent d’avoir de bonnes conversations avec nos congénères…

Il faut déstabiliser tout ce système d’exactitude sociale !

 

Décembre 2006

Jamais je n’aurais pu aller à la guerre.  Je serais mort avant le moindre coup de feu !  Je sais que si j’effectue l’exercice de me transposer dans les années 1930 où l’information était pratiquement inexistante, je pourrais déceler la possibilité de m’être engagé dans les forces armées avec la conviction de faire de beaux voyages, de porter un rutilant uniforme, de représenter l’honneur d’un pays et la force d’un regroupement d’hommes prêts à défendre femmes et enfants contre la tyrannie de l’envahisseur.  Mais une fois sur le champ de bataille, je crois que j’aurais flanché…  L’idée de crisser quelques balles de fusil dans l’ennemi ou de piquer ma baïonnette dans la silhouette d’un autre humain ne se serait jamais rendue à ma cervelle.  J’aurais couru en ce sens inverse, tentant d’éviter les coups de feu et c’est sans doute ma propre armée qui m’aurait tiré en hurlant « pas de pitié pour les… (mets le mot que tu voudras).

 

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Une des grandes transitions dans l’évolution sociale québécoise fut votre génération.  Vous avez été l’aboutissement de ce que nous avions commencé dans les années 70. « LA GÉNÉRATION QUI RÉPOND ».  Nous, quand on répondait à nos parents, on recevait une balle par la tête ou un objet quelconque se fracassait près de nous.  À l’occasion, une crise de larmes si la maman était seule ; mais on ne se sentait écouté, compris, invité à la discussion.  Ce n’était pas de la faute de nos parents puisqu’eux n’avaient jamais eu le droit de répondre à l’autorité parentale.  Et s’ils osaient le faire, ils se retrouvaient bannis, ostracisés, excommuniés !  Nous sommes donc devenus des parents compréhensifs et négociables alors que l’enfance nous avait enseigné de nous la fermer et de ne pas chercher à comprendre.  Cette heureuse transition fut accompagnée par la révolution sexuelle.  On n’avait jamais vu notre mère en brassière et à 16 ans, on se retrouve dans une magnifique chute d’eau avec une dizaine de filles toutes nues qui nous invitent carrément à vérifier nos possibilités physiques…  Toute une transition !...

 

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De toute évidence, les pires cochonneries que nous puissions traîner dans notre existence sont la rancune et la jalousie.  La rancune parce que pour en vouloir à quelqu’un, il faut prendre le temps de l’haïr et comme la haine entretient un parallèle incestueux avec l’amour, aussi bien dire qu’il faut aimer un peu les gens qu’on haït beaucoup…  Préférons donc à la haine l’indifférence.  Si on ne reconnaît plus quelqu’un qui nous a fait grande peine, si on le regarde comme on observe un tube de dentifrice sur une tablette de supermarché, on a atteint envers lui ce stade d’indifférence salvatrice.  En fait, le principe n’est pas de pardonner (le pardon est l’enfant pauvre de la réflexion) mais d’anéantir ceux qui ne cadrent pas dans nos univers personnels.  La jalousie représente la plus grande perte de temps et d’énergie.  Je ne parle pas évidemment de la jalousie complice dans un couple qui nous permet de dire à l’autre les choses qui nous énervent dans son comportement.  Quand c’est fait intelligemment et avec tact, ça ne peut qu’améliorer l’ambiance.  Non ; je parle plutôt de la jalousie maladive.  Celle qui vient du fin fond de nos manques de confiance en soi ; celle qui vient de la répression violente qu’a pu exercer sur nous nos parents, nos frères et sœurs ou même un quelconque enseignant…  Celle qui nous entraîne inexorablement dans la spirale de l’incompréhension, celle qui fait que tous nos proches s’éloignent, celle qui amène la personne que l’on aime à nous détester !...  La jalousie amène la haine, la haine jalouse l’amour, l’amour guérit tout…  Ouf !...

 

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Un jour il sera essentiel que chaque Nord-Américain provenant d’une famille aisée matériellement passe obligatoirement un mois dans un endroit relativement isolé sans eau courante ni électricité.  Ça reconnectera bien du monde avec les valeurs fondamentales de la vie…

 

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Je devais avoir 5 ans ; 6, peut-être et mon rêve était de m’envoler dans une fusée, prisonnier d’une minuscule capsule spatiale, pour côtoyer l’immensité intersidérale.  Je m’imaginais vêtu de mon scaphandre spatial, enfermé sous mon casque de cosmonaute , en route pour l’espace.  J’en parlais souvent avec Rodolphe et papa s’amusait à compléter mes folles aspirations.  Il me disait l’importance de maîtriser les hauteurs, d’ignorer le vertige de comprendre les mathématiques et les diverses sciences et de demeurer en toutes occasions maître de ses plus obscures émotions.  Et c’est là que je me suis mis à grimper aux arbres.  L’exercice combinait toutes les exigences.  La hauteur, les vertiges, la science de savoir quelle branche utiliser pour continuer à grimper et la maîtrise des émotions si on éprouvait le peur de tomber.  Je m’entraînais souvent, chaque jour si possible, croyant qu’ainsi j’accèderais aux critères essentiels pour devenir astronaute.  Et puis un beau dimanche après-midi, alors que la famille était réunie, papa décida de nous amener faire un tour d’automobile.  Nous nous dirigeâmes alors vers le rang St-Jean-Baptiste (à côté du rang du fromage Boivin) et passant devant une ferme, il immobilisa le véhicule.  Nous étions alors devant un immense silo à grains.  Puis papa dit : « Tu sais, Jacques, c’est d’ici que s’envolera la fusée qui te transportera dans l’espace ».  Pour moi, c’était vrai.  Mes sœurs et mon frère (Jean-Pierre n’était pas né à l’époque) étaient bouche bée devant l’immense rampe de lancement et maman avait l’air inquiet de penser qu’un jour un de ses fils braverait l’apesanteur pour s’envoler dans le vide.  Le silo à grains, pour l’enfant de 5 (6 peut-être) ans avait vraiment l’air d’un lance-fusée…  Et j’ai eu peur…  J’ai vraiment été effrayé, non pas par l’idée de partir dans l’espace, mais plutôt par celle que maman soit inquiète de mon avenir…

Je n’ai jamais plus caressé l’idée de devenir astronaute à partir de ce jour.  En revanche, j’ai continué à grimper aux arbres jusqu’à l’âge de quatorze ans.

 

Janvier 2007

Lorsque j’allais au CEGEP et que j’habitais en appartement avec Piero Gilbert, nous éprouvions un malin plaisir à inventer des choses qu’on invente dans des états altérés d’esprit.  Comme on s’altérait l’esprit pratiquement chaque jour, nous étions très inventifs…  Une de ces inventions se présentait comme suit : Piero dessinait et j’écrivais.  C’était très automatique ; sans thème établi ou tout autre restriction constipative…  L’exercice se faisait avec fond musical progressif à très haut volume, éclairage ambiant mais efficace, et le tout dans une concentration étudiée mais sujette aux soubresauts des euphorisants.  Nous avions baptisé phénomène : le Vrouft.  Il traîne dans mes archives personnelles quelques vrouft.  Mais le but ultime de cette forme d’art était d’offrir le produit fini à quelqu’un ; c’est-à-dire le dessin accompagné du texte.  Plusieurs Vrouft se promènent donc chez des centaines de personnes que j’ai pu côtoyer au cours de ma vie.  Certaines très près de moi, d’autres moins connues et d’autres, enfin, parfaitement inconnues ; des amies d’amis, des amis d’amies, des pas de rapport, etc…  Je vous offrirai donc, dame Jessica, quelques Vrouft au fil de cet ouvrage.  Je vous imaginerai dessinant près de moi et j’écrirai…  J’installerai la musique, tamiserai les éclairages et me mettrai à créer des Vrouft.

Quand les cent mille réseaux solaires

Enligneront leurs folles épines

Et qu’un million de faux reflets

Égratigneront nos rétines

Nous éteindrons tous nos paupières

Nous ferons fi de la lumière

Et nous réfléchirons

 

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Une autre base essentielle de la vie est le jeu.  Jouer sans cesse, le plus possible même quand c’est pas jouable.  Si on est concierge dans un hôpital, par exemple.  Dans le temps qu’on pouvait fumer dans les hôpitaux, on retrouvait donc par terre 3 éléments très nombreux : les p’tites coppes pour les médicaments, les ouates puis les prises de sang ou les nettoyages de plaies et les tops de cigarettes.  Quand je balayais les chambres, je comptais ces 3 éléments.  Je les comptabilisais et j’en faisais des statistiques complètement débiles, précises, fiévreuses.  Donc, à un moment donné, je balayais une chambre à l’hôpital de Chicoutimi et j’entendais clairement la foule encourager les tops de cigarettes contre les ouates et les p’tites coppes à médicaments.  Ça hurlait dans ma tête ; ça criait : GO, LES TOPPES, GO !  Et je travaillais avec le sourire « méchant buzzé » de ton père.

 

Février 2007

La pire des choses à commettre face à l’inexorable monotonie de certaines phases de la vie, c’est de se rendre travailler de reculons ; la face longue ; en tabarnak ; etc…  Comme on dit, de toute façon y faut y aller pareil ; alors pourquoi ne pas le faire positivement ?  Je ne demande pas de vous présenter à la job en chantant ou en portant une gerbe de ballons mais du moins en vous disant qu’à la fin de la semaine vous devriez avoir le cash nécessaire à votre pitance et à celle de votre entourage, au besoin.  Et cette pensée est suffisante pour motiver votre démarche prolétarienne.  Vous savez, j’ai toujours séparé mon travail monétaire de mon travail artistique.  Pourtant, dans une semaine, je consacrais souvent beaucoup plus d’heures au deuxième qu’au premier…  Et le premier servait à payer pour le deuxième.  En fait, un gars qui travaille pour la ville peut être artiste autant qu’un boulanger peut être mécanicien ou qu’un massothérapeute peut être lutteur…  L’essentiel est d’assurer le revenu nécessaire à l’aspect matériel de la vie et ne jamais perdre de vue la passion qui nous anime, qu’elle soit artistique, mécanique ou physique…

Dans le même ordre d’idées, je m’amuserai à vous décliner toutes les jobs rémunérées que j’ai faites dans ma vie.  Elles ne sont pas nécessairement en ordre chronologique et j’espère ne pas en oublier.  J’ai réellement exécuté tous les emplois qui suivent et jamais, en les effectuant, je n’ai négligé ma démarche artistique :

-Concierge à l’hôpital de la Baie

-Peintre en bâtiments

-Bûcheron

-Prof de guitare

-Commis de bureau

-Passeur de journaux

-Courtier d’assurances agréé

-Directeur d’un projet d’isolation thermique

-Concierge, brancardier, plongeur, aide-cuisinier, buandier, laveur de vitres à l’hôpital de Chicoutimi

-Plongeur, pâtissier, cuisinier à la pâtisserie « La Souveraine », Montréal

-Poseur de tapis, tuiles, prélart

-Cuisinier pour des planteurs d’arbres

-Gardien de nuit pour les vendeuses d’arbres de Noël à Manhattan

-Cuisinier pour le Grand Prix Auto de 3 Rivières

-Déneigeur à l’hôpital Louis H. Lafontaine

-Conducteur de chenillettes (déneigement)

-Auteur-metteur en scène-machiniste pour les Productions Ardantes (pas payant mais payé un peu quand même…)

-Poseur de laine minérale soufflée et d’uréthane

-Menuisier

-Déneigeur de boîtes à malle

-Déneigeur de toitures (verglas)

-Rénovateur de bateau (Vieux Port Montréal)

-Travail de manufacture

-Journalier, homme d’aqueduc, préposé à l’asphalte, opérateur de machineries lourdes, etc…  Ville Saguenay…

Voilà…  C’est à peu près ça, ma vie de travailleur…

 

Mars 2007

Le triangle demeurera à jamais la forme géométrique la plus fascinante.  Il trouve toute sa force dans sa structure qui s’appuie et se nourrit sur chaque courant angulaire qui se forme.  Que ce soit la religion, les mathématiques ou toute autre base physique, chacune trouve son compte dans cette représentation cartésienne de l’équilibre, de la puissance et de la parfaite corrélation entre trois plans égalitaires.  Pour moi, mon triangle personnel se résume en ce qui suit : mes relations amoureuses, mes enfants, ma démarche artistique.  C’est au travers ces trois entités bien distinctes que je me suis offert 50 ans d’équilibre et de progression.  Je m’appliquerai donc à détailler ici la troisième partie de mon triangle personnel : ma démarche artistique.  Dans mon cas personnel, parler « d’équilibre » en invoquant ma relation avec les arts peut paraître paradoxal…  Mais curieusement, c’est grâce au chaos que m’occasionnaient mes recherches créatives que j’ai pu profondément apprécier les moments de stabilité que me procuraient mes vies familiales et amoureuses.  Je crois que sinon, la routine et l’ennui auraient réussi à s’immiscer sournoisement dans mon quotidien et ainsi me plonger dans une léthargie négative.  L’artiste en moi a pu s’exprimer principalement au moyen de 3 formes d’art, soit l’écriture, le théâtre et la musique.  Pour ce qui est du plaisir d’écrire, je rends hommage ici à deux personnes qui m’ont accompagné dans ma trajectoire scolaire : Andrée Barrette, qui fut ma maîtresse d’école en cinquième et sixième années et Léonard Girard, qui m’enseigna et me fit apprécier la littérature en secondaire cinq.  Mon enseignante au primaire fut la première à me donner comme devoir à la maison d’avoir à composer un poème.  Je me rappelle très bien l’incestueux rapport que j’ai entretenu dès mon jeune âge avec les rimes.  Je me sentais si près d’elles que l’impression d’être leur frère et qu’elles étaient mes sœurs m’habita immédiatement.  Je les habillais, j’évaluais leurs formes et je les aimais ; presque passionnément, au fur et à mesure qu’elles s’amusaient à me dévoiler leurs charmes.  Mon poème s’intitulait « La mort ».  J’me rappelle pas ce qu’il disait mais en revanche je me souviens des commentaires dithyrambiques que mon enseignante exprima devant toute la classe…  Elle souligna la qualité d’écriture et insista sur l’originalité du thème choisi.  La performance d’écriture débuta dès lors à me hanter.  Plus tard, en secondaire V, j’ai eu la chance de côtoyer un professeur passionné.  Il a su me transmettre les bases de cet art en me faisant lire tous les classiques fondamentaux du 16e au 20e siècle.  Et il m’initia aux mondes uniques de Charles Baudelaire et de Théophile Gauthier qui furent hors de tout doute mes accompagnateurs en cette fin d’adolescence.  J’échouai donc sur les berges de l’art théâtral.  Je me plais ici à citer tous les titres des pièces de théâtre que j’ai écrites :

-Pace sempe (Paix toujours)

-Le vieillard sans soleil

-Cadavre et belle-maman

-Bitte bleue

-Rubycon Wollonstrô

-Les chroniques du docteur Lèchefer *

-La cuve cubique

-Le technicien et la balance*

-L’instable humeur

-La revanche de la végétation (inachevée)

*D’après le texte original mais génial de Sir Yvon Tremblay à Nazareth.

Après une de nos premières présentations théâtrales, ma mère vint me voir en coulisses et s’adressa tout à coup à toute l’équipe.  Elle employa alors ces mots : « Voyez-vous, le problème, c’est qu’un public veut sentir que les personnes qui conçoivent et donnent le spectacle l’aime.  Or, dans votre cas, on a plutôt  l’impression que vous voulez qu’on vous aime.  Ça marche pas.  Pensez-y !  Ça marche pas. »  Et elle repartit.  Cette fois-là, ma mère m’a prouvé que bien que les mots étaient là, il y manquait l’émotion…  Toute qu’une leçon !...  En fait, l’évolution dans le monde de l’écriture et du jeu théâtral peut être génial…  En autant qu’on désire s’y insérer.

Et des paroles de chansons

Toutes sortes de choses qui nous ramènent

Et des musiques, inspiration

Sommes-nous même des phénomènes

 

Mars 2007

Ma mère a cité, alors qu’elle définissait une pièce de théâtre que j’ai écrite : « En tant qu’auteur de l’auteur, j’aimerais vous amener ma critique… Etc… »  Ma mère a dit « en tant qu’auteur de l’auteur »…  Génial !

Ma démarche artistique m’a amené de fabuleuses rencontres…  De Tiwi à Gaby en passant par Martin Murray et tant de géniaux collaborateurs…  Ma démarche artistique m’a amené de fabuleuses rencontres.

OH YÉ !...

 

28 mars 2007

Il est 23h51.  Je suis actuellement à la « dompe à neige de Chicoutimi », assis dans mon truck 10 roues et c’est appuyé sur la volant que ce petit livre reçoit les mots que je lui destine.  À ma gauche, l’Everest de neige qui a tombé sur la ville pendant l’hiver et qui s’étend sur ½ kilomètre et sur une hauteur d’au moins 10 mètres.  À chaque fin d’hiver, son immensité m’étonne…  Dire qu’à la mi-juillet, il sera fondu !...  J’adore cette planète !...  À ma droite, d’hirsutes reliefs formés par d’autres tas de neige qu’on a déposés là, faute de place ailleurs.  Dans le ciel, un ¾ de lune croissante qui laisse presque apparaître le fameux visage qui revient chaque mois ; souriant mais interrogatif ; fascinant…  Je me sens bizarre ; comme obligé d’analyser attentivement la situation.  À prime abord, je dois envisager qu’à l’avenir on me situera dans un monde sérieux, sujet aux préjugés, presque constipé et que ce sera à moi et à moi seul de prouver les nuances au fil des conversations.  Le silence ne pouvant que confirmer l’appréhension précédente.  Je devrai choisir aussi entre le cocon qui normalement enrubanne les « vieillissants » ou la ferme envie d’en sortir et d’habituer mon corps et mon esprit à devenir papillon et à continuer d’explorer les diverses facettes de cette fantastique vie.  Je dois absolument poursuivre mes rêves les plus débiles et leur consacrer, à titre d’hommage vital, toute l’énergie dont ils ont besoin pour entretenir ma flamme personnelle…  Je souligne l’importance fondamentale de saluer quotidiennement la rivière qui borne notre terrain et qui s’étend comme un chaleureux foulard vers tous ceux que j’aime !  Et que l’eau que l’on puise, 230 pieds sous la maison, abreuve de sa pureté nos joies, nos peines et tous nos espoirs.  J’apprécie en ce moment, la larme à l’œil, l’incroyable opportunité d’être père et d’ainsi réaliser, sans nécessairement le comprendre, un contact absolument réel avec l’infini.  J’espère vieillir en chassant de mes pensées les stéréotypes abrutissants véhiculés par la haine, la médisance et la jalousie.  J’avoue conserver, sans obsession, la hâte de voir ma d’job m’apporter un jour les vacances et l’opportunité de confortabiliser certaines zones de mon existence.  Je confirme l’amour que j’éprouve pour Thérèse Lafrenière ; un sentiment solide et dénudé d’obligations astreignantes.  Une véritable complicité dont les bases se redéfinissent chaque jour, chaque heure, chaque fraction de seconde ; d’elle-même….  Je prends une pause pour savourer cet unique instant de ma vie…

Il est minuit 39 minutes, nous sommes le 29 mars 2007.  Ça y est !...  J’ai cinquante ans !

 

Vrouft II

Quatorze chiens tirent un traîneau

Sa charge aurait tant à nous dire

Que lorsqu’on devient le fardeau

On n’a plus le goût de sourire

Deux milles flamands flambent à l’aurore

Et leurs ailes n’ont plus rien à dire

On peut s’envoler vers la mort

C’est la vie qui nous fait revivre

Je mens, je meurs, je m’élimine vite

Et rien en moi n’a le goût de survivre

La peur n’atteindra jamais sa poursuite

Si celle qui craint a refusé de vivre

Et l’herbe coule et la rivière pousse

Et rien en eux n’atteindra le bon port

La grippe nous parle à chaque fois que l’on tousse

C’est la magie qui nous jette des sorts…

 

***

Dans les pièces de théâtre que j’ai énumérées précédemment, j’ai volontairement oublié « L’option chimère », car je désirais t’en parler plus précisément.  J’ai écrit et pensé et écrit et corrigé et écrit et mijoté et écrit cette pièce de théâtre en deux nuits de pleine lune.  C’est probablement la plus grande dose d’inspiration et de réalisation que j’ai reçue dans ma vie.  C’était vraiment comme si le crayon agissait tout seul ; que ma main était là seulement pour le tenir et non pour le guider…  Les mots prenaient forme sur les feuilles de papier et les personnages se définissaient d’eux-mêmes.  La pleine lune me pilonnait de ses rayons magiques et j’écrivais ; heureux de le faire ; privilégié parmi les privilégiés…  C’était l’hiver que j’ai passé seul dans le fond du rang à Ferland.  Avec deux chiens et un cochon.  Parfois, la nuit, je gobais une mescaline et je partais avec ma canine escorte sur le dessus de la montagne, en raquettes, là où le sorcier avait érigé son étrange autel…  Et je m’allumais un batte de hash, overdose su’a mess et je contemplais l’époustouflante force de l’univers.  Et j’étais fier d’avoir écrit « L’option chimère » en deux nuits.  Ces moments uniques plongés au plus profond de moi-même n’ont pu que contribuer à ma folie contrôlée…  Je n’aurai jamais de difficulté à l’admettre.  Mais le fait d’avoir posé ces gestes peu communs, le fait d’avoir parcouru ces montagnes inondées de neige en raquettes en pleine nuit de pleine lune, g’lé comme une balle, n’ont pu qu’améliorer ma recherche d’originalité terrienne.  J’en suis sûr !...

 

Mai 2007

L’idiotie totale se concrétise dans les cosmétiques pour hommes !  Les crèmes « soins pour la peau », l’épilation, le maquillage masculin, le narcissisme mâle poussé à l’extrême.  L’homme qui angoisse sur son épiderme signe le terme de l’évolution humaine.  Je ne parle évidemment pas ici de maladie genre « acné » ou « psoriasis », mais criss, je parle des ostis d’tapettes qui nous répètent l’importance d’une peau lisse, bien émulsifiée, d’un sourcil égal et lisse, d’une joue glissante pour qu’elle soit invitante et d’une dent blanche, étanche aux caries et surtout libre de nicotine…

Sacrament qui m’énarvent !

Triomphe de l’industrie cosmétologique !

 

***

 

Corder du bois est un geste noble et solide ; insensible.  Surtout quand la « shed » à bois est à une vingtaine de mètres de l’endroit où l’on vous dompe les bûches.  C’est le cas chez nous.  Et tout le sens du mot « corvée » prend forme quand vient le temps du transport.  Il faut se mettre en mode automatique, ce qui nous permet de répéter le cycle sans se poser de question et sans se lamenter.  Tous les muscles du corps participent.  C’est pourquoi l’intervention intellectuelle doit être mise en veilleuse.  Il n’y a pas de question à se poser, il ne faut pas chercher à poétiser l’instant et ne jamais se plaindre du manque d’aide ou de temps.  Il faut le faire, il faut que ça se fasse et ainsi va la vie.

 

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Il faut avoir du plaisir à essayer des choses.  Si possible en groupe…  Pour socialiser en dehors des familles, des garderies, des écoles et des groupes restreints d’ami(e)s intimes.  C’est dans les louveteaux que j’ai acquis mon désir fondamental d’explorer ma vie au travers des autres.  À chaque semaine nous avions une réunion pendant laquelle on nous demandait fréquemment de monter un « sketch ».  Ce furent mes premiers pas théâtraux.  Puis à chaque été, le camp, d’une durée entre 10 et 14 jours, en plein bois, avec des épreuves, des initiations, des aventures rocambolesques, d’extraordinaires souvenirs blottis au fond de mon cœur et que je tente de vous communiquer au compte-goutte, au travers des « courses au trésor », des explorations sur des lacs, des promesses et des délires que je vous fais vivre !  J’ai aussi fait partie d’équipes sportives, hockey et baseball surtout, ainsi que d’une troupe de danse folklorique au secondaire.  Mais aucune de ces participations n’égalera jamais la débrouillardise, la créativité et l’enthousiasme que généra en moi le scoutisme.

 

***

 

La créativité est partout autour de nous, dame Jessica.  Et ce que j’apprécie profondément de vous, c’est que vous me le prouvez à chaque fois que l’on se rencontre.  Que ce soient vos photos découpées et soigneusement installées un peu partout ; vos interventions dans les arts picturaux et les bricolages ; vos dispositions d’objets hétéroclites dans vos univers ; vos tissus inusités qui enveloppent, qui détendent les atmosphères…  Quelle perte de vie pour ceux qui ne font qu’acheter et empiler les choses !  N’oubliez jamais la magie que vous opérez, chaque fois que vous flirtez avec la transformation créative ; c’est de l’alchimie moderne, propre à vous…

 

Exercice 1

  S’ils suintent en sortant

S’ils entrent à nouveau en laissant s’échapper de fines gouttelettes

S’ils se mettent à parler et qu’on n’comprend rien

S’ils pensent à des choses qu’on ne considère plus depuis longtemps

S’ils s’imposent

S’ils suggèrent des gestes qu’on ne pose jamais

S’ils s’imprègnent comme des taches que l’on tâche d’oublier

Prenons une pause

Et chassons-les dans l’oubli

 

***

 

La pire des gaffes dans une vie est de suivre l’osti de ligne droite que la sotteciété veut imposer !  L’appareil gouvernemental est installé pour engourdir la ferveur instinctive.  Il répugne toute initiative motivante pour le peuple, de peur d’avoir à participer à un éveil collectif capable de révolutionner l’appareil administratif !  Un jour, il y aura plus de votes annulés que de votes attribués aux quelques partis existants !  Ce sera le plus grand événement politique de tous les temps !  Plus de 90% des gens iront voter en mettant des X partout sur le bulletin de vote !  Ça voudra dire « on fait le grand ménage, ostie ! »

 

***

 

Que peut-on obtenir par la vanité ?...  Qu’est-ce que ça peut donner de toujours regarder les autres à partir d’un piédestal ; en se croyant plus beau, plus fin, plus intelligent ?...  Où ça peut mener, quand on considère que le centre de l’univers se développe à partir de nos opinions, de nos agissements et que seul notre entourage a le droit de s’élever pour devenir meilleur et aspirer aux plus hautes sphères de la société?...  Quand peut-on freiner l’admiration personnelle si elle atteint une vitesse telle que même un mur de briques ne réussirait pas à l’arrêter ?...  Que donne la vanité?...  Rien ; sinon l’horrible illusion d’avoir « bluffé » le peu de convictions qu’il nous restait.

 

Juin 2007

Les sports sont une formidable mutation des instincts d’origine.  La compétition s’organise à partir d’obscurs racoins du cerveau.  La performance naît d’une parfaite symbiose de la force et de la vitesse.  Le goût de se dépasser est probablement la seule valeur humaine qui a réellement l’envie de côtoyer la performance lors d’une compétition sportive.

 

***

 

Voir : La rivière qui nage dans le paysage, le corps de l’être aimé, de merveilleux souvenirs quand on ferme les yeux, des animaux, des insectes, des objets qu’on acquiert parce qu’ils nous parlent, le cœur de l’être aimé, tous les gens qu’on aime, un éclair, des nuages, des tonnes de pluie, une enveloppe qui nous est adressée, un film qui nous arrache l’âme, un brin de blé.

 

Entendre : Un instrument de musique qu’on utilise pour la première fois, la voix de l’être aimé, le bruit des manèges, des animaux, des insectes, les premiers mots de notre enfant, la voie de l’être aimé, une foule durant un show de Yes, un tonnerre, une tempête de neige, une récréation près d’une cour d’école, des cloches.

 

Goûter : Un réveillon qu’on a cuisiné et que le monde apprécie, la bouche de l’être aimé, le gâteau d’un anniversaire-surprise qui nous est destiné, du steak, des chips, une chocolatée saveur, un brin d’herbe quand on est enfant, les lèvres de l’être aimé, un hot-dog chez Polo, le premier café espresso, de la réglisse noire.

 

Toucher : Les cordes d’une guitare, le corps de l’être aimé, des tissus qui développent en nous toutes sortes de sensations, de la plasticine, de la glue, une galle sur un vieux bobo, le cœur de l’être aimé, les gens pendant un show qu’on a créé, l’enveloppe qui renferme une lettre d’amour.

 

Sentir : Des draps qui ont séché sur la corde à linge, la peau de l’être aimé, un lac en plein bois à la levée du jour, le bois de chauffage, de l’abondance, le souffle de l’être aimé, la confiance qui nous habite lorsqu’on fait un show, le café, des toasts, un vieux vêtement.

Mais j’entends la vue qui sent le goût qui touche à la vie.

 

***

 

Il y a longtemps que je n’ai pas eu autant de plaisir à écrire…  Le cadeau que je suis en train de te construire, Jessica, est sans aucun doute le plus beau cadeau que j’aurai fait à quelqu’un dans ma vie.  J’ai commencé ce présent depuis presque huit mois et j’y consacrerai plusieurs lunes encore…  Et je me surprends moi-même à continuer…  Comme si le souffle de l’écriture perdurait malgré mon essoufflement.  Je me demande souvent jusqu’où l’inspiration me suivra…  Car il y a tant de pages à remplir !...  Je t’aime, p’tit Mini ! XXX

 

***

 

Jour 1 : Y a pas à dire, cet endroit porte drôlement son nom : « Portage des Roches ».  Avoir su, j’aurais tenté de trouver quelque chose à habiter à « Portage des Sables », ou encore « Portage des Affaires pas pesantes », mais que veux tu !  On demeure à « Portage des Roches », donc portons des cailloux. 

 

Jour 2 : Le découennage se fait mieux de façon progressive ; du moins c’est ce que j’en pense.  Il a fait 30 degrés à l’ombre.  Chaque mouvement effectué me délivrait d’une once de sueur et c’est tant mieux.  Le découennage progressif s’explique de la façon suivante : je découenne un boutte et je nivèle immédiatement ; à grands coups d’efforts.  En général, le peuple préfère compléter les étapes, c’est-à-dire tout découenner puis tout niveler.  Mais tu sais comme j’aime transgresser les normes établies, ma fille…  Alors on découenne un boutte puis on fait d’autres choses pis on redécouennera plus tard.  J’estime avoir environ le tiers du travail accompli.

 

Jour 3 : Toujours 30 degrés…  Sti qui fait bô…  L’outillage, quoi qu’on en dise, est vraiment important.  Je peux parfaitement comprendre que l’on puisse bâtir une maison avec une roche plutôt qu’un marteau et une égoïne à la place d’une scie électrique…  Mais faut vraiment vouloir.  Dans mon cas, j’ai dû me rendre à l’évidence qu’il me manquait un outil essentiel à ma démarche : une pioche.  Je disposais depuis le début de mon entreprise de l’appareillage suivant : une brouette, une pelle ronde, un rateau, un galon à mesurer et un niveau…  Mais j’ai rapidement réalisé l’inévitable besoin d’une pioche, étant donné le nom de l’emplacement où est située notre maison (voir jour 1).  Un immense rocher est apparu vers 18h30.  J’ai mis une bonne heure à le dégager mais j’ignore si je pourrai le déplacer.  Tel un archéologue, j’ai soigneusement éliminé ce qui le recouvrait pour finalement admettre son gigantisme.  Tout le long de l’opération, je m’adressais directement à lui, lui rappelant que je suis le petit-fils d’un tailleur de pierre; que mon parrain avait su dompter des masses calcaires cent fois supérieures ; à quel point je l’utiliserais à même le décor que j’étais en train de faire naître si je ne pouvais l’enlever de là…  Puis la pluie s’est jetée sur moi et la fatigue de ma journée d’asphalte m’ont convaincu que c’était assez pour aujourd’hui.  Je lui ai lancé un dernier regard et sous mes yeux satisfaits de cette nouvelle étape, on pouvait remarquer un large sourire épuisé.

 

Jour 4 : 27 degrés, plein soleil mais un petit vent à l’occasion ; beaucoup plus agréable pour le gros travail physique.  Je suis particulièrement fier de pouvoir accomplir ces lourdes tâches de corvées.  Ma d’job d’asphalte n’a plus besoin d’être décrite et mon entreprise à la maison achève.  J’aurais pu terminer le creusage-nivelage.  Transport vers le « dos de baleine » ce soir mais j’ai préféré faire une bonne vérification du niveau des travaux.  Ça se présente très bien…  Tous les muscles de mon corps participent et veut-veut pas, on se sent plus fort, plus dynamique, prêt à faire face à toutes sortes de situations.  On est aussi beaucoup plus alerte.  Ouais…  J’pense ben finir demain.

 

Jour 5 : C’est fait !  On a déroulé le tapis de pelouse juste après avoir terminé de placer les premiers rochers qui délimitent l’espace qu’occupe l’excavation.  Chaque brouette pesait au moins cent livres et j’en ai transporté une quarantaine derrière le dos de baleine.  2 tonnes de terre, de sable et de roches que j’ai déplacées à bout de bras.  Désormais, nous contemplerons le feu à partir d’un terrain plat, sans pente dérangeante.  Il sera borné de pierres disposées en muret ascendant ; presque pyramidal.  En plein centre mais au fond, le gros rocher à qui j’ai rappelé mes origines continuera de trôner sur le lieu pour nous rappeler ses propres origines qui naissent au « Portage des Roches ».

 

Exercice 2

J’irai vous voir à gauche

Tout près d’un restant de soleil

J’apprécierai le charme de la chaleur humaine

Et sans savoir pourquoi

Je blottirai vos deux épaules au creux de mes paumes solides

Et la pression sincère que j’exercerai

Vous prouvera mon amour

 

Et je glisserai à droite

Au creux d’un vieux cratère lunaire

J’évaluerai c’que vaut une franche accolade

Et sans savoir pourquoi

Je penserai aux beaux moments qu’on a passés ensemble

 

***

 

Ils sont tous là à discuter de la beauté de leur « fifth wheel ».  Ils me demandent mon opinion.  Je leur réponds que je préfère 100 fois plus la beauté d’une vieille grand-mère qui sourit sur une galerie.

 

***

 

Il ne faut surtout pas que l’envie de terminer quelque chose comme t’écrire ce livre l’emporte sur la qualité de réalisation.  Si j’ai trop hâte de compléter la phase créative, je générerai toutes sortes de trucs pour finir plus vite….  Comme par exemple ÉTIRER un mot et passer de l’espace à gauche.  Ça donne un beau look et ça permet d’avancer un peu plus vite dans le remplissage de pages.  On peut aussi VERTICALISER un autre mot.

 

***

 

Je rends ici hommage à la beauté de ce livre.  Quand on remarque sa couverture, on la trouve solide, magnifique dans ses teintes de rouge-fucké…  Y a les traces de noir patinées en surface qui donnent un air vieillot…  Et que dire de ces enluminures dorées, savamment travaillées avec courbes et pointillés…  Et la robustesse de l’épaisseur de la couverture…  Avec le rabat aimanté qui rejoint parfaitement le motif de l’autre page…  Ce livre est formidable, Jessica !  Quel bô cadô !  Dire qu’il te revient bourré des délires de ton paternel !  Les pages sont aussi excessivement plaisantes à compléter.  Le papier reçoit bien l’encre et mes idées glissent aisément dans l’ensemble de l’œuvre.  Elles se confortabilisent.  Ça me donne tout à coup l’envie de t’écrire la seule formule magique que j’ai pu inventer dans ma vie.  Elle provient de « L’option chimère » ; quand Glousme veut ressusciter sa mère.  La voici donc : MERERICHE SATAZIOUME PHANTASME PHYLLIS ORGALISME SYMÉTRANT ALCALINE SYPHONNANTE DOUX DÉLIRE D’UN AUTOMNE SAVOUREUX À MA TEMPE MAGNIFIQUE GESTION ONDULEUSE SIGNIFIANCE MONDE FOL ANASTÈRE.

Ce livre reçoit ici la mémoire de mon grimoire.  Il devient partie prolongeante, extension nécessaire de mes idées-souvenirs….  Je vous les offre, dame Jessica.

 

***

 

Dans les plus beaux moments de la vie, il y a évidemment les retrouvailles avec les vieux amis.

 

***

 

Ils grimpaient en pleine montagne

Sans même percevoir l’horizon

Et chaque élément de la gang

Formait son sens de la vision

Puis au milieu de la brousse

Une clairière s’est dessinée

Ce sont les obstacles qui poussent

À conquérir sa destinée

 

St-Jean-Baptiste 2007

Un homme était assis devant la resplendissance naturelle.  Il contemplait les montagnes de roche, les arbres, la rivière et réussissait même à faire abstraction des choses qui le dérangeaient.  Et à tous les matins lorsqu’il venait s’asseoir devant ce magnifique tableau, il oubliait l’essence matérielle de la vie ; ces maudites obligations salariales ou familiales astreignantes, parfois baignées de maladie ou d’obstinations dérangeantes.  Il se savait choyé ; privilégié de profiter d’un lieu aussi sain.  Puis cet homme décida de poser une action.  Il entreprit de se rendre aux plus hautes instances gouvernementales pour leur prouver leur incompétence.  Il consacra énormément de temps et d’énergie à monter son dossier, à préparer ses arguments en vue d’éventuelles discussions acharnées et à prévoir toute intervention du clan ennemi apte à nuire à ses desseins.  Il rencontra plusieurs personnalités spécialisées dans le domaine, négligea sa compagne et ses enfants, perdit plusieurs amis pour avoir accès à des sources de financement pas très catholiques et modifia la plupart de ses propres comportements.  En fait, on ne le reconnaissait plus.  Et pourtant tous les gestes qu’il avait posés pour amener son « action » à terme étaient dans l’unique but qu’on le reconnaisse.  Qu’on le reconnaisse comme celui qui avait ébranlé l’appareil gouvernemental, qui avait instauré de nouvelles façons d’agir, qui avait réussi quelque chose de si important !  Beaucoup plus tard, il retourna s’asseoir face à la resplendissance naturelle.  Il contempla la montagne de roche, les arbres et la rivière mais cette fois, il ne put réussir à faire abstraction des choses qui le dérangeaient.  Il se mit alors à hurler, engueulant le paysage parce qu’il ne lui apportait plus ce qu’il espérait de lui.  Puis il se calma.  Il constata alors que le laps de temps qui venait de s’écouler (des mois, des années peut-être) et qu’il avait consacré à son « action » aurait très bien pu se faire tout en contemplant son magnifique tableau.  Il regretta l’instant profondément et se sentit tout à coup vieillir.

 

Vrouft 3

Une émulsion de mains démises essaie de s’accrocher à nous.  Faites attention devant l’église.  Elle est dirigée par des fous.  Des escaliers qui s’agenouillent, des Jésucris pissent les rubis.  C’est quand l’infini nous bafouille que la religion quitte son nid et qu’elle erre.

N’ayons plus peur de l’évasion et expirons toutes nos angoisses.

Il n’y a que la création.

Il n’y a que la crétion.

La créton.

La crton.

Crtn.

Rtn.

Rn.

R.

 

***

 

Autre problème probant du vieillissement, c’est la fuite des belles saisons et l’interminable prolongation de celles qu’on aime moins.  Si on préfère la chaleur, l’hiver semble aussi dur à partir qu’une tache de sauce à spag sur un vêtement qu’on aime.  Si on préfère les saisons froides en général, on aime l’été quand même.  L’endroit où on a déniché notre maison est idéal autant pour les solstices que pour les équinoxes.  Mais criss que les périodes estivales sont belles.  Même quand y mouille, on conserve notre admiration pour les lieux qui nous encerclent.  Et quand le soleil perce et qu’il trône sur l’ensemble du terrain, on s’abandonne aux tonnes de rayons solaires qui nous traversent et qui nous bercent par leur chaleur et leur enveloppante énergie.  Les hivers sont aussi très beaux.  Une neige immaculée s’empilant sous les fenêtres vers la rivière, des arbres majestueux ployant sous la charge blanche et une faune presqu’inexistante ; laissant l’air imprégné d’un étrange silence.  Mais dans mon cas rien ne vaut l’été et viarge qu’il est court !

 

***

N’OUBLIONS JAMAIS LE MERVEILLEUX MOMENT QUE NOUS PASSONS ENSEMBLE.

 

Juillet 2007

Nous sommes en fait en août…  Je n’ai rien écrit en juillet.  Trop de visites inoubliables, trop de boisson, de fumage, tant de discussions décousues et pourtant si profondes…  Et le soleil, rare mais si puissant lorsqu’il apparaît…  Et ce retour en fin de mois sur la distance qui nous sépare, l’ennui qui nous envahit et qu’on contrôle lentement, au rythme du temps qui passe…  Ce fut un mois de contemplation, d’intenses vibrations, presqu’entièrement consacré à ma famille…  Le temps qu’elle arrive, qu’elle soit là, qu’elle reparte et qu’elle disparaisse progressivement du fond de mon horizon paternel.  Chaque parcelle de visite de mes filles me comble au plus haut point ; c’est ça la vie…

 

Août 2007

J’installe lentement mes neurones en mode créatif.  Je déplace plein de priorités quotidiennes sur les côtés pour laisser le centre de ma lucidité libre de toutes contraintes.  Et j’attends la sacro-sainte inspiration.  Elle demeure toujours d’une impolitesse caractéristique ; décidant de se manifester en pleine nuit ou au beau milieu d’un travail exigeant.  Et on doit la saisir lorsqu’elle passe ; quitte à abandonner une activité passionnante ou à garer son véhicule sur le bord de la route pour prendre le temps de noter sur un papier l’idée attendue.  Je n’sais pas si je réussirai à combler les attentes du metteur en scène qui m’a suggéré l’écriture d’un théâtre en pièces…  Mais j’écrirai quelque chose.  Et comme toujours, à chaque fois que j’ai pris un crayon pour transmettre aux feuilles mes idées, c’est le résultat final qui parlera.  Et je ne pourrai, comme les autres, qu’écouter ce qu’il a à dire.  C’est un jeu de corde raide ; d’équilibre sur des axes inconnus et instables.  Je propulse des opinions et les personnes visées les reçoivent.  Puis j’attends les réactions.  Qu’elles soient bonnes ou mauvaises ne peuvent en aucun cas jeter un doute sur ma performance.  J’exécute, je façonne, je laboure ma cervelle jusqu’à ce qu’elle donne la récolte envisagée.  Si sa saveur et sa quantité ne réussissent pas à satisfaire ceux qui y goûtent, je ne peux m’en faire un calvaire.  J’ai réalisé quelque chose et je l’apprécie pour son ensemble ; je ne peux m’attarder à trop de nuances.  C’est le lot du créateur de textes.  BOLDO X.

***

C’est fou comme depuis que j’ai atteint cette cinquantième année, je remarque le vouvoiement…  Même si auparavant un quidam me disait « vous », je n’en tenais pratiquement pas compte.  Mais criss, on insiste vraiment ces temps-citte !  Tout le monde me dit « vous », s’ti ! Comme si y m’était apparu deux immenses rides en forme de V sur les joues ; ma bouche incarne le O et mes cheveux-mèches dans l’toupette proposent sûrement le U et le S.  En fait, il ne manque le « au fond là-bas » pour me replonger en pleines répliques théâtrales que j’ai jadis écrites.  Remarquez que le « vous » ne me rend pas mal à l’aise ; il me fait plus souvent sourire, disons.  Et il m’intrigue…  Parfois je me surprends à me demander : « Pourquoi cette personne me vouvoie-t-elle ?  L’impression-je ?  Me craint-elle un peu ?  Me considère-t-elle comme un illustre inconnu, une difficulté d’approche, un vieux qu’il convient de vouvoyer, étant donné les coutumes du peuple auquel il appartient ?...  À quelques occasions, le vouvoiement m’a déçu puisque j’espérais un tutoiement de la personne que je rencontrais.  Le fait qu’elle me dise « vous » me plongeait dans les méandres du doute.  L’impressionnais-je ?  Me craignait-elle un peu ?  Me considérait-elle comme un illustre inconnu ?  Une difficulté d’approche ?  Un vieux qu’il convenait de vouvoyer, étant donné les coutumes du peuple auquel elle appartenait (tiens, il me semble avoir déjà écrit ça…) ?  En tout cas, c’est clair : depuis que j’ai 50 ans, j’admets que je l’ai.  Et n’oublions pas les nouvelles douleurs, dans le coude droit et sur la main gauche.  Comme des enflures persistantes dues à l’effort depuis que j’ai osé creuser ce satané terrain…  Et mes cheveux qui blanchissent…  Je ne m’imaginais pas les sourcils blancs et pourtant, progressivement, un par un, ils s’enneigent, comme une neige éternelle.  Installée sur la cime d’une montagne que je représente probablement pour mes enfants…  Mais si je n’étais qu’une colline, ou pire encore, une plaine, une plaine pleine d’horizontalité régulière, prévisible plate…  J’espère être une montagne…  Le croyez-vous ?

 

***

 

Je m’ennuie d’avoir un chien ; ou une chienne.  C’est pourquoi je parle à mes arbres comme si c’étaient des chiens ; ou des chiennes.  Je les flatte, les rassure, je leur rappelle fréquemment l’immense plaisr que j’ai de vivre avec eux.

 

***

C’est un exercice standard de base.  On met de la musique plein nos oreilles et on écrit…

 

Exercice 3

N’utilisons que l’espace nécessaire pour bien connecter l’univers de nos connaissances.

 

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L’utilisation d’un manège est probablement la manière la plus intéressante de visiter des états altérés d’esprit sans substances illicites.

 

***

 

Les anniversaires sont de merveilleux points de repères.  Isabelle : le début de la fin de l’hiver…  Jessica : le plein cœur de l’été.  Roxane : la valse des couleurs automnales.

 

***

 

Je n’humerai le parfum d’une autre que si elle l’a laissé trainer quelque part.

J’illuminerai les ténèbres d’une autre lorsque la lumière qui me côtoie se sera éteinte.

Je contemplerai bien des temples avant qu’une silhouette ne me jette hors de moi.

J’effectuerai tant de travaux que ma peau se moulera à mes exécutions.

J’avalerai tous les poisons que me confieront les fabricants d’antidotes.

Je roulerai à la vitesse de mes guides.

Je ne contesterai que les choses qui me laissent d’étranges doutes.

Je parlerai quand bon me semble puisque c’est la plus grande richesse que je possède.

Je remercierai souvent l’énergie fondamentale, puisqu’elle m’a amené là où je suis présentement.

Je dégusterai chaque parcelle de la vie.

J’ignorerai sans aucune amertume les combats inutiles, les échanges insolites et les vaisselles mal lavées.

Si je fais tout cela, ça devrait bien aller.

 

***

 

Elle ne m’aurait jamais écrit si je ne m’étais pas fâché.  Et pourtant la lettre que je lis ne pourra pas me consoler.

 

Osez ouvrir les orifices.

 

***

 

J’ai écrit dans l’autre sens précédemment.  C’était normal que pour stabiliser l’ensemble de l’œuvre je me mette à pondre un texte dans le sens opposé.  Rien à dire, mais tout à repositionner dans le bon ordre des choses…

 

***

 

Il suffit de faire en premier le dessin et d’insérer ensuite des mots.  Ils n’ont pas besoin d’être cohérents mais au moins on tente de leur faire dire quelque chose d’intéressant.  Ensuite, on complète l’exercice en racontant presque rien ; juste assez pour ne pas ennuyer l’éventuel lecteur.  Et puis on se laisse aller ; à l’abandon…  C’est dans ces drôles d’exercices qu’on se retrouve vraiment.  On aligne des mots et c’est tout ce qu’il faut !

 

***

 

Nous n’irons jamais en nous-mêmes

Il y a bien trop de choses cachées

Les rencontrer s’rait un problème

Nous n’sommes pas prêts à discuter

 

Septembre 2007

Une fois de plus installé dan la cour, face à la rivière, en plein soleil, me demandant pourquoi tous ces beaux rayons chaleureux ne se sont-ils pas déversés sur nous en plein cœur de l’été, alors que la rivière était baignable…  L’été 2007 aura été froid, pluvieux, quasi-pourri.  Ça pourrait signifier un hiver long et difficile à supporter.  Mais il n’en sera rien.  Si les saisons se mettent à suggérer nos humeurs et si nos capacités à braver les intempéries dépendent d’elles, qu’en sera-t-il lorsque les véritables épreuves de la vie viendront nous visiter ?  Banalisons donc la température.  Ne lui laissons jamais la place qu’elle ne mérite pas.

Ce qui m’amène donc à aborder le thème des passages dépressifs.  N’essayons pas de nous le cacher, nous en avons tous.  Pour certains, ils sont infranchissables mais en général, nous sommes bien armés pour affronter ce redoutable ennemi.  Et l’une de ces armes, c’est l’entourage.  Que ce soient des amis, des parents ou d’occasionnels confidents comme les professionnels de la santé, le fait de parler de nos états d’âmes négatifs aux autres s’avère souvent une excellente panacée.  En fait, c’est l’accumulation qui conduit tout droit à la dépression.  Donc, n’hésitons jamais à déverser le trop-plein à nos proches.

Gardons aussi toujours à l’esprit que si c’est nous qui devenons à personne à l’écoute de l’autre, il faut absolument éviter de se laisser remplir à ras-bord.  Gardons toujours une réserve d’espace vital qui nous permette de respirer et d’éviter une noyade dans les tourments d’ennui. 

Il est de plus primordial d’être en mesure d’identifier le déprimé chronique.  Celui qui est né dans la dépression, qui a vécu en dépression et qui ne pourra malheureusement jamais s’en sortir sans l’aide d’une savante médication.  Il est en général le plus susceptible de nous noyer dans ses problèmes.  C’est pourquoi je suggère une bonne veste de flottaison avant de nous laisser baigner dans sa mer de chimères.

 

***

 

Le problème pour un halluciné comme moi est de maintenir un contact constant avec la réalité.  C’est pourquoi l’achat de la maison fut bénéfique.  Cela m’oblige chaque moi à rencontrer les exigences monétaires qu’elle exige et me conserve ainsi en plein cœur des exigences sociales.  Les travaux qu’elle demande pour se maintenir en bonne santé ramènent aussi souvent le rêveur que je suis à l’âpreté quotidienne de la vie.  Enfin, je ne cache pas que la situation de propriétaire d’un morceau de planète apporte fierté et assises solides.  Comme si ça nous faisait un endroit où nous accoter quand les genoux nous fléchissent sous le poids de la vie…

 

Vrouft 4

N’allumons qu’un jeu de lumières

Au travers l’arbre de notre vie

Qu’il soit profond, juste et sincère

Le réveillon qui nous réjouit

Ne déballons qu’un seul cadeau

Celui que nous ne voulions pas

Comme si le laid devenait beau

Par l’émotion qu’il procura

Et puis mangeons, fêtons, dansons

Jusqu’à fatigue intolérable

C’est dans l’action que nous créons

Les souvenirs inoubliables

La fête n’aura comme seul mérite

Que les convives rassasiés

Avant que la vie ne s’effrite

Prenons le temps de célébrer

 

***

 

Faut-il avoir souvent pleuré pour se sentir délivré ?  Comme si le torrent de courant de nos larmes pouvait entraîner avec lui tous nos tracas, tous nos soucis, toutes nos peines.  Y a-t-il un barrage qui pourrait retenir le drame « suicidable » d’une mort injuste, d’une maladie salope, d’un enfant kidnappé ?...  Que représente ce cruel couloir qui condamne aux plus sombres racoins de la vie?...  Je n’irai pas plus loin.

Mais kriss ke dè foi l’havy hèdür.

 

***

 

Je crois que j’aurai de la difficulté à me séparer de ce livre.  Nous sommes devenus si intimes !  Il est une sorte de confident de vieil ami, de tchomme sur lequel on peut vraiment compter.  Il m’a connu dans tous mes états : fatigué, g’lé comme une barre de fer, saoul, à jeun, en extase sous un chaud soleil, grelottant près d’une pleine lune, devant un feu, dans un 10 roues. Sous l’influence bénéfique d’un candélabre à la table dans la cuisine, dans le décor discret d’une chambre sur le quai, sur la pelouse pas loin du quai…  À tant d’endroits…

Je pourrais demander qu’il se transmette de génération en génération.  Je pourrais espérer tant de choses pour ce livre…  Mais je n’en ferai rien.  Il se répercutera sur les chimères imprévues de la vie et échouera, comme tant d’autres avant lui, sur le récif incisif du hasard.

***

 

Le sapin et l’épinette (celui de la corde à linge) dans notre cour sont des mats de bateau qui nous transportent avec eux…

 

***

 

Ben plein devant l’feu ; j’vois presque rien…  Juste pour vous dire combien, comment, pourquoi j’vous aime, ma famille…  Oh yé !...

 

***

 

Les derniers jours de septembre sont ceux qui nous prouvent que l’hiver arrive.

 

***

 

Je parle souvent de l’ennui.  C’est normal.  Je vis avec.  Et vous aussi.  En fait, nous nous ennuyons mutuellement en admettant l’état des choses ; on vit à 400 kilomètres l’un de l’autre et il faut faire avec.  C’est comme ça.  Ainsi va la vie.  Dans mon cas, je le vis avec 25 ans de plus vieux que toi, Jessica.  Ça veut dire plus lourd, plus pesant, plus avec l’impression de manquer quelque chose de si important dans l’existence…  Mais je n’angoisse pas là-dessus ; je te le jure.  Quand c’est trop intense, je m’installe devant le quai, plutôt sur le quai et je décompresse toutes les zones intenses-actives de mon être.  Je les jette dans l’eau de la rivière et les regarde s’émanciper vers l’infini et je les trouve belles.  Comme des morceaux d’un univers qu’il m’est facile d’habiller.

Mais je m’ennuie souvent…

 

Octobre 2007

Pleine lune.  Parlons de la déception.  La plus lourde anticipée mais toujours inattendue.  Comme lorsqu’on pose notre candidature pour une jobbe, une audition, un loyer…  Ou encore comme une amorce d’aventure créative que l’on propose et qui est refusée pour toutes sortes de raisons.  Cette impression de pesanteur qu’entraîne irrémédiablement la négative d’un espoir varie avec l’âge.  Jeune, elle nous effouère comme une pâte à crêpe mais le dynamisme et l’énergie de la jeunesse escortent en général l’oppressé hors de la dépression-refus.  Vieux, on l’observe glisser sur une mer curieusement composée de confiance en soi, de doute, de certitude et d’hésitation.  L’urgence de l’âge arrondit les coins, allège la dure réalité, laisse la place à la satisfaction de l’acte posé en toute sincérité.  Il n’y a d’étape plus intéressante que celle qui consiste à avoir une idée, la créer, la soumettre à une éventuelle équipe et la voir mise de côté ; sans feeling apparent…  Parce que…  On peut s’en faire une montagne et y agglutiner les propositions qu’offrent la rancune, la colère et l’incompréhension, ou on peut, au contraire, y voir une plaine où s’accumulent les diverses contraintes qui meublent notre vie.  La montagne cache l’horizon alors que la plaine s’étire pour qu’on puisse y distinguer clairement les obstacles qui se dressent devant nous tout au long de notre vie.  L’âge, en fait, nous fait prendre de la hauteur.  Comme si on observait notre plaine personnelle de haut ; mais je ne parle pas ici de vol d’oiseau ; plutôt d’une tour d’observation mobile qu’on peut promener à sa guise.  On devient en quelque sorte immunisé à l’interminable douleur affective.  Comme si on avait moins de temps à y consacrer et qu’on préférait utiliser le temps qu’il nous reste à des formes d’existence plus intéressantes…

 

Exercice 4

C’est dans la plaine de la déception

Qu’iront se promener nos âmes

Les plus faibles y demeureront

Les fortes écraseront l’infâme

Et elles iront se saupoudrer ailleurs

Semant quelques flocons aux alentours d’un impossible

Laissant l’effluve frôler la cible

Celle que l’on vise

Celle qui se trouve à mille lieux du découragement

 

***

 

J’ai ramassé et brûlé les feuilles cet après-midi ; corvée automnale récurrente.  Ça ma rappelé quand je t’ai parlé du « cordage de bois » vers le début de ce livre.  Je te parlais de « geste noble et solide ».  En fait il n’y a pas de geste noble et solide.  Il n’y a que l’importance que nous accordons à nos actions.  Celles qui se répètent à l’occasion seront tantôt trippantes et parfois d’une interminable longueur.  Nous sommes les seuls juges du moment présent.  À nous d’y apposer le sceau du positivisme.

 

Novembre 2007

Je viens de finir de démolir le mur au sous-sol.  La menuiserie fut ardue mais relativement facile.  C’est l’électricité qui fut la moins aisée.  Je demeurerai toujours impressionné par l’électricité.  Tant de possibilités de prendre un choc, de cuire sur place, de provoquer l’étincelle qui pourrait brûler notre propre maison.  Et puis on joint les fils…  On suit la rigueur des normes à la mode et on complète cette phase électrique qui nous semblait presqu’impossible à l’origine du démolissage de murs.  En fait je suis aussi fier de mon courage que la fois où j’ai fait le mur de pierre autour de l’espace des jeux extérieurs.  Je m’assois devant ces réalisations et je savoure l’évolution de la zone « maison ».  En arrachant un pan de mur à la structure existante, je suis allé vérifier les entrailles de notre demeure.  En allongeant et déplaçant des fils électriques, je suis intervenu au sein même des organes vitaux.  J’ai sectionné des appendices, j’ai fracassé la forme osseuse, certaines actions me parurent tristes, alors qu’elles étaient si heureuses.

C’est parce que je pensais à toi, Jessica, savourant la possibilité qu’on puisse un jour prendre nos marteaux ensemble, en même temps, et démolir ou construire de fabuleuses réalisations !

 

***

 

La galle qui revient à coup sûr

Ne parle pas au pas souvent

 

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Pour moi, c’est le temps de Noël qui vient vraiment chercher le plus profond de moi.

 

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Une pomme se sauvait de l’arbre alors qu’elle n’était pas vraiment mûre.  L’arbre lui dit : « Reviens, petite sotte !  Dure comme tu l’es, personne ne te savourera ! »  À ces mots, la pomme fut happée par un renard et instantanément avalée.  On entendait le fruit hurler de très loin : « On verra ce que ça donne ! »

 

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Un mur à terre

L’espace qui se libère

 

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C’est le 15 novembre 2007 que j’ai obtenu mon poste permanent pour Ville Saguenay.  Ça signifie un genre de mec plus ultra dans le monde du prolétariat… : fonds de pension, habillement, jobs parfois fatigantes mais en général très très smooths, pas mal de vacances, de jours fériés, de congés de maladie, de temps accumulé qu’on désigne sous l’appellation de « compensable »…  Et un salaire absolument convenable.  En plus y a la possibilité de faire de l’ « over » à temps et demi ou à temps double !  C’est en fait la première fois de ma vie que je toffe une d’jobbe assez longtemps pour qu’elle puisse me procurer ce qu’on appelle en général « le confort matériel ».  La maison, les voitures, tout ce qui enrubanne notre vie…  C’est quand même une d’jobbe gigantesque…  Conduire les 10 roues avec les charrues attelées dessus,  contrôler les sableurs, les chenillettes et les immenses loaders, faire de l’asphalte à des températures bourrées de sueurs, dégager les tuyaux et absorber l’intolérance des compagnons de travail, observer le favoritisme, humer l’humeur intrigante des paroles dites à notre insu…  Camoufler habilement une gaffe monumentale, faire d’un geste inhabituel une marche à suivre, avaler d’insolites commentaires en sachant qu’il est inutile de les contester, savoir au travers tout ça comme il est bon d’être papa, pouvoir fournir le fourrage qu’ont besoin les petits pour se nourrir, pour avancer !

 

Décembre 2007

Je pense souvent au jour où mes petits-enfants viendront se promener chez grand-papa.  Ce sera sûrement une priorité lors de mes véritables vacances estivales, en 2009…

 

***

 

Nulle besogne n’a besoin d’être compliquée pour comprendre sa véritable saveur.  Même si on se plaît à compliquer la réalisation de l’œuvre, elle ne sera jamais plus que l’effort qu’elle a demandé.  L’ensemble a de satisfaisant les détails qui la meublent.

 

Vrouft 5

OK !  Cherchez les balivernes

Et grimpez-les comme l’alpiniste

Trouvez au fond d’une caverne

Les subtilités qui attristent

Puis placez-les en ligne tout au fond de la salle

Optez les angoisses qui vous cernent

Devenez traîneau qui se glisse

La main caresse l’épiderme

Puis la cervelle rapetisse

Ce sont les trésors découverts qui nous emballent

Enfin l’aurore qui traîne

Et le crépuscule qui résiste

Je cours à perdre haleine mais ne connais la piste

Ne sois jamais morceau de l’autre

Une entière entité

N’a de père que les filles

 

Jusme

 

Février 2008

Le poids du monde ne se pèse pas

Il s’équilibre

 

***

 

En fait c’est un p’tit présent pour libérer mes pensées, mon esprit, mes imageries tout en pensant un peu à ma fille ; Jessica…  Elle enlumine toujours mon être, elle y est présente pour m’épauler à chaque cafard, à chaque bien-être ; une chance qu’on est plogué d’même !  Ça sauve de tout !  J’aime à la folie, ma belle Jessica d’amour !...  J’ai une immense fierté d’être ton papa.  J’t’admiradore.  P’pa X

 

***

 

Elle ne ressemblait à nulle montagne.  Pourtant, on devait, il fallait la gravir.

 

***

 

L’été prochain, il va y avoir plein de feuilles dans les arbres…  Plein de belles grosses feuilles vertes et pleines d’été !...  Et l’hiver est si long !...

 

***

 

Qu’amènerons-nous le dernier jour ?  Une source sûre d’amour d’autrui ?  Un morceau d’ongle pour nous ressusciter ?

 

Exercice 5

J’y passerai probablement un bon moment de ma vie mais jamais, tu m’entends, jamais je ne m’attarderai devant les choses qui ne m’intéressent pas.  Je conserverai ces précieux instants à penser à toi, Jessica, à tes flôs, à l’entourage qui t’encercle.  Un bout du monde s’ennuie de l’autre, un morceau de nous ne sait pas vraiment ce qui se passe.  Ainsi va la vie !...

***

 

C’est une feuille de l’érable que j’ai planté dans la cour, l’été dernier.  C’est pratiquement la dernière qu’il restait sur le petit arbre à l’automne et j’attendais qu’elle trouve sa place dans le livre.  Je lui souhaite d’être encore là dans 100 ans.  Pour prouver l’humilité du monde végétatif et la solidité des gestes posés.

Bon voyage dans le temps, petite feuille…

 

Mars 2008

J’avalerai quelques pilules avant de vous écrire toute l’importance que vous avez pour moi.  Juste pour calmer l’ardeur utilisée…  J’analyserai fiévreusement le « pourquoi » de cet immense trait d’union qui s’est inséré entre nous.  Et sans panique, sans rancune inutile, j’admettrai qu’il devait être là.  Que la corrélation universelle n’a pas besoin d’opinion acariâtre.  Qu’elle se sucre et se glisse au gré d’un « bon me semble ».

Jolliette-Laterrière

 

***

 

Deux jours après mes 51 ans.  Ce qu’on acquiert, on le répand.  Et plus on prend de la place dans la vie des autres, plus on a l’impression de s’installer confortablement dans l’éternité.  C’est notre souvenir qui nous succédera.  C’est lui qui provoquera des réactions dans l’entourage qu’on aura fréquenté.

 

***

 

Mon frère avait 2 ans de plus vieux que moi.  Et à mon jeune âge, il me faisait jouer avec lui et ses amis.  J’étais donc pratiquement toujours le plus jeune de la gang.  Et puis depuis mes 50 ans, je suis souvent le plus vieux.  Veut veut-pas, ça fait un choc.  Un drôle de choc.  Pas choquant, mais surprenant…

 

***

 

La plus grande des pertes qu’aura subie l’humanité au cours de son évolution technologique est sans aucun doute « la pochette de disque vinyle ».  C’est un des plus beaux objets que j’ai découverts dans ma vie.

Renouvelable : puisqu’à chaque nouveau disque, on savourait une nouvelle pochette.

Hypnotisant : parce qu’on pénétrait l’objet.  Qu’on l’analysait dans les moindres détails.  Et qu’on était même prêt à inventer des rapports que même les concepteurs n’avaient pas envisagés !

Social : Nous pouvions deviner des traits de caractère à partir des disques que transportaient les individus…  Les pochettes étaient de dimensions généreuses !  On les voyait de loin…

Solide : Une pochette vinyle n’éclatait pas en miettes quand elle tombait sur la céramique.

Culturelle : Certains groupes entretenaient un aspect muséal de leurs différents albums.  Ils confiaient toujours au même artiste le soin de la réalisation de la pochette.  Comme le groupe Yes, par exemple.  Roger Dean peignait et inventait de magnifiques dessins-peintures et lorsqu’on enlignait les différentes pochettes l’une près de l’autre, on avait l’impression d’assister à une exposition dans un musée.

 

***

 

J’te vois venir, toi le chercheur

Avec tes yeux qui en disent long

Sachant que pour toi, le bonheur

C’est de trouver la solution

Mais…

Y a tout au fond de l’univers

Tant de questions, tant de mystères

Que d’en chercher les solutions

C’est se poser d’autres questions

Alors…

Attendons l’interrogation

Car nous ne sommes scientifiques

Sentons l’humeur, humons le son

Magnifions le magnifique

Tu sais…

Y a pas de véritable recherche

Pas plus d’indices pour révéler

Pas besoin de naître dans une crèche

Pour savoir comme se sauver

Donc…

Je t’aime

Je sais que tu sauras te sauver

 

P’pa X

 

Avril 2008

Y a tout le phénomène

Du mois dernier

Qui vient à nous

Énarver…

 

Ne nous laissons jamais guider

Par quelqu’un qui n’est pas venu

Dans les sentiers inespérés…

 

Voici l’avril

 

***

 

Némésis adorait les ponts.  Souvent elle n’hésitait pas à stationner sa voiture dans n’importe lequel bled perdu juste pour le plaisir d’y traverser un pont ; à pied ; pour bien sentir l’altitude, la solidité, l’intensité de ce qui se passait en dessous d’elle.  Et une fois revenue à son point de départ, elle se sentait prête-capable d’affronter l’obstacle qui se présentait devant elle, ou qui pourrait éventuellement apparaître.  Comme si elle venait de l’enjamber et qu’elle se retrouvait maintenant en position offensive.  C’était une excellente tactique.

 

Mes enfants

Nous connaîtrons assurément des choses qui se perdent

Et nous frôlerons tous les couloirs

Qu’ils n’ont pas voulu explorer

Nous allumerons des torches pour étirer à l’infini les nuits de fête

Et nous prendrons le temps qu’il faut pour expliquer

Jamais nous ne contournerons l’obstacle

Et la personne dans la misère comptera sur nous

Nous placerons la marche à suivre au centre de l’épiderme

Et les parfums qui nous envoûtent n’auront pas de place éternelle

Nous nous situerons là où la disponibilité l’exige

Et aucune ombre ne pâlira ce qu’on reflète

Nous assurerons la postérité

Nous assumerons ce qu’elle deviendra

Et lentement les « vagues à l’âme » ne s’accrocheront plus sur nous

Nos discussions seront profondes et plus riches que la plus grande valeur

Nous évaluerons les distances sans tenir compte de l’ennui

Nous propulserons nos pulsations

À aucun temps nous aurons l’impression

Qu’une larme s’est logée entre nous

Nous étirerons les accolades si nous doutons de l’être que l’on étreint

Nous admettrons une défaite

Et la saveur de la victoire n’écartera jamais l’ennemi…

Nous saluerons souvent le soleil

Apprécierons le prix qu’on paie pour continuer

La fin essaiera de mieux connaître le début

Aucune mode ne tanguera notre navire

Le familier ne s’installe pas

Il attend notre invitation

 

***

 

Hissez le fanion

Les pirates !

Bardez les voiles

Et foncez

Délivrez-nous d’la peur

Fonçons vers le surprenant

Et tout à coup inconnu

AH HA HA

 

***

 

-Salut Batman !

-Salut.

-T’as-tu un gros batte, man ?

-… Criss que chus écœuré de me faire demander ça !...

 

***

 

Aucun espace n’a la place qu’il pense avoir

Une fleur a beau sentir tous les parfums qu’elle émane

Elle ne demeure qu’une fleur…

Se foutre d’une senteur

C’est manger même si c’est mauvais

***

 

Le grand prêtre musulman parlait avec le pape.  Ils discutaient de sujets tellement surprenants que bien des fidèles les auraient quittés s’ils les avaient entendus.  Puis le pape demanda au grand prêtre musulman s’il croyait réellement à Dieu.  Ce dernier répondit : « Mais pas du tout !  Qu’ai-je à faire d’une telle masse d’irréel ?...  Je ne crois qu’au confort matériel que m’apporte la générosité de mes disciples. »  Puis à son tour il demanda au pape s’il croyait réellement à Dieu.  Ce dernier répondit : « T’es malade !  Si qu’tu veux que j’fasse d’une telle masse d’irréel ?  Je ne crois qu’au confort matériel qye m’apporte la générosité de mes disciples. »  Et ils continuèrent à échanger, se saoulant de vin de messe et en fumant narguilé après narguilé.  Puis le pape dit : « Écoute vieux, chus plein comme une église à’ messe de minuit !... »  Le grand prêtre musulman répondit : «  Mets-en, vieux pape !  Chus g’lé comme le monde qui vont à la messe de minuit quand y fait frette !...  On s’rait p’t’être mieux d’aller se coucher… »  Ils décidèrent alors, chacun dans sa propre chambre, d’aller se coucher.  Durant la nuit, le grand prêtre musulman eut envie de pisser.  Il passa donc devant la chambre du pape où la porte entrebâillée laissait vomir dans le couloir une curieuse lumière.  Il ne put s’empêcher de glisser un œil dans l’ouverture et c’est à ce moment qu’il aperçût le pape à genoux en train de prier.  Il ouvrit la porte violemment et s’adressa d’un ton ferme et inquisitoire au boss des chrétiens : « Si qu’tu fais là, osti d’malade ?  Tu m’révèlent pendant la soirée qu’on passe ensemble que tu ne crois pas en ton dieu, pis je te pogne en train de prier en plein milieu de la nuit !  Me prends-tu pour un cave, tabarnak !... »  Le pape sortit de sa méditation et enligna son regard plein de « je vous salue marie » vers le grand prêtre musulman.  Il lui dit alors : « Mais si qu’ça peut crisser ?... »

 

***

 

Si vous possédez une maison ou tout autre lieu qui vous permet de le faire, jurez-vous toujours avoir un sapin naturel pour Noël et brûlez-le au printemps, lors de votre premier feu extérieur.  C’est une cérémonie fondamentalement agréable qui consacre le retour à la vie extérieure ; du moins pour quelques mois à venir…

 

***

 

Quand j’tais flô

J’adorais dessiner des bolides…

 

Vrouft 6

La musique m’a très bien connu

L’écriture m’a dévoré la moitié de l’âme

Et le théâtre…  Ah ! le théâtre…  J’m’y suis tellement défini !...

La guitare m’a bien enjoué

Mes textes m’ont grimpé malgré eux à des sommets

Mais le théâtre !  Ah ! le théâtre…

M’a propulsé dans la vie !...

Une seule de mes notes de musique

Peut vous ramener à ça !

L’âpreté d’une quotidienne

La différence qu’on n’aura jamais

Et si c’que j’ai devenait tienne

Peut-être qu’on se reconnaîtrait

Les textes incompréhensibles

Adorent les yeux qui les relisent

C’est là qu’ils se sentent invincibles

Face aux logiques qui les détruisent

 

Mai 2008

Je n’ai pas vraiment envie d’aborder la mort.  Quand on la cite, elle s’excite ; si on l’ignore,  elle nous mord hypocritement ; sans aucune invitation.  Et la plaie qu’elle incruste dans notre vivant nous suit bien au-delà de l’oubli…  Les 4 lettres qui la nomment résument en un seul mot tout le paradoxe de l’existence.  Rien ne sert de la combattre quand un proche nous quitte.  Il est préférable de la laisser se dissiper comme un parfum d’étoile qui ne reviendra jamais.  Je n’ai vraiment pas envie d’aborder la mort…

 

Conte pour Jessica

Crin de Bison inspectait soigneusement son embarcation.  Le quart de l’Amérique du Nord était maintenant sous l’eau et on prévoyait la disparition totale des provinces maritimes sous peu.  C’est lors de cette nouvelle étape que les scientifiques-écologistes avaient prévu le débordement des Grands Lacs.  Ils nommaient cette prédiction : LA GRANDE CATASTROPHE.

Crin de Bison déploya les capteurs solaires tout autour de son canot et le temps qu’ils emmagasinent l’énergie nécessaire, il s’affaira à rabattre le toit télescopique puisqu’il prévoyait une longue journée de navigation.  Le ciel semblait clément et les vagues étaient rondes ; situation propice pour celui qui désirait s’éloigner d’un méga-tsunami.  Il avait suffisamment de provisions.  Tous les dispositifs mécaniques de propulsion étaient prêts à collaborer et le canot « XL16 à propulsion solaire » n’avait jamais semblé si solide.  Crin de Bison s’agrippa au gouvernail pendant que l’impressionnante marée mettait le bateau à flots.  Il était vraiment prêt pour la haute mer.

Il naviguait depuis quelques jours lorsqu’il atteignit une bande de terre, fournie d’une dense végétation où il pourrait sûrement faire provision de fruits, de plantes comestibles et d’eau douce.  Il y accosta sans peine.  Quand il eut terminé d’accomplir les diverses tâches nécessaires à sa survie, il regagna la rive et s’approchant de l’embarcation, il tendit l’oreille pour mieux entendre l’étrange sonorité qui se rendait à ses oreilles…  Un genre de cliquetis assez régulier qui provenait du côté caché du bateau.  Il s’avança prudemment et déposant silencieusement sa cueillette, il rampa jusqu’à contourner le canot pour voir ce qui se passait de l’autre côté.  C’était une bouteille qui au rythme des vagues produisait ses étranges sonorités en frappant l’obstacle qui se dressait devant elle.  Évidemment, elle contenait un message.  Il s’en empara avec la délicatesse qu’on emploie lorsqu’on touche la peau d’une femme.  Il caressa les rebords vitrés et observa le parchemin à l’intérieur comme s’il s’agissait d’un trésor inestimable.  Enfin, il entendait une autre voix (voie ?) que la sienne ; d’autres mots, d’autres façons de s’exprimer.  Ça faisait si longtemps qu’il n’avait pas rencontré un autre humain ou quelque animal !  Et pourtant la végétation ne s’était jamais montrée aussi généreuse et les mers qui envahissaient rapidement les surfaces terrestres n’avaient jamais regorgé d’autant de poissons ; preuve irréfutable qu’après les règnes végétal et minéral, le monde animal était en fait le seul à ne pouvoir bénéficier de cette incroyable crue des eaux.  Et il s’éteignait rapidement et il se sentait bien seul, l’être humain invincible et dominant sur la planète !...

Crin de Bison ouvrit la bouteille facilement mais éprouva quelques difficultés à en faire sortir le petit parchemin roulé ; comme s’il avait pris de l’extension ; preuve que la bouteille était à la mer depuis un bon moment.  Il parvint à l’extirper à l’aide d’une brindille et celui-ci, une fois à l’extérieur du flacon, se déroula de lui-même puisqu’il n’était pas attaché.  Le papier avait subi l’avarie du temps mais demeurait somme toute encore très lisible.  Il parcourut les mots et entendit clairement une voix qui les lisait dans sa tête :

« Le message contient trop de lettres…  Élimine celles que tu trouveras en navigant et ainsi le message te révélera son secret… »

« Élimine les lettres que tu trouveras en naviguant… »  C’est beau à dire, mais naviguer vers où ?  Vers le nord ?...  Non, puisque c’est de cette direction qu’il arrivait…  Vers le sud ?  C’était en fait la trajectoire qu’il poursuivait déjà.  Restait aussi l’est et l’ouest…  Comment décider de la marche à suivre ?...  Bof !  Son instinct le guiderait.  Aussi bien continuer dans la direction qu’il s’était déjà proposée.  Il naviguerait vers le sud.

Sa prochaine escale l’amena devant une île sur laquelle diverses lettres se révélaient…  Les arbres qui formaient des « I », des « N » et des « M », une falaise étroite en forme de « F », une rivière profilant un « S », des pelouses pleines de « Y », de « P » et de « W », un quai en « T », un amas de pierre en « B » et pourquoi pas, le soleil comme un gros « O » et la plage rappelant des « L » et des « U »…  C’est alors qu’il réalisa l’importance du message écrit sur le parchemin.  Notre entourage nous révèle sans cesse diverses formes de fabuleuses silhouettes, de fantastiques sculptures façonnées par le fil du temps.  Seuls les moments d’intense observation peuvent nous les faire apparaître convenablement.  Crin de Bison prit donc, à partir de ce jour, le temps de savourer tout ce qu’il pouvait apercevoir.  Et son voyage lui parut tout à coup beaucoup moins pénible…

Il dut se décider à changer de crayon et cela le déstabilisa au plus haut point.  Pour renfrogner l’éclat d’humeur, il se proposa d’offrir à l’infini un quelconque poème.

Apprendre à prendre

Connaître comment naître

Essuyer la suie qu’on laisse

Mordre l’ordre

Appuyer la pluie

Inventer le vent savant

Compiler des piles de piles passées date

Foncer dans des ronces maléfiques

Avaler l’intervalle

Soumettre aux promesses d’odieuses missions

Soupçonner des options qui n’ont pas de valeur

Et voguer vers l’inconnu

Le canot XL16 prouva une fois de plus son insubmersibilité au milieu d’une mer gigantesque et déchaînée.  Crin de Bison était au cœur d’une tempête titanesque et veut-veut pas, il paniquait tout en contrôlant ses centres nerveux et instinctifs.  Les vagues attaquaient l’embarcation et les vents savouraient leur victoire sur l’équilibre de l’équipage.  C’est alors que Crin de Bison eut l’idée de savourer le moment.  Les lames d’eau lui lacéraient le visage et il souriait !...  Fier devant l’implacable force des éléments.  Les vagues le berçaient exagérément mais il appréciait tout de même la sensation.  Et il savait pertinemment que ces nouveaux états d’âme étaient en fait une fois de plus l’extension incestueuse du fameux parchemin.  Comme il comprenait bien cette idée « d’éliminer ces lettres de trop »…  Toutes ces situations ennuyantes qui nous grugent la vie.  Il n’y a pas de véritable message.  Il n’y a que l’interrogation qu’il nous laisse.    

 

 

05/06/08

Juin 2008

S’ti que j’m’ennuie de faire d’la musik !...

 

***

 

Quelle ne fut pas ma surprise de constater que je n’apprécie pas tellement les vidéos musicales.  Je parle ici de ceux que l’on achète.  Ceux de nos artistes préférés.  Ceux de Yes, par exemple.  Je trouve qu’ils nous permettent de constater des erreurs qu’on n’avait pas remarquées pendant le show…  Et je n’aime pas ça.

 

Exersix

OK !  Comptons l’incroyable mensonge

Et les respirations que l’on prend  

C’est la fable qui nous interroge

Si on a le cœur de l’enfant

Et les contes n’ont plus de lent âge

La jeune vie a ce qu’elle prend

La poésie a-t-elle vraiment

Besoin de tout ce qu’on lui offre ?

Que vaut la pose d’un geste

Qui ne peut qu’amplifier

Ceux que pose une masse de gens ?

Nous ne sommes décidément pas uniques

Notre alter ego se promène et nous rencontre de temps en temps.

 

***

 

Les chandelles sont vraiment fantastiques…  Elles éclairent, réchauffent, se répandent dans toutes les atmosphères qu’elle côtoie.  Et pourtant, elle sont de cire ; fragiles…  Vulnérables…  Les chandelles sont vraiment formidables !

 

***

 

Deux chattes vivent avec nous dans la maison devant la Rivière des Enfants ; Alice et Samantha.  Je m’suis réellement lié de complicité avec elles…  J’trouve ça ben l’fun.

 

***

 

Je crois qu’il n’est pas important de résumer sa vie.  Laissons-la filer comme un roman inachevé ; une histoire à suivre…

 

***

 

Plusieurs poteaux toujours plantés n’ont plus aujourd’hui la fonction qu’on leur avait prévue au départ.  Et pourtant ils sont encore là debout, fiers.  Probablement ont-ils découvert leur propre fonction.

 

***

 

Le plaisir de vieillir, c’est le plaisir que ça apporte.

 

***

 

Un poussin observe un œuf qui cuit dans un poêlon et l’infini se manifeste.

 

***

 

Les Ipods, les cellulaires, les blueberrys, les walkman, les MP3, les centaines de gadgets collés sur l’oreille…  Et les gouvernements, les rois du lingot d’or, les magnats du pétrole et autres hauts-dirigeants…  N’ont-ils pas toujours rêvé d’hypnotiser le peuple ?

Quoi de mieux que d’hypnotiser son sujet à partir du creux de son oreille ?...

 

***

 

La puissance d’une guitare électrik…

 

***

 

Je ne chercherai jamais à te surprendre, Jessica…  Mais j’aime tant t’impressionner !...  Te soumettre à toutes sortes d’impressions que je ne calcule pas moi-même.  Je suis avec toi à chaque fraction de seconde de ma vie ; même si je n’y pense pas ; ça se fait tout naturellement ; instinctivement, de père en fille.  Je ressens clairement chaque parcelle de mes molécules couler dans tes veines ; et dans celles de Mahori et Nadja.  Je m’enrubanne subrepticement à tes subtilités neuronales l chacune d’entre elles révélant notre unique complicité.  J’uniscise tous les instants que nous passons ensemble, je fanatise nos échanges, je t’aime.

                                                                       P’pa

 

***

 

Les super-héros ont occupé une place prépondérante dans mon enfance.  Et elle garde encore tout son enthousiasme malgré l’âge que j’ai maintenant.  J’ai grandi avec les « comics » et la bande-dessinée francophone.  Je dois avouer que Superman et Batman doivent compiler à eux deux la majorité de mes lectures.  Je dévorais littéralement chacune de leurs nouvelles aventures et les émotions qu’elles me procuraient ne se retrouvaient nulle part.  Mais c’est hors de tout doute « L’Araignée » qui m’a le plus frappé !  C’était la première fois qu’un super-héros exprimait clairement ses vagues à l’âme, sa tristesse, sa difficulté à conquérir l’être aimé, son hésitation répétée face à son statut de « combattant pour la justice », son appréhension à détruire définitivement un ennemi ; tant de facteurs qui faisaient de Spiderman un de mes meilleurs amis.

 

***

 

Vous parlerez assurément avec ceux qui ont vu le jour la même date que Jésus.  Vous en verrez, des fêtards qui hurleront qu’ils sont nés le premier de l’an !  Des mères vous conteront des naissances associées aux saisons, à la Saint-Jean-Baptiste, à diverses fêtes religieuses.

Mais qui peut se vanter d’être né le même jour que celui où l’Homme a marché sur la Lune pour la première fois ?  Vous ?...

 

***

 

Un p’tit bout de délire

Pour se dire

Qu’on aura beau enjoliver les flous moments

Ils demeureront

Et comme la brume se dissipe

Ils finiront par fuir notre vie

Avec la lenteur d’un navire

Avec la trace persistante d’un mauvais souvenir

 

***

 

J’n’aurai jamais de problème à m’imaginer autrement.  C’est de m’en convaincre qui devrait s’avérer, somme toute, assez difficile.

 

***

 

Mes cinquante années m’auront apporté aussi leurs lots de tristesse, de déceptions…  Évidemment, en premier lieu, le départ si subit de mon père.  P’pa s’est éteint en coup d’vent ; instantanément, juste au moment où on aurait pu continuer tellement d’affaires ensemble…  Puis des choses comme le SIDA…  Criss, mourir pour avoir fait l’amour !  Ça a tellement pas de bon sens !  Ou encore le soleil qui provoque le cancer…  TABARNAK !  On a TROIS MOIS de soleil par année !...  Voulez-vous ben nous calisser la paix !...  Et la séparation avec ta mère…  J’avais vraiment cru à cette union.  L’effondrement des productions Ardantes…  L’anévrisse à Tiwi…  Le boutte débile quand un osti de malade mental faisait d’la marde à ma fille…

Mais les beaux instants de ma vie l’emportent haut-la-main sur tous les moments de ténèbres que j’ai pu côtoyer…

 

Vrouft final

C’est le travail que l’on achève

Qui peut transformer le présent

L’arbre n’a plus besoin de sa sève

Quand il s’effondre sous le poids des ans

Ses branches nourriront l’orignal

Ses bourgeons n’auront pas d’enfant

Un ange peut être original

S’il connaît bien les moindres

Parcelles du néant.

 

Juillet 2008

J’aime bien les graffitis.  Ils sont si énergiques !

 

***

 

La bêtise humaine ne nous laissera jamais prendre de l’avance sur elle.  Aussi bien s’en faire une idée.

 

***

 

Un moment indéniablement platte de la vie, c’est celui où on décide de peser le pour et le contre d’une relation amoureuse et que le contre l’emporte avec un pointage très serré ; genre « 37 à 35 ».

 

***

 

C’est drôle mais j’éprouve comme une petite gêne à terminer…  C’est fou mais je sens comme un léger mal à l’aise à finir…  C’est fou mais je perçois comme une inconfortabilité à conclure…

Trois phraséologies identiques qui expriment pratiquement la même idée.  C’est l’alchimie de l’écriture.

 

***

 

La cinquantaine entraîne d’étranges phénomènes.  Elle nous rend plus exigeant envers la température ; comme si trop de pluie l’été représentait un vol crapuleux.  Elle nous rend moins tolérant devant l’inertie et l’idiotie d’autrui.  Elle engendre parfois des sautes d’humeur qui se glissent et s’immiscent dans les méandres inattendus de la colère.  Et elle nous prouve souvent que notre corps n’est plus aussi fort qu’hier.

 

***

 

Les séparations se nourrissent des conséquences qu’on leur accorde…  Bien que ce soit difficile à réaliser, il faut en venir à une certaine indifférence face aux gestes de l’autre.  C’est le seul moyen pour ne pas trop s’égratigner…

 

***

 

En fait, ce qui me surprend le plus avec la fin de ce livre, c’est que je n’ai pas eu à le meubler avec tous les textes que j’ai pu écrire dans ma vie.  C’est un produit presque cent pourcent original.  L’inspiration et le délire sont venus faire leur tour et ils ont été bien reçus.  Probablement qu’ils reviendront un jour…

 

***

 

Cet ouvrage est à toi, Jessica ; tu en feras ce que tu veux.  Tu peux l’enfouir dans un vieux coffre, tu peux le rendre à ton chevet tout près de ton oreiller, tu peux le faire lire à qui tu veux ou l’endormir avec tes seuls souvenirs.  Mais ce que je souhaite par-dessus tout, c’est qu’il t’accompagne tout le long de ta vie ; comme un vieil ami.  En fait, tu tiens entre tes mains vingt mois de ma progression vers l’infini.  Presque deux ans de mes pulsions cervicales que j’ai immortalisés juste pour toi, ma belle petite Jessica.  Je ne recommencerai pas cet exercice.  Tu as l’unique exemplaire d’un morceau de vie de ton père.

 

***

 

Ça y est !

Je ne laisse qu’une page blanche

Pour qu’elle serve d’introduction

Au poème

Qui confirme

La plus grande

Et la plus belle

Réalisation

De toute mon existence

 

***

 

Bonne fête, Jessica

Bonne vie

P’pa

 

 

 

RÉUSSIR À STIMULER ET CAPTIVER L’INTELLECT D’ENFANTS

(ANNÉE INCONNUE)

 

 

 

Y a une graine qui entre dans mon œil

Et qui s’en va triper dans mes viscères

 

            Le problème majeur pour tout auteur qui se propose de stimuler et captiver l’intellect d’enfants dont l’âge varie (doit se situer) entre 6 et 16 ans est de réussir à découvrir un sujet théâtral assez large pour lui permettre d’y intercaler en tout temps les notions académiques, historiques et sociales que pourrait intellectuellement exiger celui qui commande la pièce de théâtre.

            Donc, l’idée à la base est de réussir à cerner des personnages susceptibles d’enseigner aux enfants des notions élémentaires dans différents domaines tout en développant entre eux et les personnages une impression de complicité amicale.

            Il s’avère ainsi très important au fil de la pièce d’allumer chez le spectateur l’étincelle qui lui procurera l’irrésistible envie d’aller jusqu’au bout de l’histoire.  Généralement l’auteur, chez un public d’âge mûr de curiosité, doit procurer cette flammes dans les 30 minutes de sa trame dramatique, puisque, semble-t-il, le spectateur adulte aime à se laisser transporter en toute douceur pour finalement entrer de plein fouet dans l’action.  Un peu comme le sommeil qui précède le rêve, quoi !

            En revanche, chez l’enfant, il me semble évident que l’on doive accélérer le rythme.  Comme il est en pleine croissance et en éveil constant, il n’a pas le temps d’emmagasiner en début des pièces de données qui lui seraient essentielles pour la suite, pour bien comprendre le déroulement de l’action théâtrale.

            C’est pourquoi je me propose de vous offrir un texte vif, libéré de toutes contraintes psychosociales et apte à capter dans les 5 premières minutes de son évolution l’intérêt auditif et visuel des gens se trouvant dans la salle.

            Car vous savez, la pire erreur que l’on puisse faire dans l’exécution d’un texte théâtral pour enfants et adolescents est de sous-estimer la soif de compréhension de l’intrigue que manifeste ce genre de public.

            C’est bien beau d’amener sur scène princesse et dragons, mais encore faut-il que ceux-ci aient quelque chose à dire et qu’en plus ils puissent réussir à se faire comprendre.

            C’est donc sous cet angle de respect de l’auditoire et de lucidité du texte que nous aborderons le synopsis de la pièce.

 

 

 

CALEMBREDAINE, PLAISANTERIES (VOIR PROPOS) (ANNÉE INCONNUE)

 

 

 

 

            Même un cyclone dans toute sa fougue au paroxysme de son intensité ne pourrait déplacer tous les détritus stratifiés sur les trottoirs et ruelles.  Les « ‘meselles » réussissent à maintenir un semblant d’ « alphatisme » grâce aux passages réguliers-répétés de véhicules en déplacement. 

            C’était en effet exceptionnel que le gouvernail ait laissé fonctionner les V.G. cette nuit-là.  Cela pouvait se produire une ou deux fois par année.  Comme on l’annonçait 2 ou 3 semaines à l’avance, les banlieusards vivaient en dehors du dôme, en profitant pour planifier diverses activités extérieures.  Décalcification des plantes et arbustes, « déstratification » des détritus et nettoyage des parois « inopaques » ; la routine, quoi !  Les V.G. étaient devenus d’essentiels attributs au maintien de la survie terrestre ; au même titre que le soleil et la pluie, ils maintenaient par leur activité sporadique le fragile équilibre « oxygène-azote » qui permettait aux braves humains ne demeurant pas sous le dôme de respirer de l’air… euh!.... disons « respirable ».  Ils apparaissaient comme d’immenses moulins à vents et s’actionnaient au moyen de l’énergie solaire plantés au milieu de montagnes de déchets compactés.  D’immenses rangées d’accumulateurs pouvaient leur permettre à l’occasion de fonctionner la nuit, mais comme le gouvernail encourageait de plus en plus l’exode sous le dôme, ils progressaient lentement vers la désuétude et étaient voués dans un avenir très prochain à une extinction due à l’absence d’entretien.  

 

 

IDÉES D’AVANT-PIÈCE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Pour une fois dans ma vie, je devais connaître la joie de faire comprendre une de mes sauteries à un public, par « La Cuve Cubique » ; je devrais combler cette parcelle de bonheur qu’il me manque.

            L’histoire, qui jongle encore dans ma tête, sera saisissable !  Je sais qu’il est crû d’élancer comme c’la, sans méfiance, une telle phrase iconique ; je sais aussi comme il est dur d’être saisi, assimilé par le public…  Tant pis !  J’ignore et repousse ces mythes bien fondés ; j’éjacule aussi les abordages mondains, j’élance les rumeurs.  Je crée la compréhension, l’idée directrice.

            Être compris ; offrir une histoire complètement « capotée », mais réelle, humaine.  Jouer, à l’aide de textes, dans de sombres songes ; dans d’épaisses et lourdes intrigues…  Toutes basées sur le fait, plus tard, sur les personnages eux-mêmes…

            Vu le début d’écriture théâtrale, je n’peux qu’espérer que mordre l’idée fixe qu’en tête je me suis ancrée ; que réserve la dernière réplique de cette future pièce ?  Pourra-t-on y déceler l’espoir que j’aurai fondé en elle ?  Laissera-t-elle supposer aux fines têtes et cervelles un semblant d’explication ?

Que me réservent mes dernières répliques ?  Foi ou questionnement ?

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Admettons tout d’abord l’existence d’une quelconque mauvaise pensée, pensée se métamorphosant maintenant en désir, en obsession.

Jeanne-Ursule Coussin aimait maintenant Léon-Georges depuis 14 années ; « aimer », c’est beaucoup dire, empruntons plutôt l’expression « vivait toujours avec »…  Leur concubinage n’ennuyait ni concierge ni voisins.  Le train-train habituel des Coussin, auquel l’entourage s’était vitement habitué, ne pouvait déranger ;…  Au contraire, comme terne il était !

Depuis deux jours, Léon-Georges construisait d’une absence non-motivée son triste futur destin.  Une nervosité nasillarde pesait sur Jeanne-Ursule.  Où donc se trouvait Léon-Georges ?  À quoi pouvait-elle rapporter l’absence de ce dernier cité ?

-Emma, c’est la bonne.

-Qu’est-ce qu’hurle madame ?

-Comme vous êtes grosse ce matin, Emma !

-Qu’environ quatre cent-quatorze livres ne m’occupent !  C’la vous dérange, « Saint-Archange » !

-Simple remarque, voyons !  Vous avez mes bas ?

-Vos bas sont en bas.  Je cours…

-Avez-vous remarqué une absence ?

-Une absence ?

-Si !  Si !  Une absence non arrogante, non lourde à porter, mais… qui apporte quand même fatigue !

-J’ai senti une absence, Jeanne-Ursule, une absence que depuis longtemps j’hésitais à te confier ; mais maintenant, par quelle force suis-je poussé, j’exprime légèrement ce sentiment fuyant que pour vous j’éprouve… !

-N’allez pas plus loin !  Vous n’avez rien compris à ce que je vois !

-Tutoie-moi, Jeanne-Ursule !  J’aime le tutoiement…

-Où est Léon-Georges ?

-Depuis deux jours n’ai-je point vu lui.

-Comme est bizarrement constituée cette phrase qui précède cette dernière !

-Je n’suis pas si mal, Jeanne-Ursule ; point-virgule ; regarde-moi !...

(Musique du regard émotif de Jeanne-Ursule.)

-Nous n’pouvons pas !  Voyons Emma, comprends-moi !  Ou, du moins, comprends !

-Tu me tutoies, Jeanne-Ursule ?...

-Voyons !...  Laissez-moi !  (Emma sort)  Léon-Georges, absent depuis deux jours…  Comme c’est lourd !...  (Elle va au piano pendant qu’un lourd et frénétique Beethoven emplit la salle…  Puis, d’après l’air, elle joue maladroitement.)  Mes mains tremblent…  Où te niches-tu, Louis-Georges ?

Voyons !  L’atmosphère se dilate.  Momonstro, tu t’éparpilles, univers…       

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Nous nous trouvons dans la quatrième période ; soit l’absence de souliers.  Donc, à la période « pieds nus », l’homme n’adhère plus à la logique, mais au sens aigu de la ferrailleuse-monétaire logique pudique !  Concassons ces idées, mes lascars, et créons en nous l’évidente suggestion gastro-totale-vitale « manettes » …  (Musique « engourdissante »)

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE

 

            Se demander si oui ou non il y a « comeback »…

            S’expliquer l’évidence, se donner des raisons tantôt vraies, tantôt fausses…

            Où puiser l’inexorable oxydation ; la réelle composition d’un sentiment qui semble parfois fort, au moment de l’envol solitaire, et souvent faible ; soit à l’instant des conjonctures, des obligations ou des partages quotidiens d’idées, d’actes, d’abnégations…

            La source pourrait s’offrir à deux endroits :

            Le premier : un orme massif, sans orgelet couvert d’écorce tentaculaire fonçant du haut de l’arbre ouvert, jusqu’à un socle où il serait tant agréable de s’appuyer…

            Le second : un trou noir, vide, puant, ayant pour seule lueur une grille donnant sur la rue « déguelamment » désuète.

            Évidemment, les opposés se rejoignent, en autant que l’image projetée par leur description soit nettement décomposable jusqu’aux racines qui, elles, fourniront le semblant de similitude proposé par la réaction du contact des deux contraires.  Or, dans d’autres cas, nous aurions pu faire face à l’enchainement de deux contraires…

            Le premier : Jeanne est laide.

            Le second : Jeanne aurait pu être belle.

            Il est facile ici de distinguer l’évidence de l’enchainement.  Référons donc aux exemples…  1 : Jeanne est laide…  C’est l’évidence, quoi !  Et maintenant, le second : Jeanne aurait pu être « belle »…  Extirpons l’opposé qui est « belle » et faisons maintenant le rapport direct avec son antécédent (laide) en nous fiant à sa définition phraséologique, c.a.d. celle proposée par le contexte où lequel « belle » fut inséré.

            Jeanne aurait pu être « belle », mais elle ne l’est pas puisqu’elle aurait pu l’être…  Donc elle est laide !

            Bof !  Qu’ajouter de plus…

            Euh…

            Joyeux Noël !

 

 

GOUGES, PLEURS ET AUTRES ! (ANNÉE INCONNUE)

 

Ce soir, j’aurais eu l’envie de fables fabuleuses

J’aurais voulu émettre au plus haut point la force totale, vitale qui m’habitait ; j’aurais aimé pouvoir peupler d’offrandes un monde incongru, bizarroïde…

Le fait d’émettre aurait donné la vivifiante communication que je recherche ces temps ci…

Une fleur perçant l’épaisseur lança d’humeur qu’aucun ne puisse surprendre.

Un homme à haute monture capta l’intense sonorité qui avant fut élancée par produit de nature.  La fleur heureuse d’être saisi ne put contenir son engouement et, dans un geste absurde, rompit sa tige, sa vie.  Le haut monté sursauta tourna le dos, se promettant qu’aucun des ans on l’y rendrait.

Moralité : Fleur heureuse sa tige rompue.

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Jusme utilise un balai comme longue-vue ; son corps s’étire sensiblement.

            Une voile crépite vers le nord capitaine.

            Une seule ?  Hum…  C’est bien peu…  Est-ce une frégate ?  Est-ce un vaisseau ?

            Un vaisseau ?  Quel mot sot, mon capito !

            Mutinerie !!!

            Glouille ? :

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Hier soir, j’ai rêvé…  Cela se situait sous l’ombre d’un mur massif de bronze…  De vils vautours voltigeaient aux dessus-dessous des corniches délabrées ; leurs nids, hissés de toiles vertes et rouges, capotaient de cris démentiels le sourd décor « éblicanné ».

            Déjà, à l’aurore d’un mur, l’espace bleuissait ; son tapis, long-large à perte de vue, glissait dans l’œil une impression « totaloguée » ; une horde de « tôsses hibouées » l’aurait ignorée…

            La foule fuit, maître !  Hein ?  Idiotie que vous êtes, Jules !  Ne saurez-vous donc jamais distinguer le cri d’une maison en construction !  Et le haut, je descends, « vertigineuilleux ».

 

Le vent hurlait une ode

Le ruissellement-geyser ne te porte plus

Il te cherche

Il t’énerve, tu sais ???

 

Le jour, la nuit n’importe point…

 

 

DIDACTIQUE FIÉVREUSE (FIN D’OCTOBRE)

            Quelques-uns exclament des rires, le leader hurle, on se tord.  Qui a tort ?  Qui suppose une raison ?

            Avoir soif d’une botte débile et découvrir la réponse à sa soif qui s’étale devant nous.  Posséder le poteau ; la tige qui daignera mordre-pénétrer l’ouverture vaseuse qui s’offre à lui.  Être deux ; être l’homme de la femme, être femme de l’homme, être deux êtres force !  Qu’aucune poésie n’hante ma grise efficacité…  Qu’on me laisse revivre, renaître au délire de moi-même…  Cesser de convaincre et ne pas être, pour une fois, le catalyseur centrifuge qui mène-dirige toutes les voix d’un sot peuple pausé comme on le dit…

            Y suis-je triste ou mélancolique ?  Bof !  Quel mot abusif pour exprimer la lourde humeur qui me pèse !  Comme je m’asperge, comme je m’éponge d’un tel diminutif…  Enlisez-vous bien, blondes, noires !  « Viscongissez » fort que j’en pleure au plus profond de mon moi !

            Saccage monstrueux…  Tout de « noirâtrige ».  Je fuis !  Au fil des flots s’émancipe ma peine.  Elle atteint d’un large geste expressif ces atours que revêtent les pantins pausés.  Faut-il être triste pour se laisser comme cela supplanter de plusieurs « têtations » ?  Où sont-ce les mesures qui diffèrent des miennes ?  Pourquoi faut-il s’offrir gratuitement alors que tant d’idées sont à résoudre…?  J’expie en fait la bonne solution.  Ne même plus vouloir réchauffer son semblable…  Être à bout !  Le caprice naît bien inutilement.  Il dispose d’un abus à sa source qu’il se sert aisément quand il veut.  Aux racines de son mal qui est mien s’élancent bien des chancres qui, comme l’infect pou, demandent bien des sacrifices avant d’éclipser leur mollusque masque de chair.  Je broute !  Tel le cheval qui cherche impunément le silence, telle la chouette qui roucoule à ses heures, telle une lamentable erreur qui tôt le matin se fut fermée, je m’abandonne, flasque et ondulé, massivement à l’ennui qui me ronge, qui m’endure, qui m’habite.  Car savez-vous, peut-être n’êtes-vous point les seuls à créer l’erreur ?  Peut-être dans le fond signifiez-vous la « résolvable » solution apportant aux fines lamelles de la supériorité une sombre teinte orageuse, rageuse, démentielle.  Le fond de ma boîte m’embête !  Peut-être aurait-il mieux suffit la tâche en étant d’autre couleur…

            Peut-être ignorait-il lui-même la force déchaînée à l’impact d’un tel fol amour !!?

            Amour !?!?...  Bof !...  Parenthèse futile !  Voilà tout qui s’« allongive »…  Ne plus…

            Ne plus chercher l’œuvre, mais au contraire la provoquer en la forçant à vivre par de « génialtiques » moyens.  Quels sont-ils ?

            Le premier : sociabilité !

            Amèrement

            Jacques Bolduc

 

 

 

PLEURS INUTILES !  (ANNÉE INCONNUE)

 

            Ne plus pouvoir pleurer parce que l’erreur commise est incrustée dans son soi-même.

            Offrir aux cauchemars de larges gouttes de pleurs…

            Obéir sans voir ; se guider vers une force funeste qui galope de haut en bas, sans jamais ne savoir pourquoi… 

            Avoir perdu, renié et menti l’unique pouvoir en ma possession…

            Ne plus pouvoir penser ; résoudre calmement le cataclysme ondulatoire qui se meut en ma tête nuit et jour…  Offrir comme un geste soluble une lamentable hypothèse…  Obéir aux forces d’un sarcasme matériel commandant, en plus de mille et une cervelles, la mienne de même…  Avoir laissé se fondre la gentille grassouillette qui de moi s’occupait, s’affairant pour un rien…  Aimant, quoi !

            Je me retrouve, ce soir, à cette heure si quelconque au fond, devant une harassante fatigue qui prit forme de mes mains et pensées. 

            En fait j’ai construit instinctivement et sur commande sans doute le désordre qui sur moi s’abat !

            Je freake !!!

            Maman !

            Elle m’offrit le reste du manque qui m’habitait.

            Je lui refusai bêtement.

            Triste con que je fus !

            Idiot !!!

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Ne plus pouvoir, quelques jours après, lorsque l’on réalise enfin l’immonde idiotie dans laquelle on s’est glissé.

            Mordre le fait qui fait frémir la poutre sensible de son soi.

            Réaliser la botte immorale que prirent deux extrémités.

            Être le dindon !

            Être le joué.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

            Éponger sa soif d’éternels « loudontages ».

            Pivoter continuellement tel un fragment « disconfus ».

            Convoiter au plus profond du soi l’immuable inspiration féminine nécessaire au bien-aller de l’être.

            Découvrir l’évidente inefficacité…

            Se sentir lourd ; se sentir dépourvu.

            Être seul.

            Si au moins ce n’était qu’écriture !

            Mais…

            Qu’aucune attaque n’ait porté germe agaçant.

            Qu’aucune remarque n’ait pu réveiller le plus profond épiderme de la cible.

            Qu’aucune rancune ne fut morte ou née.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Être d’une épaisseur telle que le moindre son émis obscurcisse les pensées géniales de l’écrivain.

            Heureusement, le son total émis par Yes peut combler cette supposée lacune provoquée par une pauvre âme innocente croyant encore au Père Noël.

 

ÉPOPÉE GLACIALE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Unique comme commencement.

            Démoniaque au fil de ses hallucinations.

Exubérance contradictoire prévue d’actions qui amènent et défilent le dénouement, fine, entrecoupée pour ses deux yeux hideux, grimaçante, involontaire due à l’ouverture fortement prononcée d’une lèvre gercée.

Seins pendants, flasques et ondulés.

Mamelons « galactiquement » galeux.

Membres disproportionnés.

Doigts horribles.

Ongles flétris, décomposés à la demie.

Jambes tirant aux quatre points cardinaux.

Nombril inexistant.

Oreilles jaunes, grises et vertes.

Vile totalité.

Un fou flux de fluide fluorescent s’empara de moi.

Je devins semblable à une toupie tournoyant toute la journée sans graisse.

Beurk !  Rien qu’à y penser, le cœur me lève.

C’était sa présence qui ainsi m’avait rendu.  Je refusais l’évidence qui devant mes yeux se glissait.  L’ « honification » que me procura telle constatation devenue inexplicable.

L’inexorable oxydation avait dressé son siège ; elle en suçait un autre.

Pauvre Esther.

 

 

ASMUTH (ANNÉE INCONNUE)

 

On admettait facilement l’évidence de son regard intéressé.

La cible qui logeait perpétuellement ses ondes semblait-elle un peu moins forcenée par l’effort du Bouledogue.

-Pourquoi s’attacher aux concepts physiques ?

Je m’le demande et me le redemande.

Après tout, les goûts devraient toujours se compléter non dans l’espoir, mais dans une certaine réalité ; si minime soit-elle.

Heureusement… Gentle est là !

Le ciel retourne et découvre au soleil de nouvelles qualités.

Les herbes se penchent et deviennent tout à coup invitantes.

Les oies sifflent.

Comme le cœur émet en ces jours-ci !

Qu’incommodes sont les fanatismes !

Pourquoi désirer encore l’impossible oxydation ?

Surveiller le monde.

Le posséder dans quatre neurones.

Et si ces champs que je laboure ne portent pas fruit, j’en labourerai d’autres !

Neuf arbres se pénètrent.

Libre est tout comme un livre ouvert.

J’abandonne le reste.

J’avironne vers le solide roc bien ancré.

J’ovationne quelques adages bavarois.

J’oublie le détail.

J’ouvre mon amour.

Ouf !

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Je t’aime tant, Esther, qu’espérer  l’arrivage serait trop demander.

Je sais que je t’aime, mais toi, sais-tu ?

Bof !

Je t’aime.

Offrir au grand jour ses idées et les estimer en même temps.

Savoir qu’elle se demande.

Savoir qu’elle sait.

Aimer.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Dévoré d’avides dénouements ?

C’est comme se situer face au vent et lui reconnaître d’odieux délires.

C’est comme s’asseoir et voir perchée devant soi la réalité du geste.

Se promenant dessus les blés.

La blonde releva quelques indices.

Baisser la flèche et avouer au saint sacrement ses crimes.

C’est comme ret’nir sa poffe et attendre l’explosion.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Après avoir longtemps rampé, l’hirondelle me sourit enfin…

Ses gestes-coutumes semblaient omettre une raison…

On aurait dit une fuite ; comme celle d’Hélène face au rocher…

La lune n’imposait plus ses suggestions rayonnantes.

Elle éclairait, rien d’plus du tout.

 

Au début, les émulsions naissaient vertes.

Au premier échelon, l’absence de bras et d’épaules était chose vaine.

 

Tes yeux sont de viles souches.

Tes mains, les ronces qui les entourent.

Tu es belle, pâle et femme.

Tu es loin sans comprendre l’absence qui me ronge…

Tu cohabites mes impulsions douteuses sans te douter qu’un nuage d’ennui pourrait enrayer ma tête…

Au fond du verre, sous le liquide, se meurt mon cœur.

Ses soupirs suffisent l’audience, ses gestes semblent ignorés…

Comment construire la véritable liaison au travers des milles et une fuites… 

Dois-je vraiment creuser le sol aride qu’on m’offre ?...

Devrais-je encore espérer le fol envahissement symphonique que me proposes ses gestes, corps et paroles …?

J’hume une brise douteuse.

Que me proposent les stupides événements ?

À cette heure tardive, où tout espoir est déploré, j’exclame la forte démangeaison qui me suce le cerveau.

J’ajourne les pudeurs harassantes qui me hantent.

J’étale les actes, si minimes soient-ils, et constate avec tristesse la rare délicatesse de l’amour.

Je « suffrationne ».

Jacques

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Vie courante : -Durex

                        -Savon à vaisselle, navette

                        -Barres de savon, shampoo, pâte à dent

                        -Papier torcheur, ciseaux, poêlon, haschisch

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Rire sourire et te dire de toutes façons que je t’aime Esther

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

C’est comme avoir envie de s’poser

Et trouver son « posoir » au-dessous

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Pour moi, rire ou sourire, parler, imaginer, espérer, exiger,

Je t’aime aussi.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Quand le monde de fée est v’nu me voir, j’avais envie d’abolir des raisons… Suivre un déclin, bavarder d’un clin d’œil, rire fort…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Les gens sont bien durs lorsque l’on extrapole

Leurs sentiments…

 

Piètres furent-ils.

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Au lever, 2 attendent l’arrivée de « illisible ».  Gestes tendus.  On sonne.  Entrée humide, puisqu’il pleut.  « Débarrassement » des habits.  Demande une brosse.  Anxiété des 2.  Explication.

 

Oui Christ oui oui oui oui oui oui oui oui

 

Le professeur m’amena donc dans l’angle gauche de l’arrière-scène

Et il se mit à débiter, d’une voix quasi-rageuse

Les problèmes qu’engendraient l’incorporation d’un être « humanoïdement » conçu

Sous la paillasse d’un paillasson paillassonnéééé…

 

Sacre fou de satin sifflotant, êtes-vous fou à lier ?

Sans que n’ai-je à le dire, vous voilà démordu !

 

 

SPOXME OU LA SORCELLERIE DÉLIVRAIT L’HOMME (ANNÉE INCONNUE)

 

            Dans le vaisseau, badigeonnait trois canards, plumes éplorées, qui de leur chair devaient offrir aux sorcières mâles la possibilité de se féminiser…  On devrait ensuite les plonger dans la marmite, feu au-dessous, bouillon d’agiles compréhensions ; cette forme ovale « élargissante » deviendrait, en quelque sorte, leur bain de drôle sensation…

            Une immense cuiller vint remuer d’un plongeon l’emblée épaisse d’une prochaine consommation…  Quelques légumes mêlés ensemble, de la boue, éparpillaient selon l’humeur exquis délice ou vil dégoût…  Qu’en était-il pour nos sorcières…?

            Rien ; sinon l’hideuse envie de tout faucher.  Voilà la tension ; c’est celle qu’elles expriment…  Par leur broussaille chevelure, l’inspiration du « dégoûtement » se fraye un passage d’épineux énervements…  Leur taille est démesurée…  Et leur carrure fait naître en nous le quiproquo dégénéré.

            Depuis vingt-deux secondes, trois canards sont cuits.  L’auparavant nous réservait le transport du vaisseau à la table et d’la table à la marmite…  Ils nous reviennent, bruns, savamment assortis aux salades et aux jattes, élégance surprenante pour la classe des hommes-sorcières.

            Le gouffre buccal ne prenait plus le temps de goûter l’aliment.  Il mastiquait à l’avant tout en broyant de l’arrière…  Un canard n’existait plus que par sa forme osseuse, grugée et clairsemée aux croquants de lattes de chair duveteuse, destinées au chat sans aucun doute.  Le second, entamé aux trois quarts, ne laissait à la vue que la vue de sa tête, au large bel amolli par la chaleur…  Le troisième, qui le premier fut capturé, nageait dans son gros jus…

            Au terme de la digestion, Phallus, l’aînée de l’autre sorcière à bitte, s’envola sur son balai vers la salle des ordures expulsées.  Sa robe paraissait légère et il lui plut de la soulever, avec grâce, pour l’installation de son point hors corps linéaire sur l’étole de fourrure…  Le trou au centre du « cache-cou » permettait permettait facilement l’expulsion des ordures humaines.  Phallus regagna Vrille. 

            Vrille n’aimait pas réagir aux ordres.  Pourtant, comme si un sentiment l’animait, elle pliait plus que souvent aux impératifs de son compagnon-compagne…  Était-ce normal ?

            -Nous redeviendrons sorcières !  L’oubli du qualificatif que Nosmose nous avait infligé s’officialisera !  Sorcières se « remétamorphosant », sommes-nous en train de reconquérir notre « tout court »…?

            -Ouais !!!

            -C’est bon, Vrille.  Ne t’enthousiasme pas trop.  T’hurles bien, tu sais…?

            -Ce canard excellait en saveur…

            Avaient-elles reconnu le gras qui cernait l’autre canard, le dernier, celui qui a nourri la dernière digestion…?  S’étaient-elles aperçues du sourire flasque du second, semblant inviter le malaise, semblant obliger l’expulsion rapide de ce qu’on vient d’avaler…

            Et pourquoi le chat refusa-t-il le premier, dodue sublime pour le félin de s’amuser avec un mort tout cuit dans l’bec… Non ?...   

            Et qu’avaient donc ces canards…?

 

            Jusme

 

 

DILLIGISME (ANNÉE INCONNUE)

 

À vous entendre nous aurions dû nous souvenir ; mais avions-nous besoin de cela…?  Est-ce ça la réalité : souffler un rêve et le voir éclaté, soit au réel ou au réveil ?

Savoir attendre que l’apogée s’y lève dans la brumeuse ensoleillée, lumière opaque, journée d’automne peu savoureuse.  Le printemps amène les bourgeons et puis l’hiver les claque.  Le printemps ramène les bourgeons…

Et pour la mienne il ferait froid ; comme une précède-février née à l’avance, sans se douter que j’observais.  Le son qu’elle chante harponne l’ouïe et lui fournit le gazouillis « naturacelle », celui qui orne le parapet de son volet oculaire, clair, désireux de se voir décroiser et maîtriser par l’être rare qui lui plairait.  Se plait-elle à choisir ?  Ou a-t-elle désiré, dans sa chambre, à la limite du baldaquin, revoir celui qu’elle invita sur ses genoux ?

21017.

L’homme progresse et s’y joint une femme.  Il additionne les acquis et se fout de la somme.  Ce qui compte, c’est de l’en voir jonction prolifique comme celle qu’il entretient avec la Dame.  Puis les ombres se succèdent successivement au pas des Lunes qui dorment.  C’est au réveil qu’on les constate.  Dans le même geste ils ont fini d’analyser ce qui pourtant les retenait.  Tout coule ; les rivières se « retransversent » au rythme d’un écoulement et les cascades liées aux parois ont ignoré pour une fois tout rôle de soutien.  Les colonnes se formèrent il y a de ça trois-cent-mille ans, là où les secondes exisent trop…

 

 

GESTE (ANNÉE INCONNUE)

 

            La lenteur ménopausique de l’attente dévorait son cortex.  Jamais l’œil de sa tête n’osait croiser ; il préférait comme l’hyène face au lion fuir le possible.  Sans doute se plaisait-il d’imaginer ce que l’action aurait produit.  Pauvre con.  Intrépide perfide qui ne cause que question.  Ta cause causera la suite…  L’homme n’avait rien mangé depuis trente-six jours.  Sa ceinture le dédaignait déjà et son ventre ne pouvant plus attendre regorgea le sol d’un poids supplémentaire.  Il était à terre, nu, parsemé de craqures de tissus s’étendant à la masse qui n’pouvait plus l’occuper.  Donc, de plus en plus, la transparence inhabituelle l’envahissait.  Pauvre humble.  Sa squelettique carrure lui supposait l’ennui ; depuis longtemps l’arbre pliait à l’idée de l’engrais que fournirait son corps mort.  La biochimie s’intéressait à le voir mûrir-mourir.  Et pourtant, qui aurait cru que dans sa tête l’intérêt existait toujours…  Celui qui porte à mordre son tube respiratoire afin de peut-être voir ce qui ne va pas…  L’œil coulait et progressivement l’orbite prenait forme.  Telle une horrible fleur, il se dégageait, immuable trou, crevasse subalterne, et poussait la bille hors du gîte ; surprenant contraire…  Lorsque sa main devint un amas d’os, il ne put plus se gratter…  D’ailleurs…  Le résumé de ses gratouilles se situait dans l’échancrure de sa peau.  En fines lattes, comme une toilette paperasse, elles tombaient, sans vitesse, tristement au sol…  Le temps pressait de définir quelque chose…  Mais quoi ?  C’est vrai, hostie !  Quand le corps fuit et que la cervelle elle doit attendre l’achèvement du cœur pour se permettre le repos…  Où puiser une solution ?  Et d’abord, sur quelles bases, sous quelle forme inventer la question qui engendrerait la suite logique…?  Finalement, après la chute de ses cheveux, son crâne s’ouvrit et libéra la masse « gluamment » cellulaire…  Elle était trop rapide pour les vers et désolés, ils durent se contenter de lécher les quelques miettes du bulbe rachidien demeurées près de l’occipital…  La cervelle rampa jusqu’au bord de la tombe et dégagea une odeur qui fit se soulever les restes du corps.  Elle s’installa, sur le coussin de satin, et patiemment attendit que l’on refermât le couvercle.

 

 

EST-CE POSSIBLE ? (ANNÉE INCONNUE)

 

            Janvre 7.

            Bonsoir Petite Lune.

            Il y a des ans que je n’ai vu votre visage.  Et ce pourtant au fond de moi réside votre image, douce, évangéliquement serrée contre les câbles de mon cœur.  Je vous revois soir liquéfié.  Il y avait des « je n’ai pu » et je trouvais bien difficile de me débattre sans la joie de votre corps célébré.  Au point culminant dialogué, j’arrivai enfin à la fin des doutes, malheureusement, je n’cessais de repenser, inexorablement, à l’indubitable action que tantôt j’avais posée si j’voulais du concret.

            Ma mémoire ne fit qu’un bond.  Je rappelai en ma faculté de me souvenir les images précédentes qu’en ma tête j’avais nées.  Elles se bousculaient au va et vient des autres, , à leur tour adjacentes et se cherchant l’endroit, la place ou le lieu de repos nécessaire à leur gîte.  La mémoire offre plusieurs nids installés de confort éternel ; mais plusieurs sages se plaisent à partir retourner culbuter aux forêts, sans jamais se soucier si l’installe qu’ils avaient devait être monnayée ; ou du moins compenser par un genre, de même nombre.  De toute façon est-elle allée me voir au jardin du viens-t-en…?  Suis-je le seul solitaire à espérer l’espoir, celui qu’on espère lorsqu’il n’y a plus que c’la à espérer…?

            J’aimerais être haut, voir bien plus loin que mon moi-même et le constater compléter, d’ici quelques jours, quoi !  J’en ai marre d’être esclave de jour et d’attendre le terme notoire.  Il « s’impossibilise » pour moi de vibrer le non-temps, vide absolu où la peur est éternelle, donc inexistante.  Vois ce qu’il te reste, ma femme : un « absolument pas » ou un « enfin mon amour ».  Ouvre-moi ce qu’mon œil a envie de t’offrir.  Laisse-moi baptiser ma bêtise et lançons à nous deux un déclin d’éclatantes fééries, les nôtres !  Celles qu’on construira toi et moi, à l’insu des tempêtes qui sifflent et aux joies des journées « siphonnantes », point de vue « coloris énergique ».

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Ce genre de fausse représentation qu’il se tue à se taire.  Comme si l’envie d’être élevé ne l’hantait pas.  Modestie abusive de l’être qui se croit à terme alors qu’en lui nul ne glisse.  Il orbite une tenture « rabattante ».  Sirius n’est rien et veut se voir vu.  Comme s’il s’aimait non pas pour c’qu’il est, mais pour ce qu’il se voudrait être…

            Son langage le trahit quelques souventes fois.  Comme à la seizième page du texte sous la réplique septième…

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

J’Irai mordre la lune

Quand mon œil m’aura mordu.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Je crois temps, ce soir, de redéfinir mes fonctions au sein de cet immense fracas Jiro…cellien…  L’ai-je créé ou lui ai-je transmis à mes heures le condensé essentiel de mes délires ?  La seconde facette de l’interrogation semble plus lucide ; elle l’est.  Je veux donc tenter à présent de lui fournir le maximum de mes heures…  Lui consacrer prioritairement mes énergies personnelles, point d’vue physique, au moyen de nombreux assouplissements susceptibles de rendre mon corps maniable à l’extrême…  « Réoxygéner » aussi mon cerveau ; en le délivrant à l’aide des feuilles où s’imprègne l’encre ; là où se meurt l’obsession.  Il est évident que les nombres posthumes appuient l’importance où j’ai à dire « ‘stie ».  En augmentant la résistance-persistance de mon potentiel corporel, j’alimente instantanément l’insistance du cerveau puisque ne lui offrant aucune overdose de gras de jus ou/et de boucane, ce dernier doit chercher à puiser ce qui manque.  Il est évident que quelques glandes en manque puisse sécréter le produit.

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Jacques laissa choir son crayon (il n’avait pas d’ordinateur.  Il n’avait pas de voiture non plus.  Et ses armoires se garnissaient en proportion de ses moyens).  Il contemplait les phrases, les pronoms, les verbes et la ponctuation et n’y décelait ni faille, ni satisfaction, ni trouvaille, ni omission ; qu’un amas de « illisible » qui pouvait éventuellement charmer quelques lecteurs, mais malheureusement pas son auteur.  Il demeura un instant fixé dans cette pseudo-catalepsie qu’entraîne l’incertitude face au travail accompli.  Il regardait toujours les phrases, mais ne les décernait plus.  Que d’étranges taches s’étalant sur le blanc d’une feuille…  Qu’un récif…  Qu’un écueil…  Il se leva en repoussant sa chaise de bois à l’aide de ses mollets.  Il possédait une chaise ajustable de cuir rembourrée sur roulettes chromées que sa mère lui avait léguée, mais par orgueil il ne l’utilisait pas.

            Il provenait de cette génération n’ayant jamais vu sa mère en brassière.  Et maintenant la rivière pullulait de nymphes nues, de pubis poilus et de seins invitants et pointus ruisselant de soubrettes fraîches qu’il aurait tant aimé éponger du long de sa langue.  Je crois que c’est à ce moment qu’il comprit que ses bobettes étaient dorénavant trop étroites.  Il lui faudrait du large.  Du jour au lendemain, il était passé du catéchisme à la catéchèse ; d’un Dieu punisseur et sévère à un Jésus amical, compréhensif et bourré de bonnes intentions.  Il avait vécu ses 3 premières années d’études sous l’égide de frères sévères et de sœurs pointilleuses et pavées de rancœur…  Puis suite au transfert de son père du village à la ville, il changea d’école, passant ainsi de la messe obligatoire et incompréhensible en latin à chaque matin au joint quotidien, libérateur d’entraves, donnant l’impression de capter et saisir une partie d’univers, celle qui nous concerne ; celle qui nous aime.  C’était si bon de ramener Dieu et Jésus et l’élu à une partie d’univers, toute simple, facile d’accès et à chaque « poffe » la partie se précisait sans mystère, sans trinité, qu’un univers unifié où quiconque trouve sa place sans invitation.  On l’avait placé de missionnaires aux colliers de haches rougies par les bûchers à des images d’Épinal symbolisant les races priant à l’unisson.  Du danger d’assassiner Jésus en croquant la rondelle sacrée au plaisir des communes, l’hostie dans la main.  De Moïse menaçant les brebis galeuses égarées de tes tables de pierre vengeresse à des contrées chantant les joies de l’amour.

            Il démêlait ses bobettes d’avec son frère par l’étiquette, lui portait du médium, l’autre du large.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            Il possédait un engin majuscule qui devait sûrement former une bosse énorme sur son péritoine viscéral.  Ce qu’elle aimait l’insérer, le serrer à l’aide de ses muscles minuscules et le sentir pilonner sans saveur !  Elle lui laissait le défoncer le pont-levis et lorsque la porte de son château de rêves cédait, les milliers de soldats pénétraient l’enceinte et se butaient sur son stérilet.  Et elle souriait.  D’un sourire de bouche entrouverte aux lèvres humides et scintillantes, dégoulinantes de fins filets de bave tout autour du péritoine.  Un délire fantasmagorique « symbiosant » l’extase du plaisir sexuel et la joie du devoir accompli.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

            (Début illisible).

 

            Elle s’amusait à s’imaginer faire une grosse queue de cheval, ou plutôt un chignon, vu les doigts recroquevillés.  C’était une femme magistrale, monumentale.  Sa dernière réalisation majeure datait de quelques heures et c’est ce qu’elle fêtait dans sa suite gouvernementale avec son secrétaire de 20 ans son cadet , si frais, si soumis, si brandi.

            Elle avait eu besoin de déposer 17 projets de loi nécessitant tout autant de votes et d’interminables périodes de discussions.  Bien qu’au pouvoir pour un troisième mandat consécutif, son parti ne possédait pas la majorité absolue si pratique lorsqu’on matraque l’électeur.  Elle dut donc se résoudre à la torture de la procédure ; maraudant dans les méandres des antichambres, soudoyant adroitement à gauche, rassurant la masse.  Son projet n’avait pas plu au début.  Étant trop général, il avait placé l’opposition en (mot barré : « fâcheuse ») position.  Bien qu’elle sût l’impeccabilité d’une telle idée, elle dut s’appliquer à n’afficher que ses mauvais côtés, affiches qui disparurent à l’usure.

            L’odeur qui régnait dans la pièce était remarquable, bien qu’inidentifiable.  Un mélange de sel et de parfums raffinés, extrêmement dispendieux.  La narine experte décelait sans peine les effluves de la sueur et de la luxure.

            Son gouvernement fut élu sous le règne du chômage excessif (plus de 42%) et de l’état dépressif.  Le taux de participation n’atteignait même plus la moitié de l’électorat, tellement le peuple était occupé à se g’ler et à se saouler. 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

 

            C’était un projet admirable, grandiose, génial, magnifiquement intelligent.  Elle l’avait baptisé « Service Médical Obligatoire », une forme de conscription digne de l’ère du verseau destinée à enrôler les jeunes dans les hôpitaux et les centres d’accueil dans l’unique but de leur faire apprécier leur précieuse santé.  Trois mois maximum en soins généraux et trois autres, minimum, avec les aînés où ils pourront acquérir les valeurs fondamentales de la vie, les conseils essentiels pour s’acheminer avec force et conviction vers la sagesse de la vieillesse et la joie incommensurable de voir sourire la nuit de la vie lorsqu’elle gagne une partie de dames ou simplement lorsqu’elle confie ses plus beaux secrets de pêche ou de tricot.  La rémunération proposée égalait largement celle de l’aide sociale actuelle mais contrairement à l’oisiveté suggérée par l’ancien système, le S.M.O. déploierait chez l’enrôlé un bien-être social et humanitaire.  Les hôpitaux et centres d’accueil deviendraient aussi de véritables « illisible » d’envie de vivre et d’entraide ; chacun s’occupant à encourager, à appuyer, à distraire, à écouter, à apprendre.

            Elle était maintenant accroupie devant le téléviseur, occupée à visionner le bulletin spécial entièrement consacré au S.M.O..  Elle ressentait des vibrations semblables à celles qu’elle venait d’avoir au lit avec son joujou.  Si ce dernier ne s’était pas manifesté, elle aurait probablement atteint un nouvel orgasme.  Il lui demande doucement, comme par peur de déranger, de lui délier les poignets, qu’ils quittent cette teinte bleutée, due au manque de circulation sanguine.  Elle acquiesça, mais ne s’exécuta pas tout de suite, fascinée qu’elle était encore par le reportage.  Ça lui permit de lui admirer les fesses.  Comme une mappemonde, parfaitement symétriques, elles exposaient à son visage la longue route qu’avait dû parcourir l’évolution humaine pour atteindre un tel niveau de perfection.  En leur centre explosait une fissure pure comme le cristal, bordée de reliefs langoureux et tellement invitants.  Elle augmenta le volume du téléviseur, écartant ses deux jambes et rejoignit l’associé sur son ventre, laissant la fissure se frotter sur son froc à l’occasion.  C’est elle qui exigeait que son partenaire conserve son pantalon pendant l’acte, ne laissant que la baguette brandir de la braguette, comme un orme jaillissant de l’homme.  Elle lança sa brassière au bout de ses bras et la regarda virevolter dans les airs avant de tomber  le lapin, elle pensa à tous ces saints sensés peupler l’univers.  Une idée comme ça.  Comme elle en avait parfois.  Elle remarqua quelques stries aux poignets de son jouet.  La teinte bleutée fuyait rapidement, laissant le rosé standard de le pas reprendre sa place.  Elle augmentait la cadence de la friction au rythme où la télévision complimentait le projet qui deviendrait sous peu réalité.  Intimement liés, ses comportements sexuels et professionnels se malaxaient-ils en cette soirée, admirés, contemplés, approuvés, félicités.  La télé déversait l’approbation du peuple et le secrétaire savourait enfin son corps de façon tactile.  Il la contemplait se dresser au-dessus de lui : stature de star… extatique comme un cadeau.  Elle l’envisagea, puis « l’envagina » de nouveau profondément, comme un cadeau.  Un cadeau qu’elle lui faisait ; un cadeau qu’il lui laissait ; un cadeau qu’elle faisait au peuple en lui offrant le S.M.O., un cadeau que lui faisait le peuple en approuvant l’intelligence d’une telle initiative.  Y a pas à dire : la vie nous réservera toujours de belles surprises.

            Dans quelques mois, pensa-t-elle, des milliers de sourires édentés jailliraient de partout au pays, constatant le plaisir de se sentir écouté, réconforté, apprécié…  Et autant de jeunes s’enligneront désormais vers le 3e âge en sachant qu’à leur tour, un jour, on prendrait humainement soin , l’aube de la vie n’aura de répit que lorsqu’elle saura que son « illisible » peut désormais s’endormir en paix.

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

            On a eu droit dernièrement aux innombrables et traditionnelles revues artistiques de l’année.  Que ce soit à la télé, à la… (phrase non terminée)

 

            Faut-il faire quelque chose pour avoir la renommée ou faut il avoir la renommée?

 

            Sa toux avait la régularité des salves de canons, des destroyers lorsqu’ils battaient la plage pour permettre à l’infanterie d’envahir le territoire ennemi, lorsqu’elle ne tournait pas.  J’imaginais ses poumons se recharger de munitions avant de bombarder à nouveau.  Sa mère m’assurait ne pas comprendre la situation.  Menus végétariens constitués de légumes hydroponiques et cuits à l’aide d’eau distillée, règlement antitabac strict (hystérique ?) à l’intérieur de la maison.

 

 

AUBE ET CRÉPUSCULE-DESCRIPTION DU PROJET (ANNÉE INCONNUE

 

Le chemin des années n’est jamais indiqué sur les pancartes de la vie

Puisqu’il suit le tracé que lui ont destiné les voies cachées de l’infini

 

SYNOPSIS « A »

C’est l’histoire du même personnage, divisé en deux.  À prime abord, je retiens celle de l’enfant et du vieillard qui, l’un comme l’autre, ont des comptes à régler avec leur vie respective.  L’un a-t-il conduit l’autre au bon endroit et l’autre, une fois rendu, a-t-il passé son temps à refuser d’y aller ?  La jeunesse, fondamentalement instinctive, a le choix d’emprunter diverses voies carrossables ; mais une seule d’entre elles déterminera l’aboutissement de son existence.  Le jeune ne choisit pas cette route à partir d’un choix éclairé et judicieux, mais décide de l’emprunter autant pour la beauté qu’elle propose que pour le « fun » qu’il prévoit éprouver en la parcourant.  Et rien ne prouve qu’une déchéance acquise en fin de parcours soit la résultante d’un choix initial erroné.  C’est le questionnement que je propose, plongé dans un enrobage fantasmagorique, analysant au travers les sourires et les froncements de sourcils diverses avenues, bordées de pancartes aux suggestions intéressantes, mais qui ne peuvent s’interpréter qu’à partir de la route qu’a choisie d’emprunter « l’auditeur-spectateur » lui-même au cours de sa vie. 

Parlons d’un tout jeune enfant, que l’on voit d’abord très vieux, puis qui devra se rencontrer lui-même lorsqu’il était encore enfant, s’il veut maîtriser l’introduction de sa vie afin d’en pénétrer le dénouement en pleine possession de ses moyens.  Au niveau du jeu, il faut que ces deux entités (le vieillard et l’enfant) soient interprétées par le même personnage afin que l’on saisisse hors de tout doute que l’un est la morale de l’autre comme l’autre est la conscience de l’un.  Comme j’expliquais au début du « synopsis A », l’aspect paradoxal des deux individus doit être maintenu de front puisque la jeunesse arrive parfois au crépuscule de la vie complètement ruinée, autant que la vieillesse peut dilapider en un instant dépressif les rentes de bonheur qu’a économisées le jeune âge en prévision d’une retraite solide des expériences antécédentes.

Je précise que je me lance dans cette élaboration philosophique non pas à partir de mûres réflexions résultant d’une étude fouillée et bien documentée, mais strictement par audace personnelle.  Ajoutons que comme mon âge m’aiguille lentement vers la sagesse, cela pourra en plus me permettre de vérifier si je possède les outils nécessaires pour m’y bâtir une demeure confortable et intéressante.

 

(Notes d’auteur 1)

Au niveau de l’exécution « live », il faut tenir compte, tout au long de l’élaboration du projet, que le personnage « vieillard-enfant » n’est en fait qu’un seul interprète.  Comme si un carcan rigide personnifiant l’aïeul pouvait envelopper l’enfant de la tête aux pieds et se retirer au besoin, soit par voie aérienne, soit par un moyen plus modeste en se scindant en deux par exemple, et permettant ainsi au spectateur de bien discerner que l’un fait intrinsèquement partie de l’autre.  Ce moyen, en majeure partie mécanique, suppose toutefois des manipulations compliquées et me semble bien précaire pour ce qui est de rendre le faciès de l’interprète crédible lorsqu’il passe d’un état juvénile à un âge beaucoup plus avancé.  Je prends quand même le temps d’en mentionner l’existence puisque c’est à partir de cette compréhension visuelle précise qu’on pourra sans équivoque suivre le déroulement du questionnement proposé tout au long du livret, et comprendre la délicate ambigüité que les textes et les ambiances musicales tentent de traduire.  Il ne faut jamais perdre de vue, en cette époque de monarchie télévisuelle, que l’être humain ne jure plus que par l’image et les sonorités qui l’accompagnent.  Ce n’est qu’une fois le charme établi entre l’auditoire et la métaphore suggérée par le show que le niveau textuel pourra établir le contact et se mettre à détailler les nuances qui feront de cet événement spectaculaire une entité unique se distinguant d’autres œuvres traitant d’aspects similaires.

On l’aperçoit donc en début de show évoluant dans son milieu.  Il est trop tôt pour avancer exactement l’allure que peut revêtir la scène à ce moment, mais précisons quelques accessoires nécessaires à l’élaboration que j’entrevois.  D’abord une porte, ou du moins une voie d’accès significative d’où pourront entrer et sortir logiquement des personnages.  Je lui suppose une fenêtre ; enfin, une ouverture par laquelle il sera possible de vérifier qui se pointe avant de lui donner droit d’entrée.  Parmi les éléments meublants, une télévision, imposante, capable de fournir la luminosité qu’on lui connaît et transformable au besoin.  Une table, genre cuisine, où la chaise infiltrée nous permet de manger et d’écrire à notre aise ; bien comprendre que ce n’est pas une table à café.  L’accessoiriste pourra au besoin se glisser en dessous pour exécuter les manipulations décrites dans le livret.  Pour l’instant, j’ajoute une planche à repasser qui signifiera la mère, bien que j’anticipe les hystériques féministes paniquer en « stéréotypant » ainsi la génitrice de notre héros.  C’est pourquoi je continue à rechercher l’objet idéal personnifiant la maman, bien que celui-ci m’apparaisse adéquat, tant par sa signification que par les possibilités qu’il offre au niveau de la versatilité qu’on exigera de lui.  Pour le père, une chaise berçante semblable à celle qu’on retrouve au local chez Lemieux, altérable à l’excès, capable de lire un journal et même de fumer la pipe.  Aussi, un crucifix, modeste, piqué sur un mur, appelé à prendre le volume nécessaire pour accueillir l’être humain que l’on immole habituellement sur sa forme.  Enfin, pour le moment, un bol d’aspect standard, mais pouvant élargir son diamètre jusqu’à permettre à un cors de passer par son fond.

J’entends déjà fuser les commentaires concernant mes prévisions « accessoiristiques ».  Il faut en revanche comprendre que j’ai besoin de visionner le jeu des personnages, non pas à partir de ce qu’ils feront après qu’une armée de concepteurs se seront définitivement entendus sur la facture finale du spectacle, mais visionner précisément dans ma tête ce que doivent exécuter les antagonistes si j’entends mener la construction du livret définitif à terme.  Ce sont ces projections précises qui me permettent, au travers le processus créatif, d’acheminer l’action vers l’endroit distinct où doivent la conduire les sentiments exprimés dans les textes chantés; car je demeure arrêté sur l’idée que le spectacle sera chanté d’un bout à l’autre, comme une « toune » concept qui s’écoule la durée d’un show, qu’on fragmentera au besoin pour créer les « hits » nécessaires au succès radiophonique, mais fondamentalement prévue par l’auteur et le compositeur comme un seul jet dans sa version finale. 

 

SYNOPSIS « B »

L’ambiance scénique semble se préciser peu à peu.  Je maîtrise suffisamment la matière exploitée pour faire coïncider textes et mouvements dans une sorte de limbes vaporeux.  J’ai de moins en moins besoin de tenir compte de lieux précis où doit se dérouler l’action pour envisager les mots à exprimer.  À ma grande satisfaction, je réussis à séparer le travail d’écriture de celui de mise en scène.  Bien que les explications fournies au synopsis « A » et dans les notes d’auteur demeurent d’intérêt, elles perdent, pendant que s’additionnent les textes à chanter, l’importance que je leur réservais en début de travail.  Je réalise, à la relecture de ce que j’ai créé jusqu’à présent, que l’action principale du show évolue plutôt dans une ambiance que dans les lieux physiques définis comme ceux qu’une maison propose par exemple.  Pour améliorer la clarté du peu de lumière que fournit jusqu’à présent ce deuxième jet synoptique, voici quelques précisions sur ce que je nomme les « limbes vaporeux » et « l’ambiance ».  L’atmosphère scénique devrait reconstituer, à l’aide d’une grande poésie visuelle, l’intérieur utérin.  Sans accentuer la cavité pelvienne, il faudrait que cette pseudo-grotte progresse de manière à révéler sa véritable identité quand le besoin s’en ferait sentir.  C’est pourquoi il ne faut pas perdre de vue que la matrice maternelle n’apparaîtra qu’en temps voulu ; autrement dit, certaines personnes pourront conclure qu’elle se trouvait là depuis le début, même si on ne la voit concrètement qu’au milieu du spectacle.

 

(notes d’auteur 2)

J’ai maintenu, depuis le début d’écriture, le développement du thème intimement lié à l’enfance.  Par le fait même, quelques clins d’œil aux divers autres stades de la vie s’insèrent.  Pensons à la rencontre parentale exprimée à l’aide d’étranges objets « (notes d’auteur 1) » ou encore à ces moments où le vieillard  s’exprime ; mais l’observation principale tire sa source de l’aube de la vie.  Il serait hallucinant de faire naître et/ou renaître de cette matrice le personnage principal du show.  Pas nécessairement au début, mais à un moment précis ; ou l’effet de surprise combiné aux contractions nécessaires pour expulser le nouveau-né hors du sein maternel amèneraient le spectateur dans la fantasmagorie mentionnée précédemment.  On peut penser aussi voir le vieillard se recroqueviller en position fœtale à l’avant-scène et regagner lentement le fond, avec toute la peine que sa posture suppose, comme s’il pénétrait un « chronogyre » constitué de tissus humains.  On accentuerait l’effet de perspective à l’aide d’un tunnel lumineux s’éteignant en direction de l’arrière-plateau.  Une fois disparu, le mécanisme musculaire propre à l’accouchement pourrait débuter, symbolisé par les pulsations ondulatoires transmises le long des parois caverneuses faisant office de décor.  Il est de toute évidence que le climat musical atteindrait son paroxysme si on le synchronisait parfaitement avec le mécanisme invoqué sur scène.

 

(notes d’auteur 3)

J’inclus dans le premier jet la possibilité d’exploiter le questionnement du vieillard par rapport à son enfance sous forme de dialogue vivant.  Je « textualise » donc les deux antagonistes dans les Vox IV et V en précisant dans le document lequel d’entre eux doit prendre la parole au moment d’énoncer l’opinion décrite.  Ce niveau d’expression en est à ses premiers balbutiements et doit être considéré dans sa forme la plus précaire.  Y aura-il réellement deux individus ?  Une seule personne se répondra-t-elle à l’aide d’une voix semblant venir de l’intérieur d’elle-même ?  Cette voix intérieure sera-t-elle enrobée d’effets sonores, genre « reverb » ou « vocoder » ?  Et ce seul personnage qui se répond, qui sera-t-il ?  Le vieillard ou l’enfant ?  Une tierce entité doit-elle être envisagée ?  Comme j’ai décidé de fournir au compositeur la totalité de mon travail de départ afin qu’il puisse, je l’espère, y puiser suffisamment d’inspiration pour effectuer sa propre genèse, on ne doit pas se suspendre de retrouver au travers la substance certains items semblant douteux à prime abord.  Je ne peux qu’espérer qu’ils dénicheront leur justification au fur et à mesure que l’œuvre évoluera.

J’entrevois la même possibilité d’opérer si jamais l’enfant doit dialoguer de façon concrète avec les « parents-objets » auxquels je fais allusion dans les « notes d’auteur 1 ».  La situation s’avère en revanche plus délicate, car j’anticipe développer de tableau en laissant croire à l’auditeur que l’enfant s’ancre solidement dans une schizophrénie  plus qu’apparente ; ce qui laisse supposer qu’il hallucine les tierces voix et que celles-ci devraient s’exprimer à l’aide de ses propres ondes vocales.  Je laisse toutefois la porte ouverte, puisque ce genre de maladie a prouvé plus d’une fois que le sujet qui en est atteint entend fréquemment des voix imaginaires qui peuvent à l’occasion s’exprimer à partir de timbres de voix autres que celui qu’emprunte habituellement le détraqué.

 

(notes d’auteur 4)

On remarquera que le présent dossier contient un texte en prose (Vox XI).  Il amène par naïveté précise ou par sa précision naïve, comme bon vous semble, l’éventualité qu’un conte sera narré.  Je le sens intimement lié avec le Vox IX, ajoutant même que, selon moi, ce dernier devrait logiquement précéder l’autre.  Sa position exacte dans le show n’est toutefois pas encore définitivement déterminée.

 

SYNOPSIS « C »

La source de la dualité vieillard-enfant pourrait être la fin, voire la mort symbolisée en ouverture de show.  Que ce soit la fleur qui se fane, le torrent qui se tarit, la neige qui fond, la photo que l’on déchire, l’arbre que l’on coupe, l’œuf qu’on écrase, les ruines qui traînent après le bombardement, la tête d’orignal sur le capot, l’assiette avec ses restes séchés, un cendrier qui déborde, une bouteille vide, une forêt sans feuille, une croix, un long tunnel lumineux, l’addition d’images aptes à exprimer l’idée de terminaison situerait de façon subliminale la direction de l’œuvre.  On verrait, suite à cette allégorie, apparaître le personnage principal anticipant presque sa rencontre avec l’enfance ; comme si on revoyait réellement notre vie avant de mourir.  C’est au travers cette vision en « comeback » qu’il inventoriera les phases de son existence et qu’il en livrera les résultats au public.  Nous éloignerons ses propos le plus loin possible des formes didactiques et scatologiques, mais ne nous étonnons pas de le voir frayer à l’occasion sur ces voies d’expression.  Les épisodes de sa vie seront traités autant par sketchs que par fresques métaphoriques élaborées, conjugués avec poésie et réalisme absurde, présentes sous un format accessible, c’est-à-dire pouvant s’installer dans tout endroit susceptible d’attirer par son emplacement existant une clientèle potentielle.  Je sais qu’il paraîtra étrange que j’aborde théoriquement les lieux où le spectacle pourrait être présenté ; mais le climat intimiste qu’il propose requiert une écoute serrée et dénuée d’artifices.  C’est pourquoi j’entends l’élaborer dans une formule versatile, compacte et suffisamment efficace pour qu’elle puisse transporter l’auditeur potentiel autant à partir d’un bar exigüe que de n’importe laquelle salle dite « professionnelle ».

Retenons aussi l’idée de la caverne vaginale d’où pourra naître et/ou renaître le vieillard-enfant.  Le suintement de ses parois, la perspective de sa profondeur et l’infini semblant y résider tiennent toujours une place prépondérante, à mon avis.  C’est, jusqu’à présent, mon point de repère d’où peuvent se ramifier les diverses avenues que proposent les saynètes et les scènes plus élaborées, mais où l’on revient à l’occasion, histoire de bien se resituer avant de poursuivre le voyage.  Cette grotte utérine doit enrober, par l’atmosphère qu’elle suggère, tout le côté mystico-surréaliste que propose cette fantastique odyssée au sein de nous-mêmes, et qui nous permet de visionner ce qui viendra si on est tout jeune et de vérifier ce qu’on a peut-être oublié si on est plus vieux.

Comme le thème se précise de plus en plus, il ne faut pas se surprendre que je considère l’éventualité d’y inclure certains textes s’y rattachant, même si ceux-ci ont vu le jour bien avant la copulation auteur-compositeur qui enfanta le présent projet.  Comme j’énumérais dans les « notes d’auteur 1 » divers accessoires, il va sans dire que le crucifix pourrait très bien nous rappeler Jésus et que son message se livrerait très bien au travers un texte comme « Dimanche noir » (Vox XII).  Si jamais la thématique désire bifurquer vers l’antonyme du jésus, « Genèse Rock DCLXVI » (Vox XIII) délirerait la climatique à merveille.  Et un texte que j’ai à peine exploité à l’époque Boldô/Moro, « L’enfant » (Vox XIV), trouve de son côté une pertinence beaucoup plus officielle en ce qui a trait aux idées invoquées.  Je les intègre donc au présent document tout en tenant compte que, comme tous les autres Vox, leur adhérence au show ne se concrétisera que le jour où ils recevront leur sceau officiel de participation.  Le dit « seing » ne peut être appliqué qu’après entente formelle entre l’auteur et le compositeur, éléments indéfectibles au rendement exigé de la part des textes et des musiques nécessaires à l’édification de cette mégastructure.

 

Vox I

 

Elle s’amusait dans les débris

En redonnant de nouveaux rôles aux trucs inertes

Comme si elle entendait la vie

Lui raconter qu’elle pouvait limiter les pertes

Si elle prenait le temps d’apprendre comment multiplier les choses

Si elle voulait vraiment comprendre qu’on n’échappe pas ce que l’on pose

Doucement

 

Elle se plaisait dans les décombres

En réveillant certains objets qui y dormaient

Elle les sortait de leur pénombre

En leur confiant qu’un jour elle les transformerait

S’ils prenaient le temps de s’apprendre et de devenir d’autres choses

S’ils voulaient finalement comprendre qu’on apprécie ce qu’on dépose

Doucement

 

Et la vie continuait à l’autre bout du monde

Elle ne savait pas que d’autres enfants y vivaient

Que d’autres enfants vivaient à l’autre bout du monde

En ignorant pourtant que sa vie continuait

 

Elle faisait des châteaux de cendres

En rêvant qu’elle était au bord de l’océan

Les cauchemars pouvaient attendre

Elle n’avait pas atteint l’âge des jours angoissants

En autant qu’elle imaginait le sable dormir sous les épaves

En autant qu’elle se rappelait que l’herbe pousse sous la lave

 

Elle joue encore parmi les ruines

Car c’est le seul endroit où elle peut reconstruire

Tous les châteaux qu’elle imagine

Et que le fil des ans s’occupe de démolir

En autant qu’elle attend le temps qu’il faut pour faner une rose

En autant qu’elle attend le temps qu’il faut pour effacer les choses

 

Et la vie continue à l’autre bout du monde

Mais elle ignore que c’est là que dorment d’autres enfants

Que d’autres enfants s’endorment à l’autre bout du monde

Et qu’ils ne connaissent l’avenir qui l’attend

 

 

 

Vox II

 

Je suis le peuple des vidanges

Le monde immonde de la méfiance qui évolue sous votre fange

Je suis le peuple des crachoirs

La ville des vilains rêves noirs, cité perfide et sans espoir

Rien à perdre

Tout est perdu

 

Je suis l’impureté de la terre

Empilée sous ta sale affaire, ne faites rien ; y a rien à faire

Je suis le poumon de la crasse

Et que je crève dans vos crevasses ne vous dérange pas, que je sache

Rien à perdre

Tout est foutu

 

Gare à celui qui viendra dans ma cour

Je l’attraperai, je le pendrai haut et court

Et gare à celle qui n’a pas peur de mon appel

Comme l’hirondelle, je lui briserai les ailes

 

Je suis le peuple des microbes

J’anéantis les anticorps et qui me mord court à sa mort

Je suis le peuple des détritus

Je me noie sous vos cochonneries, pris sous l’emprise du mépris

Je suis le prince du mucus

 

Gare à celui qui viendra dans ma cour

Je l’attraperai, je le jetterai aux vautours

Et gare à celle qui n’a pas peur de mon appel

Rien à perdre

Tout est perdu

Rien à perdre

Tout est foutu

 

Vox III

 

Je sais, je sais, je dois partir

J’ai toujours du mal à sourire

Quand je sais que personne ne sait que je m’en vais

Je n’ai pas d’enfant qui m’attend

Ne me rappelle rien d’important

Qui ferait qu’un subit départ m’angoisserait

Je crois être un être déchu

Quand je passe ma vie en revue

 

L’infini peut offrir à qui se hait de disparaître

Mais si je n’ai pas su m’aimer, comment pourrais-je renaître ?

 

Je sais, je sais, je vais mourir

J’ai toujours du mal à partir

Quand je sais que je ne reviendrai plus jamais

Je n’ai pas fait de testament

Je ne vois aucun événement

Qui ferait qu’un jour quelqu’un me reconnaîtrait

Je crois être le seul déçu

Quand je passe ma vie en revue

 

L’infini peut offrir à qui se connaît d’apparaître

Mais si je ne me connais pas, comment puis-je renaître ?

 

Vox IV

 

Le vieillard

Un enfant qui frappe à ma porte

Je n’réponds pas « que le diable l’emporte »

Je n’ai qu’à fermer les lumières

Ça le f’ra taire

 

Allez décampe, peste enfantine !

Je suis trop vieux, tu me déprimes

Je n’ai pas envie de t’aider

Je n’ai plus rien, j’ai tout donné

Pars loin d’ici, retourner jouer dans l’infini

 

L’enfant

Mais si te me laisses dehors

Tu empêches le bateau de s’accoster au port

Oui, si tu me laisses dehors

Tu te réserves le contrôle du hasard

Si tu ne m’ouvres pas la porter

Tu te rappelleras que le diable m’emporte

 

Le vieillard

Vas-tu finir par déguerpir ?

Je n’ai personne à accueillir

Je n’ai pas envie de parler

Je n’ai plus rien à raconter

Pars loin d’ici, fous-moi la paix, je suis fini

 

L’enfant

Mais si tu me laisses dehors

Tu s’ras rongé et dévoré par les remords

Oui, si tu me laisses dehors

Tu te rappelleras à jamais de tes torts

Si tu ne m’ouvres pas la porte

Tu sauras que c’est toi que le diable emporte

 

Vox V

 

Le vieillard

Pourquoi as-tu choisi de rôder dans ma rue ?

 

L’enfant

Mais je n’ai jamais quitté cet endroit

 

Le vieillard

Tu n’as pu le quitter ; tu n’y es jamais venu

 

L’enfant

Peut-être parc’que tu ne m’accueilles pas !

 

Le vieillard

Je t’ai laissé entrer ; donc tu n’étais pas là

 

L’enfant

Je s’rais ici si j’étais bienvenu

 

Le vieillard

Je n’t’ai jamais connu ; ne comprends-tu cela ?

L’enfant

Peut-on connaître c’qu’on n’se rappelle plus ?

 

Le vieillard

Alors j’ai dû rêver ma vie d’enfant

Car j’n’ai pas souvenir

De m’avoir vu vieillir

Et d’avoir ressenti des mains

Me montrer le chemin

Que traversera note vie

Si elle est bien partie

 

Vox VI

 

Presque cent ans de vie que j’ai comptés jusqu’à présent

Et ses feux d’artifice n’ont pas l’éclat de ceux d’antan

La nouvelle étincelle éteint celle qui venait avant

Surtout lorsque sa flamme n’éclaire qu’un bien triste bilan

Car j’ai mené ma vie en oubliant l’enfant en moi

Celui qui souriait aux pleurs coulant sur d’autres joues

Celui que se dressait quand d’autres ployaient sous les coups

Celui qui vient me dire que c’est de moi que je ne me rappelle pas

 

Le chemin des années n’est jamais indiqué sur les pancartes de la vie

Chemin inachevé qu’on n’peut pas décoder puisqu’il s’écrit à l’infini

 

Presqu’un siècle de joie au fond de moi qui attendait

Mais moi j’ai fait le tour des alentours qui m’attiraient

Refusant d’entrevoir ce que le sort me réservait

Ignorant l’espérance que ma conscience entreprenait

Car j’ai mené ma vie en oubliant l’enfant en moi

Celui qui n’a pas eu droit au bonheur que l’on mérite

Celui qui attendait que le vieil homme le ressuscite

Celui qui vient me dire que c’est de moi que je ne me rappelle pas

 

Presque cent ans de guerre qui ne m’aura guère avancé

Car j’en étais le nerf, l’allié, l’ennemi et le blessé

Presqu’un siècle d’enfer où j’enfermerai le passé

Chaque jour qui se perd ne pourra être recommencé

 

Vox VII

 

On a prouvé à l’infini qu’il vient d’atteindre ses limites

Puisque l’enfant n’a plus la clé que lui réservait la sagesse

Quand il voulait ouvrir la porte pour rencontrer le vieil ermite

Et vérifier les vérités qu’on lui impose dans sa jeunesse

 

On a prouvé à l’infini qu’on a terminé sa poursuite

Puisque l’enfant n’a plus l’envie d’entendre le sage lui confier

Que le vaincu connaît l’ennemi mieux que le froussard qui l’évite

Puisque les jours d’autres combats il l’aura déjà affronté


On a prouvé à l’infini qu’on n’écoute plus ce qu’il nous cite

Puisque l’oreille entend les sons que lui fredonne l’anonymat

Puisque les yeux ne voient plus qu’un ciel inondé de satellites

Parce que l’être veut tout avoir alors qu’il n’est pas ce qu’il a

 

Faut-il faire quelque chose pour être quelqu’un ?

Faut-il être quelqu’un pour faire quelque chose ?

 

Vox VIII

 

Mon corps habite dans les plus beaux endroits

Dans des palais où je me sens le roi

Avec jardins de leurs paradisiaques

Parfumant vie d’odeurs aphrodisiaques

Je mange toujours les mets les plus rares

Que l’on me sert dans des assiettes d’or

Table dressée sur un marbre fragile

Miroirs cachés au fond des ustensiles

Des lustres de cristal et de diamants

Illuminent des trésors étincelants

Les portes parées de cadres luxueux

S’ouvrent souvent sur salons somptueux

Les meubles sont recouverts d’une soie

Tissée par des mains qui ne font que ça

Les planchers qui s’étirent à l’horizon

Sont faits de bois dont on oublie les noms

Fenêtres bordées de rideaux magnifiques

Fioles et flacons emplis de fluides uniques

 

Et pourtant ces lieux qu’on m’envie parfois

Sont pour moi source d’un très grand ennui

Car j’envie aussi celui qui côtoie

L’ordinaire au cours des jours de sa vie

Celui qui habite un endroit modeste

Où le jardin est un terrain de jeux

Où les repas sont souvent faits de restes

Que l’on termine les doigts bien juteux

J’envie ces tables au milieu des cuisines

Et ces enfants élevés sans caprices

Les chaises qui bercent l’histoire qu’on imagine

Les lieux qui ne tolèrent pas l’artifice

 

Parfois la nuit quand je ferme les yeux

Je me rappelle un endroit si petit

Qu’on ne pouvait ne pas y être heureux

Tellement l’espace y était réduit

Même pas de place pour installer lumière

Où pour entrer le moindre objet meublant

Endroit où n’est jamais venue ma mère

Où on ne revient pas de son vivant

 

Non vraiment, mon plus bel appartement

C’était au sein du ventre de maman

 

Vox IX

 

Raconte-moi une histoire

Mais n’y inclus aucune intrigue

Fais-y voguer le vague à l’âme

Blesse le bien, sauve l’infâme

Laisse l’effort ployer sous la fatigue

 

Dessine-moi une histoire

Mais n’y griffonne aucun héros

Personnifie plutôt les choses

Parle à la plaine, marie la rose

Laisse le froid se tenir bien au chaud

 

Chante-moi une histoire

Mais ne la conte pas en chantant

Laisse les mots devenir notes

Les événements, des instruments

Laisse ma tête faire la fête en t’écoutant

 

Vox X

 

Où étais-tu

Quand mon chagrin avait la force

De l’eau de pluie qui ronge la roche

Et qui ne laisse dans ses sillons

Nulle émotion ?

 

Où étais-tu

Quand ma peine avait la puissance

D’une gigantesque avalanche

Et qui enfouit sous son manteau

Le moindre sanglot ?

 

Où étais-tu

Quand la tristesse fouettait ma face

Et que j’étais un arbre que le vent arrache ?

 

Où étais-tu

Quand on écrasait ma confiance

Sous les monts de la déchéance

Et que s’empilaient sous la pierre

Mes nuits de misère ?

 

Où étais-tu

Quand j’expliquais qu’un sacrifice

Est comme la terre que l’on défriche ?

Elle ne donne aucun résultat

Si on n’y croit pas

 

Tu te dis mon ami

Comme un ami tu te dis

Que je suis con si je n’prends pas

Ce que je me comprends pas

 

Vox XI

 

S’il n’était qu’une fois, cette histoire n’existerait pas.  Car on ne peut la raconter qu’après plusieurs répétitions.  À chaque fois que se répète le cycle immense de la vie et que le tout de la conscience à nouveau s’agrandit.

S’il n’était qu’une fois, cette histoire ne se pourrait pas.  Car on ne peut la percevoir qu’au travers millions de regards.  Comme si l’enfant de notre enfant comprenait un peu plus qu’avant et que ces nouvelles connaissances engendraient l’infini.

S’il n’était qu’une fois, vous ne seriez pas devant moi.

 

Vox XII

 

J’étais venu vous redonner de l’espoir

Briser les dimanches noirs

Vous m’avez flagellé

 

J’étais venu abolir les dictateurs

Qui vous menaient par la peur

Mais ils m’ont fait fouetter

 

J’étais venu vous redonner de l’amour

La nuit étouffait le jour

Vous m’avez crucifié

 

J’étais venu donner la chance à la paix

De régner sur ses sujets, mais…

J’n’en fais plus, j’ai trop mal

 

L’église se brise, elle a perdu son emprise

C’est mort

-N’en dites plus, j’ai trop mal

 

Le crucifix a perdu de sa magie

C’est mort

-N’en dites plus, j’ai trop mal

 

Le notre père n’est plus le signe de l’espoir

C’est mort

-N’en dites plus, j’ai trop mal

 

Vox XIII

 

Bien avant que l’homme

Ne croque la pomme

Et que la Bible

Ne soit lisible

Dieu se reposait

Satan le savait

Et dans sa tête l’idée germait

Satan dit à Dieu

« Salut Dieu

« Aurais-tu du feu

« Car l’enfer est encore éteint ? »

Dieu lui dit

« Maudit

« Le fais-tu exprès ?

« Rien qu’à matin ça fait déjà trois fois »

Satan dit à Dieu

« Écoute vieux

« J’ai p’t’être une idée pour que l’enfer reste allumé

« Envoie-moi sur Terre

« Cette planète qui t’est chère

« Et laisse-moi m’y infiltrer

« Et tous ceux qui diront

« Satan est le bon

« Celui pour qui l’on doit prier

« S’en viendront chez moi

« Me serviront de bois

« Et crois-moi, pour les attirer

« J’ai d’excellents moyens… »

 

Vox XIV

 

L’enfant qui a peur

Pleure

Quand ses compagnons l’effraient

Il est une fleur

Qui se meurt

Au milieu d’un bouquet

 

L’enfant qui a froid

Croit

Que le monde est de glace

Pour qu’il ne s’y gèle pas

Il faudra

Qu’un d’entre nous l’enlace

 

L’enfant qui a faim

Craint

Que son corps dégénère

Il est un chemin

Qui s’éteint

Au milieu du désert

 

L’enfant qu’on rend fort

Dort

D’un sommeil magnifique

C’est là qu’il récupère

Les mystères

Qui rendent sa vie magique

 

Prends-le dans tes bras

Dis-lui que tu es là

Ferme la télé

Ouvre-toi

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Du haut de la tour, Frigzel contemplait d’un aboyant regard l’immaculée splendeur entourant Jeanne, l’élue de son cœur.  Ses palpitations surclassaient de loin la normalité du Rythme cardiaque car du haut de sa nef, Jeanne ne pouvait l’apercevoir ; puisqu’elle cueillait plus bas quelques fleurs.

Le temps, inexorable, vient à bout de n’importe quelle masse ; qu’elle soit calcaire ou d’autre forme.  Surprenamment, la masse ne cédera qu’au moment inattendu par la négligence.  C’est ce qu’on appelle la force des choses, ou le destin…

Lentement, la pierre granitée, jadis figée au créneau principal du château où naquit Jeanne, augmentait sa chambranlance.  Pourtant, dix ans plus tôt, Frigzel, maître du castel, fit remarquer à son laquais l’anormale solidité du bloc, composant avec ses semblables la découpure architecturale de la tour.  Il lui proposa à ce moment de la solidifier.  Le lendemain, la pierre n’avait point vu le laquais…  La pierre, au cours des années et sous l’influence tempérée des eaux et des vents, était maintenant au stade du « prêt à tomber ».  Comme une dent qui du branlement passe à l’addition du jeu dans l’axe, le bloc de granit n’espérait plus qu’un providentiel mistral qui, de son souffle, mettrait terme à son ennuyante disposition.  Du nord-ouest, sur un amas de nuages déplacés rapidement, signalait une proche violence ventée…

Au pied de la tour, depuis que ses jambes la portaient, Jeanne se rendait seule cueillir des pousses florales qui, grâce aux énergies naturelles, s’émancipaient chaque soir où le soleil s’énervait.  Dans sa solitude, elle comprenait son geste.  Calmement, de sa main gauche, elle créait dans sa droite une gerbe appelée à mourir.

 

 

 

 

FIN AVRIL… TERRE BOUEUSE (DATE INCONNUE)

 

  

Du fond du rang de St-Gabriel de Ferland : temps morne, tantôt chaud.

Tantôt plus froid que l’avant-veille.

Les arbres plient et se souviennent de ta présence.

J’Imagine de plus en plus la prochaine phase…  Elle devrait se situer là où l’on cherche l’illusion ; celle qu’hier je n’ai pu perdre ; celle qui captive mes restes de mémoire.

Je lui laisse le laps de s’étendre ;…  Sous forme d’aile elle devrait déployer son contenu à ma vie, raide et distincte, prête à s’apercevoir du fait.

L’éloignement a ses limites.  Quand elles se dresseront… 

Les limites ne se dressent plus non plus.

De temps en temps, j’imite tes phrases canonnées d’existence.

Un amas de phrase

Le texte qui t’encourage

Mon bras hésite

D’où proviennent les vibrations

Si t’es pus là

Qui se débrouille ?

Deux flots

Est-ce trop ?

Ou pas assez ?

Expédie ton point d’vue

Je t’attends, vois-tu ?...

 

Jacques

 

P.S. : Ma job roule ; tête éprouvée

          Sylvie fait « salut » à toi

 

 

 

 

ATTENTION ATTENTION ATTENTION ATTENTION ATTENTION ATTENTION ATTENTION ATTENTION ATTENTION (ANNÉE INCONNUE)

 

 

Veuillez remarquer que la dactylo qui a tapé les textes qui vont suivre fonctionne quand même assez mal.  C’est pas parce que je suis un lamenteux que je vous préviens de la sorte, mais plutôt par souci de perfectionnisme.  Les quelques fautes d’orthographe qui auront pu s’introduire clandestinement au sein des feuilles sont elles aussi hors de mon contrôle car les dites feuilles ont été produites d’un seul jet, soit le plus sincère et généralement le plus intéressant.

 

***

 

Bon !  Le principe était relativement compliqué à développer, puisque nous nous retrouvions devant l’obligation de séparer le show en deux montages distincts.  Premièrement, nous devions prévoir au minimum une heure trente de matériel, durée quand même acceptable pour un spectacle standard de salle.  Il fallait dans un premier temps épurer les sept dernières années de production afin d’y déceler les meilleures pièces susceptibles d’être conservées et voire même améliorées.  Ce fut fait.  Non sans difficulté.  De toute façon, je te joins une liste détaillée des tounes et tu pourras constater par toi-même les résultats de cette opération.  Ensuite, apparut le stade le plus compliqué de ces décisions.  Il fallait dans un deuxième temps construire un mini-show qui contiendrait en plus de quelques commerciales, des moments cruciaux de mise en scène, aptes à attirer les spectateurs pour d’éventuels spectacles subséquents.  La durée idéale de ce « concert réduit » fut fixée à trente minutes, chrono généralement accordé lors des concours et des différentes premières parties auxquels nous aurons probablement à faire face sous peu.  En ce moment, nous travaillons surtout sur cette fameuse version écourtée, nous disant qu’il nous sera facile par la suite d’additionner les moments manquants.

Toutefois, je te précise qu’actuellement, point de vue musical, ça va fantastiquement bien.  Des arrangements et compositions produits par Martin et dignes de génie.  Vraiment, ce gars-là insuffle à mes textes une magie complémentaire que je recherchais depuis longtemps et, qu’honnêtement, je n’aurais pas nécessairement cru connaître un jour.  Curieusement, au cours d’une discussion l’autre fois, il me disait exactement la même chose de son côté.  Il trouvait que mes textes propulsaient ses musiques.  Que le rythme naturel que je sais introduire aux syllabes se marie parfaitement aux différents accords qui ornent les portées.  C’est vraiment trippant.  En tout cas, trêve de vantardise et continuons.  (Je te précise quand même que c’est pas pour faire mon smatte que je te confie cela, mais bien pour te montrer l’atmosphère de conviction et de franche camaraderie qui règne au sein de l’Organisation, ces temps-ci.  Tu en serais fier, mon frère.)

Le travail avec Charles a lui aussi ses côtés l’fun.  Mais Charles demeure et demeurera toujours cet énigmatique homme d’affaires relativement semblable aux Pedyes, mais quand même beaucoup plus exalté et chaleureux.  Il m’a confié t’avoir rencontré lors de sa dernière descente en terre saguenayenne.  Quand même que je te dirai que son studio d’enregistrement n’est pas pratique ces temps-ci, cela serait un odieux mensonge.  On l’utilise au maximum et Charles sait se montrer efficace et intelligent derrière ses machines qu’il chérit avec autant d’intensité que sa blonde. 

 

 

LES LOUDONTAGES…  CES DRÔLES D’ISOPHERMES

(ANNÉE INCONNUE)

 

Le tout baigné d’angoissantes visions…  Au travers maintes musiques souvent étranges et tant de fois masquées.  J’admets à ce stade de notre progression l’indubitable erreur due à la plurielle confiance aujourd’hui dispersée…  Chaque vibration cardiaque est source sinueuse…  Un froid de glace…  Une invalide…

Le grand jour…  Immédiatement après la (illisible), l’air regorgera d’ondes névralgiques volatiles lors des baisses subites de tension…   Jamais auparavant je ne vécus telle intensité…  Ce genre noueux…  avant les tripes (illisible).

Le nombre de notes justifiera la postérité…  Plus nous sillonnerons nos cordes, plus leurs sons seront masqués…  Je suis en veille…  À l’éveil d’absorber d’un (illisible) les feuilles…  J’en ai pleinement envie… Seule cette façon, puis l’assouvir…  Je développerai aussi une technique d’écriture rapide afin que mes idées ne devancent pas ma possibilité d’écrire.

Manque possible de vitesse.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

« La mort s’amuse à divulguer ses différentes facettes.  Lorsqu’elle visionne après acte les multiples facettes de ses démarches, que de sadiques sourires lui ornent le visage ! »

Bientôt (espéré-je) le matériel requis motivera notre hargne.  Les diverses morsures que nous imposerons à l’énergie émise marquera l’intensité de notre envie d’expédier nos ondes.

J’en ai assez…  Toute palpitation m’ennuie.  Le terme tarde trop et cet étirement inutile n’a que de néfastes effets.  Chaque particule indépendante de mon cerveau m’hurle son autonomie…  Le fait que je les transporte n’a pas lieu d’être ; je ne puis en tirer aucune suprématie selon eux.  Une morveuse démangeaison hante mes forces habituelles.  Mes doigts s’ennuient sur la guitare les nerfs qui les agitent gisent inactifs.  Tout effort est vain puisque ma force elle-même me boude.  J’ai l’impression que mon corps fait la grève et que les revendications de mon cerveau barbotent dans le marasme de l’inaction.  Je pourris, tel le légume non cueilli ; telle la feuille déjà morte.  Mon corps gangrène…  Nausée.

La capote hurle au sperme.  Je te consomme à mort.  Le sperme, effectivement, capote.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Mes arrière-gardes (celles qui prévoient tout) ont démissionné.  Le creux qu’ouvrit leur absence ne put se combler qu’à la septième décennie ; lorsque tout s’explique…  À leur habile vigilance succèdera la mise au point définitive.  Quand tout est prévu, autant point d’vue technique que dramatique.

Le tout naîtra d’une subdivision…  Une molécule vivante « agencée » de deux êtres en boule.  Tout roule.

Un dôme…  Sublime présence, non de confiance, mais d’actes imprévisibles.

Lorsque Doizabilh nous quitta, je dus tout d’abord combattre le manque de dessins…  Bien que depuis deux ans ses valises étaient faites, je n’pouvais me résoudre à croire voir son départ…

Maintenant que le ciel est bleu, que les nuages ne paraissent plus, j’ai plus d’espace ; plus d’air à respirer.  Chaque poffe n’étant plus dense mais très élargie…   Je n’m’attarde aucunement aux horizons tout se bornant auprès de moi : stade palpable.

Chaque minute, soixante diverses phases bouleversent l’événement (ligne droite-fil logique), ce qui subdivise les possibilités d’intrigue, bien que chacune d’entre elles tende vers le noyau.  Je crois aussi qu’une intrigue principale doit progresser…  Ne jamais savoir où l’on en est exactement mais avoir hâte de le comprendre, l’œil ne cessant de se soumettre…  La magie du décor trônera l’événement.  Chaque flash, toute union d’un phénomène scénique convergeront vers l’ultime point…  Le message universel…  que chacun pourra traduire à sa façon mais toujours dans le sens de l’hypnotique direction : celle qu’avalanche le show puissamment constellé d’énigmatiques faits et gestes qui progressent sans arrêt…  Ouais !

 

Je cancelle les jouvences

N’ayant déjà usé quatre

Je préfère l’espérance (Ludger)

D’exclamer ma rate

 

Jamais le fait de pousser une porte ne m’avait tant porté…  Survolant l’au-delà, j’effectuais la symbiose évidente… Théâtrale… Musicale.

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

 

Dans le jus qui mijotait, un pitoyable repas prenait forme.  Les convives n’avaient pas faim.  Et pourtant, à chaque instant, leur instinct encadrait l’insistance au refus.  Ils n’avaient point faim…

Après le repas, lorsque chaque assiette fût à nouveau remplie, ils comprirent la situation.  La digestion s’était enfuie, laissant derrière elle un flou amas « putréfacté ».  Les mauves intestins…  Aucun foie…  Nulle rate…  Rien…  Un tube, long d’un mille au moins…  Rien.

Quand les rayons X furent bannis des solutions, la médecine intervint nerveusement.  Souvent soumise à de fébriles problèmes, elle se trouvait ici au prise d’une désintégration collective.  Un genre de mouvement de masse.  Rien de bien alarmant…  Un fait divers…

Une tranche démontrant la perte de cohésion due au vide…  Ce long instant mort…  Lent…  Fort….

 

 

 

NOUVELLE ÉTAPE (DATE INCONNUE)

 

Constellée une fois de plus d’entraves insoumises toujours prêtes à vous dévorer par le dessus…  Pour une première fois, la béchamelle angoisse s’éclaircit d’une lueur…  Peut-être est-ce aussi un début d’hallucination…  Ange.

À son arrivée au bureau, il gagne sa place…  Aucune dope ne peut apaiser sa gangréneuse situation.  Pauvre homme !

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

L’envie de déranger le calme abrutissant d’un peuple…  L’espoir de voir devenir « croire » réalité…  L’ennui face au désopilant manège de la routine…  Non pas abolir mais modifier les cadres…  Leur redonner la souple structure qu’ils arborèrent lors de leur création…  Exterminer les fausses soupapes qui ne font qu’encrasser le cérébral moteur principal ; ce théâtre proprement dit…   Nous nageons en plein folklore…  Non plus à titre antique, mais au sein du renouveau kébékois.  C’est effarant…  Tout style, toute œuvre contemporaine ne fait que rebrasser la géante marmite de l’oubli…  J’en ai marre.  Mon froc ne s’étire qu’en un sens…  Il ne rapetisse plus…  Il a hâte de noyer sous sa semence les faux-prêtres de l’absurdité.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Comme en cinq cents années-lumière

Fraction de temps manquant de sève

Tant que l’argent meuble nos rêves…

 

Si tu tombes dans la boue, je n’épongerai qu’à demi la marde qui te recouvre, le reste étant ce que tu mérites.  À moins qu’on ne t’ait tendu un piège…  Et si moi-même l’aurais-je tendu, t’essuierais-je vraiment ou ne ferais-je que t’éponger ?...  (C’est ce qu’on peut appeler, selon moi, une version contemporaine du « tournage alentour du pot », l’ancienne méthode étant « va-t-elle se marier et si oui avec qui, quand, où ?...  Et lui, l’aime-t-il vraiment ? »)

Sylvie m’a suggéré de créer l’accessible…  Du genre « public timbre-prime », mais dans l’plus overdose…  J’trouve (pitié) évident qu’cé-tu « j’arriverai-je ».

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Dans cette maison jadis construite par plus de vingt bras, ne stagne plus qu’une ombre absente…  Chaque énergie, chaque joie autrefois constellées n’existent plus…  Tes dernières vapeurs s’effritent et le peu de nuages qui demeurent meurent lentement au gré du vent de l’oubli…  Chaque coup de marteau s’efface dans la nuit des temps.  Les notes de musique se sont tues, ke bois a revêtu son gris-automne et les foires qu’hier nous buvions ont toutes été vomies…  Nous avons tenté, moi et l’autre, d’escalader le mur du vide…  J’ai cru faire abstraction des anciennes vibrations, tous ces flous moments où pétait l’énergie…  Malheureusement (car malheur il y a), tout n’est que ruine.

J’abdique.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Les melting-pots, genre de groupe où chacun exprime ce qu’il a à dire.  Je n’approuve pas cette idéologie.  Elle ne peut être possible qu’au sein de gens ayant tous, ou à peu près, la même opinion.  Comme si Beethoven pouvait melting-poter avec Rotten.  Ça tient pas d’boutte !  La paix, Bongieu !

 

Gluantes formes vivantes intéressantes par moment ou par instant, peu importe.

 

Rang double, Ferland.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

 

La vibration jaillit d’un sentier inhabituel.  Lentement, telle une tiède lave, son obsédante progression se dessine.  À mesure que naissent les formes, une vapeur drape tout ancien testament promettant tout ou rien…  C’est l’ère de la compréhension qui s’amorce ; cet état où l’on assimile « la marche du progrès » plus rapidement qu’elle ne progresse, permettant ainsi aux folles sensations d’avenir d’écourter leur période d’arrivée.  Enfin une façon de devancer le temps pour ainsi rajeunir nos convictions, leur construire de nouveaux principes dix fois plus « overdose » que ceux précédemment vénérés.

 

Malaxant les axes

Compressant les désastres

Assimilons donc la nature écaillée

 

Vos neurones dépressionnent comme vos « bolles » somnolent l’hurlement de vos voix agaces, mêmes les sourdes.  Comme j’espère l’arrivée du grand Dieu qui immole tous les faux troubadours.  Grande race de vautours.  Yes !

 

J’ai l’siô fou

La fente me fêle

La paix, caliss !

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Plus qu’un simple conditionnement physique, une véritable compréhension du mouvement où chaque geste devient source d’inaltérables sensations…

Conclure que non le vide de la méditation mais le plein mouvement amène à l’autre.

Doit-on méditer avant d’agir ou au tout dernier geste, quand le corps sent « l’épuise » l’envahir ?

J’aime ce genre de confrontation-maîtrise de l’antonyme.

Tant d’assurance, tant de chambranlance.

Tant possibilité de voir tout s’effondrer.

Ne pas pouvoir lui offrir de main secourable, puisqu’il n’est pas de même matière…

D’ailleurs, de matière est-il ?

La tôke boukannait.  La filtration de l’air n’était plus possible et déjà d’épais tapis de « drosse » s’étaient formés…  Tout décor, toute teinte jadis appliqués à la pièce s’engloutissaient sous la résine rampante…  Ça tôkait au max calissss…  Quand le tuyau de la pipe fondit, tout œil s’écarquilla…  Le vaporeux spectacle que je visionnai à ce moment mariait horreur et beauté…  D’une part, tant de porcs asphyxiés sous l’amas de fumée et, d’une autre, ce tuyau entrouver aux volatiles formes suggérant enthousiasme morose…  Calcinante migraine…  L’énergie large et sale…  SALE.

 

 

 

STABILITÉ INCONFORTABLE (DATE INCONNUE)

 

Froissé, « je » rentra chez lui, l’œil droit à demi-clos.  Il venait d’être attaqué ; provoqué par ces semblants d’automates.  Sa voie aigüe mit du temps à se libérer, du temps à se voir.  Entendre des sons, poser des gestes, à quoi « Je » pensait-il avec des voisins aussi plats ?

Bombardé de jugements anti-personnels, accablé de réflexions si peu partielles.  Quelle réaction pouvait-il goûter, adopter ?  Au sein des corrompus, la potabilité de « Je » eut été la moindre…  Accablé de babillages bien bombés, « Je » demeura « Je ».

 

 

 

POINT FATAL (DATE INCONNUE)

N’étant qu’un nombre singulier, n’étant qu’une thèse inexplicable, à quoi bon me débattre ?  je coule et recoule.  À fondre sans me morfondre, à rire sans lui sourire, du haut de sa glace, ma face se rompt.

Ce craquement audacieux qui m’assemble, ressemble au piment brûlant qui m’asperge le sens.  L’éponge à mon front, son lit sous les yeux et cette ombre multicolore éblouissant ma respiration profonde s’entremêlent, se confondent.

La musique s’éteint ; le dessin s’efface ; et « Je » reste seul, loin de ceux qui l’allumèrent au deuxième décan.  Cette personnalité difficilement conquise s’inutilise d’elle-même pour l’humilier.  Le rat, le puits, le verre de terre à sa vue.  Ses crissements près de l’eau glissent sous la vague.  Le vent s’approche, je l’entends, « je » s’achève.

Je tremble, j’ai froid, j’ai peur.  Le sable au loin se soulève.  C’est le dernier avertissement ; l’inévitable dresse son siège.  La brise m’empogne ; « je » chancelle.  La résistance n’est plus en moi.  L’engourdissement m’accapare, la jouissance s’intensifie.  Elle monte, me gagne, me vide.  Plus un mot, plus un son.  Ça y est ; « JE » s’éteint, je m’allume…

Lorsqu’on s’éteint

Tous sont heureux.

Achève-toi toi-même,

Cela vaut beaucoup mieux…

 

 

 

 

VUE INOPAQUE DES « CONTRE-ÉTATS D’ÂME » (ANNÉE INCONNUE)

 

Tous ces gens m’enferment, m’écrasent.

Écartez-vous, place à l’individualité ; place au chef d’état.

L’hilarante gestion que vous eussiez conçue n’a pour répercussion qu’une morne main mordue.

Et parlez fort et parlez bien, puisque je n’y suis point !

 

 

 

PAN !  DANS LE UN…  ZÉRO TROIS FOIS (ANNÉE INCONNUE)

 

Mais c’est qu’on ne peut pas lui dire impunément, comme cela, qu’il n’aurait pu triompher aussi facilement de la détresse.  Il en rêve même à ce qu’on dit ; à ce qu’on aura dit.  C’est drôle tout de même de transvider, comme ça, de temps à autre, sous la même question.

Trônifier l’indifférence ne s’apprend pas pas à pas ; il s’exécute : comme la marche qui amplifiait mes sourdines allongées.  Et ce suspense climatisé par tes ongles (illisible) ; tu crois que je les assourdis, tu crois que je les amoindris à l’aide de jus mystifiant légué en héritage le siècle dernier…

Toutes ces cacophonies symphoniques alternent les tympaxes, les arrondissements (et elle dort probablement ; comment communiquer alors si ses dents me mordent, me mastiquent ?  Au secours, au secours.

Au secours…

Et chante en gazouille l’oiselet.

 

 

 

ET DES BANDES-DESSINÉES (ANNÉE INCONNUE)

 

Et les tests philosophiques se multiplient eux aussi…

Que faire ?

Appeler, mordre ou rêver ?

Groupez-vous, bande d’alchimistes !...

Joignez donc vos efforts continuels !

Et moi-même et Appolliste remercierons des automates sensoriels.

 

Et fugitifs ?  Et robotiques ?  Et pourquoi pas névralgiques aussi, vos symptômes d’aciéries inconstruites ; que pensées ?

 

C’est fort d’être fort.

Mais tant plus beau d’être encor

Et encore si bon mort !

Mordifié, mordu et morbide

Voilà donc…

 

 

 

 

ET J’OSE : DÉPRESSION (DATE INCONNUE)

 

Ce ne sont plus des voyages, des ventouses ou des étourdissements : c’est l’apprentissage, le goutte-à-goutte, le pas-à-pas, le peu à peu, le peau à peau, le tien, le mien, les vôtres, les nôtres et tien, le tien tannant, tanné, taxidermie, taxidermiste…  TAMISÉ !

Et reprenons à court terme puisque le temps temps fend, fendez

Le le le le le le le l

Et toi et moi, tous deux, les bras, les jambes, envissés, synchroniques, magnifiques, avec un seul nom, une seule phraséologie, philosophique, conçue exprès pour la naissance en clameur…

Et clame la réclame

Bravo

 

 

 

TA GUEULE, TU M’ÉCOEURES ! (DATE INCONNUE)

 

Te revoilà une fois de plus avec tes répressions et tes injustices.  Garde-les donc pour toi, tes convictions sociales, ton indépendantisme industriel ; je n’en ai que faire.

Tu te crois dans les hauteurs mais à chacun de mes pas je foule ta pourriture de cervelle.  Tes jugements impassibles s’avortent d’eux-mêmes, vu leur trop grande vulnérabilité.

Aux moments opportuns, tu me pèses misérable poids sans valeur ; lourdeur sans fonction.  Ta féminité s’effondre, tu te masculinises ; tu te fortifies et t’engraisses à mes dépens, à ma fatigue.  Je te loge, te transporte, te nourris et comme retour tu me juges.

Je n’ai à faire de tes conseils.  Avec un entourage couramment compressé et, en surplus, ton insouciance qui questionne mes capacités de résistance, je n’ai plus qu’à me rendre.  Ton armement m’éblouit et tes coups se portent avec tant de précision, avec une si grande portée, qu’il est devenu inutile de fuir ou de me parer : tu as dressé ton siège, tu as blessé de part et d’autre mon imagination, ma singularité, alors je m’expose, je m’inhume.

Je sens maintenant ta suprématie me contraindre.  Tu maîtrises, j’obéis.  Je n’ai plus rien à dire ; je respire, j’entends, j’écoute, mais je ne parle point.

Je te vaincrai par mon silence et peu à peu, goutte par goutte, ma victoire se dessinera.  Pendant que ta décomposition s’effectuera, je n’aurai qu’à continuer la débitation de mes harassantes positions.

Ce concubinage exaspérant tinte de plus en plus.  Sans doute le glas qui débute à rebours ta finition.  Bientôt il ira démesurément, en confondant dièses et bémols, croches et pointées et plus sa sonorité cacophonique rétrécira, moins ton souffle s’exécutera.

Tu croiras peut-être au malaise passager, ou encore à une espèce particulière, mais ce sera bel et bien ta descente vers le trépas, vers l’incertitude.

Et enfin et enfin je pourrai exclamer mes hilarités et enfin on daignera me confondre ou m’élever et enfin je dicterai d’une sonorité forte et convaincante et enfin je partagerai avec elle…

HAHAHAHAHAHAHAHAHA…

Comment ?  Tu ris ?

Ah ! et puis ta gueule !  Tu m’écœures, maudite conscience !...

 

La conscience se stabilise parfois.  Heureux devez vous être si cela est.  Mais pas la mienne…

 

 

 

POURQUOI L’EXPLIQUER ? (DATE INCONNUE)

 

Un ruisseau qui coulait paisiblement en forêt se vit tout à coup aux prises avec la destruction.  On se souvenait du temps où sur son dos se juchaient quatre grands ormes aux feuillages épais, aux troncs tangibles.  Son lit se bornait de coquelicots et de pensées à droite et un magnifique tournesol étalait sa corolle perdue au milieu d’aulnes, de bouleaux et de ronces, à sa gauche.  Le cours d’eau sillonnait une petite clairière perdue entre deux montagnes.  Au haut, tout au haut de la plus vieille, régnait une petite cambuse dont les planches abandonnées à la moisissure et aux insectes accomplissaient avec pénible difficulté leur rôle de soutien.  Le ruisseau continuait sa route jusqu’à l’instant où il parvenait à l’épaisse forêt de conifères.  Ce bois, limite de description, constituait une telle opacité que c’est avec difficulté qu’un ver éthiopien aurait réussi à se glisser entre deux massifs.  Aujourd’hui, le souvenir plane sur cette terre humide, plus personne ne lui rend visite, plus personne ne goûte sa fraîcheur, son calme.  Parce qu’un jour, à l’instant où un jeune écervelé parcourait en aval le tracé du jeune canal, parce qu’un jour ce vieil automate cracha dans le liquide du ruisselet une pièce de monnaie, on fit de même.  Et après l’argent ce fut les déchets de pique-nique, les plages artificielles et les injures jetées à son reflet sous prétexte qu’un jeune cinglé se noya imprudemment dans la nausée de l’humidificateur.  On le quitta, on le laissa, l’abandonnant sauvagement sans ciel artificiel, sans propreté, débordé sans la saleté.  Et ce ruisseau, ce fut moi…

 

 

 

LÀ (ANNÉE INCONNUE) 

 

Et voilà que dans un cendrier se tourne et retourne le millier de formes ; de réformes, difformes sous le plat de limaces endurcies ; là, sous ma tête.

Et voilà que dans ma main se crée une centaine de couverts, somptueux argentés importés d’ailleurs ; ou d’ici.  Probablement là.  Là probablement.

Et voilà que des dizaines d’oreilles fourbissent et s’amollissent aux dires et rires d’un autrement dit ; là, sous mes tympans.

Et voilà que dans mon œil se ferme et renferme la pause fertilisée.  J’y rêve en pensant.  Je lui pense en rêvant et je mords et remords sans remords sa morsure éjarée, sa posture agacée ; son saint sein, sexuel ; sensoriel.

L’autre que j’attends, que j’entends me faire la fête pour regards ; pour mes égards, s’égare-t-elle ?  Probablement, me dit-on.  Mais où ?

MAIS OÙ ?...

Là, peut-être…

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Mon père est v’nu l’autre jour.  J’tais bien heureux de le percevoir au travers d’la nuée de bière qu’il s’envoyait sous la calotte.  Il a crevé, pour ainsi dire, le silence monosyllabique qui régnait ici depuis quelques jours…  Étant seul, vu que tout l’monde est aux quatre-vingt-quinze îles, j’apprécie énormément une présence corporelle devant mes oeils (yeux)…  Sans farce, la rareté des corps est facilement explicable par chez nous.

Raison 1 : Premier voisin de droite à ¾ de milles…

Raison 2 : Aucun voisin à gauche, vu que le rang est un cul-de-sac.

Raison 3 : Des détours pis des buttes.

Raison 4 : On voulait pas de voisins, on l’a voulu, on l’a pis c’est parfait, hein ?...

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

N’est-ce que le goût d’écrire lettre, ou pour le plaisir de vous écrire, là vous, fée des étés jadis consumés chez mère-grand…  J’ignore ma tendance ; bien que j’en sache les dérives, je ne vois pas de plaisir à vous l’étaler…

Elle existe, c’est tout !

Depuis l’hier qu’il neige encore.  Mes raquettes y ont pris goût et, je crois bien que mes jambes, qui les accompagnent presque toujours, ne tarderont pas à sombrer dans le narcotique désespéré de la joie du grand air nordik du Saguenay…  C’est ce qu’on peut appeler « une crainte non fondée »…  J’sais…  Mais j’aime tant parler…  De toute façon, restons lucide…

 

ET VOILÀ (ANNÉE INCONNUE)

 

La troisième épreuve dépeignait avec précision un caractère particulier ; le mien.

Tout ce que tu as vu, tout ce qui s’est déroulé était mon moi psychologique.

La troisième épreuve, c’était mes peines, mes amours, mes ami(e)s.

Aucune réussite n’a comblé cette épreuve tertiaire ; qu’une compréhension généreuse et attentive fut nécessaire à son montage, à sa présentation, à son message.

La troisième épreuve, ce fut beau ; très beau.

 

 

+ OU – (ANNÉE INCONNUE)

 

Ne démordez pas ; les morsures des mordus maudiront la morne moisissure de vos mains.  Et « de » vos corps aussi.  Étancher sa soif ne rime à rien.  Il faut tout d’abord penser à l’autre…

C’est ce que je fais.

C’est ce que je cherche.

 

Il faut savoir ce que l’on saura.

Il faut savoir ce que l’on sait.

SILENCIUM (ANNÉE INCONNUE)

 

Avant que le temps n’eût le temps de me tuer, je courus vers la ferme fermée fermement à clef.  Quelle déception j’éprouvai face au faux entrouvert !  Je m’en retournai, pieds dans les poches, mains sur la tête, au dessus de la montagne centrifuge.

Après que le temps eût le temps de me mordre, je restai sur le mont mondainement monstrueux à mes yeux.  Quelle érection j’éprouvai face aux vraies étendues !  Je m’y figeai, tête dans la poche, mains sur pieds, au-dessous de ces choses dépuantes.  Maintenant où je suis, je rondule les faisceaux, girondelles en fusion.

 

 

CHUTE (ENCORE) (ANNÉE INCONNUE)

 

L’absence prolongée de son sixième enfant le plongea dans cette léthargie incompréhensible enchaînée par la solitude.

En effet, « je » fit l’amour à plusieurs reprises, se croyant comme les autres.  Il n’y a qu’à voir le résultat de ses croisements bitumineux pour entrevoir son semblant de similitude.

Pauvre premier ; il descend si bas, si loin…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE

Il était une fois un savant fou, qui découvrit le moyen ingénieux d’incorporer son fidèle serviteur dans le monde des paillassoniens, c’est-à-dire des habitants de la paillasse du paillasson.  Il en résultera une aventure follement audacieuse qui pourra même être très dangereuse pour notre voyageur.  Les risques de non-retour sont grands, les habitants guère invitants et, même, je pourrais dire « diaboliques ».  Nous assisterons donc, chers égaux, au déroulement tragique d’un aventurier le plus souvent étonné devant les dires et comportements des méchants paillassoniens qui, en passant, détestent ceux qui osent salir leurs toitures magnifiques.  Cette histoire n’a donc pas d’époque, car elle est hors du contrôle du temps.  C’est pourquoi les années passent par centaines, en une seconde, en une fraction de temps.

Que fera le poltron ?  Que fera-t-il ?  Qu’adviendra-t-il de ce pauvre terrien ?  Hihihihihi !

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Comme  si l’on aurait eu l’envie de rendre à l’œil cette atmosphère cérémoniale du salon si normal.  Le tout sera de ne pas négliger l’aspect esthétique des meubles meublants et des chaises invitantes à l’appui de ce corps si lourd après tant d’années…  L’évident contraste se glissera dont point-de-vue salon (atmosphère détendue) et personnages (dégénération calme-nerveuse-tendue)…

La tenture côté-cour masquera Poléon inséré à l’arrière.  Elle définit en fait l’espace moral de sa chambre puisque le texte ne fait que la supposer…  Derrière elle, en savonneuse suprématie, une haute-large plaque de bois sur laquelle s’est imprégné le Triangle Maléfique…

L’axe « jardin » doit lui aussi invisibiliser un long moment quelques éléments de ce décor si bien monté.  À l’aide d’une large-immense étoffe noire disposée en angle obtus, la fresque de château disparaîtra moment voulu par ceux qui jouent.  À l’avant de l’épais tissu s’érigera la partie principale de l’hostie d’salon à caractère dégénéré.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Il y a évidemment aussi la boîte à malle…  Régulièrement elle s’emplit, mais rarement de vos esquisses…  Y aurait-il possibilité de matière contraire entre cette boîte et votre…  écriture ?

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Je n’explique point encore mes humeurs ; voyez-vous, ce sont ces sensations sans support qui m’égorgent.  Aucune implication explicative.  Ne pas se lier à un phénomène aussi retournablement sensitif que le propagation d’ondes, disons…  Enfin…  (Peut-on le dire ?...  Sommes-nous ici en lieu sûr pour discuter pour discuter de telles choses ?...  Bon !  C’est cette partie de mon moi-même insatisfaite ; c’est cette même partie, d’ailleurs, qui hurle obsédément sa propre vigilance affamée ; elle crache cette pré-ambition qui ne lui est point fournie ; elle pleure ce manque de…  disons de, de…  J’aimerais…  Pourtant je n’ose !

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Comment t’appellerais-je si j’avais à te nommer ?...

Comment pourrais-je d’un seul mot condenser ton âme et tes airs ?  Tes joues et tes perles de yeux ; enfouis au travers de tes fenêtres inopaques… Djinne ?...

 

Courir ouvrir la porte ouverte et constater qu’elle l’est déjà.

 

  

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Elle était là, ce soir, les autres aussi…  Mais je me sentais comme une force, quelle force ?...  Je l’ignore.  Mais j’ai toutefois senti mon approche à la salle et cet éloignement par rapport à la douce rocheuse francineuse…  Je la vois loin…  Si et tant loin !...  Aussi loin qu’une fleur que l’on doit cueillir à quelques millimètres de soi.  J’ai pourtant tout au fond du profond de mon moi-même besoin de cette égalisation frauduleuse.  J’ai besoin d’appuyer contre mon être corporel la douce résine francineuse que le saint ixe daignasse créer en ma faveur.  Oh ! ou peut être une belle espèce de…  Où peux-tu donc en ce moment morfondre des espèces de genre de sorte de sentiments !  Tu sais Francine, j’espérais que ce théâtre amènerait en toi la certitude de nos ressemblances ; mais tout au long du lourd déroulement, je t’ai sentie loin ; sans déroulement…  Bof !  C’est si loin, le jour où le jour hurlera nos semblants d’adoption…  Je sais bien à la plus infime des parties de mon moi-même si raisonnable que tu dédaigneras les hâtives oscillations que j’offre au grand socle du soleil en ta faveur.

Et d’ailleurs, hostie, j’en suis écoeuré moi, de tous ces succès que les autres, c’est-à-dire ceux qui sont proches de moi tout en étant pas moi, accumulant sans être gêné !  Allez-y, sieur de la Zuifafiouze Beethovengore, allez y, hurlez vos abat-jours aux super-stradivarius ; dites-leur même que vous êtes loin ; plus loin que la hauteur normale du…

Ah ! foquez…  Bof !

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Vous crier pour vous dire

Comme se tendre une main et se voir l’autre bout

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

En réponse à votre missive datant de la mi-mars, il nous fait plaisir de vous communiquer les renseignements désirés.

Nous pourrions nous produire pendant la fin de semaine du 19 juillet. 

Le cachet exigé est de 250$.

Nous possédons notre éclairage ainsi que notre moyen de transport.

 

 

SANS  TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Foire.

Objet.

L’avancement vers l’algonquin me fit comprendre qu’il fût « ni l’autre » !  Je me réservai le droit de maintenir mon opinion comme sur l’azur à l’insu de la vaste égarée.

Chute.

Plus rien n’érigeait le fleuve ; il se déversait, versatile, nuagement aux nuances presqu’idiotes.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Dans les nuées d’alcool prit forme le lien magique

Qui de tes mains à mes doigts t’a conduit chez moi !

 

De l’essentiel au trop-avoir

Germe l’idée de possession

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Musique.

Un genre d’astrodôme accueillant avec deux gros sièges au milieu…  Une place pas plate avec des choses normales mais qu’on aperçoit que très rarement…  Sur une scène, par exemple…

Progression…

Si j’pouvais décoder ma raison, l’ouvrir à gauche-droite et puis faire croire qu’il existe d’autres affaires que son masque…  S’il savait seulement y croire à ce qu’il dit…  S’il s’aimait au lieu d’s’haïr pis qu’la grâce avait pu l’sanctifier…  Nerveusement, nous aurions pris la route et l’on aurait…

Lumières…

Chœur

Présenter !

En rebrousse-poil on s’en arrive.  Content.  Ouais.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

  

Comment le puis-je ?

Renie tout d’abord ton écorce ; ensuite, je t’ensevelirai sous la mienne (Poléon se dêvet ; ne reste sur lui qu’un collant noir)  Mais !...  Tu es noir !

Non ; blanc.  L’argent me manquait pour me faire teindre au complet.

Pour te faire teindre ?

Tu sais, là d’où je viens, plusieurs personnes aiment à varier leur couleur initiale.  La plupart le font ordinairement au niveau du haut de leur corps ; principalement au niveau du haut de leur corps ; sur les parties qui ne cessent de pousser, quoi !

Ils teignent leurs cheveux, leurs ongles et leurs dents ?

Ouais !  Pour les cheveux et les ongles, toutes les gammes de couleurs sont employées ; et pour les dents, on se contente généralement de les faire redevenir blanches.  Bien que certains utilisent quelquefois l’or ou le plomb.  Pour ce qui est de moi, j’ai préféré teindre une partie moins visible de mon corps.  Je trouvais hypocrite d’afficher des couleurs que le destin m’avait refusées à ma naissance.  Je me sentais en quelque sorte moins coupable…  Sauf à la piscine, bien entendu !

C’est ridicule !

Mais enfin !  On a déjà vu des chandelles à deux couleurs, pardi !

Très bien, je t’accorde ce point.  Continuons ton allumage.  Tu vas maintenant… 

 

 

 

 

TEXTE DANS LA POCHETTE DE L’ALBUM « L’IDÉE EST LÀ » DE BOLDÔ-MORO

(ANNÉE INCONNUE)

 

Boldô et Gabriel Moreau rendent hommage à Mario Bergeron pour son soutien technique et humain si nécessaire au cours de la réalisation de ce projet.  Sans lui, jamais cet album n’aurait pu voir le jour.  Ils remercient aussi Jacques Daigneault pour son implication matérielle et musicale.  Ils saluent également Martin Murray pour son apport musical génial ainsi que Marc Guérin pour son coup de main à la programmation de la batterie.  Enfin, un petit mot pour nos « fans », histoire de leur rappeler que l’existence de Boldô/Moro sera toujours intimement liée à leur présence lors de nos prestations et pour cela, du fond du cœur, nous les remercions.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

  

Tu meurs dans la bonne humeur

Tu fêtes même tes défaites

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Lorsque la lumière baigne la scène et que l’œil peut enfin s’y reconnaître, l’on aperçoit au centre du plateau Maxe et Glocquô, ancrés dans un profond sommeil.  Leur corps immobile prisonnier des racines s’aperçoit difficilement et semble nettement s’y trouver mal à l’aise.  Du côté jardin, au loin, une larve s’amène, traînant derrière elle à l’aide d’une corde de soie les restes aplatis de Flasque.  Il revient sur la falaise.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Le passé est à venir et l’avenir est à passer.  Celui qui prolifère ne peut plus être proliféré…  La masse exacte ne devra pas se diminuer ; d’ailleurs, peut-elle le faire elle-même ?  Comme j’essayai de me pourfendre, afin d’y prendre-puiser l’objet utile, celui utile à l’ouvrier…  (Durant qu’elle poursuit ses phrases, Splitch aiguise un couteau et sa voix consciente débite, amplifiée.)

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Je ne suis rien, Splitch ; j’ai donc tout à découvrir.  Tel un diamant, je prisme à ma guise ma vue ; je n’ai donc ni odeur, ni sentiment éminent à divulguer, ni ondes ; ma couleur demeure au neutre malgré ses innombrables multiples teintes neutralisées

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Le matin où j’entrai au travail, le 17 mai, j’aperçus calmement ma chaise, toujours au même endroit, prête à recevoir sans rouspétance et mes deux hanches et le fessier qui accompagne…

Les membres de mon équipe m’arrivèrent, vert, jaune et brun.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Elle choisit un chemin difficile, tortueux où ronces et racines envahissent souvent la voie carrossable empêchant ainsi le passage de véhicules motorisés.  Mais elle n’a pas peur de marcher ; puisqu’elle sait que la crainte est pire que le ravin que l’on doit franchir ; puisqu’elle a compris que la peur est le roc que l’on doit escalader, sans jamais le quitter des yeux, pour qu’il saisisse bien qu’un regard est une lame qui peut fendre rocher ; que les yeux sont plus forts que l’épée acérée.

Elle n’avait pas peu de se perdre non plus, car ses parents avaient pu lui transmettre la certitude que la meilleure des boussoles était le soleil que l’on apprécie briller à chaque jour.  Le même soleil qui nous chauffe le cœur même s’il est caché sous d’épais nuages où nagent foudre et tonnerre.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Ils étaient prêts à tout laisser tomber quand tout leur est tombé dessus.  Et comme cette sensation était agréable… 

Toutes ces conversations à mi-mots qui s’enlignaient maintenant sur une route rectiligne, libre de ces courbes accrochantes où s’insinuent souvent les fausses interprétations…

Tous ces gestes retenus, ces envies d’attraper l’autre et de l’enfouir profondément dans le creux de nos bras…

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

(J’ai senti) couler en moi le fou flux de fluide fluorescent.  Pis tout à coup, j’ai ouvert les yeux.  J’ai r’gardé la gagne pis j’ai dit : « Les gars, je n’suis qu’un chancre mou…  Voyez-vous ?... »   J’ai eu une ovation !  Toujours en est-il que le test, je l’ai passé les doigts dans l’nez.

Enfin !  La troisième épreuve : l’audace.  Un homme doit être audacieux.  Il fallait donc que je prouve à la gang à quel point j’pouvais être audacieux.  Ça fait qu’j’ai décidé de prouver mon audace pendant la classe ( vu que les gars d’la gang sont toutes dans ma classe, t’sé…)  Ça fait qu’à un moment donné, la p’tite Manon Guimond va aiguiser son crayon ; pis moé, Manon Guimond, (je l’aime, délire).  Ça fait que Manon arrive à l’aiguise pis j’m’enligne carré en arrière.  Juste assez proche pour que le bas d’sa jupe frôle mes pantalons.  S’tu l’audace à votre goût, ça ?...  Des gouttes de sueurs perlaient sur mon front ; mes pulsations cardiaques augmentaient sans cesse, pis j’restais là quand même.  Pis tout à coup, le son de l’aiguise s’est tu, elle s’est retournée, pis je l’ai regardée carré dans les yeux.  C’t’audacieux, ça, monsieur !  Un coup qu’a été partie, j’ai allongé la main et je l’ai posée sur la poignée de l’aiguise…  C’pas mêlant, a’ boucannait.

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Il y eut aussi le défilé coiffure-esthétique…  Un moment curieusement intense, flanqué d’une trentaine de mannequins, mu par une organisation débutante mais professionnelle, efficace au possible.  Je n’y exécutai qu’une prestation d’animateur, sans instrument et placé dans un décor serré, intimiste, encerclé de spectateurs.  J’ai réellement ressenti, pendant que j’animais la foule, une progression du calme au tendu-avide…  Les gens ont glissé…  Certains empruntant des pentes calmes et d’autres plus raides…  Je ne me suis aperçu de mon pouvoir que vers l’après-demi du show.  Je les tenais là, les faisant tantôt rire aux éclats, tantôt exciter de me voir délirer mon verbe.

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Plus il lui massait les épaules, plus il s’enfouissait dans un fantastique voyage de détente.  Son corps à elle devenait quasiment « plasticinesque ».

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

L’alcool ne possède en fait aucune vertu.  Il a simplement quelques pouvoirs de déséquilibre et d’audace qui souvent, une fois mis en pratique, n’apportent que confusion et déception.  Prenons une brosse, par exemple.  Une brosse imprévue, en plus.  Et disposons-la dans une atmosphère féminine où franchement l’étourdissement alcoolisé n’a pas nécessairement sa place.  Le déséquilibre se glisse lentement au travers nos propos.  Nos phrases demeurent rectilignes, mais perdent progressivement la cohésion que l’on voudrait leur apporter.  Pis ensuite c’est la confusion.  On voudrait déborder au même rythme que nos sentiments, mais comme ceux-ci se bousculent, comment les placer comme du monde lorsqu’on les émet ?...  C’pas drôle.

 

Quand les 100 000 vapeurs s’envoleront

Et que mon sang pouss’ra l’alcool hors de mon corps

Me répét’rai-je encore une fois la même chanson :

« J’arrête de boire, encore, encore » ?

 

Quand ma cervelle prendra sa place

En épongeant les restes humides de la boisson

Me répét’rai-je encore une fois la même chanson :

« J’arrête de boire et pour de bon » ?

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Vous êtes apparue dans ma vie avec tous vos curieux problèmes.

Qu’as-tu dis ?...

Nous étirerons la plus large couverture.

Et nous l’étendrons.

Ça nous f’ra passer l’temps…

Ne place pas tes mains sur la table.  Et respire moins fort.  Tu m’énerves.  Tu m’donnes l’envie d’hurler parce qu’avec toi, on n’arrête pas.

-J’arrête de quoi ?...  De penser ?...

L’oiseau battit de l’aile.

Et quelques plumes s’abattirent.

 

 

 

BONJOUR LA VIZITHEM (ANNÉE INCONNUE)

Sur le circuit étrange de la vie, se retrouve souvent les points obscurs et embêtants de la décision…

Et tout d’un coup, un furieux vent de folie s’empara de la princesse…  Un curieux mouvement de va-et-vient, une impression.

Le soin donnait l’impression de revêtre.

ABCDEFGHIJKLMNOPQRSTUVWXYZ…

Lorsque je ne pourrai plus, je m’en irai au bout du champ avec les herbes, avec le vent et toi, peut-être…  Ne laisseras-tu pas vivre près de toi la moitié de ta vie ?  La récession amène souvent le manque de fonds monétaires…  La vie n’entraîne pas nécessairement des moments intéressants…  Le Stadler, le Hasbro, l’énergie cinétique de l’atmosphère, les comptes débilitairement…

ABRACADABRANCERMENTALIMAGE…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Et c’est pour ça qu’elle m’intéresse

J’aime mieux les chansons qu’y ont d’la voix

Que celles qui chantent avec nos fesses

 

 

  

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Les grands yeux des enfants sont comme des satellites

Quand ils flottent, ingénus, tout autour de l’orbite

 

  

 

POUR COMMENCER LORSQU’ON A OUBLIÉ DE SE DIRE À SOI-MÊME OÙ L’ON EN ÉTAIT (ANNÉE INCONNUE)

Une brise peu commune amenait sur la ville l’odeur de l’entourage.  Un genre de vent qui sans choquer le derme, prouve quand même au corps sa présence évidente.  Dans la ville, au milieu des murs et des briques crevassées par le temps, déambulait Jusme, être inerte et imprécis, qui semblait lui-même surpris de sa présence en ces lieux.  Ses pensées se laissaient aller à la poésie; pensées-poèmes qu’il réussissait tant bien que mal à se remémorer.

 

La glace fit place à un frimas

Puis le soleil ramena l’eau

La mer liquide se déchaîna

Avalant l’homme et ses troupeaux.

Il ne resta du grand lavage

Que quelques êtres sans mystère

Heureusement, ils étaient sages

Et c’est ensemble qu’ils commencèrent

À repeupler leur belle planète

Celle qui maintenant était bien prête

À respecter ceux qu’y a respectent

 

Jusme trouvait aussi que sa blonde lui faisait rarement plaisir.  Pas au point de vue « ménage », « cadeaux » ou « enfants » qu’elle lui avait donnés, mais plutôt à un stade de complicité.  Ce niveau ou l’autre devine les envies de son conjoint et qui est nettement moins compliqué que de se le faire demander…  Mais sa blonde voyait cela d’un autre œil et c’est ce qui rendait Jusme hésitant à en faire la demande…  Puisque sa blonde semblait bien filer de cette manière-là, pourquoi lui aurait-il cassé les pieds en lui demandant de se faire belle et appétissante, vorace et choquante ou encore mystérieuse et provocante ?  Elle le faisait pourtant bien avant chaque sortie publique, avant chaque rencontre avec des gens.  Mais pour lui, lui seul, jamais elle ne s’en était donné la peine.  C’est cela qui, dans le fond, le bouleversait vraiment.  Cet état de corps qu’elle ne respectait que pour le public et non pour lui seul

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Ça y est !  Un autre moment flou de ma vie qui tire à sa fin (plus que 4 nuits).  Flou parce que loin de ma blonde et de mes enfants.  Flou parce que j’ai envie de me nourrir d’elle et d’eux et que cette ration quotidienne m’est si loin.  J’aurai pu constater dans cet exil mensuel l’envie plus que forte d’évoluer près d’elle.  De la voir se fondre sensuellement aux alentours de mes manières et de me sentir sensuellement pénétrer ses subtilités sans n’rien brusquer, surveillant l’à-côté et tentant de comprendre le plus profond de ses humeurs.  Apprécier le chaud souffle nocturne qu’expulse sa bouche lorsque le rêve meuble son subconscient.  Chevaucher ses épaules de mes paumes pour ainsi l’amener au doux comble du corps massé.  Avaler ses angoisses pour n’en vomir que le plus beau, digérant ainsi les bébittes et les « vers-où-allons-nous ».

 

Un oiseau sur un barbelé

Croit que l’acier est paille sèche

Puis il essaie de l’arracher

Et dans son bec fait une brèche

Une blessure qui lui enseigne

Que l’homme bâtit au détriment

De la nature de qui le règne

Glisse lentement vers le néant

Une tortue sur une plage

Vient pondre un œuf instinctivement

Et elle ignore que le rivage

N’est plus qu’un amas d’excréments

Un don de vie qui lui enseigne

Que l’homme bâtit en se foutant

De la nature qui se démène

Pour mettre au monde ses enfants

Un plancton glisse dans la mer

Fier d’être le chaînon manquant

Et malgré sa vie éphémère

S’amuse le temps qu’il est vivant

 

Puis le carbone et le nitrate

Le désintègre

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Je jouais avec mes jouets et comme tout enfant, en fantasmant, j’imaginais la magie naître.  Des termes d’étonnantes entreprises.

Mais je ne suis plus jeune, comme en témoigne la blancheur de mes cheveux.  Mais une mèche veut-elle dire que je suis vieux ?

 

Y a tant de branches dans mon jardin

Qu’elles me dérangent quand j’y vais

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Certaines choses se disent…  D’autres s’écrivent.  On les transmet à la feuille pour les voir s’immortaliser, reflet fidèle ignorant le temps et on se rappelle (lorsque le long temps s’empile) à quel point fut intense l’instant…

 

L’étincelle se fait impatiente

Elle veut déjà devenir flamme

L’architecture d’une chevelure

L’éclat fidèle de deux beaux yeux

Le nez fidèle, la lèvre pure

Le corps aux détails harmonieux

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Il y a les gestes qu’on analyse ; que l’on mastique afin qu’ils soient bien digérés.  Il y a aussi les gestes instinctifs ; ceux qu’on pose par réflexe et qu’on réalise bien après.  Je suis de ce genre instinctif, ce genre d’humanoïde au travers lequel l’impulsivité obtient toute sa signification de base.

La belle n’avait même pas encore atteint sa quatre-vingt-douzième saison.  Sa beauté ne tolérait pas l’extravagance.

 

Il y les gestes que l’on pense

Il y en a d’autres plus instinctifs

Les premiers sentent de la conscience

Les autres sont parfois destructifs

Car les actions dites « impulsives »

Oublient souvent les maux du coeur

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Il s’arrêta sec et se mit à réfléchir.  La question n’était pas de savoir qui était le vainqueur ou le vaincu ; non.  Le principe s’étalait plutôt sous forme d’analyse des gestes posés.  En fait, il avait carrément été expulsé de la vie de sa compagne et comme toute grande peine, la fissure avait été très longue à se refermer.  Curieusement, il ne restait aucune trace de la cicatrice ; les lourds souvenirs avaient lentement laissé leur place au goût de progresser et c’est en explorateur avide d’avenir qu’il élaborait maintenant sa vie de célibat.

Les maximums s’atteignaient souvent au niveau des discussions entreprises avec de nouvelles connaissances.  Non par par instinct de conquérant, mais sous le signe.

 

C’qu’il y a de veau dans ce système

C’est que tu fais ce que tu veux

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Chaque question comporte la réponse

Comme le maçon répare le mur que tu défonces

Si t’épates ta blonde, fais ça comme du monde

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

J’ai cru longtemps que je n’pouvais être quelqu’un qu’à partir du moment où je réussirais.

Jusqu’à ce que je comprenne que j’étais quelqu’un à partir du moment où j’essayais.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Est-ce réellement la grande nuit ?  Rien ne recommence.  Tout finit.  Quatre ans d’amour à se dire « t’es beau, t’es belle » que l’on doit perdurer, c’est pour la chasseur ou la poubelle.

 

Comment peut-on se reposer ?  On n’a pas eu l’temps de s’aimer

Imagine un peu ma souffrance

Pendant que je pleure, toi tu danses

Et tu reçois mille et une invitations

Pour sortir, pour dormir, pour vivre dans d’autres maisons

 

 

 

NOUVELLES DU CŒUR (ANNÉE INCONNUE)

Les mains tendues sont ignorées

On pense plutôt à s’en méfier

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Il était tard…  Ouais !...  Tard…  Tard dans cette vie qui curieusement débuta si tôt.  Déjà à sa cinquante-deuxième saison, Jusme s’intéressait assidument aux rites secrets de ses aînés.  Il les observait avec la curiosité de « l’adulte en devenir », tantôt surpris, souvent étonné de les voir chevaucher avec tant de grâce ces mondes obscurs et fantasmagoriques que constituent les chemins de l’expérience, ces voies variées, souvent inédites.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Certains espaces ont le mérite d’être bien remplis.  Ils le sont en hauteur  avec leurs verticales vertigineuses qui plongent vers le ciel.  Ils le sont aussi par l’amplitude sonore des klaxons et roulements des pneus sur l’asphalte aplati par autant de poids.  On y pense aussi, à l’atmosphère souvent dense et pénible ; pénétré par plein de particules qui n’ont rien à faire dans l’air.  Le ciment semble content, puisqu’il vit parmi ses semblables.  Le béton, son compagnon…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

J’ai vu des couples qui n’s’aimaient plus et qui vivaient quand même ensemble

J’en ai vu d’autres qui s’adoraient mais qui refusaient de comprendre

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Certains soirs, lorsqu’on a erré de bars en bords pour plonger son œil dans le regard complice de l’être attendue…  Certains soirs où l’on s’est tenu constamment en alerte au cas où elle passerait…  Certaines nuits où on se retrouve seul, bousculé par les drôles d’événements qui se sont produits et qu’on confie à la feuille ce qui aurait dû se passer…

 

J’aurais pu la filer jusqu’à un drôle d’endroit

D’où j’aurais retiré mille et une sottises

Ce sont elles qui nous brisent

 

C’est pas nécessairement ton regard

Qui m’a montré ce que t’étais

C’est pas non plus près de ta bouche

Que j’ai entendu des mots qui m’touchent

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE – INCOMPLET)

 

Je les sens lourdes.  Probablement dues à cette culminance du « que peut-elle bien faire en ce moment »…

Mon état personnel s’envrolbilise de plus en plus.  Addtionnés aux  manques monétaires, les manques d’argent et… de dollars consitussent les principales sources de mes tourments.  Évidemment, j’espère m’en sortir.  Sera-ce possible ?  We will see.

D’autre part, un soir où l’acool se plaisait à taquiner ma serre-velle, ma maman, c’est-à-dire ma mère, a réussi à…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Belle nuit pour écrire

À celle qui nous inspire.

Occasion de lui dire… quelques mots (maux)

 

Les tracas font partie de la vie.  Ils embusquent certaines journées-soirées sans que la cervelle n’ait à s’obstiner.  Ils surgissent, rusés et cruels et pénètrent nos émotions avec la même facilité qu’une lame acérée.  Les culbutements internes qu’ils procurent ont une saveur acide et répugnante, un peu comme une tarte aux poivres assaisonnée de DRANO…  C’est ridicule de constater la faiblesse du moral devant les tracas.  Qu’ils soient sociaux, légaux ou sentimentaux, ces chancres naissent à la vitesse d’un bobo et prennent plus de temps à galer qu’une banale écorchure.  Comment cerner ce trouble tracassant ?  Feindre de l’ignorer ne peut être suffisant puisqu’il vit à l’intérieur de nous-mêmes ; dans un état d’omniprésence agaçant et constant.  Il faut plutôt chercher à l’oublier.  Mais comment créer l’oubli, lorsqu’on est seul avec soi-même et qu’on n’a pas envie de se parler d’autres choses ?...  La lecture ?...  Non.  On a l’esprit assez sincère pour savoir qu’un livre n’est pas assez pesant pour écraser de son poids aléatoire le tracas.  La musique ?...  Non.  Même à volume maximum, elle n’a pour effet que d’amplifier la mélancolie solitudinale ; elle s’arrête au tympan, incapable de se rendre dans la partie tracassée du cerveau humain…  La TV ?  Non.  Les images elles aussi stoppent au niveau de la rétine ne pouvant traverser le canal oculaire d’intérêt.  La dope-boisson ?...  Non plus.  Les états altérés d’esprit amplifient les phases dépressives et même s’ils réussissent à les cacher, ce n’est que pour les redécouvrir dix fois plus intenses, intensité aidée par le corps magané-rongé par les excès de brosses-trips.  L’écriture ?...  Ouais !...  En tout cas, on a l’impression, même si ça règle pas le cas, de se l’expliquer, de mieux le comprendre…  Comme si on tentait de l’apprivoiser, en quelque sorte…  Comme l’auraient dit quelques grands-mères : « Ça guérit pas, mais ça soulage. »  Se détracasser par l’écriture…  C’est pas pire…  C’est à essayer.

Les robinets cessèrent de couler, les toilettes explosèrent et l’océan eut un soupir de soulagement.

Kataflak !

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

La cohabitation est-elle réellement le plus grand défi des années 80 ?...  Qu’on le veuille ou non, il est politiquement impossible d’ignorer ce fait.  Que l’on se croit protégé par le grand amour (avec son « grand A ») ou encore bercé par les flots paisibles de l’infinie compréhension, nul couple n’est protégé des bourrasques brutales et imprévisibles qu’apportent avec eux les conflits matrimoniaux.

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Les inévitables nausées créées par un long voyage s’emparaient lentement de Jules Zÿgel.  Enfin sur la banquette arrière, son corps suivant pesamment les hauts instables des creux hasardeux de la chaussée, son teint javellisé se révélait comme toute couleur qu’un blanc-blême laiteux, digne des plus grandes victimes du mal de mer.  Mais c’est plutôt l’amertume qui le creusait ainsi.  Avec son air de sac négligemment tassé au fond de la voiture, grâce aussi à l’immense tristesse que chacun de ses traits traitaient soigneusement tout autour de son visage, Jules laissait l’impression de n’être plus qu’une marchandise livrable ou périmée, entièrement insensible à son destin et ne représentant plus pour la race humaine qu’un piteux amas de chair d’où le cerveau semblait s’être enfui.  C’était réellement un homme-objet ; au sens crucial du mot.  L’objet signifiant l’inertie, l’absence de vie, le besoin d’un organisme vivant à se voir manipulé.  Pour les besoins de la cause, cette nuit-là, j’étais moi-même devenu l’organisme dit « vivant », bien que la fatigue extrême que m’avaient procuré les événements précédents, m’eussent fait douter par instants que j’étais bel et bien vivant et qu’au summum de mes efforts.  Je conduisais actuellement le véhicule qui nous ramenait, moi et Jules, vers un semblant de vie civilisée, mais au point où nous nous situions, même un semblant nous satisfaisait au plus haut point.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

(À la plante) Oui, je sais, elle devrait être écrite à l’heure qu’il est.  Mais que veux-tu que j’te dise : c’est pas parce que tu m’obsèdes à écrire une toune sur un sujet qui te tient à cœur que je peux la cracher comme ça, en moins de 2 semaines, sur la feuille.  Je sais très bien que j’ai déjà accouché de certains textes en moins de 20 minutes ; que je suis toujours prêt à défendre celui qu’on persécute ; que parfois je me nourris du malheur des autres pour écrire des phrases dans lesquelles je me vautre. 

(En fait, c’est la plante que Boldô nourri avec du gâteau au chocolat.)

 

Mais ce sujet est trop brûlant

Pour le traiter à vol d’oiseau

Je dois l’aborder prudemment

L’élaborer en crescendo

Le sentir couler dans mon sang

Pour que mes mots viennent du plus haut !

Il faut que ces phrases soient le socle

D’où j’érigerai…

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Lorsque l’absence hante le « je t’aime »

Il devient difficile de rêver

Aux espaces

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Principalement à ceux qui vivent seuls ou sont solitaires et qui la plupart du temps de sales habitudes à force de vivre dans la solitude.  Dans toute leur longitude ces petits tubes absurdes se plaisent à considérer la femme comme un objet domestique.  Mais je crois sincèrement qu’il serait temps que l’on cesse de considérer la femme comme une crevasse ou encore comme une imitation du Mont Everest au niveau de la poitrine.

Alors cessez vos platitudes, changez d’attitude et j’ai la certitude que vous obtiendrez la gratitude.

Tubes qui dans leur solitude ont pris la sale habitude de développer des attitudes absurdes.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

La prochaine pièce en est une très délicate, car elle aborde un sujet que j’affectionne particulièrement.  Elle s’intitule « La marche des femmes » et, curieusement, malgré l’exclusivité apparente de son titre, elle s’adresse aussi à l’homme, même s’il partage déjà avec sa compagne :

 

Le déjeuner

La toilette des enfants

L’habillage des enfants

Leur départ à l’école

Même s’il fait la vaisselle

Et beaucoup de ménage

Et qu’il tend les ficelles

Pour sécher le lavage

Il peut plier le linge

Et laver le comptoir

Se creuser les méninges

Au moment des devoirs

Frotter, laver, torcher

Passer l’aspirateur

Et laver les planchers

S’il y a des visiteurs

 

Remarquez qu’aux hommes qui se partagent déjà les petites corvées que je viens d’énumérer et qu’ils le font dans la plus pure harmonie en solo ou à l’aide de leur compagne, eh bien je leur dis BRAVO !  Non, vraiment, j’crois qu’il était temps, hein ?...  Et pour ceux qui hésitent encore, eh bien magnez-vous l’derrière…  N’attendez tout de même pas que l’on vous botte le cul, quand même !  BON !

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

La fatigue est-elle l’ennemie du créateur ?  Quand l’envie de poursuivre est évidente mais que le corps s’y oppose ; par overdose…  Ce sont là de drôles de sensations.  Le torse devient progressivement flasque et les membres qui y pensent relâchent leur raideur.  Le cou, curieusement, se raidit ; comme si les vertèbres verticales prenaient plus d’espace ; comme si elles se gonflaient un peu, juste assez pour former une protubérance subtile.  La tête enfle dans ses détails ; poches sous les yeux, cheveux ébouriffés, lèvres épaisses et sèches, gercées et un nez à demi explosé d’avoir trop sniffé et trop bu…  Le fessier est mol et détendu.  Une simple poussée pourrait aisément en venir à bout, procurant ainsi à tout le corps un danger de chute…  Les jambes, les pieds, tout est relax, comme engourdi.  Un corps où l’inertie prime, impose et provoque le sommeil.

Le sommeil est-il l’ennemi du créateur ?

Ben là, on pourrait en parler ben ben longtemps.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Il avait toujours cru que lorsqu’il réaliserait quelque chose, il serait quelqu’un.

Mais lui fallait-il être quelqu’un pour réaliser quelque chose ?...

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Peut-être suis-je atteint d’une grave maladie ?...  Un mal étrange qui me pousse à délirer, à hurler des situations débiles alors que finalement, y a pratiquement rien là.  La jalousie serait trop faible pour espérer qualifier mon état présent de corps-esprit…  C’est plutôt une un grignotement qui se nourrit de toutes sortes de répliques-gestes que tu peux poser.  Ce grignotement, puisqu’il faut l’appeler par son nom, un coup nourri, se lance à l’assaut de mon intérieur et culbute, le temps de le dire, tout ce qu’il trouve sur son passage…  Ma cervelle avec…  Pourquoi gueule-je tout le temps ?...  Pourquoi tape-je sur les tables, murs et objets durant deux jours avant de t’expliquer ce que je ressens (ce que je ressentais, de toute façon, deux jours auparavant) ?...  C’est dolle et débile, ce que je suis en train faire…  Mon état présent d’action n’est pas à son plus fort.  J’en ai plein la raie d’expédier mon corps à tous les matins à l’hospitalization !  J’manque de guitare…  J’manque d’assurances avec toi… J’pas t’ta faite remis d’la dernière chotte de freak entre nous pis j’m’aperçois qu’j’ai plongé seul dans un nouveau freak.  J’ai peur aussi que tu ne freakes pas à cause que toi, finalement, c’est réglé dans le sens d’un « on oublie ça, c’tait ben l’fun, ru prendras le flô de temps en temps, j’t’aime ben, salut ».  Pour le reste, j’t’en ai jasé ce soir, d’une façon brutale et impolie, c’est sûr, mais ces réactions-là, elles sont causées par la maladie dont je te parlais au début de ce texte concassé…

Peut-être aussi n’est-ce point là une maladie…  Peut-être est un présage, un cri, une erreur, une imposture, une crise, une affaire de fou, un divorce, une retrouvaille, une très longue conversation, une incompatibilité d’idées, une affaire simple, une jalousie débile et maladive de ma part, toi, moi, les autres…

Un vent d’orage fit surface

Et balaya les sentiments

Son appétit était vorace

Nombreux étaient ses excréments.

***

 

J’aimerais ici te parler de l’immense remerciement que je t’offre pour avoir porté deux si magnifiques enfants et les avoir admis dans ma vie…  C’est sûr que c’est dur, souvent pas drôle, mais pour les fois qu’c’est l’fun, ça en vaut la peine…

Aussi si t’as l’temps, parle-moi, dis-moi c’que tu penses de moi ces temps-ci…  Si t’as un t’chum, ou une blonde…  Si tu restes ou si je pars…  Rien qu’un peu, pas longtemps.

 

Tu rentres tard

Le soir tu sors

Et tu t’en fous

L’autre qui a peur

Qui s’lève à sept heures

Tu t’mets ça où ?...

Les passes de musiques

Théâtre et répliques

T’font pas triper

T’aime pas mon serpent

Y é trop achalant

Faut pas t’coller

On t’frotte les cheveux

Tu t’fermes les deux yeux

Hyper-jouissance

J’te frotte les cuisses

J’m’envoye où qu’ça glisse

Hyper-souffrance

Quand tu sors en ville

Tu sais qu’t’es une fille

Tu t’laisses frôler

Souvent un regard

Est plus qu’un espoir

On s’laisse toucher…

 

Continue ton trop, il te va si bien !  Je vais tenter de modifier le mien, s’il en est encore temps.

 

***

 

PHASE II

La phase I ayant été toutes ces conneries de jalousie débile, je la sens terminée…  Nous abordons donc une nouvelle étape, soit ma carrière et les actions-sentiments que j’emploie et exécute pour y arriver.

Je me remémore :

Il y a eu le Club Soda…  Premier contact avec le monde bestial et arrogant du showbizzzz…  N’eut été de mon enthousiasme habituel, ma possibilité de carrière aurait dû s’éteindre là.  Ce fut pire qu’une gifle.  En plus d’être ignoré, d’être pratiquement ridiculisé par les juges et organisateurs parce que je prônais le francophonisme.  Je dus accepter de terminer deuxième sur une possibilité de trois.  Cela m’a coûté une petite fortune pour aller hurler mes mots dans une atmosphère anglaise au plus possible.  Une rencontre étrange avec Marc Durand, gérant de Men without Hats et de the Box, qui s’est acharné à me dire que mes paroles ne l’impressionnait pas plus qu’il ne le fallait…

Je suis entré à Montréal plein d’espoir…  Convaincu que mon message serait vénéré…  Le peuple a tripé au fond…  Il m’a certifié ma force et ma détermination.  Mais je n’ai pas gagné l’Empire des Futures Stars…  Ça m’a fait mal, mais ça passe…  Je reviendrai, Montréal.  Je te prouverai un jour que ma plume peut être plus forte que l’Anglophonisme.

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

L’arbre cessa de résumer et attendit.

Et dans sa tête culbuta les points de vues moroses ; ceux qui se glissent quand vos oreilles s’ouvrent trop.

Tibi, signe de motivation ou de complément, peut-être…

Je crois que la valeur se situe dans la détermination et non pas dans le nombre d’heures de fréquentation.

C’est ce que tu m’as prouvé et même sans preuve, j’aurais saisi.

Quand l’évidence de la confiance s’installe, rien ne peut plus l’ébranler !

Mes hanches s’ennuient de la jonction de tes doigts gratouilleurs.

Surtout lorsque je m’abandonne à penser à Claudie, petite fleur de deux semaines que depuis deux autres je n’ai revue.

Vois-tu, la consolation exige le refuge habituel.  Je l’obtenais déjà avec Louis, c’est sûr, mais y a bien plus de consolation dans deux êtres que dans un…

Mon silence, innocence d’un long moment, ne fut pas seulement motivé par le retard de vos paiements.  Ils y contribuèrent, c’est sûr, mais en plus de ceux-ci s’ajoutèrent les amères difficultés de devoir tenir seul aux gestes abrupts de l’hiver, devant ignorer la scène, l’obscène taverne et les énergies fraternelles qui nous gardent ensemble.  L’accumulation de ces balivernes se conclut dans le débordement de mes réactions normales.  Je n’voulais pas écrire, non pas par méchanceté ou par vengeance, mais par aboutissement de moi-même.  Était-ce masochiste ?  Un peu, probablement.  Mais je refuse de situer entièrement mon geste dans une porte de sortie aussi commune.  Je n’peux exactement le définir.  Peut-être ai-je trop bien su dissimuler mes larmes et ma seule arme fut le silence.  À quoi aurait-il servi de vous hurler mes décadences de dopes et de bières, d’espoir de féminiser mes redevances, d’envie de scène, de foire et de vous ?

Un seul mot, une seule phraséologie peut m’espérer de vous survivre jusqu’au retour de vos vous-mêmes.

Jirondanjoncelle.

Jacques

 

 

 

 

À MON SANG (ANNÉE INCONNUE)

 

À l’octobre d’un soir, 17e soleil.

 

Où étiez-vous lorsque j’ai crié ?...

Lorsque l’hurlement d’or dévora ma cervelle…

Il y a quelques temps nos présences régulières n’adonnaient pas le mot

Et voilà qu’en l’absence je me ronge d’autrefois…

Je revois l’esprit calme qu’avec vous je vivais

Je ressens l’ineffaçable « au revoir » d’à chaque jour…

Puis, le départ.

La concrétisation du geste du jeune

Soif de voir son soi-même ; de réaliser quelque chose.

État pur d’éloignement, de repos et d’espace.

Depuis le dernier œil que sur vous je fixai

Bien des choses sont nées…

À l’instant, je suis seul, avec Louis-Line

Dans l’immense maison.

Tous sont partis et les autres qui restent

Partiront à la fin de ce mois pour travail

Vers la côte du Nord, aux sept-îles qu’ils se disent

Au début de novembre, je s’rai seul avec moi et les chiens.

 

***

 

Je n’ai reçu aucun $ encore du chaud mage.

Cette cure matérielle m’a beaucoup enseigné ; j’ai dû survivre, quoi !...  Sans bière, dope et nul autre élément de fête…  Je méconnais la ville.  Pourtant elle m’invite souvent et son bras est bien long pour qu’il vienne me tenter jusqu’à Saint-Gabriel… 

Heureusement, à l’aide de quelques légumes et de pain, les recettes se multiplièrent, faim après faim, et de même, quelquefois, les copains commandèrent plein de bouffe ; donc, bien en vie corporelle je suis.

Pour ma tête, c’la vacille.

Je culbute aux remords d’un départ sans évidentes motivations.  De plus, ces temps-ci, l’affreuse et morbide folie du suicide a sucé la cervelle d’un de mes tchommes : MAX (t’as dû en entendre parler)

J’ai longuement médité ce flou geste qui combine courage et folie et je n’peux m’expliquer qu’avec peine ses raisons.  Yves (vieux trench) fut complètement bouleversé par cet événement ; c’est lui qui l’a trouvé sur son lit, pété…  tu comprends…

Quand j’ai voulu aller le voir allongé à son show mortuaire, une amie m’a supplié de n’pas le faire.  Paraît qu’il était affreux, C.A.D. mal arrangé, l’air vieux ; cheveux, barbe coupés, tout à fait méconnaissable…

Donc chus pas allé.

À la place, j’ai rencontré Yves qui m’a scandé, dans un balbutiement sanglotif inhabituel pour lui, son affreux cauchemar.

J’ai beaucoup écrit là-d’sus aussi…

 

***

 

Au cours de septembre, je n’ai rien créé (point d’vue théâtre).  Les préparatifs d’hivernage nous ont largement occupés : finir le bois d’chauffage, serrer l’attirail de ferme (charrues, râteaux, faucheuses, tracteur, etc.), refaire les égouts, repeindre ici et là, solidifier les clos, arranger la grange, fermer une maison, en finir une autre, poser les châssis doubles, faire peur aux braconniers, etc…

Mais depuis l’octobre, j’ai recommencé à penser une histoire.  T’la conter s’rait très long ; à la place, j’en enverrai une copie pour la famille à la finition ; ce qui devrait se situer à la mi-novembre à peu près.  Comme tu l’vois, j’me presse pas.

De toute façon, un coup seul, j’aurai rien qu’ça à faire, ou à peu près ; ça fait que ces temps-ci, j’parle avec le p’tit gars au maximum avant leur ÉLOIGNEMENT…

 

J’m’ennuie d’vous autres

Je regrette nos sautes d’humeur

Nos superbes sourires

Et nos joies quotidiennes à l’action d’analyse

J’essaie d’enrayer la culpabilisation qu’en tête j’m’étais fourrée

Mais mes cellules de mémoire sont lentes à détruire

Et les dettes longues à amasser.

Ce fut le plus bel été de ma vie

Si près de vous ; mais malheureusement

Je n’m’en aperçois qu’à l’automne

Au travers des souv’nirs

Comment va Jean-Pierre et m’man et p’pa, ce génie de l’audace sentimental qui piétine la réalité pour accomplir l’ « une fois pour toutes » ?

Où est Louise ?...

Où êtes-vous, frères et sœurs ?...

Père et mère ?...

Là.  Évidemment…

J’vous aime.

Jacques

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

 

 

 

Un dessin qui me donna l’étrange impression de connaître l’inconnu ; de percer l’intangible perception…  Je découvris tout à coup ce qu’était sa manière de finesse…  Tout à coup, je compris la raison de ce trouble de vibrance…  Je l’aime, pourtant ; mais rien ne passe ; aucun fantasme, aucun phylisme…

 

 

PAN ! DANS LE UN…  ZÉRO TROIS FOIS (ANNÉE INCONNUE)

 

Mais c’est qu’on ne peut pas lui dire impunément, comme cela, qu’il n’aurait pu triompher aussi facilement de la détresse.  Il en rêve même, à ce qu’on dit ; à ce qu’on aura dit.  C’est drôle, tout de même, de transvider, comme ça, de temps à autre, sous la même question.

Trônifier l’indifférence ne s’apprend pas pas à pas ; il s’exécute ; comme la marche qui amplifiait mes sourdines allongées.  Et ce suspense climatisé par tes ongles aurifus ; tu crois que je les assourdis, que je les amoindris à l’aide du jus mystifiant, légué en héritage le siècle dernier…

Toutes ces cacophonies symphoniques alternent les tympans, les arrondissements.  Et elle dort probablement ; comment communiquer alors si ses dents me mordent, me mastiquent ?  Au secours !  Au secours !  Au secours !

Et chante en gazouille l’oiselet.

 

 

 

ET DES BANDES-DESSINÉES … (ANNÉE INCONNUE)

 

Et les tests philosophiques se multiplient, eux aussi…

Que faire ?

Appeler, mordre ou rêver ?

Groupez-vous, bande d’alchimistes…  Joignez donc vos efforts continuels.  Et moi-même et appolliste remercions des automates sensoriels.

Et fugitifs ?  Et robotiques ?  Et pourquoi pas névralgiques, vos symptômes d’aciéries inconstruites; que pensées.

 

C’est fort d’être fort.

Mais tant plus beau d’être encor

Et encore si bon mort.

Mordifié, mordu et morbide

Voilà donc…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Ferme et renferme la pause fertilisée.  J’y rêve en pensant, je lui pense en rêvant et je mords et remords sans remord sa morsure éjarrée ; sa posture agacée ; son saint sein, sexuel ; sensoriel.  L’autre que j’attends, que j’entends me faire la fête pour regards ; pour mes « éjards ».  S’égare-t-elle ?  Probablement, me dit-on.  Mais où ?  Mais où ?

LÀ !__Peut-être…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Construisez avec les avantages.  Autant de choses réchaufferont tous vos huilages.  Rideau classique, tendre remise.  Et toutes les choses qu’on frotte !  Aux âges, ajoutez de nouvelles choses.  Pourquoi ?  Une explication due à l’une lune, long traumatisme qu’on s’obtanburne.  Égalité frappante ?  Agisurne…

O.K…  C’est le son qui s’obscurite en ce moment.

Ici, tout est calme.

Je suis si bien !  Je conclus si bien haut !  Je suis haut.  Je vois si bien, rondelle classique.  Hique. Ique. TICTAC… 

Arrangement parfait.  D’une perfection érectante.

Enlisez-moi tous ces bras droits ; ils m’énervent.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Tout ceci peut te paraître grotesque, mais c’est l’unique partialité que j’ai pu établir face à ton innocent silence.  J’ai bien hâte de te revoir, petite Line, pour te redire une fois de plus que je t’aime, non pas comme Francine, mais comme Line.

Salut.

Jacques

 

P.S. : Vous voyez, je suis dans cette histoire comme une espère de genre de sorte de masse de glue vivante dégueulasse coulant le long des veines de vos voisins vomissant vos verrues verrouillées de verrous.

Voyez-vous ?...

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Ah ! Fous-moi la paix, maudite conscience !...

 

Peut-être demain,

Peut-être ce soir,

Probablement jamais.

 

 

LE CONCUBINAGE SE RÉALISE (ANNÉE INCONNUE)

 

La conscience est parfois silencieuse

Mais parfois insupportable aussi

 

Sauf sinon…

 

CHUTE

  

L’absence prolongée de son sixième enfant le plongea dans la léthargie incompréhensible, enchaînée par la solidaritude.

En effet, « Je » fit l’amour à maintes reprises, se croyant comme les autres.

Il n’y a qu’à voir le résultat de ses croisements pour entrevoir son semblant de similitude.  Pauvre premier ; il descend si bas, si loin…

 

***

 

Te revoilà une fois de plus avec tes répulsions et tes injustices.  Garde-les donc pour toi ; je n’ai que faire de tes convictions sociales ; de ton industrialisme industriel.  Tu te crois dans les hauteurs, mais à chacun de mes pas je foule ta cervelle pourrie.  Tes jugements inutiles s’avortent d’eux-mêmes.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Et voilà que dans un cendrier se tournent et retournent les milliers de formes, de réformes difformes dans le plat de liège endurci, là dans ma montre.

Et voilà que dans ma main se crée une centaine de couverts, somptueux, argentés importés d’ailleurs ou d’ici, là probablement.  LÀ…

Et voilà qu’une dizaine d’oreille fourbissent et amollissent aux dires et rires d’un « autrement dit » ; dissimulé LÀ ; sous mes yeux.

Et voilà que dans mon œil se ferme et enferme la fertilisée.  L’autre.  Celle-ci que j’attends, que j’entends me faire la fête pour mes regards, pour mes égards.

Mais…

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

C’est un de ces appels, en fait…  Une de ces longues volontés d’offrir mon amour par des gammes de piano…  J’aime tes yeux en rouage d’arpentage saisonnier…  La fiole s’offre toute entière, buvons là Jacques en fût de Loubolagenne.  J’ai tout étoutdié.  J’ai tout à fait la mauvaise parole, mauvaise manière, mauvaise lanterne, mauvaise mauviette, mauvaise nouvelle…  Mauvaise compréhension?  Mauvais amour ?

 

Car au fond de l’abîme

Se rigolent les franchonnes

Les baronnes fanfaronnes qui côtoient…

 

Quelques notes

Et tout revient

Là où l’aorte

Se dévêtit

S’ouvrent nos amours

Chers amis…

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Est-il possible, Louis, que j’aie peur d’une cuirasse inhumaine ?  C’est si confus en ce moment !...  Tu comprends, j’ai eu cette soif soudainement ; à vrai dire, c’est lorsque j’imaginais cette image que je concevais les restes totaux… (inédit)  Tu sais, Louis, j’ai parfois d’honteuses oscillations d’ondes…  Des oscillations sinueuses, scambrantes de gauche à droite…  J’allume de ce refus l’inaudible sacrifice à cette mie de moi-même, à ce double désuni qui ne peut demeurer plus longtemps séparé.  Aimer est si dur lorsqu’une pâle et amorphe lueur scintillonne dans les cieux…  J’ai mal parfois ; très mal, eh oui !...  Avec la lune au huitième de son poids raisonnable, je ne peux concevoir une abolition si…  Sans rapport…  Avec ces sales saloperies salissantes, c’est le nom de ma prochaine…  Enfin !...  Tu comprends ?  Je me fige à l’instar du fougueux avion…  Je m’illustre de ce muscle transparent d’eau douce…  « Eh !...  Eh !  Ne partez point d’ici » !  Voilà ce qu’elle aurait dû dire, mais…

Non ?

Je ne suis, tout au fond de moi-même, qu’un vase vaseux de Vaseline.

 

Ça pouvait même s’appeler « innocence » ;

Eh oui !  Innocence face à la nouvelle apparition

Tant attendue…

Vous savez, Monsieur di de la Gaudriléfère

Que vous êtes un fou fol

Et non pas de ce fou sage que vous paraissez être !

 

Vous êtes, comme ainsi dire, mouillé !  Mais vos ordres sont en somme ce parfum…  Oui Glouis !  Nous nous sommes mordus  du dessous la paillasse…  Bous au fond de moi-même mes doux rêves francineux, car je sais que je suis l’antipode Anastère de cette douce mergriche…

Oui Louis, je parlais de la simple bellâtre siphonnante beauté cigalienne.

 

J’aimais les fourdoles

Mais j’ai aboli c’la !

Vive les rougeoles

Noir blanchâtre

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Je viens te lire, comme ça, cet amour inusable que j’admets vers toi, Cigale…  Tu sais, j’élimine la mauvaise sinueuse qui jamais m’élira…  Tu sens la verdure qui nous appelle ?  Moi je l’assure et l’endure plus qu’avant ; je l’observe en ton nom, belle image francineuse !  J’ai bien hâte de te voir, beau visage saisonnier, car tu sais, je suis stone, je suis g’lé !

 

Et au fond de l’abîme

Se joignirent nos deux corps

Qui sans fendre ni mordre

Ne s’envole l’abîme

LA CLOCHE ET HAIS LE SAPE HEIN (ANNÉE INCONNUE)

 

Ah !  Qui a eu l’idée de braquer ce maudit sapin dans ma face ?  Depuis deux ans qu’il m’empêche de voir les mouettes se balancer dans le vent sur le bord du quai.  Ah !  Et ces épines qui se frottent contre mon fuselage.  Je me souviens du temps où on l’a planté ; quatre pieds qu’il mesurait.  Je me moquais souvent de lui en criant : « Il fait beau en bas ! »  À cette époque, lorsque je le vexais de la sorte, il repliait sa cime contre ses branches et il pleurait : mais en cent ans, il en a fait du progrès ; il en a gagné du terrain !  Moi, je ne crois plus.  Je suis là, planté avec ma centaine de pieds ; inerte.  Lui, il pousse.  Lentement, à peine visible à l’œil nu.  Le jour où il a le plus goûté sa suprématie sur moi, c’est quand trois touristes anglais, ignorants dans le domaine de l’art gothique, ont foulé le sol qui retient ma charpente.  Ils étaient trois : la maman anglaise, le papa bilingue et le petit idiot, avec sa coupe de cheveux en brosse, qui parlait à peine.

Lorsqu’ils se mirent à admirer ma stature, ils discutaient ensemble d’un langage que je ne pouvais traduire ; de l’allemand, probablement.  Et voilà que le petit con, que ce petit amas d’os planté sur deux jambes bourrues, prononce en français : « T’as vu le beau sapin, maman ? »  À ce moment, toute ma charpente trembla ; je sentis mes cloches tressaillir.  Le sapin leva la tête, me regarda et ne prononça aucune parole.  Il savait que c’était lui maintenant que l’on apercevait en premier plan.  Lorsque l’on s’approchait de mes portes, on disait : « Les oiseaux ne doivent pas s’ennuyer par ici », ou encore « je veux grimper, maman !  Je veux grimper ! »  Et on entraînait les petits singes.  Dans ma nacelle, pour leur changer les idées.  Je me sentais devenir inutile.  Je le sens encore aujourd’hui.  Quand mes cloches sonnent, le sapin rigole ; il sait que les fidèles qui se réuniront sous mon enceinte ne pourront se refuser un regard ou un mot d’admiration pour ce conifère.

J’en suis rendu à rêver le jour de ma démolition.  Car je sais que le sapin restera là.  C’est à se demander s’il n’est pas le plus haut du monde.  Il ne reste plus que ma girouette à dépasser ; il s’allonge de jour en jour.  Bientôt on dira : « Maman, quand ira-t-on visiter le sapin près de la Basilique St- Pierre de Rome ? »

SALUTATION (ANNÉE INCONNUE)

 

Je constate pour une première fois dans ma vie comment il est difficile  de modeler un mot de remerciement.  En tout cas, petite Esther, vous avez un avenir prolifique d’installé chez vous.

Ce que je tiens à vous exprimer, c’est une joie tourbillonnante qui s’est enroulée sur mon moi à la vue du colliotton que vous avez construit d’une manière si extraordinaire ; car c’est vraiment véritablement vrai qu’il est extra-hors-de-l’ordinaire.

Ça fait que je te remercie ben bien bien gros pis je te remercie énormément gros.

En tout cas, chus pas ma content.  Ouais !  Pas mal.

Pis en attendant de te revoir, je te laisse une petite poésie pour tes longs soirs d’hiver.

Lou lou lou lou lou (dessin de loup)   

 

 

SUJET NUMÉRO « E » (ANNÉE INCONNUE)

 

 

 

 

L’oiseau de nuit parcourt le ciel en quête de nourriture.  Il aimerait quelques insectes à se mettre sous la dent.  Il regarde bien.  Qu’aperçoit-il là derrière les champs ?  Papa insecte qui promène sa belle progéniture.

 

L’oiseau de nuit voltige, en quête de nourriture.

Les insectes le taquinent ; il se fâche, il s’énerve.

« Je vous craquerai », leur dit-il de sa voix taciturne.

Et il fonce, enragé, comme la foudre sur la cime.

 

Les insectes sont déçus car dame lune brille.

Et l’oiseau les voit bien sous ce ciel éclatant.

Il les vise, il les scrute, étudiant leurs quadrilles

Et déjà détendu, il se voit digérant

 

Mais voilà qu’un nuage obscurcit l’éclairage

Et l’oiseau tout mêlé perd de vue son repas.

Le néant s’éclaircit et l’oiseau aperçoit

Que son met a quitté l’emplacement du carnage.

 

L’oiseau fixe la lune et lui dit d’un ton sec :

« Qui vous a permis d’éteindre votre lueur ? »

La lune fixe l’oiseau et lui dit, l’air moqueur :

« Vous n’avez qu’à chasser de jour si mes postures vous incommodent »

 

L’oiseau rage.  Il se crispe.  Il se sent attaqué.

« Vous semblez bien inutile, là-haut perchée

« Vous êtes inerte, presque rampante.

« Tandis que moi je peux voler ou bon me semble »

 

La lune se ferme et se promet de se venger

L’oiseau repart, si fier d’avoir porté son coup

Il voltige, s’arrête.  Qu’aperçoit-il, là, l’autre bout ?

Un pied d’un arbre, cent beaux moustiques à avaler.

 

Il prend son élan et fonce vers ses victimes

La lune éclaire, il les voit bien, il fonce toujours.

Il est si près qu’il peut maintenant ouvrir sa gueule.

La lune se cadre sous un nuage, l’oiseau se pète la tête contre l’arbre

 

Et dans cette nuit,

Cette nuit si calme

On n’entend plus pour tout bruit

Que la lune qui ricane.

Morale : mieux vaut chasser de jour que de nuit

 

 

RAPPEL COLÉRIQUE À DEUX (ANNÉE INCONNUE)

 

N’oublions surtout pas que tout cela n’est qu’entre-phase mélodique, rhapsodique, fanatique…

Et ce disque grafigné qui me charme toutefois ; et les autres.

Je suis là, qui vais vite.  Mais cette « elle », sensorielle…  M’évite-t-elle de justesse?  Je m’invite à dîner et n’en reste point bon.  Mais on s’aveuglifie.  S’estomprissent les morphines, cocaïne et tangerine…

Des nouvelles ou quelque chose ?...  Pourquoi pas ?  Je ne t’ai rien fait.  Que dis-je?  Point plus que rien.

Et au diable, diaboliques musiques, les violons et les harpes de l’Espagne aussi, de pair…

J’ai les noires qui suffisent.  Et les blondes et les brunes aussi.  Qui s’alignent ?  Aucune.  Bof !  Ça viendra…  Mais quand ?  Et où ?

Tabarnac !

 

 

 

ET J’OSE : DÉPRESSION (ANNÉE INCONNUE)

 

Ce ne sont plus des voyages, des ventouses ou des étourdissements ; c’est l’apprentissage, le goutte à goutte, le pas à pas, le peu à peu, le peau à peau, le tien le mien, les vôtres les nôtres, et tiens le tien, tannant tanné.  Taxidermie, taxidermiste…

Tamisé !

Reprenons à court terme puisque le temps temps fend fendez

Le le le le le le

Toi et moi, tous deux, les bras, les jambes envissées.  Synchroniques, magnifiques avec un seul nom, une seule phraséologie philosophique, conçue exprès pour la naissance en clameur…

Et clame la réclame.

Bravo.

 

 

JOURNÉE BONNE… (ANNÉE INCONNUE)

Bon.  Bon bon bon-jour…  Francine.  (Hésitations et pensées)  J’arrive de travailler…  Comme j’ai reçu ta lettre ce midi, l’après-midi fut assez, pas mal lourd…  Mais enfin c’est terminé.  Je dois dire que ce dernier message m’a… profondément… clairsifié les choses.  Il est vrai et très vrai que les « freaks » moraux sont fréquents chez moi.  Une espèce de paranoïa dull et harassante m’habite à toute occasion unique…  J’sais pas ; on dirait que le moment v’nu, rien ne marche…  Je sais que tu dois trouver ça flou, c’est-à-dire embrumé, ce que j’vieux dire, voici donc un exemple :

 

(Il manque la suite du texte).

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

J’imaginais à toutes les nuits diverses recrudescences…

Maintes et maintes fois j’ai crié ; j’ai hurlé d’effroyables hurlements à la vue de cette coupe capillaire si et tant monstrueuse !

Je suis présentement à faire le point, dans cette phase dépressive augmentant son allure.

Je cherche à comprendre le futur, c’est-à-dire d’élucider des choses, des faits que je suis seul à construire, à créer.

Et en plus de ce songe agaçant ma cervelle, je me rase de plein gré, de la tête à mes pieds !  Je travaille, je suis seul, sans femme, sans force, sans amis !  Je reviens du travail et je trouve une famille scandée, gélatineuse.  Je ne puis me mordre, je ne puis rire car on croit à une folie de ma part !

On m’asperge d’idéologies fausses ; mais je dois maintenant tenir le coup

Ce n’est pas de la sériosité, petite Line ; c’est un « stress » entraînant avec lui des rafales de folie allégorique…  Je bafouille lorsque je parle, je tremble quand j’écris, j’abaisse les yeux au croisement d’un regard, je me retourne face à la quelconque idée…

C’est que j’avais envie pour une fois de m’installer, d’obtenir par efforts inhumains tout ce matériel qui me glisse au nez !  La nature est si tentante !  Et cette eau savoureuse ; et ces chants d’oisillons qui bercent et rebercent mes pensées saltimbanques…

J’avais envie de musique, d’écriture, d’amours si tranquilles… Si parfait…  Je rêvais à des soirées de théâtre magnifiques où tout semblerait bon…  J’avais envie de cette franche Francine qui aurait pu renaître, sans que j’eusse à parler ou à mordre !...  J’ai envie de partir, mais…

Où vont les fuyards si ce n’est que nulle part ?

Ça devrait passer…

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

J’y suis rendu, à cette satanée léthargie qui noircit nos idées.  Excuse-moi de t’importuner, mais j’ai vraiment besoin de crier à quelqu’un ce que m’inspire la monotonie.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Tu sais, Isabelle, plus j’accumule des années, plus je constate que tu m’as aussi adopté. 

Quelle sensation extraordinaire !

Être le père d’une fille-mère qui m’a adopté.

Je veux te faire une confidence : nous sommes un mystère de la science.

 

Car si un jour ils lisent notre sang

Ils verront que nous sommes parents

 

Lucas Hakim et Isabelle

Tournent ensemble la même manivelle

Et si elle vient à s’enrayer

Grand-père les aide à réparer

Et tous les 3, ils retournent la manivelle

Dans un mouvement éternel

Celui au-delà de la vie

L’infini

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Évidemment !...  Quand j’suis entré aux toilettes tout à l’heure,… un vieux sac gisait au sol…  C’en était un B.B.Q. !

Après l’avoir amassé, je lus à l’intérieur que je trouv’rais les indications à suivre au fond de la deuxième cabine à partir de la gauche…

J’entrai dans la première…  Par méfiance…  Le siège y semblait confortable !  Je m’y installai donc et y attendit le moment convenu.

Tout à coup, ils m’agrippèrent par le dessous…  Les traîtres !  Ils connaissaient ma seule faiblesse.

Une faible force, presque inexistante, floue.  Au fond du cercle, une ombre, luminescente.

Cascade de risques aux flancs agiles.

Beauté claire et sarcasimique !  Ondulescence préfabriquée.

 

 

 

« PACE SEMPE » (PAIX TOUJOURS) (ANNÉE INCONNUE)

 

Le début de la pièce se fait sur la musique de Joe Cocker, « Mad dog and englishmen « , (introduction).  Le Sage entre en scène.  La Paix ainsi que la Guerre sont couchées sur le dos.  La Paix a près d’elle une guitare et la Guerre a un fusil.  Au début de la musique entre le Sage ; il marche sur la scène et dès que la batterie commence, le Sage s’agite et se met à courir sur scène.  Dès que la musique cesse, il s’assoit et toutes les lumières s’éteignent.  À ce moment début Pink Floyd, Meedle, (echoes).  Il se fait des jeux de lumières et quand les paroles commencent, le balayeur entre en scène.  Il balaie doucement et se met à se rouler une cigarette ; il rebalaie et ressort.  Pink Floyd, Meedle, (One of these days) commence alors.  À un certain moment, la Guerre se lève et prend le fusil qui se trouve près d’elle ; la Paix se lève à son tour.  La Guerre rôde pendant un instant autour de la Paix et elle commence à la frapper.  La Paix se défend mais la Guerre sort victorieuse de cet affront.  La Guerre, contente de sa victoire, se montre alors à la foule et commence à parler : « Comme toujours, je suis la plus forte, car moi la Guerre, on ne m’a jamais vaincue.  Et croyez moi, je serais le plus étonné d’entre tous de l’être un jour.  Non mais, regardez-moi ça !  (Il montre ses muscles.)  C’est pas beau, ça ?  (Il fait pendant quelques instants des exercices pour montrer sa musculature et…) »  Le Sage parle : « Stop ! »  (À cet instant, tout arrête ; la Guerre ne bouge plus.)  Le Sage : (Se dirigeant vers la Paix qui git sur le sol.)  « On a tué ma meilleure amie ; (Il prend la guitare.) et elle n’était même pas armée ; ma vengeance sera terrible !...  (Il rôde in instant autour de la Guerre, puis retourne s’asseoir.)  À son tour maintenant !  Que l’on prépare le châtiment…  À ce moment, la Guerre est toujours debout ; la Paix, elle, toujours étendue par terre.  Entre le disciple ; il entre avec un sceau et un torchon pour venir laver la scène.  Au moment où il entre, la musique de Jean-Pierre Ferland, Soleil (Rose Maggie) vient à peine de débuter.  Après avoir lavé un peu, le disciple va rapporter son seau et revient chercher la Paix.  Il la sort en la traînant par terre.  Il revient ensuite parfumer la scène et y étendre des fleurs ; il ressort encore et revient avec une croix qu’il va piquer en plein milieu de la scène.  La musique s’achève.  Le Sage se lève et crie d’un grand trait : « Crucifiez-le ! »  Comme alors la musique de Jean-Pierre Ferland, Soleil (Mon ami J.C.).  Le disciple cloue la Guerre et ressort.  À un certain moment, la Guerre tombe de sur la croix en lâchant un long cri languissant.  La Guerre est morte.  Le Sage réapparaît alors sur scène vient inspecter si la Guerre est bel et bien morte, puis il ramasse les quelques fleurs qu’on avait mises sur scène et les lance à la Guerre et il va se rasseoir dans un coin.  Le balayeur entre alors ; balaie les fleurs et ressort ; le rideau se ferme alors doucement.

 

RIDEAU !

 

 

UN QUART D’HEURE DE VIE SUR TERRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Un homme qui part prendre une bière.

Un homme qui décide de connaître un autre monde.

Un monde que la pensée évade d’un corps à peu près mort.

Cet homme mort, à la pensée vivante, entre dans un sommeil profond.

Où la chose devient presque un véritable rêve où le monde parfait apparaît.

Un monde où la haine et la misère n’existent plus.

Cette nouvelle ville qui commence à se construire, de corps mort et de pensée vivante.

On l’appellera « la ville de la pensée ».

Après un quart d’heure de vie sur cette Terre, on s’aperçoit que la chose sort de son sommeil profond et revient continuer le tout de l’horloge solaire.

Cette horloge qui n’arrête plus.

Elle tourne, tourne et retourne.

C’est pourquoi un homme a chanté un jour

Pourquoi ?  Pourquoi t’es-tu donné tant de mal pour faire tout ça ?

Tu le savais que ça pouvait pas marcher.

Tu dis que tu sais l’avenir ?

 

LA TOMBE DE LA JOIE DU CŒUR… (ANNÉE INCONNUE)

 

Pour une poignée de raisons aussi mauvaises les unes que les autres, il aurait réussi à me pousser jusqu’au suffrage de l’entourage.  J’avais beau lui demander de me laisser, il continuait jusqu’à épuisement de sa personne de traître.  Contrairement à la loi qu’avait érigée ce bon vieux Aristote, il continuait de frapper pour la gloire et la vengeance de son peuple.

 

La foule qui assistait se roulait de rire sur tous les côtés, on avait même vendu des photos-souvenirs pour le rendement, bien entendu, du matériellement vôtre qui avait été réalisé par une bande de jeunes terrestres qui se trouvaient à ce moment en excursion sur notre planète.  Après la mise à mort des barbares d’autres planètes, on me désigna donc comme étant un des 600 000 gladiateurs qui auraient à défendre sa vie contre un adversaire qui se trouverait alors, à ce moment, dans une situation identique à la mienne.

 

Le carillon central de la ville-métropole sonna donc le quatre-vingtième coup de minuit.  L’heure de l’affrontement avait sonné pour moi et en même temps pour lui aussi.  On ouvrit donc détroitement ma cellule, pour m’offrir mon ultime chance de liberté.  Arrivé dans l’arène où les 599 autres gladiateurs étaient là, eux aussi, attendant de connaître à fond les règles de ce jeu qui consistait à déterminer quel esclave était le plus fort du royaume, j’avais, pour la première fois de ma vie, peur comme un enfant.

 

Quadravingonto, l’empereur, s’avança vers nous ; pendant trois années-lumière, il nous explique les règles du jeu de mise à mort que nous étions en train de jouer.  Le bourreau s’avança, prit mon meilleur ami et lui trancha le bras gauche en lui désignant son adversaire qui, lui, avait trois bras.  Il dit alors : « Que veux-tu !  Cet homme a trois bien beau bras, mais j’ai gagné soixante tremplins sur lui et si je veux être sûr de regagner mon argent, faudrait ben qu’il ait un tout petit avantage sur toi, n’est-ce pas? »  Mon ami prit l’épée avec laquelle le bourreau lui avait coupé le bras et il la planta dans son œil droit.  Le bourreau avec étonnement lui demande pourquoi il avait fait ça.  Mon meilleur ami répondit alors : « Comme ça, je ne verrai pas le bras qui me manque et je croirai alors être à égalité avec ton protégé.

 

Le combat débuta donc, quarante-sept années-chandelles s’écoulèrent, un seul combattant avec survécu : moi.  Je levai alors les yeux vers l’empereur en lui réclamant ma liberté, il me répondit avec un large sourire : « Grâce à cette épreuve de force et de courage, tu auras désormais le droit de me voir, une fois tous les 400 siècles durant au moins quinze secondes. »  Je tombai alors à genoux en implorant son incroyable générosité, pour me donner au moins la permission de la voir vingt secondes ; il accepte et j’en mourrai de joie.

 

Jacques Bolduc, humanoïde parmi tant d’autres.

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Dans la soirée du 21 mars 1975, quelque part au Saguenay, s’exécutait pour la première fois sur scène le théâtre Jirondanjoncelle, organisme créé par les fonds monétaires personnels de ses membres.  Déjà, à cette époque, se dessinent d’eux-mêmes les buts-objectifs de la troupe : l’originalité, par des textes aux tournures de phrases mouvementées, au vocabulaire riche, et l’indépendance, dans le sens que nous ne pouvions attendre l’appui monétaire du gouvernement et encore moins de nos parents…  Sur des bases solides, s’organise donc notre premier spectacle : « Sous la paillaisse du paillasson », que nous cesseront après cinq représentations, vu un premier manque d’organisation.  Le satané transport…

Eh oui !  Le transport.  Nous traversions là une première évidence : le vital besoin de se déplacer au-delà du Saguenay pour survivre et ainsi continuer…  La région nous ayant bornés à seulement cinq représentations pour notre premier spectacle et devant l’impossibilité de que nous traversions de ne pouvoir nous déplacer (ce dû à notre imposant matériel théâtral), nous décidâmes de monter un second show pour, du moins, conserver l’étincelle que nous avions su faire naître dans notre coin restreint…  Naquit alors la seconde production, toujours subventionnée par la troupe elle-même : « Les Chroniques du docteur Lèchefer »…

Ce texte, comme le premier, fut offert à cinq foules différentes : seulement…  Mais grâce à lui, la troupe connut son premier spectacle hors de son territoire, à Roberval, dans le cadre de la Traversée Internationale du Lac-Saint-Jean.  L’expérience nous apprit une lacune qu’un public ne nous connaissant pas avait mieux décelé que nos salles précédentes ; un certain hermétisme au niveau des textes, l’évidente difficulté qu’avait l’auditeur à saisir le sens complet de la pièce…  Les textes devinrent alors sérieux sujet d’étude…

En premier lieu, nous décidâmes de fondre en un seul show les deux précédentes pièces ; ce qui donna « Rubycon Wollonstrô ».  Il se voulait en quelque sorte la preuve que nous pouvions manipuler nos textes et ce tout en leur conservant leur fil logique d’histoire.  Bien que dur à saisir, l’unanimité attesta sa présence.  C’était compréhensible, bien que, de temps en temps, la confusion semblait prendre le dessus.  Restait alors pour nous de préciser nos idées.  De les rendre claires, précises et ce tout en conservant l’originalité du spectacle…  L’envie de sortir de l’ordinaire.  Vint à ce moment le montage de notre quatrième particule théâtrale : « La Cuve Cubique », l’explication de divers sentiments humains…

À sept reprises, nous pûmes le propulser aux gens, dont deux fois à l’extérieur de nos bornes habituelles.  La réponse fut favorable.  Le texte, facilement décelable, amplifiait la vigueur des comédiens.  Chaque geste signifiant chaque phrase, chaque déplacement appuyant chaque montée d’intensité vocale rendait la pièce vivante et surtout compréhensible au maximum.  De plus, l’œil ne pouvait qu’apprécier l’imposant décor…  Nous avions meublé la scène, borné les coulisses de hauts murs et ce afin d’engourdir l’œil, de lui plaire à l’aide de nos plus beaux atours pour ainsi capter l’esprit de l’auditeur et lui refiler nos idées ; un genre de tactique, quoi !...  Une fois l’œil soumis, l’esprit est apte à comprendre-entendre.

Puis suivit « Le Technicien et la Balance », autre spectacle qui nous aida à mieux maîtriser le plateau de jeu ; à savoir quoi y mettre, quoi y ajouter…  Il fut aussi le retour au spectacle présentable n’importe où…  Contrairement à la « Cuve Cubique », nous voulûmes conserver en réserve une production n’exigeant pas la grande scène pour être jouée.  Le tout s’avéra concluant car à cinq reprises sur sept, la pièce fut jouée en des lieux peu privilégiés, point de vue « technique de scène » (son, éclairage, etc…)  Nous apprîmes aussi ainsi à connaître les publics de cafés, de petites places où rarement de telles choses étaient présentées.  Une autre corde à notre arc, si l’on peut se permettre de dire…

Finalement, la dernière œuvre, la plus complète, celle en laquelle nous avons mis le paquet : « L’instable Humeur »…  Des costumes délirants, issus d’on ne sait où, un diabolique centaure tentant de masquer sa rage, un escargot ignorant l’action…  Une pièce hyper-plausible, sortant des cadres théâtraux habituels et d’un grand déploiement.  Pour une première fois, à l’aide du spectacle complet, nous réussissons à graver véritablement notre message…

Aujourd’hui, après avoir tant crée, nous visons les centres de diffusions ; là où le public est…  C’est pourquoi nous vous informons de notre existence…  L’œuvre actuellement prêt : « La Revanche de la Végétation », explique son titre tout au long de son cours…  En plus, comme dans chaque production précédente, chaque moment intense de la pièce est appuyé de musique, saccadant l’atmosphère ou l’adoucissant, tout dépendant….  Cette musique est-elle aussi œuvre de la troupe.  La finale du spectacle : le musicien-comédien prouvant qu’il peut, tout en se servant de son corps, amplifier ses axes spirituels, ce par la musique que sa tête crée-pense tout en le communiquant par l’instrument…

Un bon spectacle !...

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Le juge demande au prisonnier de ne pas le prendre au sérieux.

 

Et dans l’fond

Qui nous dit que le destin

N’est pas un jeu qui…

 

Si le destin n’était qu’une roue qui ne tourne pas tout à fait rond ?

 

 

 

PRÉSENTATION DE LA « MARCHE DES FEMMES » (ANNÉE INCONNUE)

La prochaine pièce en est une très délicate car elle aborde un sujet que j’affectionne particulièrement.  Elle s’intitule « La marche des femmes ».  Et curieusement, malgré l’apparente exclusivité de son titre, elle s’adresse surtout aux hommes.  Je n’parle évidemment pas ici des hommes ayant acquis envers la femme les notions de respect et de complicité nécessaires à toute relation solide et intelligente.  Non.  Non, je parlerais plutôt ici des hommes crétins ; des hommes cons.  De ces « cons d’hommes » qui ne pensent qu’à déverser le contenu de leur contenant dans des contextes pas toujours convenables.  Bien que je sache pertinemment qu’il n’y ait aucun représentant de cette catégorie ici ce soir, je crois quand même bon de rappeler à tous les boyaux que la femme n’est pas seulement qu’une crevasse juchée au sommet de deux jambes, ou encore qu’une imitation du Mont-Everest au niveau de la poitrine, mais bel et bien une force réelle qui ne cesse de s’affirmer et qui reprend enfin la place que trop longtemps on lui a interdite.

La femme sait ce qu’elle veut.

Elle ne veut plus être derrière la queue.  

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE-INCOMPLET)

 

Tabarjole à deux étages (en pouffant) !  On en fait-tu des affaires pour garder ses chums !  Autant qu’on peut en faire pour impressionner une fille.  Bof !  C’est sûr que c’est pas eux autres qui sont venus me chercher pour être dans ‘gang ; non.  La gang vient jamais t’chercher ; c’est toi qui vas a’ gang.  À part ça, c’est pas n’importe qui peut être dans ‘gang ; faut passer par des épreuves ; faut être à hauteur.  Y ont mis des épreuves dans ‘gang parc’qu’y ont décidé qu’un homme, pour être un homme, doit posséder 3 qualités fondamentales.  Premièrement, la culture générale : un homme, ça doit être cultivé.  Ça fait que quand t’arrives pis qu’tu d’mandes aux gars « j’veux rentrer dans ‘gang », y t’remettent un questionnaire pour voir si t’as assez de cult. gén. Pour pouvoir être accepté.  Y a 550 questions dans l’test pis t’sa l’droit d’en manquer 10.  Pis sans vouloir me vanter, j’ai ai toutes eu bon.  Les 500 premières, j’ai ai même pas vues.  Les gars capotaient.  Y me regardaient aller en s’disant : « non mais ça s’peux-tu, cultivé d’même ».  Mais rendu à 522, j’ai eu un p’tit problème.  C’était une question à laquelle je devais répondre oralement.  Y d’mandaient : « Construisez une phrase allitérative au travers laquelle vous dépeignez votre humilité face à la gang. »  Bon…  (À quelqu’un) : « Tu sais pas c’est quoi une phrase allitérative, hein ?... »-« Ben une alitération, c’est une phrase qui contient le même son répété plusieurs fois. »  J’ché pas, moi.  Disons : « As-tu déjà… femme ? »  Non.  C’est froid chez toi.  Bon !  Alors, comme je disais, j’étais un peu nerveux.  Y m’restait 5 minutes, 28 questions à répondre pis toute la gang était là qui watchait l’horloge en se d’mandant si j’allais réussir.  J’ai fait ni un ni deux.  J’ai fermé mes yeux et j’ai laissé …

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE-INCOMPLET)

 

(Voix off)  La suite des premières séances de notre patient s’est développée à la suite de la mort de son meilleur ami Théo, décès qui de toute évidence est directement relié à l’alcool.

 

« Théo, c’était mon grand t’chum.  Toujours ben saoul.  Toujours ben rond.  Toujours l’impression d’avoir rien fait d’bon.  2 grands amours, sa bouteille pis Simone.  Théo y avait marié pis quand y m’en parlait y m’disait : « Boldô, j’t’écoeuré.  Simone, j’t’écoeuré parce qu’elle est grosse… »  Quand y m’parlait d’sa bouteille, y avait jamais d’problème.  Il l’aimait nature ; mais quand y m’parlait d’Simone…

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Le but que se fixe l’Organisation Boldô est d’offrir une prestation scénique qui se veut aussi fascinante du point de vue visuel que du côté musical.  Pour y arriver, divers moyens sont exploités.  Un fond de scène comprenant six (6) décors différents qui viennent tour à tour appuyer les ambiances suggérées par le texte.  Des masques et des costumes utilisés au travers une mise en scène serrée et efficace.  Des éclairages et une sonorisation appropriés.

L’Organisation Boldô a vu le jour sous sa forme actuelle y a plus de deux ans et cumule au travers de ses membres de nombreuses années d’expérience sur les planches.  Le spectacle qu’elle présente est d’une durée d’une heure quarante-cinq minutes, divisé en deux parties, entraînant avec lui une participation active de la part du public compte tenu des différents personnages et de leurs interventions.

Pour donner un aperçu réel de l’ensemble du produit, nous incluons quelques photos explicatives ainsi qu’une bande sonore qui, nous l’espérons, sauront retenir votre attention.

Contact : l’Organisation Boldô

 

 

 

LA PARTIE DE PÊCHE (LES AVENTURES DE MICK ET PATT LES HAMSTERS)

(ANNÉE INCONNUE)

 

Textes

 

01 : « Bonjour !  Nous sommes Mick et Patt les hamsters.  Nous habitons la maison de la famille Content.  Tu vois le châssis à gauche du côté de la cheminée ; c’est celui de la chambre de Thomas.  Approchons-nous et jetons-y un coup d’œil. »

 

02 : « Remarque dans le coin, sous la fenêtre, la charmante petite chaumière…  Eh bien c’est notre chez nous ; nous tenions à ce que tu le saches.  Alors voilà, maintenant que tu connais notre demeure, commençons cette aventure. »

 

03 : C’est la fête chez les Content car c’est aujourd’hui dimanche.  Toute la famille s’en va au chalet pour y faire une partie de pêche.

 

04 : Monsieur Content achève de préparer le lunch.  Il apporte des sandwichs au jambon, de la salade de chou, des échalotes ainsi que des pommes et des pêches.

 

05 : « Thomas, va te changer de chaussures », lui dit sa mère.  « Et apporte ton chandail de laine ; il ne fera peut-être pas chaud. »

 

06 : Arrivé à sa chambre, Thomas salue ses amis les hamsters.  « Bonjour les copains, je m’en vais au chalet avec ma famille pour y faire une partie de pêche ; bonne journée ! »

 

07 : « Oh !... comme il est chanceux ! », soupire Pat.  « Moi aussi j’aurais bien aimé aller à la pêche. »  « Mais regarde », répond Mick. « Thomas s’est tellement dépêché qu’il en a oublié son chandail sur la chaise.  Attend un peu ; je reviens. »

 

08 : « Arrête de pleurnicher », dit Mick.  « Penche-toi près de la porte, que je monte sur ton dos.  À l’aide de cette broche, je vais toucher le crochet qui nous empêche de sortir et le faire tomber. »

 

09 : « Grimpons par une manche et cachons-nous dans une poche.  Thomas reviendra sûrement chercher son chandail accroché à la chaise et ainsi nous partirons à la pêche avec lui. »

 

10 : Mick ne s’était pas trompé ; en effet un instant plus tard, Thomas réapparaissait dans la chambre et s’emparait du chandail.  Et voilà Mick et Patt en route pour la pêche, regardant le paysage de leur cachette.

 

11 : Sur leur chemin, nos amis s’arrêtent chez le marchand pour y acheter de l’huile à mouches.  « Eh Mick ! », chuchote Patt.  « C’est quoi la grosse machine là-bas avec des chaînes à ses roues ?... »

 

12 : « C’est un tracteur », répond Mick à voix basse.  « Tu vois, on y a attaché une charrue pour défricher le sol.  On peut aussi y mettre une charrette pour ramasser le foin des champs. »

 

13 : « Enfin !  Nous voici au chalet », dit monsieur Content.  « Chacun sa tâche : maman et les enfants, vous déchargez les choses dont nous aurons besoin.  Moi, je m’occupe de la chaloupe. »  Nos petit chenapans en profitent pour courir se cacher derrière une grosse chaudière.

 

14 : « Nous descendrons la rivière jusqu’au petit chenal », explique le père.  « Arrivés là, nous accosterons la chaloupe et nous pêcherons au pied du petite chute. »  Et les voilà partis.

 

15 : « Mais avec quoi allons-nous pêcher ? », demande Patt, presque fâché.  « Ils ont apporté toutes les cannes à pêche avec eux ; c’est fichu ! »  Mick réfléchit un moment.  « Écoute, Patt ; tout à l’heure près de la chaudière, j’ai remarqué une ficelle par terre ; cours la chercher.  Moi, je me charge de trouver deux branches. »

 

16 : Un instant après, les voici revenus avec leur matériel.  « Regarde Patt, je sépare la ficelle en deux et j’en attache un bout à chaque branche.  Voilà nos cannes à pêche ! »  « Oh ! comme elles sont chouettes ! », s’exclame Patt.

 

17 : « Mick, tu crois qu’on va attraper quelque chose ?... »  « Hum !...  Le poisson m’a l’air farouche, Patt ; mais tu sais, l’important à la pêche, c’est la chaleur et le calme. »  Et les voilà qui s’endorment, couchés sur le quai.

 

18- Beaucoup plus tard, Patt est réveillé par des chants lointains ; c’est la famille Content qui revient.  « Mick, Mick, réveille-toi !  Regarde ! » « Oh ! vite, Patt !  Courons nous cacher près de la voiture. »

 

19- La chaloupe est maintenant attachée et on la décharge.  Thomas porte tellement de marchandises qu’il ne remarque pas une petite souche par terre et        oups !...  Le voilà qui trébuche.  Tout le monde accourt l’aider et nos amis en profitent pour remonter dans l’auto.  Ils cachent dans les bottes de Thomas.

 

20- Sur le chemin du retour, Amélie raconte comment elle a sorti son premier poisson.  « Ce n’est pas vrai, réplique Thomas.  C’est papa qui l’a accroché ; ensuite il t’a passé sa canne à pêche ! »  Tout le monde éclate de rire de voir Thomas ainsi fâché : le pauvre !  Il n’a rien attrapé.

 

21- Arrivés chez eux, les Content débarquent les bagages.  Ainsi les bottes de Thomas se retrouvent dans la maison et nos amis s’en échappent.  « Vite Patt !  Regagnons notre chaumière.

 

22- Enfin, Thomas vient saluer ses hamsters avant de se coucher.  « Quelle belle partie de pêche on fait, les amis !  On s’est tellement amusé !  La prochaine fois, j’essaierai de vous amener au chalet.  Tiens !  J’avais oublié de mettre le crochet ; par chance que vous êtes encore là !...  Bonne nuit Mick !  Bonne nuit Patt ! »

 

Détails dessins

 

01 : C’est la vue de façade de la maison de la famille Content ; une vue mitoyenne où le point de mire se situe entre le trottoir et le toit.  Demeure unifamiliale avec deux lucarnes.  Fleurs, petite entrée, rocaille, etc…

Évidence : cheminée (évidemment) et une pancartes sur laquelle on peut lire « vétérinaires ».

 

02 : La petite chaumière des hamsters possède en fait un étage et demi.  Baignée de couleurs vives, bien éclairée puisqu’elle se trouve sous la lucarne ; une véritable maison de poupée.  Éviter le plus possible des grillages, sauf pour la porte d’entrée où il devient presqu’impossible d’utiliser autre chose.

Évidence : crochet sur porte.

 

03 : Plan de la famille qui s’affaire à la cuisine.  On aperçoit un chien à sa niche par la fenêtre.

04 : Zoom sur le compter, intérêt sur les victuailles.  Jus, breuvages.

 

05 : Thomas en mouvement dans l’escalier, vers le haut.  Mère en bas s’adressant à lui.

Évidence : sécheuse avec porte entrouverte où pend une chaussette, chapeau de paille accroché au mur près de la sécheuse, Amélie pieds nus.

 

06 : Thomas près de la résidence des hamsters.

Évidence : porte de la garde-robe entrouverte qui laisse voir une ou deux paires de chaussures, chandail sur le dossier de la chaise.

 

07 : Zoom sur hamsters mais à l’intérieur de la cage.  Visage déconfit de Patt, mine réfléchissante de Mick.

 

08 : Mick debout sur le dos de Patt.  Mick bras allongé avec broche qui touche au crochet.  Lignes de mouvement sur crochet.

 

09 : Patt au pied de la chaise observant Mick.  Mick déjà en train de grimper. 

Évidence : crochet défait au loin, manches du chandail qui traîne par terre.

 

10 : Zoom sur voiture vue de l’arrière.  Mick et Patt dans la poche du chandail qui git au fond de la voiture leur donnant ainsi une vision au travers la lunette-arrière.  Voiture genre « familiale» (« station-wagon »).

Évidence : Amélie porte le chapeau de paille.

 

11 : Voiture stationnée devant la boutique d’un marchand général.  Thomas et Amélie toujours dans l’auto.  Tracteur au loin.  Troupeau de vaches, un ou deux chevaux.

Évidence : chaînes aux roues du tracteur.

 

12 : Tracteur avec charrue, charrette qui traîne à quelque part.  Voiture et boutique du marchand en plan éloigné.  Cochons, chèvres…  Parents qui reviennent à l’auto.

 

13 : Mère et enfants débarquant les bagages (lunch, gilets de sauvetage, etc…)  Père en direction du quai avec rames et cannes à pêche.  Chalet visible mais négligeable.  Hamsters en premier plan derrière la chaudière.

Évidence : portières de l’auto et porte-arrière ouvertes, ficelle qui traîne près de la chaudière.

 

14 : Zoom sur chaloupe vue à partir de la rivière.  Hamsters en fond avec têtes qui sortent de chaque côté de la chaudière.  Chalet visible mais négligeable.

 

15 : Hamsters sur le quai en plan principal, chaloupe visible au loin ; pas mal loin.  Mine déconfite de Patt, Mick convaincu avec geste d’assurance du genre « poing qui cogne dans main ouverte ».

 

16 : Chacun avec canne à pêche en main, mine évidemment très réjouie.  Toujours sur le quai.

 

17 : Une ou deux chenilles sur un gros champignon qui observent les hamsters en riant.  Hamsters « évachés » sur le quai, lignes à l’eau, peut-être poissons qui s’amusent alentour.  Bonheur total des deux hamsters.

 

18 : Chaloupe quand même encore assez loin avec famille qui a l’air de chanter.  Patt sautille sur place avec bras et doigt tendus en direction des arrivants.  Mick dressé mais pas tout à fait debout.

Évidence : voiture en fond de plan.

 

19 : Père tirant ver le quai, mère et Amélie tirant vers auto, Thomas à mi-chemin entre les deux déjà tombés (marchandises qui jonchent).  Évidemment : père et mère en mouvement vers lui.  Amélie regarde aussi dans la même direction mais nettement moins pressée que les parents.  Mick presque dans la botte, Patt arrivant.

Évidence : souche, bottes à l’arrière de l’auto, portières de l’auto ouvertes.

 

20 : Vue à partir de l’arrière de l’auto.  Mick et Patt de dos avec demi-face qui se regardent en riant, ensuite Thomas de dos qui semble gesticuler avec à ses côtés Amélie qui parle en direction de sa mère.  Parents en troisième plan, à l’avant de l’automobile.  Mère retournée qui regarde sa fille en riant, père visible au travers le rétroviseur et qui rit lui aussi.

 

21 : Vue intérieure de la maison.  Plan semblable au 03.  Porte ouverte, père qui arrive les bras plein de bagages.  Mick et Patt en mouvement dans l’escalier vers le haut.

Évidence : extérieur crépusculaire, bottes tombées près de la porte.

 

22 : Dans la chambre à Thomas.  Plan semblable au 06.  Hamsters couchés dans petits lits coquets s’échangeant un clin d’œil.

Évidence : Thomas en pyjama, crochet défait.

 

N.B. : Toutes ces idées ne sont qu’une mince idée par rapport à l’imagination débordante de l’illustrateur.  Elles sont donc sujettes à changement sans préavis.

 

 

LES AVENTURES DE MICK ET PATT LES HAMSTERS-DESCRIPTION DE PROJET

(ANNÉE INCONNUE)

 

L’idée à la base est de réussir à cerner des personnages susceptibles d’enseigner aux jeunes enfants des notions élémentaires dans différents domaines tout en développant entre eux et les intervenants des diverses aventures une impression de complicité amicale.  Il me fallut donc définir en premier lieu les matières à travers lesquelles nos sujets auraient à évoluer.  Elles m’apparurent alors en trois sphères bien distinctes : ACADÉMIQUES (botanique, biologie, zoologie, français, mathématique, musique, etc…) ;  DOMESTIQUES (mécanique, menuiserie, cuisine, travaux ménagers, etc…) ; SOCIALES (bienséance, amitié, jeux, télévision, races, usines, métiers, etc…)

Il s’avère aussi très important au fil des histoires d’allumer chez le lecteur l’étincelle qui lui procurera l’irrésistible envie de mieux connaître les personnages.  C’est donc pourquoi le choix des héros et des individus qui auront à les côtoyer devient d’une importance cruciale.  Vous m’aviez indiqué lors de notre conversation téléphonique la quasi-nécessité d’accorder au monde animal les rôles titres.  À la suite d’intenses réflexions et d’une mini-enquête que je me plus à mener auprès de mes filles et des enfants d’amis que je côtoie occasionnellement, votre idée m’apparut excellente.  L’animal se présente souvent chez l’enfant comme le premier véritable ami et confident; probablement parce que ne pouvant s’exprimer, il semble toujours attentif aux babillages volumineux et aux scénarios farfelus que l’être humain développe au cours de son enfance.  Mon investigation m’amena alors à tenter de découvrir quel animal les charmerait le plus.  La diversité s’avéra stupéfiante.  Passant de la grenouille à l’éléphant, de la perruche au tigre, j’en vins à me demander si je n’avais pas mieux fait de déterminer une liste de choix au préalable.  Les résultats de mon enquête me révélèrent toutefois qu’en autant qu’il sache obtenir la sympathie des lecteurs et qu’il se montre à la hauteur de leurs aspirations, le choix proprement dit de l’animal ne présente pas de problèmes.

J’accorderai donc ma préférence au hamster, animal populaire auprès des enfants et déjà intégré dans plusieurs familles.  En plus, contrairement au chien ou au chat (pour coquin et poilu.  Il faut aussi mentionner que sa taille réduite m’ouvre de possibilités de transports presqu’illimitées en ce qui a trait aux divers scénarios projetés.  En effet, compte tenu de ses dimensions très réduites, il peut autant voyager dans la poche d’un veston que dans une boîte à lunch et ce, sans ne jamais présenter de problèmes de crédibilité au niveau du lecteur.  Je pense même très sérieusement à créer un tandem plutôt qu’un héros solitaire.  Le premier serait disons « très éveillé, rusé et débrouillard », tandis que l’autre se présenterait sous des allures plus « lourdaudes », si l’on me permet l’expression.  On n’a qu’à faire ici référence à Astérix et Obélix, ou encore aux Deux Nigauds pour saisir ce que je veux dire.  Cette formule s’est toujours avérée des plus efficace et procure en même temps à l’auteur l’occasion de camper ses personnages sous des caractéristiques solides, évidentes et faciles à reconnaître surtout chez un public de bas-âge.  Bon !  Comme nous nous sommes mis d’accord sur le fait que nos héros se matérialiseront sous la forme de hamsters et que leurs traits de caractère sont définis, découvrons maintenant la famille chez laquelle ils évolueront.

Optons ici pour des standards.  Un père, vétérinaire ; une mère qui, pourquoi pas, aurait embrassé la même profession que son mari et deux enfants, un garçon et une fille « propriétaires » de nos héros.  Je mentionne tout de suite que les noms qui seront attribués aux personnages ont été volontairement omis de ma part.  Il ne sera qu’agréable de les dénicher en équipe si jamais mes projets de scénarios sont retenus par les principales investigatrices du projet auquel je soumissionne.  L’âge des parents frisera plus ou moins la trentaine et celui des enfants se situera évidemment aux alentours de celui du public cible que nous visons, c’est-à-dire environ six ou sept ans.  Les enfants recevront parfois la visite de quelques-uns de leurs petits amis et même, pour une histoire ou deux, celle de leurs grands-parents : les enfants les aime tant !...

Il est maintenant temps de sortir à l’extérieur et de nous placer sur le trottoir, juste devant l’allée qui mène à la maison.  Déjà, on remarque une petite clôture qui ceinture le terrain où quelques arbres et arbustes s’éparpillent.  Sur un des arbres, celui qui pousse près de la rue, pend une pancarte portant le nom de la famille et bien entendu la mention « vétérinaires ».  Des fleurs multiples jaillissent de la rocaille que l’on a gentiment aménagée au pied de la demeure.  La maison respire la bonne humeur et les volets qui flanquent chaque fenêtre ne peuvent qu’appuyer cette impression de bien-être.  Dy toit émergent deux lucarnes d’où souvent les enfants contempleront le monde qui les entoure en compagnie de nos deux héros : les hamsters.  À l’entrée, on remarque l’originalité de la sonnette ; c’est en fait une vache à laquelle il faut tirer la queue pour voir s’agiter le grelot qui pend à son cou.  D’ailleurs, la maison sera truffée de toutes sortes de gadgets ayant trait au monde animal ; il ne pourra qu’être amusant de les découvrir au fil des aventures que vivront nos comparses.  La porte principale, une fois ouverte, donne sur le salon.  Je vous épargne ici la description des meubles et rideaux et rendons-nous plutôt immédiatement à l’endroit qui nous intéresse, soit la chambre des enfants située à l’étage.

C’est en fait une chambre d’enfants dans le sens propre du terme.  Murs agréablement décorés, couleurs vives et stimulantes, lits fantaisistes du genre « voiture de course » ou « baldaquin de poupée ».  Dans un coin, spacieuse et fonctionnelle, la résidence de nos deux amis les hamsters (je refuse ici d’employer le mot « cage » car comme vous devez bien vous en douter, nos héros habiteront plutôt un petit chalet comprenant tout de même mes contraintes mais de façon très subtile).

Le cabinet du vétérinaire des parents sera adjacent au reste de la maison.  Ainsi,  on verra souvent nos personnages se lier d’amitié avec un ou plusieurs des pensionnaires de la clinique et, à l’occasion, certains de ces nouveaux amis pourront même réapparaître dans des aventures subséquentes.

Sachant que les scénarios devront être construits selon des principes de prononciation exigés par vos programmes, il me serait difficile de détailler immédiatement de façon textuelle les différentes intrigues que nos aventures proposeront.  C’est donc pourquoi je me contenterai d’idées d’ensembles, mais relativement précises.  Si l’on se réfère au tout début de ce mini-dossier, je me suis permis de vous énumérer une quinzaine de sujets répartis en trois grandes catégories bien distinctes : académiques, domestiques et sociales.  Mélangeons donc le tout et tirons-en une au hasard.  Un instant, le temps que je déplie le petit billet…  Voilà !  J’ai pigé la catégorie « domestiques » l’item « travaux ménagers ».  Voici donc une première idée de scénario.

Nos deux héros se lient d’amitié avec une araignée qui, par malheur, sera avalée par le système d’aspirateur central.  Évidemment, ils réussiront à la sauver « in extremis » d’un mort certaine, juste avant que les éboueurs n’amènent le vacuum à leur camion pour le vider.  Le sujet nous permettra, entre autres, de découvrir comment tel système fonctionne – ses utilités et pourquoi par ses parallèles tel le balai, l’aspirateur manuel ou bien encore le linge à épousseter et le plumeau.  Évidemment, nous nous retrouvons ici devant une élaboration simpliste et peu détaillée.  Analysons donc pour voir un deuxième sujet.

Pour le deuxième exemple d’histoire, je vous offrirai une possibilité que j’appelle dans mon jargon littéraire « le combiné », ce qui veut dire, vous l’avez sans doute deviné, la combinaison de deux sujets différents, peu importe leur catégorie.  Bon !  Je « remélange » mes petits papiers et en sors un premier de catégorie « académique » portant l’item « mathématiques ».  Maintenant le deuxième…  Un instant que je déplie…  Voilà !  Catégorie « sociale », sujet : métiers (je choisis : pâtissier).

Alors en début d’histoire, nos héros s’ennuient par un bel après-midi de printemps et décident d’écouter la radio (comme je vous le précisais tout à l’heure, leur résidence est tout ce qu’il y a de plus fonctionnel).  Un message annonce tout à coup qu’une pâtisserie lance un concours qui permettra au gagnant de pouvoir s’approvisionner en sucreries gratuitement pour une période d’un an.  Comme nos héros ont de légères tendances à la gourmandise, ils se demandent bien comment ils pourraient remporter ce merveilleux prix.  La récompense sera en fait décernée à celui ou celle qui pourra définir avec le plus d’exactitude possible le nombre de fèves contenues dans une jarre située dans la vitrine de la pâtisserie en question.  Le principal problème dont ont à faire face nos amis est évidemment celui du transport.  Comment diable pourraient-ils donc se rendre là-bas ?...  Ils décident donc de descendre à la clinique vétérinaire rencontrer leur ami le chien (ou la corneille), histoire de lui demander conseil.  Mais à leur arrivée, une surprise les attend.  Ils surprennent le père en pleine conversation téléphonique.  C’est en fait le pâtissier qui l’appelle pour lui demander de passer voir son colibri qui n’a pas l’air dans son assiette ces temps-ci.  Le temps de se faufiler dans la trousse du vétérinaire et les voilà en route vers leur destination.  Arrivés sur place, ils viennent enfin, à la suite de mille et une embûches, à se rendre près de la jarre.  Mais comment compter autant de fèves dans un délai quand même très réduit…?

Ils penseront alors à la méthode dite « de la moyenne ».  Il leur suffira de dénombrer deux cents fèves dans un plus petit contenant, d’y tracer une marque et d’ensuite vider la jarre à grosses « pognées » dans leur petit pot.  À chaque fois qu’ils atteindront leur marque, ils sauront qu’environ deux cents fèves s’y trouvent.  Cela accélérera assez leur travail pour leur donner le temps de tout compter.  Ils remporteront évidemment le prix, histoire de ne pas décevoir nos petits lecteurs.  Quant à savoir comment ils rempliront leur bulletin de participation, qui y apposera le timbre-poste nécessaire à son expédition et comment le pâtissier acceptera de voir deux hamsters gagner le prix, ça, c’est à voir…

Évidemment, je précise à nouveau que chaque aventure devra être intimement liée aux syllabes qui seront à l’étude afin de voir si le vocabulaire relié à l’histoire se prête bien au sujet traité.

Voilà en quelque sorte un bien maigre résumé de la méthode que j’aimerais employer pour participer à votre formidable projet.  Vu la clientèle visée et le milieu dans lequel les volumes seront appelés à être distribués, il m’est apparu primordial de bien définir les volets éducatifs qui devraient être insérés dans chaque épisode.  Sans m’y prendre de façon drastique et imposante, j’utiliserais plutôt la subtilité et le jeu pour inculquer aux jeunes les notions élémentaires reliées aux trois grandes catégories plus tôt énumérées.

À titre personnel, je vous préciserai aussi que l’aspect « marketing » de la mise en marché d’un tel produit s’avèrera pour moi très important.  Il ne faudra absolument pas négliger tous les détails qui pourront fasciner nos lecteurs dès le premier contact ; un peu comme cette sonnette d’entrée en forme de vache que je vous décrivais tout à l’heure.  Étant moi-même en train d’élaborer un scénario appelé à accompagner une bande-dessinée, je sais ce que j’avance en stipulant l’importance des dialogues et des détails « accroche-l’œil ». 

En conclusion, je vous précise mon entière disponibilité pour tout renseignement supplémentaire relatif à ce travail.  On peut me rejoindre aux coordonnées suivantes :

 

Jacques Bolduc

(Suivent l’adresse et le numéro de téléphone)

 

Vous remerciant de m’avoir lu et au plaisir possible de vous rencontrer un jour, veuillez agréer mes salutations les plus sincères.

 

 

 

Jacques Bolduc

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 

Le lendemain, fidèle aux divers cycles de la vie, Dwayne s’éveilla.  Parcourant du regard l’unique pièce de l’appartement de Vincent, il constata que son copain avait déjà quitté les lieux.  Un billet gauchement accroché à la porte exprimait sans doute les derniers mots que l’absent avait dû réfléchir.  Il s’approcha de la cloison mobile et s’empara du bout de papier.  Vincent y expliquait qu’il ne pourrait se rendre à la manifestation.

Tabarnak !

 

 

 

DÉBUT DE PROJET-LA REVANCHE DE LA VÉGÉTATION (ANNÉE INCONNUE)

Nous en sommes maintenant au début proprement dit de cette fameuse BD.  Les 12 premières pages représentant les prologues, nous plongeons dans le vif de cette folle histoire (épopée » que devra représenter aux yeux des lecteurs « La revanche de la végétation ».

Imaginons-nous au-dessus du « boiler » d’une pipe dans laquelle on souffle au lieu d’aspirer.  Plaçons-nous le plus possible au cœur de la boucane qui en sort ; c’est ça…  Opaque, n’est-ce pas ?

« Le smog quasi-solide s’agrippait maintenant entre le treizième et le quatorzième étage des buildings avoisinants.  En moins de six mois il avait descendu son plafond permanent de trois étages ; chose qui normalement lui demandait une année…  Sous la couche, là où le smog devenait brouillard londonien (vers les onzièmes étages) on apercevait au travers la brume fumiste . »

 

 

DESCRIPTION DE PERSONNAGES ET DE LIEU DANS « LA REVANCHE DE LA VÉGÉTATION » (ANNÉE INCONNUE)

Jos : C’est le leader des 2.  Rien qu’à son visage, il est évident que c’est lui qui a organisé l’évasion.  Le costume est plus celui des camps juifs que le traditionnel rayé à la Dalton.  Aucun couvre-chef, puisque même s’il en avait un au départ, il l’a sûrement perdu au stade où nous le retrouvons, loin de la prison.  Manches relevées mettant en évidence un tatouage au bras gauche, genre « femme tout nue ».  Le sexe demeure toujours commercial.  Jos est bâti comme un ours et son visage ne révèle aucune sensualité.  Balafre à la joue droite, partant de l’œil et finissant à la commissure de la lèvre.  Une cicatrice droite profonde, comme celles que laisse un coup de couteau.  La barbe est d’au moins cinq jours.  Ses sourcils peuvent facilement le rendre encore plus menaçant.  Chemise détachée révélant le velu de la poitrine.  6 pieds 1 pouce, 235 livres.  Un beu !

 

Matt : Frisant les six pieds aussi, Matt est nettement plus gringalet.  Aucun tatoo.  Visage semi-angélique.  Le genre de gars dont on se demande quel crime il a bien pu commettre.  Un peu plus pis, il aurait l’air « tapette ».  Mais n’exagérons quand même pas. Même habillement évidemment, sauf le matricule qui diffère.  Il lui manque une dent, signe de nombreuses volées qu’il a pu recevoir au bagne.  Ses manches ne sont pas roulées et sa chemise n’a que le bouton du collet de détaché.

 

Berenson Center : Bâtiment à sécurité maximale.  Tout de briques, miradors, barbelés, l’enfer sur Terre, quoi !  Ne pas hésiter à lui donner une impression de gigantisme.  La sirène, relativement en évidence.  OUINNNNNN !

 

 

TEXTE EXPLICATIF DE L’AFFICHE DU SPECTACLE « FRAGMENT D’ÉNERGIE »

(ANNÉE INCONNUE)

Ce spectacle, en particulier, dépeignait la supériorité du mal advenant le cas d’un holocauste atomique…

Le diable contrôlant Jésus par des ficelles indique à quel point il serait immoral de parvenir à de tels gestes…

Des tounes comme « Politique Meurtrière » ou l’« Arrivée de la pensée » démontrent assez bien l’impact moral et matériel de l’éventuel conflit atomique. 

PLEIN-VIDE (ANNÉE INCONNUE)

Lorsque tu te plains, tu te vides.

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Au fond, créant l’arrière-scène, se dresse majestueusement la plateforme de base sur laquelle  se dressent drums et claviers, côté jardin.

Le spectacle s’attaque au flou sujet des restants atomiques.  Sans imposer, il propose à l’aide de sa prose une version catastrophique des reliques inévitables que laisserait derrière lui le règne de la bombe.  Un règne complètement disproportionné tenant compte d’une destruction totale obtenue en si peu de temps.

D’inévitables reliques qu’abandonnerait derrière lui ce règne, cet empire autodestructeur possède les supposés chefs des peuples que les peuples craignent comme la teigne…  L’indivisible individu se fragmente telle une vitre en éclats et à mesure que les débris touchent le sol, les tintements stridents qu’ils émettent rappellent la cervelle de l’homme que la puissance dont il s’arme est la seule qui puisse vaincre l’âme…

L’analyse qu’offre la pièce ne peut toutefois s’attarder qu’aux répercussions écologiques et psychologiques que pourrait occasionner cette réaction en chaîne ; chaîne trouvant ses maillons autant dans la course à l’armement que dans l’incroyable insouciance pouvant porter des hommes vraisemblablement sensés à s’armer au point de pouvoir disposer et ce en n’importe lequel moment de la vie végétale, d’une planète entière…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

La maladie est l’une des choses les plus abstraites pour moi.  Son pouvoir de dévorer le corps, en ne grugeant qu’hyper-lentement le cerveau soumis, me fascine.

L’on dirait que seul le noyau, l’intérieur central de ma masse nerveuse, peut se défendre en se remémorant différents moments de santé et en me prouvant, de temps en temps, qu’il peut encore commander mes membres pour écrire et courir.

En ce moment, je suis victime d’une espèce de grippe cellulaire combinée à de fréquentes convulsions musculaires entraînant avec elles diverses douleurs aussi incongrues qu’intenses, « mal à l’aise dans mes rares rêves »…

Ce mal, que je n’peux combattre avec patience, réussit, grâce à mon empressement, à piquer sauvagement mes différents niveaux d’angoisse pour finalement atteindre le plus haut de leurs, soit « le point dans le dos ».

 

Le point dans le dos

Douleur atroce

J’hurle à l’écho :

« Brise sa force ! »

 

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Malgré ses quatorze naufrages, mon rafiot flotte toujours à la recherche de mers calmes.  La monotonie des vagues qui le bercent m’inflige un profond ennui.  On dirait qu’hésitant à chavirer de nouveau, il s’accroche à une dernière lame de fond…  Glou !

En dépit de ses quatorze accidents, ma voiture roule toujours à la recherche des routes calmes.  La régularité de l’asphalte qui la mène m’inflige un profond ennui.  On dirait qu’hésitant à se frapper à nouveau, elle s’accroche à un dernier garde-fou… Glou !

Voilà donc l’exemple de deux idées semblables circoncises à travers différents mots.  Je n’sais vraiment pas pourquoi je m’attarde à de si insipides phénomènes, mais le fait de l’expliquer suffit à apaiser temporairement le flasque ennui qui me gruge aujourd’hui.  Il est évident que j’aurais pu aborder l’idée différemment.  Au moyen de pensées plus gaies, par exemple…  Mais bien souvent, il est difficile de sonder l’appareillage complexe du cerveau humain.  Ce type de délire, très léger quand même, peut parfois déboucher sur d’extravagantes idées aussi riches les une que les autres.  Ce n’est pas le cas cette fois, mais tant pis ; l’importance d’en avoir tenu compte est tout de même là.

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Les saisons, dans leur tiède stagnation, m’invitent à l’envie d’annuler cette curieuse monotonie que la nature nous impose…  Le calme plat de la neige ; la régularité abrutissante des pneus qui virent du dessous ; les joues rouges, les nez gelés.

 

Se servir de sa tête peut-il encore exister

Quand toute une planète ne cesse de « décader » ?

Ne serait-il plus facile d’enfin se réveiller

Et d’étaler au grand jour tout l’amour qu’on se refuse de donner ?

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE-INCOMPLET)

Jeudi, toute la nuit, ma tête n’avait fait qu’un bond.  Une profonde douleur d’angoisse, logée sous mon omoplate droite, ne cessait de torturer mes muscles.  La sensation était en fait un mélange de point au dos enchaîné de violentes convulsions musculaires qui, naturellement, entraînaient périodiquement chez moi de pénibles séances de mal.

Le tout avait en fait débuté la fin de semaine précédente ; au moment où je fis connaissance avec une jeune dame du nom de Jeanne qui, comme il en est souvent cas pour moi, devait s’avérer par la suite beaucoup plus une erreur qu’un bonheur quelconque…  Une aberration, due à l’unique étendue physique du phénomène et non à son taux habituel de progression réciproque, soit un minimum d’échanges d’idées combiné à des dialogues le moins possible à sens unique… (là, vous devriez être d’accord puisqu’on a tant discuté)…  Cette jeune donzelle n’avait       que dix-huit ans.  Issue d’un milieu parental hyper-sévère, elle ne savait, en tout et partout, que répondre « oui » et « non » et esquisser à l’occasion un sourire à demi-caché pour ainsi masquer le plus réellement possible sa gêne maladive toujours naissante…

La fascination que j’accumulais quotidiennement suite à cette union devait finalement trouver son comble bien peu de temps après qu’elle n’aye vu le jour…  Rapidement, je me fatiguai d’avoir à me buter à ses parents omniprésents et qui, par surcroît, ne cessaient de me traiter de maquereau timbré prêt à enfiler au plus st-crème leur jeune progéniture maintenant mûre pour la profonde pénétration…  Là-dessus, aussi bien dire tout de suite que tant qu’à ça, j’aurais…

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Lorsque le rideau s’écarte, l’œil découvre Almin couché dans son lit d’or.  De larges voiles tombent de son baldaquin et recouvrent, tel un moustiquaire, les bords de la couche étincelante…  Une calme musique enveloppe l’oreille… Du côté jardin, à l’opposé du lit, le mur s’ouvre en partie, défoncé par un module aux formes étrangement cubiques et qui contient Spalme et Glocquô… Ils en sortent…

Hum…

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

The Jirondanjoncelle finds his health through the deep curiosities of the life...  By example : when you see a man pitching many flashes with his fingers and having a furious eye in his right arm...

 

 

 

À LOUIS G. (ANNÉE INCONNUE)

 

Ferland, février

 

Je veux me mettre à expliquer ce désarroi du “laissez-moi seul” !  Oublié…

Comme croire qu’il est facile de définir la solitude lorsque depuis 3 ans, on la résous avec un autre…

Avec toé, j’ai traversé les Francinailles Rocailles ou les Claveau Sauteuses…

Sans ne jamais me guider, tu complétais savamment ma réaction…

Et jamais je n’ai pu cesser d’adorer ce geste.

Mais maintenant, depuis deux mois, j’ai dû apprendre à réagir, seul, sans l’agressivité naturelle que me complétait ta personne…

Comme je suis influençable…

On m’a quasi-forcé à redistribuer les rôles et pourtant, hostie, avec sourire j’acceptais !  Ils me le suggéraient si bien…

Hypocritement, j’ai accepté leur amitié car j’avais besoin de me sentir entouré, observé, de me redécouvrir en moi ce catalyseur que le théâtre m’apporte…

Sans vous, tout semble flou.

Le vide progresse, c’est sûr, mais ne se meuble que de larmes, le soir, lorsque je me rappelle ce que j’oublie…

Ai-je le droit de continuer, de perpétuer malgré l’absence de ta présence l’habile huilage de la roue jirondanjoncellienne ?

Et le peuple, avide de gestes, acceptera-il la progressive parenthèse de…  De quoi au juste, hein ?...

C’est pas que j’freake…  Non.  Mais même les mots fuient ma cervelle quand le temps vient de définir.  Disons que moi, je végète seul ici et que la scène me manque énormément.  Lorsque le peintre pers son meilleur pinceau, interrompt-il pour autant la continuité de sa toile ?  Peut-être préférera-t-il en employer d’autres en attendant de le voir revenir…  D’ailleurs, sans lui, il ne fera que compléter les parties les moins importantes de son œuvre.  Question de ne pas perdre la main, quoi !

J’espère avidement ton retour, gentil pinceau.

 

Jacques

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Le tout fut de situer un autre être dans son problème de migration extérieure à ses amis.  Lui implanter, en plus d’ingénieuses habitudes, le goût de risquer trouver, quelque part ailleurs, l’impossible trait d’humeur quelque part inventé à l’hier de l’encore ou au vrai possible.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

La cloche va bientôt tinter ; ce sera beau de voir cette débandade générale…  Pour l’instant, personne ne bronche.  On entend des souffles incertains, peu profonds et ma mine de crayon qui galope sur ma feuille.

Trois, deux, un…  Non, je me suis trompé ; elle ne sonne pas encore.

Ça y est !  Elle a sonné.

Vous manquez quelque chose, mes amis !

C’est si drôle de voir toutes ces têtes de singes se bousculer pour atteindre la première la sortie.

Les chaises crissent dans un bruit infernal.

Ça y est !  La pièce est vide.

Plus que moi qui écris, une vieille souche tentant de déchiffrer une énigme.

Et Pierre qui s’éloigne, ballotant la tête du nord vers le sud.

Bon !  J’y vais.

J’espère vous revoir bientôt.

 

 

TRAVAIL LITTÉRAIRE (ANNÉE INCONNUE)

L’enfance chancelante que mena Baudelaire ne l’aida certainement pas à vivre comme tout jeune homme normal du XIXe siècle.  Né à Paris d’un père théoriquement stérile (60 ans) et d’une mère dans sa pleine viriginité (26 ans) ; Charles devait s’attendre évidemment au pire du point de vue familial.  Il perd son père à six ans ; sa mère se remarie un an plus tard et Charles se retrouve délaissé du côté maternel.  On le fait interner dès l’âge de sept ans dans un pensionnat de Lyon.  Seul, oublié, complètement habité par l’ennui, il souffre.  Plus tard, il change de collège d’où il sera expulsé avant même la fin de ses études.  Ce regard sur les premières années de ce futur génie, nous laisse donc supposer avec certitude, qu’il ne pourra croître normalement.

Après ces études peu marquées par l’exhaustivité, Baudelaire débute sa vie bohémienne.  Cette période s’échelonnant sur cinq années est surtout marquée par trois étapes.  Premièrement, sa décision de venir poète ; cause de conflit avec son père.  Ensuite, son paternel le fait voyager dans le but de lui changer les idées ; il en résulte une idée fermement ancrée dans la tête de Baudelaire : celle de devenir poète envers et contre tout.  Et finalement son retour affirmatif, majeur, héritier de son père, prêt à tout dépenser.

Baudelaire, face à cette fortune, se retrouve rapidement ruiné et en plus couvert de dettes.  Il se retrouve à l’état d’esclavage sous toutes ses formes ; celle de la maladie incluse.  Les docteurs le condamnent ; on lui donne trente ans tout au plus à vivre.  On le soumet de même au régime des médicaments : pilules d’abord, drogues ensuite.  Plus tard, la boisson viendra s’y joindre.

Tout ce passé, toutes ces situations ne nous amènent pas à croire que Baudelaire aurait pu s’exprimer autrement que comme il l’a fait.  Il devait évidemment démontrer par ce moyen qu’est la littérature ce qu’il ressentait ; ce qui le tourmentait.

Qu’était donc ce tourment, cette ombre ne lâchant jamais prise sur lui ?  Plusieurs réponses s’offrent comme solution à cette question mais l’une d’entre elles démontre particulièrement bien l’état d’âme de Baudelaire : le complexe.

Sous toutes ses formes, le complexe habitait Baudelaire.  À partir de son jeune âge, une grande timidité le fait se sentir moindre, inférieur aux autres.  Tout au long de sa vie, il grandit, se sentant délaissé, persécuté.  Il adore attirer l’attention.  Ses accoutrements excentriques le prouvent bien.  Il ne cesse d’abaisser les autres pour tenter de s’élever.  Une phrase en outre écrite par lui atteste bien ces faits : « Accordez-moi la grâce de produire quelques beaux vers qui me prouvent à moi-même que je ne suis pas le dernier des hommes, que je ne suis pas inférieur à ceux que je méprise. »

Baudelaire est donc maintenant face à un super-titanesque problème : sa dualité avec les choses.  Avant de se lancer plus profondément dans l’explication de cette confrontation à laquelle il faisait face, je crois qu’il serait bon auparavant de donner la signification du mot « dualité ».  La dualité, c’est un dilemme ; le dilemme de l’homme face à un choix.  Plus précisémenet le dilemme de l’homme incapable de choisir.

Que fait donc Baudelaire face à cette impasse ?  Face à cette situation quasi-insoluble ?...  Le suicide ?  Évidemment, il y a pensé, mais Baudelaire n’ose pas.  Sa définition qu’il lui a donnée : « séparation brutale de l’esprit et du corps » ne l’incite surtout pas à s’enlever la vie.  Car Baudelaire ressent à présent la lâcheté s’emparer de lui.  Non, il n’ose pas s’éteindre lui-même.  Pourtant, il se sent toujours aussi épris de cette dualité.  Où chercher maintenant ?  Peut-il y avoir encore une solution possible à part celle du suicide ?

Pour tout homme normalement fécondé, il n’y aurait pas de solution possible.  Mais Baudelaire, lui, avec ce génie fertile résignant en lui en trouva une ; sa théorie de la verticalité et de l’horizontalité.  Du plus simplement, faire de l’impossible une chose concrète.

Qu’est donc cette fameuse théorie baudelairienne ?  Expliquons : le but de cette théorie est de retrouver une unité, si profonde soit-elle, dans un concept autre que la raison.  Faire de l’art une correspondance.  Horizontalement en tombant dans un parallélisme des dimensions (exemple : l’oreille voit et l’œil entend ; verticalement dans un même parallelisme mais d’un niveau différent.  Celui de la conception d’un fait, peu importe la façon dont il est exprimé.

Donc, on peut comprendre que ce qui a fait la grandeur de Baudelaire, c’est son courage qu’il eût pour aider ses frères à se tirer du désespoir où lui-même il vivait.  La simplicité de sa langue, la densité et la nouveauté de ses images, la suggestion par le symbole et la musique du vers, et l’évocation par l’utilisation des sensations contribuèrent à faire de Baudelaire ce génie tant attendu par les générations passées.

 

 

 

EN QUOI LE HÉROS DE WESTERN EST-IL UNE CONTINUITÉ DE « PREUX CHEVALIER » 

(ANNÉE INCONNUE)

Aux premiers abords, ce qui frappe comme ressemblance entre les deux personnages, c’est cette sensation de puissance et de force que laisse au spectateur le héros soit de western, soit chevaleresque.  Rien n’arrête le héros ; aucun combat, aucun obstacle susceptible de détruire à lui seul plus de 5 hommes.  L’amour identique des deux héros envers le cheval, ce brave et fidèle compagnon d’aventures toujours prêt à conduire l’un ou l’autre héros là où le destin l’appelle.  Ce culte du costume aussi ; le cowboy à bottes à éperons, à pistolet d’un chrome étincelant, le chapeau, la chemise ; et le chevalier à l’armure de tôle de premier choix, à l’épée rayonnante, prête à trancher n’importe lequel barbare en deux.  Chaque partie du costume devient objet d’un culte délirant, pour ne pas dire « exagéré ».

Les situations dans lesquelles on plonge les deux héros apportent, elles aussi, une similarité assez frappante.  On se plaît à leur attribuer des exploits nobles, touchants et si loyaux.  Le cowboy qui sauve le train en flammes ou encore qui met en déroute les furieux cambrioleurs de banques et de diligences.  Et ce preux chevalier qui sauve d’un destin atroce la brave petite puérile princesse prisonnière du méchant baron de Carnevac.  Ou encore lorsque les furieux barbares s’en prennent au royaume et que le chevalier, au nom de la juste, va jusqu’à donner sa vie pour la rayonnance du peuple.

En fait, les conditions de vie des deux héros sont identiques.  Un destin instable, criblé de situations périlleuses dont une seule personne peut venir à bout, soit le cowboy ou le chevalier.

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Ce serait, n’osé-je le dire, plénitude accablante pour vos règnes féériques.  Ce serait, osé-je le dire, chose dure à capter pour vos poils diaboliques.

Vous verriez, évidentes, les charognes qui vous rôdent, qui vous tracent titanique.

Vous verriez que vos rôles dans ces soupes sont de loin super-plus, magnifiques !!!

(Il s’énerve) Je raye alors de mon profond moi-même cette charte prostituée.  Je crie, grâce au vide cellulaire, une inflammation vaporeuse qui portera sous son sein ces centaines de ces sages alcooliques.  Je cesse par ce fait de mordre la posture agaçante de vos jambes écartées, mère monnaie.  Je détruis à mon insu l’insulte que je trace à chacun de mes pas.

(Il abuse) Ah ! et puis foque les phoques !

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Depuis des siècles, l’homme pense, croit et réfléchit.  Au fil des années, il a su amener sa cervelle à fonctionner selon la pulsation imposée par son lui-même.  Qu’à apporter ce pouls régulier à une sorte d’infinité dite « vitale » et l’essentiel constituant l’homme. 

Dans la troisième épreuve, je voudrais abolir le mythe du sourire spectaculaire que l’homme s’est imposé ; qu’il doit comprendre, connaître et posséder le pourquoi du comment des choses face à un problème évident dans lequel il se plante lui-même.

Je voudrais, pour cette troisième épreuve, expliquer un peu plus ce qu’est l’étudiant que nous formons.  Ce maudit contexte scolaire que l’on exploite, sketch après sketch, pièce après pièce, mais dans un climat détendu, explicite et sans mensonge les raisons de l’état de l’époque ; ce climat permettant tout en réfléchissant une découverte quasi-exhaustive des angles prépondérants de ce triangle dans lequel nous sommes inévitablement impliqués.

 

Variante du paragraphe précédent

Bien sûr, l’explication sera dressée non pas dans les cadres de scolarité imposantes et lourdes à encaisser, mais dans un climat détendu, explicite où il sera aisé d’admettre les pourquoi de l’état d’une époque.

 

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Le monde n’a pas été créé pour gagner de l’argent !

Le monde, y a été créé pour s’aimer !

Vous comprendrez donc jamais ça, tabarnac ?

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Maintenant, je te confie mon été.

Un été de soleil et d’ennui, tantôt tard, tantôt tôt.  Les voyages se sont bornés à la belle province qui s’enlaidit de jour en jour

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Souvent, on aime bien se faire dire

Que l’on est au-dessus des moyennes du dessous.

Mais attention :

« Tout ce qui monte redescend. »

 

J’en suis une victime et je n’ai plus la force de remonter.  On m’a volé ma force et je sais malheureusement qui l’a.  Je sais bien que je dois lui reprendre mais ses moyens défensifs sont si sûrs, si peu tangibles qu’il me coûte de lui prendre ce qu’il m’a pris.

Ses armes sont sa plume à dessins et ses gravures qui le projettent, pour la plupart du temps, bien au-dessus de la moyenne du dessous.

Il sait dire et parler.  Il aime bien discuter de maintes choses inutiles.

 

Il devrait maintenant se reconnaître.

Tu te reconnais maintenant, petit salaud !

Tu sais que malgré ta petitesse

Que malgré tes périphrases, tu ne peux plus me toucher.

Je suis trop bas devant les autres ;

Je suis trop bas face à toi.

 

Mais attention !  Le rideau s’ouvrira bientôt

Et elle sera là pour m’écouter ;

Et c’est là que je lui crierai mes raisons

Et c’est là que j’expliquerai les pourquoi des comment.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

J’avais envie de vous causer et la distance s’y refusant, je décidai d’écrire.

On a terminé le ménage de la grange.  Tous les machins sont assemblés, bien entassés dans leur coin-coin.  On a brûlé le vieux foin, rangé de bon pour la venue du mouton, essayé quelques labours qui se sont drôlement terminés pour le petit-Bi...

La panthère noire refuse…

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Salut petite inconnue qu’encore je cherche et espère même toujours...

Je viens m’étendre à l’ombre de l’aile que tu possèdes au pare-soleil de tes jours…

Et dans l’affil de ta chev’lure je tisserai sans reconnaître la toile agile dont je rêvais si loin

de toi.

Je t’aime.

 

Jacques

 

 

GET’EM OUT BY FRIDAY-TRADUCTION (ANNÉE INCONNUE)

John Pebble of Styx Entreprises

Faites-les sortir pour vendredi

Vous ne serez pas payé tant que le dernier ne sera pas parti

Faites-les sortir pour vendredi

C’est important que l’on respecte l’horaire

Il n’est pas question de délai

 

Mark Hall-The Winkler (représentant)

Je représente une compagnie d’hommes d’affaires

Qui dernièrement s’intéressaient à cette maison

Et aux autres sur cette route

Dans l’intérêt de l’humanité nous avons trouvé

Un meilleur endroit à habiter pour nous

 

Mrs Barrow (la locataire)

Ah non !  Ça, je ne peux pas y croire

Oh ! Mary, ils nous demandent de partir

 

 

John Pebble

Faites les sortir pour vendredi

Et si ce n’est pas facile

Écrasez les encore un peu et nos problèmes vont vite disparaître

 

Mrs Barrow

Après tout ce temps, ils nous demandent de partir

Et je leur ai dit qu’on pourrait payer le loyer 2 fois plus cher

Je ne sais pas pourquoi ça a l’air si drôle de voir

Qu’ils vont faire plus d’argent

Le représentant a encore appelé, il est venu ici ce matin

Avec 400 livres et une photo de l’endroit qu’il nous réserve

Un block plat avec chauffage central, je pense qu’on va trouver ça dur

 

Mr. Pebble

Maintenant on les a eus !

J’ai toujours dit que l’argent sonnant pouvait tout arranger

Le travail peut être transformé en récompense

Quand un éclair d’intuition est un cadeau qui aide à se dépasser

 

M. Hall (représentant)

Ici nous sommes dans la nouvelle partie de la ville de Harlow

Avez-vous reconnu notre block à travers le carré par là-bas ?

Malheureusement, depuis la dernière fois que nous avons discuté

Nous avons dû augmenter le prix du loyer juste un peu

 

Mrs.  Barrow

Oh non !  Ça, je ne peux pas le croire

Oh! Mary, et nous avons accepté de déménager.

 

(Un bout de temps après)

 

Nouvelles de T.V.

Ceci est une annonce du Contrôle Génétique

C’est de mon triste devoir de vous informer

D’une restriction de 4 pieds sur la hauteur

Du corps humain

 

Extrait d’une conversation de Joe

J’ai entendu dire que la direction du Contrôle Génétique

Avait acheté toutes les propriétés qui ont été vendues

(Illisible), c’est très risqué, ils sont courageux

Ils ont dit aussi que les gens vont être moins grands

Ils peuvent rentrer deux fois plus nombreux

Dans le même building

(Ils disent que c’est bien)

À commencer par les locataires de Harlow

Dans l’intérêt de l’humanité, ils leur ont dit qu’ils devaient partir

 

John Pebble of U.B.I.

Je pense que je viens de faire une bonne affaire

Une vingtaine de propriétés qu’on va acheter à 4

Et vendre à 34

Quelques-unes sont encore inhabitées

 

Mark Hall

C’est le temps d’envoyer le représentant les voir

Il va avoir à travailler plus fort

 

Memo

Avec une terre en main

Vous allez être heureux sur Terre

Alors investissez dans l’église

Pour gagner votre ciel

 

 

 

SPLEEN ET IDÉAL (ANNÉE INCONNUE)

Il vous arrivera d’échanger contre une paire d’idées l’une ou l’autre opinion qu’à jamais vous n’changez !  Vouloir pénétrer de son aigle dorsal le plus haut du plus fort et lui imposer la règle ; être sur un couvercle…  Charles ouvre dans la circonstance pour surgir à l’instance de l’ennui, à l’œil bas de l’humeur : à l’idée que quelqu’un peut savoir autre chose qu’on ne sait pas…

Il n’avait pas l’envie de se dire ; et pourtant les autres l’ont regardé…  Comme si l’azur qu’il promettait ne suffisait à l’entourage qui, depuis longtemps, n’avait cessé de l’aimer…  L’homme averti qui savait offrir son savoir d’aimer, de connaître l’autre chose…  Baudelaire Charles…  L’être justifié frôlant d’une plume plus qu’abordable, le songe et le plus qu’imposé…

Pour peut-être saisir-comprendre l’idée d’un Charles au jeune âge menacé par la mort et d’un père et d’un autre remarié…  Comment l’humeur normale aurait-elle pu se douter d’une normale existence ?...  L’œuvre l’envahit…  Sans qu’lui-même ne s’en doute, la variante évidente dans sa tête s’est glissée, comme si le songe lui avait parlé…

(Une sale gang de sales l’énervèrent.)

L’union qu’ils avaient faite était l’œuvre d’un maître.  L’homme et la femme d’un produit surprenant conduisirent de leur force en un sperme glacé, le génie, l’un peu plus moins salaud : Charles Baudelaire.

À la quarante-septième année, il enfanta lui-même une fable…  Doux délire qu’en son nom il proposa…  Comme une espèce d’œuvre faite mais jamais terminée, au rythme d’une ou des fleurs maladives, celles du mal.

« Il fallait d’abord ignorer la foule », cria-t-il à Linsfull, l’île au toit de plein de ciel.  « Mon ouvrage s’ouvrira en cinq pièces.  Celle du spleen, celle de l’idéal et quatre autres mouvements (tous aussi).

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Le théâtre Jirondanjoncelle ne veut pas créer la faim de l’œil, mais au contraire lui proposer la nourriture qui s’ingurgite au fil du jeu des comédiens…

« Le technicien et la balance », la cinquième force théâtrale issue de l’énergie jirondanjoncellienne, se plaît à revêtir l’alliage de la rime et des mots proposés.  Elle est aussi, pour notre nous-même, la vue d’avance d’une perfection au presqu’atteinte.

Voyez-vous, nous avions l’envie d’avoir l’envie, quelque chose, et la dite source se retrouva dans le Rang Double de Ferland, où nous sommes ; où nous désirerions rester naturellement.

Déjà un an et la moitié d’une autre année nous ont prouvé que le théâtre n’est pas pour nous qu’un amusement.

Il est la source de l’énergie

Que samedi soir nous étalerons

Devant vos yeux et vos oreilles

Ce sous le ciel de Ferland

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

« Oui, oui, oui, oui », dit-il d’un ton ivre éprouvé.

À vos souches émouvantes étaient nées mes espérantes allonges.  Je croyais à la scollaffre, doux jardin au Verlaine, arcajolle de l’effroyable amour, saccarelle de l’ivresse.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Thème VIII : La nuit était belle.  Et quelqu’étoiles se radotaient les faits et gestes de l’humain.  L’être de chair, celui qui joint, en plus de maux et de mots.  La môsite facilité d’la possession.  Du « j’peux garder pas mal longtemps ».  Mais qu’arrive-t-il lorsque la possession peut posséder le possesseur.  Lorsqu’il a et ce qu’il a l’a ?

Disgrâce de 2 personnes (Moi, réaction, Piero, alliance, canisse).

 

Thème II : C’est à faire fondre son opinion que l’on constate que la chaleur porte influence ; qu’on peut même voir ; que de traduire est de capter le principal de l’idée ; la mettre à l’horizontal, l’apaiser et lui faire dire, intermédiée de notre tête, ce qu’elle a envie de devenir.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Car les demeures de l’infini se démènent pour attirer les nouvelles âmes qui se promènent.  Sachant qu’un jour elles auront faim… soif… Le jour où on les coiffera d’un épitaphe.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

 Ouverture…  Pontificat.  Impression sonore d’extra-terrestre.  Homme de caverne.

Il sort, suivant des yeux le son qui s’éloigne…  Muni d’une anxieuse profondeur, il dépénètre de son socle, formant corps au côté de masse, et élance proverbialement ses premières strophes.

Comme si j’interrogeais le contraire de « solide ».

Liquide ?

Non, puisqu’il peut être gazeux ; venons-en a un phénomène plus large, plus admissible en tout cas…

Ouais !  Le mou... L’éponge imbibée d’eau, la phalle foulle d’air, cette éponge trempée qui n’attend que l’air en ai chassé l’eau pour recôtoyer à nouveau l’aspect rigide de son être.

Je n’crois pas qu’il faille connaître d’où débute le cycle.

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Deux mille ans après la venue du Jésus, bien avant que l’esprit eût maîtrisé le corps de l’homme.

Vers la 90e année du 20e siècle terrestre,  bien avant que l’esprit eût maîtrisé le corps de l’homme, l’atome se fragmenta de lui-même en milliards de particules pour ainsi créer la mort « holocaussale » de la race humaine.

Deux mille ans après la popularisation du crucifix, bien avant que l’âme n’eut maîtrisé le corps de l’homme, l’atome se fragmenta, sur les conseils de leur créateur, de même pour ainsi provoquer créer la mort « holocaussale » des espèces terrestres.  Ce que vous propose ce théâtral moment est une profonde réflexion méditative gravitant.

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Qu’aurons-nous à retravailler si notre corps n’existe plus ?

L’éternelle méditation.  Dans une étreintante symbiose s’effectuera l’appui de chaque esprit terrestre avec l’ensemble de l’univers pour la prochaine décade.

 

 

 

 

SANS TITRE (20 NOVEMBRE, ANNÉE INCONNUE)

 

Et bien bonjour.

Je constate pour une première fois dans ma vie comment il est difficile de modeler un mot de remerciement.  En tout cas, petite Esthewawa, vous avez, à en juger la qualité de vos travaux, un avenir prolifique d’installé devant vous.

Ce que je tiens à vous exprimer, c’est la joie tourbillonnante qui s’est enroulée autour de mon moi à la vue de ce magnifiveilleux colliôton que vous avez construit d’une manière si extraordinaire ; car c’est vraiment véritablement vrai qu’il est extra hors de l’ordinaire…

Ça fait que je te remercie ben ben ben gros pis je te remercie énormément gros.

En tout cas, chus pas mal content ; ouais…  pas mal.  Pis en attendant de te revoir, je te laisse une petite poésie pour tes longs soirs d’hivers.

 

P.S. : lou lou lou lou lou

 

Je marchais tranquillement

Sur leur trottoir armé

Quand soudain

Ma tête dégringola.

On me cria que c’était la Loi du Barbare

De détruire ce qu’il ne pouvait saisir,

Ce qu’il ne pouvait comprendre

Assimiler.

Mais peut-être que l’homme

N’était qu’un gros barbare

Comparé aux êtres

Qui, eux, comprenaient l’indéfini

L’inaudissable

-C’est pourquoi tout retransverse

Tout pourridiaille

Tout rétrécit

Et au bout

Tout au bout de l’arène

Une fleur

Piétinée…

 

 

 

 

ENCHEVÊTREMENT DOULOUREUX (ANNÉE INCONNUE)

Tu sais, vieille branche, j’en ai marre de me tordre et retordre au profit du je n’sais quoi qui me pousse à ronger des pitances…  Cet esprit que nous avions su faire naître entre nos positions semblait pourtant avantager le futurisme ; mais Hélas !...  Toutes ces montagnes et tous ces cris morbides, fatigants ont créé en moi la platitude vicieuse que je craignais tant…

Je suis las de me battre ; je n’veux plus m’esquisser, me soumettre à leurs poses agaçantes…

J’espérais retrouver en vous ce calme magnifique ; j’espérais un Louis sympathique qui aurait, sans répit, fabriqué l’atmosphère, l’ethnosphère.

Mais…

Je rêvais aussi à une Line comprise ; surprenant et les choses et les fausses morsures.

Mais…

J’étais même allé visiter la cyprine Francine qui devait non pas croire vider, mais emplir magiquement mon saccage tant fiévreux…

Tu sais, vieille pipe, la fatigue m’emporte ; je me sens engourdi ; ruiné par ces pontes-attaches qui sifflotent et virevoltent au-dessus de ma têtation.

Je ne sais point redire l’amitié surprenante que je misais en vous ; j’étamais d’une main la mauvaise gerçure qu’engendraient en vous les mauvaises langues.

Je vous voyais croître fertilement comme  blé en semence ; comme feuille en débranche…

Je m’étais déjà installé.  Je voyais mal, flou, pertubément…  J’imaginais fortement les choses…  Des unions, des rires, des amours.

Je voyais bien…

J’espérais croire…

Mais ne cherchez pas à comprendre.

Je dépressionne, réquisitionne, perquisitionne.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Fonçant le songe immuable, fonçant dans cette…

Où cesseront celles de même que resteront premiers…

Ouvrant largement…

Ouvrant largement sa paume droite, Gury retira du fond profond de ses entrailles l’unique restitution qu’il espérait posant tel geste…

L’identification personnelle de son personnage lui restait à lui-même une sinueuse indifférence…

À quoi, se disait-il, contribuerait l’identification exacte de mon idiote identification…

Vrouft, vomit-il.

Rien ne saura plus m’imprégner ; je chie crache et clame sur toute forme vivante et indifférente ayant droit à la plus folle imagination humaine.  Je n’exclame plus la folle liberté qui, depuis quatre mille huit cent-quatre années lumières m’habitent.

Quand même ma marde refusera de se poser à l’insu de vos mornes mains mordues l’unique gestation produite se référera à vous ; plus point que rien à moi.

SANS NOM (ANNÉE INCONNUE)

Aux fontes fragiles de l’espace, se retranscrivent mes soupçons pour toi.  Aux larges côtes, dignes d’émulsions et de spasmes onvralgiques, s’annoncent, sans mots dire, les frêles esquisses de ton toi.

Tu t’approches…  Je te vois.

Louffle flagelle l’épiderme de ta sève ; sans fonction, sans gémir moindre son, tu abaisses l’oculaire qui te guide dans tes pas et acceptes, voilà.  Quand au souffle détendu de tes lèvres se rapproche mon impact possible, je jubile étrangement comme soupe qu’on renverse en eau chaude ; je me sens transvidé mais le contact éprouvé se marie au moi-même ; je pénètre, comme c’est tout…

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Comme une laine agile, j’appris ce matin l’espoir quasi-possible de l’édification tant recherchée du toit paisiblement tangible.  Quelle odeur m’aspergea à l’annonce dudit dirigeable.  C’est comme s’apercevoir que tout d’un coup on est moins seul et que tout espoir est et sera toujours permis en ce monde de moins en moins pourri à mes pauvres yeux yiules.

L’offre se limita à l’attendre de l’espoir…  J’amaisse s’abaissa, craignant recevoir sur sa fiole d’audace, objet propre à la destruction de sa supposée réflexion.  Elle n’éclata d’aucun sens ; aucune polypholie, aucun malaise, qu’un engourdissement gras et agile ne laissant au plus profond de lui-même que cet inexplicable goût de catapulter d’un orageux bond phosphorescent les cultes mystiques, totaux ou partiellement établis…

Qu’une Ouffle était permise ; qu’un son n’était conçu…

Je t’admirationne tellement, femme discrète, que t’offrir en plus de mes maux mes joies ne serait que vain.  Laisse tomber, Jeanne, tu t’esmiffres.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Les possibilités tendent à zéro…  En tant qu’observateur, je n’décèle aucun signe communicatif…  Comme si tous ces gens n’avaient qu’un but commun : s’en aller avec en poche un maximum de passé…  Le non-oubli…  Même ma moitié n’est qu’un quart…  Je n’la ressens pratiquement plus…  Une lourde tâche…  Un obsédant quotidien…  Il me faut capter un nouveau revitalisant puisque tu t’éloignes, puisque ton corps s’hebdomarise…  J’ai failli quelquefois (à l’occasion) clamer une non-survivance !  Une impossibilité face au manque de jus.  Mais comme une conscience (illisible) envie de survivre, m’hurler « non » !  L’attente….

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Peu importe le lieu :

-T’as trouvé un sens à ta vie ?

-Mets en !  En ligne droite, on fonce…

-Mais un jour j’irai trop loin pour moi…

 

Une fille unique tu enfanteras

Fragment d’ovaire dans l’univers

Et puis pour belle, en fait unique

Parsemée dans les Amériques

 

-Les Amériques ?

-C’est ce que me disent les arcanes.

-Mais c’est quoi, les Amériques ?  Une forêt ?

-L’espace au bout des océans.

-Mais au bout de la mer, c’est le néant

 

On va les mettre au monde, les nourrir, les habiller, les soigner, les éduquer, on va s’organiser pour qu’ils puissent se déplacer, discuter entre eux.

 

 

 

LETTRE À MON AMI, MON FRÈRE (ANNÉE INCONNUE)

Un ruisseau nous séparait lorsque nous étions petits.  Je me souviens de notre rencontre.  Tu étais à pêcher des perles dans le jardin de la vie.  Je ramassais les fruits de l’arbre de la paix.  Un papillon s’amusait à te chatouiller l’oreille.  Un papillon s’amusait à se poser sur ma main.  Je pris la volée et c’est alors que nous avons regardé notre lien qui nous a présenté l’un à l’autre.

Je me souviens.  J’avais l’âge de raison.  Tu avais l’âge de résonner.

 

 

 

SOIR DE VIN, DÉCEMBRE (ANNÉE INCONNUE)

J’ai déjà ressenti en ouvrant une lettre le doux parfum de celle qui l’avait écrite…  De main de plume, naissant sur la feuille, raide, en attente de phrase.  Un goût avec avances lentes, sûres, incommodes ; goût capable d’éveiller en osier les trames agiles du passé ; celles loin ; celles qui déjà dorment malgré le tumulte des airs bourrés d’acides névralgifs, prêts à mordre.

J’ai laissé traîner les notes que je devais transcrire ce matin.  Elles ont profité de cette attente inespérée pour s’avaler et ainsi disparaître.  À mon réveil vaguait dans l’air une odeur de digestion.  La table, stable, me révéla le draine ; cet inévitable arrêt de geste.  Trois larmes longèrent ma joue et s’évanouirent près de mon nez.  Une langue agile et rapide se chargea de les éliminer définitivement.

Et j’en suis là, à deviner mes réactions, à terminer ce magnifique local dans lequel nous évoluerons bientôt… je l’espère.

Les allumettes craquent et le joint git, inerte, prêt à être consumé.  Il éveillera quatorze cellules qui, cette nuit, ne devaient pas agir.  Après leur propulsion, lorsqu’elles auront atteint le vide, elles dormiront à jamais ; je leur souhaite.

Si tu repasses un jour, alors que la brume…

La pluie et le rivage, violent, prêt à nous mouiller les pieds.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Fixant désespérément la monotonie des flocons de neige, deux êtres s’ennuient auprès de la fenêtre d’une taverne.  De l’intérieur, ils scrutent en leur tête les raisons de leur existence dense, mais si facile à compiler.  Par habitude, ils monnaient l’apparition d’un second flacon de jus et se regardent.  Ils cherchaient à découvrir ce qui pourrait les faire sourire, ou du moins espérer arriver à quelque chose.

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Du fond du rang de St-Gabriel de Ferland, la Jirondanjoncelle façonne calmement depuis deux ans son anormale éclosion.  Présentement elle se présente au stade de tige stable, solide, gagnant nerveusement le sommet de sa course où la calice étalera son doux pistil.  Quand le pollen de l’étamine de ce dernier s’envolera vers d’autres fleurs, le but atteint sera en nous comme le germe s’ra en ces fleurs.

Qu’a-t-il fallu pour nous convaincre qu’il existait, ce supposé but ?...  Une détermination ?  Même les soldats l’ont.  Il nous a fallu créer notre jardin, y semer nos idées et les observer germer patiemment, au détriment de la critique souvent destructrice, trompeuse.

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Lorsque nous aurons déterminé ce qu’est la Jirondanjoncelle, à quoi bon servira-t-il de l’expliquer?...  Car nos spectacles ne sont que la lente définition, lourde progression vers la compréhensibilité totale de la part d’un public qui peut-être ne peut admettre nos idées, le choc de l’expulsion que l’on émet.  Lorsqu’ils seront prêts à recevoir les quelques ondes que nous daignons propulser les soirs de show, quand tout va bien…  Peut-être qu’enfin la Jirondajoncelle sera-t-elle perçue telle une image qui nous dépeint que tout va bien…  Que tout est probablement possible…

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Élevant ses bras en signe de quête, il ne put remarquer qu’à ses pieds, lentement, la terre craquelait.  D’une crevasse disparate, jusqu’à présent ignorée, jaillirent en rangées doubles d’innommables ondes aux putréfactes réactions.  Ce n’est que lorsqu’elles atteignirent son nez qu’il réalisa que pour la célébration des joies terrestres, ce n’était pas le bon endroit.  Il rebroussa les bras et reprit, en dépit de sa peine, le chemin mystérieux.

Sa marche l’amena près d’une source, sèche, et sans aucun attrait.  La raison pour laquelle il s’y arrêta m’échappe…  De ses mains, il creuse nerveusement le centre du lit du cours d’eau asséché et y déposa, après les avoir cueillies, quatorze branches de bouleau.  De nul feuillage, les branches recouvraient avec difficulté le fond du trou ; d’ailleurs, les avait-il déposées là dans ce but ?...  Ou n’était-ce qu’un caprice ?...

 

Quand la source reçut l’eau de nouveau, on pouvait distinguer en l’aval de sa course, près du bois de bouleau, un nouveau niveau d’eau.  L’onde y semblait nettement plus profonde et une touffe de bouleaux ébranchés révélait nettement qu’on s’y était promené.  En s’approchant au raz du bord de la source, on remarquait facilement qu’au fond, là où semblait vivre un tourbillon, flottait allègrement une algue jusqu’à présent jamais vue…  D’ailleurs, ce qui portait à l’observer était cette forme d’allure humaine qu’elle revêtait ; canine si quelque chose la retenait en place… 

 

 

 

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Même s’ils semblent constituer une organisation indépendante, les membres de la Jirondanjoncelle créent la normalisation de leur mouvement en additionnant à ces derniers la touche finale, complémentaire, essentielle à tout œuvre se vouant au perfectionnisme.

 

-Cuve Cubique (Louis Gaudreault, Louis Boivin, Yvan Bolduc, Jacques Bolduc, Yvon Tremblay, Richard Boivin, Piero Gilbert, Marc Tremblay, Charles Boivin)

-Sous la paillasse du paillasson

-Les chroniques du docteur Lèchefer

-Rubicon Wollonstrô

-Le technicien et la balance

-L’option chimère

- L’instable humeur (Louis Gaudreault, Jacques Bolmon, Louis Boivin, Richard Boivin,  Yvan Bolduc, Marc Tremblay, Piero Gilbert, Charles Boivin)

 

Sifflant un air de réjouissance

Je m’aperçois d’une illusion

Ce genre d’espèce de déficience

Quand vient le temps de la moisson

 

 

 

RÉACTION 1 (ANNÉE INCONNUE)

Technicien… 23 juin… Boileau

 

Salut Louis !

L’atmosphère se fait tendue… 

On vient de jouer « Le Technicien ».  Chu su l’acide.  Y a rien d’drôle…  Les gens sont lourds… 

Le show fut bizarre…  Mais présentement j’trippe sur les relations mondaines très refermées, vu le non-nombre.

Des gens NÉERDANTALAIS.

Avec une pensée de fond de grotte.

De grotesques abcès…

Pourquoi visent-ils ?

Je m’explique mal c’la…

J’manque de jus.

C’est sûr que c’est du ben bon monde mais imagine un peu si toé tu faisais un show tout seul…  Quelles seraient tes réactions…  Je pense aussi un peu à Robert Fripp qui disait qu’il quittait King Crimson parc’que ces gars avec qui qui jouait étaient toujours ben saouls…  Cette impression de délire qui personnifie les gens du peuple ; ceux qui une fois ont offert se croient ailleurs ; situés vers leurs cris, signe de leur gloire et leur coup de pied à terre, signe de l’imposition quasi-parasitaire ; celle qui vide les pots de confitures…

C’est peut-être aussi ma pensée qui déraisonne.  Mon crayon hurle et c’est à toi, je crois, qu’il désire s’adresser…  Il ne regarde plus la droiture des mots…  Ni la stabilité de l’écriture.

Ils pourraient rester là, des heures, à déraisonner…

Pourtant, ils se coucheront.  Et au moment où leur esprit croisera leur marbre, leurs glands se déracineront et dans une éjaculation précoce.

Ils chieront leur mixture.

Leur vie, s’tie.

 

Jacques

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Salut Sylvie.

Je t’ai laissée flétrie dans ton mielleux sommeil.

Je te laisse une poffe parce que je t’aime.

 

Jacques (l’antibiotisé)

 

 

RESTEZ PROPRE (ANNÉE INCONNUE)

Lorsque « je » mourra, ne l’ensevelissez point ; à quoi bon stériliser une terre qui peut être fertiliserait bien d’autres germes ?

Lorsque « je » s’éteindra, ne l’inhumez point ; son traumatisme se contrôle au contact de l’air vicié.

Quand ses poumons s’affaisseront, laissez-les s’aplatir ; l’ondulement encombrant qu’ils formaient ne procurait point plus que rien.

Quand ses lèvres s’assècheront, dédaignez leur moisissure ; les croisements infructueux qu’elles posèrent, sans importance, se désintégrèrent.

Le jour où « je » mourra, vous le laisserez vivre…

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Ce message, ce colis, cette chose pour vous souhaiter la bonne été.  Profitez-en de cet été ; à bas, les maisons trop cloîtrées !

Il fait si beau, ciboulô !  Tout est chaleur !  C’est ça la vie, hostie !  Du soleil, du soleil et du soleil.

Ouais !  Le théâtre roule à merveille.

La guitare s’en vient.  Elle m’annonce ce nouvel attestement de droit ; vous devez mordre, me dit-elle.  Vous devez jouer !

Pour moi, avec franchise, je coulerai tous mes efforts à l’élaboration d’un gîte pour le prochain hiver.  Nous avons décidé, moi et Louis et Francine et Line, de travailler cet été afin de nous obtenir un certain confort.

Y arriverons-nous ?

J’ose espérer.

Semblez-vous macadam ou de caoutchouc, la tête close à 100 milles à l’heure sur la 11.  Immobilité flagrante  de Jean-Pierre.  Le fer, lent soit-il, nous voir et mordre et juger l’autrui !

Tous les fardeaux m’incommodent.

 

 

 

 

 

DÉROULEMENT DE SPECTACLE (ANNÉE INCONNUE)

(6 minutes) Ouverture

(6 minutes) Pontificat : Passe de l’homme radié ; introduction de l’extra-terrestre.

Le naufragé d’Orion : Version de la végétation (transe de l’extraterrestre)

(1 minute) Pulsar

(10 minutes) Destin oblique : Champignon explosif

(1 minute) La méduse : (Orages, éclairs) ; explication de l’absence et de l’arrivée du bon Dieu

(7 minutes) La vraie version de la Genèse : Arrivée fortuite du créateur

(2 minutes) Vaudoo : Arrivée du diable et assassinat du bon Dieu ; explanation d’un contrôle diabolique (enchaînement sur l’intro de pièce avec phraséologie adéquate)

(2 minutes) Piège : Délire solo ; crucifixion dorsale de la force maléfique ; mort en feedback

Mensonge humain : Arrivée de Jacques

L’arrivée de la pensée : Rideau…

 

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

J’avironne toujours la Jirondanjoncelle, depuis l’existence de cette trouble stable, 5 shows hantèrent les salles.

                                       -Sous la paillasse du paillasson

                                       -Les chroniques du Docteur Lèchefer

                                       -Rubicon Wollonstrô

                                       -La cuve cubique

                                       -Le technicien et la balance

Cinq énergies très plaisantes, souvent culbutées, qu’à l’occasion nous firent rire, ou craquer en pleurs.

 

L’urne épaisse

Péta sous le choc impressionnant

Du sol.

Et l’une et l’autre

Cédèrent

Puisque le poids n’existait plus.

 

On joue le dernier morceau de mon moi-même, le 19 septembre au soir à Ch’coutimi.

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Au déploiement du cache-scène, l’œil aperçoit, sous une quasi-obscurité, l’immense boussole (rose des vents) centrée au fond d’la scène…  Embaumée de musique, la salle à la gauche du plateau, l’arrivée du technicien, sournoise, dépeignant par l’influence musicale la tension proposée d’un geste fort et prochain…

Ses quelques pas s’éteignent face à la boussole où il se fixe, dos à la salle ; il empoigne son arme, baillonnettée et sans geste long d’épaulation, il fonce et transperce la boussole…

À son impact, jaillissent de la boussole et vont se choir contre le sol des miettes-graines de folles couleurs, ce sont les graines de boussole…

 

***

 

Le peuple espérait depuis longtemps la nourriture facilement cueillie…  Et voilà qu’avant qu’l’espoir ne s’estompe, s’ouvre sous leurs yeux, tombée du ciel, une nouvelle nourriture.

Les graines de boussole…

Les éléphants, fous de joie, ne prirent pas longtemps à constater le goût, la forme, voire même l’allure parfois subtile de ce fruit frais à fraîche allure…  Ils ne pouvaient se faire une idée que pour une fois ils mangeaient bien…  Tout à coup, ils n’eurent plus faim ; et pourtant, les graines étaient encore nombreuses….

Devant le siège vraiment dressé de l’évidence, les éléphants ne paniquèrent et ramassèrent à l’aide de feuilles à large allure les miettes-graines encore restantes de la boussole qu’ils ne pouvaient plus avaler.

TRADUCTION DE LA PIÈCE « FIRTH OF FIFTH » DE GENESIS (ANNÉE INCONNUE)

Le chemin est clair

Cependant pas un œil ne peut voir

La marche s’est arrêtée bien avant

Alors avec les vieux et les hommes

Les moutons demeurent en dedans de leurs plumes

Même si plusieurs fois ils ont vu le chemin pour partir

 

Il va, majestueux

Passé les maisons des hommes

Ne se soucie pas, ou regarde avec joie

Pour voir, réfléchis par là ;

Les arbres, le ciel, le lys agréable

La scène de la mort ment juste au-dessous

 

La montagne coupe la vue de la ville

Comme un cancer grossi, enlevé avec adresse

Laisse-le être révélé

Une chute d’eau (madrigal)

Une terre en mer, sa symphonie

« Undinal » chansons

Pressent les pêcheurs

Jusqu’à ce qu’ils soient leurrés par les chants de sirènes

Maintenant comme la rivière se déverse dans la mer

Neptune a réclamé une autre âme

Alors avec les dieux et les hommes

Les moutons demeurent en dedans de leurs plumes

Jusqu’à ce que le berger conduise son troupeau ailleurs

 

Les sables du temps sont envahis

Par la rivière du constant changement

 

Les pages dispersées d’un livre sur la mer

Une forme moulée par un nuage

 

 

 

 

 

TRADUCTION DE LA PIÈCE « TIME TABLE » PAR GENESIS (ANNÉE INCONNUE)

Une table de chêne, gravée

Lit un conte

Du temps où les rois et les reines

Buvaient du vin dans des coupes d’or

Et les vaillants conduisaient leurs dames

De leurs chambres au bosquet frais

 

Un temps de légendes et de valeurs est né

Un temps où l’honneur signifiait pour un homme

Beaucoup plus que la vie

Et les jours n’étaient qu’une lutte

Pour dire le vrai partant du faux

À travers des lances et des épées

 

Pourquoi, pourquoi ne pouvons-nous jamais être sûrs

-Jusqu’à ce qu’on meurt

-Ou qu’on ait tué pour une réponse ?

Pourquoi, pourquoi devons-nous supporter chaque race

Pour croire qu’aucune n’est plus illustre ?

Ça semble être parce qu’à travers le temps et l’espace

Même si les noms peuvent changer

Chaque visage conserve le masque qu’il a porté

 

Une table poussiéreuse, des odeurs de moisi

De l’argent terni, étendu épars sur le plancher

Seulement une faible lumière

Descend à travers une pellicule de vide

Cela cicatrise les carreaux des vitres.

Elle est partie, la gravure, et ceux qui ont laissé leur marque

Partis, les rois et les reines, maintenant seulement

Les rats tiennent le pouvoir

Et le faible doit mourir selon la loi de la nature

Aussi vieille qu’eux

 

 

 

 

 

TRADUCTION D’UNE PARTIE DE LA PIÈCE « SUPPER’S READY » PAR GENESIS

(ANNÉE INCONNUE)

En marchant dans la salle de repas

Je ferme la télévision

Assis à côté de toi, je regarde dans tes yeux

Comme les sons des moteurs d’auto

Se fanent dans la nuit

Je le jure, j’ai vu ton visage changer

Il ne semblait pas véritable

Bonjour ma chérie, avec tes yeux gardiens si bleus

Hey ma chérie ne sais-tu pas que notre amour est vrai

 

(Se rapprocher)

Dormir plus proches avec nos yeux

La distance n’est plus, autour de nos corps

Dehors dans le jardin, la lune semble si claire

Six hommes mortuaires saintement avancent

Dans l’herbe, lentement

Un septième marche en avant avec une croix

En main, tenue très haute

Hey ma chère, ton souper t’attend

Hey ma chère, ne sais-tu pas que notre amour est vrai ?

 

J’étais allé si loin d’ici

Loin de tes bras chauds

C’est bon de te ressentir encore

Ça fait longtemps. Longtemps, n’est-ce pas ?

 

 

 

 

L’ICONOCLASTE À LA COQUILLE (OUI) (ANNÉE INCONNUE)

Voici.  Le jour même de sa naissance, l’Iconoclaste s’endormit comme suit : un chat petit couché entre ses petits pieds, plusieurs pages de « La nausée » étendues sous son arrière-petit-train pour pallier aux audaces naturelles, la main dextre disposée en cache-sexe, le dos couché sur des pelures d’oranges fraîches, la main senestre et le bras adjacent en constante immersion dans d’la décoction de nerfs gras évidés d’une cuisse centrale d’un jeune lynxtaxnotangerinominéralo à tête chercheuse, les épaules assujettis sur des barres de force faussées en simili-barzingue, le cou isolé, puis ensuite écarté par une gangue à glissière de métal cochère, la tête inclinée toute voile dehors vers l’Occident, la bouche et, pour cause, l’olfaction dirigées par deux longs tuyaux en plastique et reliées à une vesse de loup artificielle.  Aux oreilles, une pépaire d’écouteurs les ceinturant et reproduisant en direct les bruits de la mère au moyen d’amplificateurs à hélium baraté et, pour finir, les yeux fixés sur une image couleur de la Sainte Vierge affichée face à lui sur le mur ovale et blanc grumeux de sa chambre.

Comme prévu, le matin suivant, il se réveilla.  De suaves traînées de sueurs chaudes se reptaient le long de ses cuisses flasques.  C’était… bon.  Il se laissa suer quelques instants.  Puis soudain, bing, une sonnerie à l’odeur détestable pétassa rengaine.  L’image de la Vierge se détacha tout doucement du mur et, lentement, s’avança jusqu’aux pieds du lit.  La scène était si émouvante que malgré la forte douleur pédestre, le mobilier en demeura immobile.  Graduellement, le visage de la Sainte passa de sa douceur habituelle à la colère sévère.  Elle fixait haineusement l’Iconoclaste.  Ce dernier, fasciné et ne bougeant plus, il fut tout à l’aise de la Vierge de glisser sa main immaculée sous les couvertures tandis que de l’autre, une férule en pur cuir lui labourait les avant-bras.  Que de cruauté !  À nouveau, l’Iconoclaste s’endormit par les forces de la Chose.

***

La douleur se réveillant avant lui.  Doucement, du fond d’un cauchemar trop vieux, elle se mit en boule en s’écumant bien fort avant de rouler de ressac en ressac jusqu’aux pieds des muscles hachés par l’excès.  Cependant, un retard se plaisait au creux de muscles hérétiques.  Le païen dira : Cé la bitte.

La douleur dit ces paroles :

« Viens donc…  Allez, viens.  Il y a une grosse foire à la Grise Matière. »

Et la zone retardée de répondre :

-Non.

-Pourquoi ?

-Je suis bien ici.  Je reste.

-Ahhh !  O.Ké.  Va chier, ostie d’doll. »

Ce retard achevé, l’Iconoclaste revint habiter la réalité platte et dure.  L’atmosphère y avait changé.  Le petit chat ne ronronnait plus.  D’ailleurs, il ne fut jamais question qu’il le fasse.  L’audace naturelle avait noyé l’ouvrage.  Les pelures d’orange pourrissaient très bien, on le sentait.  Quant à la décoction de nerfs gras évidés de la cuisse centrale d’un Innnxtaxnotangerineminéralo en bas âge, l’évaporation en fit son transport et au fond de la bassine, blême et fripée, échouait la gauche mandibule de l’Iconoclaste.  Son cou n’étant plus isolé ni écartelé suite à l’oxydation fort rapide du Cochère, celui-ci n’avait d’yeux que pour l’Orient à présent.  Le loup artificiel s’était enfui avec sa vesse, tuyaux et plastique.  Pauv’ type.   Et, comme la mère ne faisait plus de bruit, on prit soin par économie sans doute de fermer l’ampli et de déceinturer les écouteurs devenus sourds.

En outre, l’image de la vierge avait grossi et il était au demeurant hardi de ne point s’y fixer une vision intense.

L’Iconoclaste, n’en pouvant plus et n’écoutant que son nom, serra fermement une barre de simili-barzingue qui s’y trouvait déjà et se résolut d’accélérer au maximum le processus de dégradation normale des choses.  Il krissa donc un bon coup de barre sur la Sainte-Icône.  La surface du mur qui prêtait à cette dernière, le soutien anti-Newton, cédait aussi facilement que l’œuf devant la claustrophobie du poussin.

Cette charmante comparaison parut se ranger sous l’aile affectionnée du hasard puisque l’Iconoclaste, une fois la brèche franchie, put, l’œil en recul, faire le constat du réalisme de cette folle coïncidence : la Coquille ne contenait plus de blanc.  Il lui fallait trouver à se nourrir.  Quel drame !

Il se résolut donc à apprendre l’art du vol.  D’abord connaître ses ailes, celles des autres ne l’intéressaient pas.  Pour connaître, il devait donc voir.

« Voir, voir, voir », se dit-il.  « Il m’en faut-t’un, un mirvoir. »

Il commanda effectivement l’objet désiré.  L’attente allait durer des mois.  Après de langoureux jours d’abstinence, il considéra avec amertume l’alternative du recollage de la vierge en icône.  Il lui fallait bien de quoi se nourrir.  Quoiqu’une telle image fut bien maigre pitance.  Ostie.  Que voulez-vous !  Il ne pouvait quand même pas s’imaginer et s’en faire des desseins.  Comprenez donc qu’il faut un respect à tout ce qui côtoie l’état de l’existence !  L’image officielle seule en était capable !  Ah !  Quelle douleur que fut la sienne !...

Pourtant, cette image de la vierge lui fournit le minimum vital jusqu’à l’automne suivant.  Ainsi à ce moment, il reçut enfin la marchandise.

Calmement, il déchire, arrache, mord, déchiquète, caresse, embrasse, puis finalement déballe de son enveloppe l’objet en question.  Magnifique.  Quoique banale, elle est magnifique.  Une splendide porte !  L’excitation est à son comble.  L’Iconoclaste en pisse…  Il va procéder aux essais de la dite porte.  Il l’ouvre…  Il y entre…  Kriss !  Quelle joie ébornée !  Il s’éleve lentement dans les airs connus…  Il vole !...

« Un instant », dit la porte.

L’effet-surprise fait vite place à la cruauté de la pierre quand l’Iconoclaste perçoit la pleine sensation d’une chute brève et convaincante.  Mais il s’en relève :

-Il faut payer.

-Combien ?

-20 000 nouveaux chiurt’s.

-Vous voulez rire de moué ?...

-Sans doute !  Veux-je…

La porte se met à rire de bon cœur en grinçant des pentures.

-Voilà !  Le compte y est, dit l’Iconoclaste.

-Merci et revenez, remercie la porte.

La porte se referma et disparut.  L’Iconoclaste reprit le vol.  Il donna de la hauteur et monta jusqu’à la voûte lisse et blanche qui servait de ciel aux nuages.  L’Iconoclaste ne pouvait rien distinguer d’accessible comme nourriture.  C’était comme ça.  Il lui fallait péter la surface de la Voûte.  C’est ce qu’il fît.  Des gaz à la pestilence intense éjaculèrent de l’orifice.  C’était dégueulasse.  Les ailes de l’Iconoclaste furent d’abord brûlées puis carbonisées et, enfin, leurs poussières partagées entre l’avidité et l’étourderie du vent.  L’Icono n’eut que le temps de s’agripper à un rebord échancré du trou.  Profitant de la présence soudaine d’une accalmie, il fournit l’effet exigé pour prendre pied sur l’autre face extérieure de la brèche.  L’atmosphère avait changé.  Il s’assit et réfléchir sur son miroir. 

-Bonjour, dit une voix gentille.  Je t’invite à souper chez mouâ.  Il y aura de la dinde farcie.

-Bonjour et dommage, répond l’Icono.  Mais je suis végétarien.

-Il n’y aura aucun effusion, je sens.  Promis.

-Alors, c’est d’accord.  J’accepte.

Les deux amis, faute d’autres moyens, se mirent en marche d’un pas heureux et bipède.

-Où habitez-vous ?  Où allez-vous ?  Exige l’Icono au bout d’un moment.

-Je n’habite pas.  Je SUIS habité.  Nous allons donc chez moi.

-Ah ?...

-Je suis le chemin et le chemin me suit.  Mon nom est Eugène dit « la Cuisse ».

L’Iconoclaste et la Cuisse se sont arrêtés à la hauteur d’un guichet où Guy le guichetier guichète.

-Salut Guy.  Deux places, dit Eugène.

-À votre guise, dit Guy.

Et il leur remet deux petits objets coniques gris et métalliques.  C’est Eugène qui les prend.  Il sort un revolver de sa poche-revolver.

-J’en ai hinqu’un.  As-tu l’tien ?...

-Non.

Bon !  On s’arrangera.

Sans poésie, il introduit la première cartouche dans l’arme, l’appuie sur la tempe de l’Iconoclaste et tire.  Il fait pénétrer la seconde balle, colle l’engin à son oreille et fait feu…

***

Indécise, difficile et incroyable, la vierge n’en finissait plus de choisir les tintes et couleurs de son maquillage de par le nombre astronomique de boutons et de cadrans de son grand miroir debout béat devant elle.  Tout dans sa loge avait été soigneusement calfeutré pour éviter que l’œil scrute indiscrètement la nudité de la Sainte.  Beurdeur’z !  Rien n’avait été oublié.  Des trous de serrures piégés à l’acide sulfurique jusqu’à l’œil de bœuf éborgné au fer à marquer, tout avait été contrôlé.  TOUT, vous dis-je…

Franchement, il se faut avouer.  Il y a eu exagération quant à la dite nudité de la Vierge fameuse.  Non.  Bien sûr, elle n’était pas vraiment « nue ».  D’ailleurs, si quelqu’un eut réussi par une incroyable adresse oculaire à percer la discrétion de la loge de l’immaculée Conception, il n’aurait, en toute réalité, rien vu, dans le sens de « voir ».  En effet, la Sainte se paraît, comme vêtement de base, de 18 longues robes à cagoules en serge réfractaire.  Dommages et appendices…

La Vierge s’avança pompeusement vers la sortie pour y faire une entrée.  Tout portait à croire que sa toilette était terminée.  Il y eut une série harmonieuse et infinie de déclics et de sonneries, puis la porte daigna enfin s’ouvrir de l’autre bord, on donnait un party non-costumé.  Frais-chiée, la Vierge s’y engagea.

-Enfin, soupira Eugène dit « la Cuisse » rassuré.  Voilà la dinde farcie promise.

-Ahhhhhh ! S’écrièrent 25 voix de jeunes enfants constituant la compagnie de cette sauterie sautée au travers de laquelle se pavanait la Sainte en mettant l’accent sur les volumes équivalents de ses audaces pectoraux et postérieurs…

L’une des convives, vivement, se lève, se précipite, cambriole, drible et arrache la première des innombrables robes de la Vierge.  Tout l’monde devenu spectateur applaudit en faisant des remarques de connaisseurs.  Logique, le plafond lisse et blanc de la salle résonne.  Eugène dit :

-C’est notre champion en ce moment et la compétition est forte.  Comment trouves-tu ma petite fouarée ?

-Banale, déplia l’Iconoclaste entre deux soupirs.  L’éternité n’est pas mon genre.

-Cé bon, dit sèchement la Cuisse.

Il sort de sa poche une grenade, la dégoupille et la lance au plafond.  Les 5/8e de la salle s’ensevelit sous de lourds morceaux de coquille d’œuf.

-Caporal ? demande l’Iconoclaste.

-Non.  Déserteur.  Mais j’ai toujours eu un faible pour la force.  À quinze ans, par exemple, j’… 

-Allez, au r’voir.  Tu ne me manqueras vraiment pas.

-Adieu.

Sans se retourner, l’Iconoclaste prend son élan (qu’est l’orignal) et plonge par la voûte éclatée.

Contrairement aux autres histoires, l’Iconoclaste ne mourra pas dans celle-ci.  Non.  D’ailleurs, pour s’en assurer, demandons-lui :

« Non.  Tout va bien.  Je n’ai pas envie de mourir,  Ça va.  On peut continuer.

Trrrès bien.  Poursuivons.  Durant 18 jours, l’Iconoclaste marcha dans un vaste désert.  Il aimait la marche.  Il ne s’arrêtait que pour s’asseoir à l’ombre et au parfum des pommiers en fleurs ou se rouler dans l’herbe du matin.  Entretemps, ses nouvelles ailes avaient poussé.  Il cessa donc de marcher et s’envola vers d’inédites et nouvelles planètes.  Plus il avançait, plus leur nombre augmentait.  La Voûte-Coquille du ciel reculait au fur et à mesure en se tenant à bonne altitude.  Fait étrange.  Quand l’Iconoclaste descendait en feignant d’atterrir, la voûte s’abaissait doucement à égales distances.  S’il remontait, elle s’élevait aussitôt.  Bizarre et poétique.

Enfin, un jour, l’Iconoclaste se résolut à l’éventualité d’un atterrissage soumis au hasard…

C’était une bien étrange planète.  Avec de bien étranges habitants portant tous une gigantesque paire de lèvres soutenues par de frêles et longues jambes velues.  Sans doute était-ce sauté à voir, mais l’entendre l’était encore davantage.

-Pardon monsieur, grignota timidement le jeune voyageur.  Pourriez-vous me dire où sont les toilettes ?

-Pr…e.k’s…sv…th…j?..., répond l’homme-lèvre interpelé. 

-Vous dites ?...

-Spt…ee…qu…phl.

Sur ces mots, l’Iconoclaste ne sut que faire et décida de ce fait absent de faire ses besoins sur place.  Il reprit la route qui se laissait faire.  Au bout d’un certain autre instant, il eut faim.  Il réatterrit.

« Mk…st…ir…fr…p? », lui demande la Serveuse-lèvre.

Affamé, l’Iconoclaste s’en tint au déroutement.

« Pt… pt… sn… thr… pr… »

Débrouillarde, la Serveuse-lèvre part et revient avec le patron-lèvre de l’Establishment-lèvre.

--Sti… spli…  flou… coué ? 

-S-t-i-.-.-.-.s-p-l-i-.-.-.-f-l-o-u-.-.-.-c-o-u-é ?  Articule la Serveuse-lèvre.

-Gl...qu...ml...chl...frr...

-Fle… pl… sq… frr… ml…

-Ml… chl… gl… qu… flr… pt… sn… frssd… stqw… chk… dtr… su’t… jkt… cxz… qwta.

L’Iconoclaste, n’en pouvant plus, interrompt le dialogue des deux habitants et risque un bout de dialecte à tout hasard.

-Aqi… spljk… sthrqwuafgerts… ahdjyetr… m.

-Ah ! vous v’nez de la Coquille, dit le patron-lèvre, surpris.

-Oui.  Mais…

-Flous ne pouvhiez pas le dirre splu tôt ?...

-Mais…

-Ahhhh ! la coquille spl…  Comme vous hêtes jeûne ! Dit la Serveuse-lèvre à son tour.

-La coquille, reprend le patron rêveur, j’en suis parti il y a sprées de karanthe temps.  Ack !  Les femmes de la Coquille.  Khel khul.  Ais dytes moah les squ… gh… zei mhyt ?...  Alhors kr… dtq… bjg… klt8… $ret… c%mbn+… ?????? 

Mais l’Iconoclaste n’écoutait plus depuis un bon moment.  D’ailleurs, il n’était plus depuis un bon moment.  Juste le temps de passer au vestiaire, d’enfiler ses ailes et sqi. Il s’envola.  Et son vol dura des mois et des mouas…

Cependant, ce long vol permit heureusement à l’Iconoclaste d’apprendre quelques rudiments de la langue « lèvre ».  Les quelques rudiments en question lui étaient entre autre fort utile pour se nourrir et faire ses besoins.  C’est durant ce long périple que des hommes-lèvres de brève rencontre lui enseignèrent cette langue fameuse.  Tous ceux qui la croisaient lui disaient.

-Squi… spl… sth… 

-Ack…  Tu vhien de la coquille, heinh ?...

Chaque fois c’était la même chose.  Mais un jour, de l’un d’eux s’échappa subitement cette révélation.

« Squi… gl… skrr… njg… »

L’Iconoclaste, incertain, répondit :

-Sg… spl… sth… 

-Ack.  Tlu vian de la Coquille, peuti.  D’où ?  Du jeûn ou du blank ?...

-Les deuk.

-Thabarnak !  Shouâ ôsi.  Mhon frair Eugène lui y demeure encore là-bas.  Eugène, quel genre !  Il nous ferait de cé terribes nôteries.

-T’é l’frère d’Eugène dit « la Cuisse » ?

-Ack.  Ouais… Cé l’seul de la famille qui soye resté là.  Toute la gangne asteure on vit icitte.

-Siffleux !  Comme c’est curieux !

-Bin si tu savais l’nombre de gars de la coquille qui s’sont fait faire une chirurgie dans ‘face pour v’nir s’installer icitte…  Sont pus arconnaissables…

Cette révélation enraya l’instant d’un instant les facultés cérébrales de l’Iconoclaste.  Il ne put apercevoir vers qui ou quoi il s’en allait.  Un bien gros nuage noir et de fort mauvaise humeur.  L’Iconoclaste y pénétra sans trop le vouloir et troubla le caractère complexe du nimbus.  Il se mit à gronder.  L’Iconoclaste, pas con, se rendit compte que cet amas de vapeurs faisait du calcul.

-Comme vous semblez avoir l’humeur aqueuse.  Monsieur le nuage, puis-je vous être de quelque conseil ?...

-LA PAIX !  Kriss, y a rien là.

-Ah bon !

-Cependant, sache qu’il en faudra des larmes de nuages pour fleurir deux cœurs-enfants.

-Plaît-il ?...

Mais le gros nuage noir fit la sourde oreille et se mit à pleuvoir à chaudes larmes…  Avez-vous déjà vu un nuage qui pleure ?...  Que c’est triste !...  Et la peine de ce nuage-ci fut si grande qu’il en tomba en dépression.  L’Iconoclaste, par bonté et humanisme, le suivit dans sa chute dispersée et s’écrasa sur une bien belle planète…

Ouais !  Vraiment belle.  Petite peut-être, mais paradisiaque.  Sur ses 100 mille milles de surface, pas un mille, pas une verge, pas un pied, pas un pouce, pas une bitch de ce terrain n’était pas une immense plage dorée, ensoleillée et isolée.  Ack ! que c’était beau !...

Malheureusement, l’Iconoclaste y arriva le soir.  Il ne put apprécier toute suite cette fort belle planète.  La soirée, en tout cas, était fort belle.  Vitement, de dessous une forte pierre, l’Iconoclaste dégagea une petite mallette.  Fortement, il fit sauter la serrure et l’ouvrit.  Une forte série d’appareils y étaient disposés.  Il en manipula un fort bon nombre.  Il mesura, en outre, l’amplitude thermique, la pression atmosphérique, le taux de gravitation, le pourcentage d’irradiation cosmique, détailla son horoscope, fit de multiples et laborieux calculs et obtint l’indice Dow Jones[1], pesa le pour et le contre et conclut, fort d’intérieur :

« Cette soirée est en effet fort belle. »

Il marcha quelques milles, puis distingua les lueurs d’un feu de camp où une quinzaine de jeunes gens attroupés festoyaient, chantoyaient et s’aimayaient joyeusement.  Hé ! hé ! hé !

-Squi…  spl… sth… risqua l’Iconoclaste.

-Te fais pas de bile, Bill.

-On vient tous de la Coquille, lui répond l’un d’eux.

-Cé vrai ? demande l’Iconoclaste, réjoui.

-Oué !  Y a rien que du vrai, monde de la coquille.  Assieds-touye, prends un joint, une bière, une bûche ; on s’la festoye, envoye !

L’Iconoclaste s’installe et suit les indications données.  Il s’amuse.  C’est alors que, doucement, non à son insu, mais presque, une plante se met à pousser tout près de lui.  Patiemment, la plante, toute jeune encore, se prépare déjà un splendide bouton, une fleur.  Le type assis aux côtés de l’Iconoclaste la remarque alors que celle-ci vient à peine d’éclore sa fleur.

« Ostie, r’garde… è pas pire pantoute. »

L’Iconoclaste, distraitement, se dévire et l’aperçoit à son tour.

« Sfi… ste… mg », lui souffle tout doucement la fleur.

Réjoui-surpris, l’Iconoclaste s’empresse de tordre l’une des ailes toute humide encore et en abreuver la fleur.  Hâtivement, la fleur se métamorphose sans pudeur et sous l’aspect sublime de la véritable fille de l’Immaculée Conception.

-Tabarnake.  T’as décroché ce qu’y a de plus beau icitte à souaire.

-Bah !  lui répond l’Iconoclaste indigné.

La jeune fille dévisage l’Iconoclaste tendrement en lui souriant de son beau sourire blanchi par de belles dents, rosées par de jolies lèvres, cutanées par son beau visage, doré par de longs cheveux d’or déposés sur ses fines et délicates épaules, écoulées sur de frêles et beaux bras ceinturant d’adolescents et parfumés petits seins emblousés.  Timidement, elle lui prend la main, se lève et l’entraîne avec elle.  N’en croyant pas son œsophage, il ne demande pas mieux que de se laisser entraîner.  À la minute même où ils atteignent la plage, le jour se lève comme un fou.  Aveuglé, l’Iconoclaste en profite pour se dévêtir de ses ailes car tout porte à croire qu’ils vont prendre un bain, ces deux là.  Les yeux calmés, ils s’entrepercent de regards amoureux.

-Squi…ml…st…ph…, dit-elle.

-You are beautiful, dit-elle.

Ils se baignent, s’embrassent langoureusement, se parlent :

-Sf…ml…grm…mr…

-You are beautifulll.

La journée est si belle, le soleil si chaud, le vent si parfumé, l’air si pur, l’eau si douce, le sable si l’fun…

« You are beautifull… »

Le soir finit par tomber, saoul de lumière.  L’iconoclaste et la jeune vierge s’endorment là, sur la plage, se donnant de l’un les bras de l’autre, parties égales.  Quelle nuit ce fut !  Oh !... L’iconoclaste est revenu, mais il n’en revient pas encore…

 

***

 

Au matin, comme il n’avait pas fermé l’œil, pas plus que le reste, d’ailleurs, et goûté une à une chaque seconde de ce voyage,  l’Iconoclaste s’éveilla à l’irréalité.  La Jeune Vierge n’était plus là, partie, envolée.  Il lui avait fait cadeau de ses ailes.  Il était là, sur la longue plage platte, seul, nu, sans aile… krisss !  Il eut beau se sentir joyeux, il fut impitoyablement triste.  Il fut comme la racine trop longue et l’arbre trop petit, le soleil trop beau derrière des nuages trop épais.  Vitreux, son œil le plus résistant, le droit, accumula et déborda une grosse goutte de sueur triste…

Un gras nuage noir s’approcha à pas de loupe et bondit furtivement sur cette larme et la but gloutonnement en remontant à toute vapeur vers les cieux gris et désertiques.  Complices, les autres nuages s’écartèrent et lui firent une petite éclaircie par laquelle il s’échappa…

L’Iconoclaste eut le temps d’entrevoir la surface blanche et lisse de la Coquille du ciel…

Cependant et contrairement aux autres histoires, ce héros-ci ne mourra pas.  Non.  D’ailleurs, pour s’en assurer, questionnons le héros lui-même…

« … »

FIN

  SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

C’est quand on se demande de quelle façon poser un geste que l’on peut s’apercevoir à quel point la nature humaine peut être vulnérable face à l’indécision.

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Sur le seul déjà solide de sang, Jeanne découvrit avec frayeur que sa haine n’était pas la seule vivante dans cette aire…  Elle ressentit en premier lieu l’habile dédain qu’à son insu le jeune garçon avait construit.  Son âme ne répondait plus à l’ancienne humeur qui en sa tête se barouettait, il y a de ça quelques années.  Elle se sentait seule ; ouais…

Rien de plus surprenant ne lui était jamais arrivé.  Ne plus comprendre son corps était courant en son pays, mais ses humeurs…  C’tait aut’chose…

Jeanne aggrava son cas lors de la troisième nuit ; celle où Jusme revint de la plage, criblé de balles qu’il n’avait pu attraper à son dernier match.  Il avait l’air soucieux de ne point avoir franchi le cap des millénaires ; elle le trouvait trop jeune pour lui, qu’il racontait à ses amis entre deux « draffes ».

Il entra sur ses crampons, odieux, et chercha immédiatement le fouet.  Il avait envie d‘elle, qu’il se disait.  Le fouet restait muet ; introuvable.  Jusme ne paniqua et se rappela du druide, de la plage et des copains.  Il ragea et cassa tout ; même le plancher.

Jeanne, surprise par le bruit impalpable mais tout de même présent, se leva calmement et remarqua la sueur qui immergeait du front pesant qu’il supportait.

-Depuis longtemps !... hurla-t-il.

-Qu’as-tu crié depuis des mois, hein ?...

Il l’aimait trop ; voilà le trouble.  Il prit le fouet qu’il retrouva sous le plancher et la vargea jusqu’au matin.  Elle, elle ne pouvait comprendre ce soudain sursaut d’amour.  Tout à coup, Jeanne s’aperçut qu’il s’occupait enfin d’elle.

Joie.

Pour la première fois depuis leur union, ils déjeunèrent ensemble.  Comme c’était beau de voir leur table entre le trou de ce parterre et le sang sec sur les murailles.  On aurait dit qu’ils avaient tout prévu ; même l’atmosphère…

Jeanne lui raconte la frousse totale qu’elle avait eu lorsque le druide lui raconta la plage seule.  Jusme, ému, gloussa un peu, péta un beau verre et l’embrassa.  Leur amour semblait de plus en plus vrai…

Il décida de retourner sur plage vu que tout allait bien.  Pourtant, au fond…

 

(Ici s’arrête le texte)

 

SANS TITRE (ANNÉE INCONNUE)

Comme les jours se relèvent…  Dissipant ainsi l’avenir incertain…  Loi des probabilités.

Reverrons-nous, seuls, ce que notre œil n’a jamais capté ?...

LA CUVE CUBIQUE…  Prochain spectacle, mi-décembre.

J’attends.

 

Jacques

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